Par Dean C. Jessee
[1]
© BYU Studies, vol. 9,
1969-1969, n° 3 – printemps 1969, pp. 275-295
traduit et affiché avec
la permission de l’éditeur
Le 11 juin 1839, moins de
deux mois après son arrivée en Illinois à la suite de son incarcération
dans une prison au Missouri et un mois après s’être installé avec sa
famille dans une petite maison de rondins près de Commerce (Illinois),
Joseph Smith commença à dicter son histoire à son secrétaire, James
Mulholland [2]. À ce moment-là, quelque dix-neuf
années s’étaient écoulées depuis sa Première Vision de Joseph [3]
et neuf ans étaient passés depuis la révélation lui commandant de tenir
une histoire [4]. Ce retard fut causé entre
autres par les circonstances adverses que le Prophète rencontra lors de la
rédaction de l’histoire, des circonstances qui ne prirent pas fin en juin
1839.
À la date du 29 octobre de
cette année-là, quand Joseph quitta Nauvoo pour Washington D.C. pour
présenter les griefs de son peuple à l’encontre du Missouri devant le
gouvernement fédéral, 59 pages seulement de son histoire avaient été
écrites et six jours après son départ, son secrétaire, James Mulholland,
mourut [5]. Quand il revint à Nauvoo en mars
1840, Joseph déplora le décès de son « fidèle secrétaire » et exprima sa
déception de voir qu’on n’avait pas de compte rendu valable de son voyage
à Washington : « Je comptais sur le Dr Foster pour tenir mon journal
quotidien pendant ce voyage, mais il s’est esquivé [6]. »
Robert B. Thompson, désigné, le 3 octobre, comme greffier général de
l’Église, continua à écrire l’histoire là où Mulholland l’avait laissée ;
étant donné, toutefois, sa mort prématurée, le 27 août 1841, il n’ajouta
que 16 pages au manuscrit [7]. Lorsque Willard
Richards fut nommé secrétaire privé du prophète et greffier général en
décembre 1841, 157 pages seulement d’une histoire qui finit par en compter
plus de 2000, avaient été écrites [8].
Les circonstances dans
lesquelles le prophète Joseph devait écrire une chronique suivie de son
passé étaient telles que deux ans et demi avant sa mort, il expliquait
pour s’excuser :
« Depuis
que je m’occupe de poser les fondements de l’Église de Jésus-Christ des
Saints des Derniers Jours, j’ai été empêché de différentes façons de
poursuivre de Journal et l’Histoire d’une manière satisfaisante pour
moi-même ou qui fasse justice à la cause. De longs emprisonnements, des
procès vexatoires constants et qui n’en finissent plus, la traîtrise de
certains de mes secrétaires, la mort d’autres et notre pauvreté, à mes
frères et à moi, due aux pillages et aux expulsions répétés m’ont empêché
de transmettre à ma postérité un rapport suivi des événements, qui serait
désirable pour tous ceux qui aiment la vérité...
[9] »
Les facteurs qui freinèrent
Joseph Smith dans la rédaction de son histoire n’empêchèrent pas des
commencements périodiques. Le prophète ajouta :
« J’ai
continué à tenir un journal du mieux que le permet ma situation et je
dicte de temps en temps pour mon histoire, quand j’en ai l’occasion, pour
que les labeurs et les souffrances des premiers anciens et saints de ce
dernier royaume ne passent pas complètement inaperçus du monde
[10]. »
À trois reprises au moins
avant 1839, Joseph Smith commença à écrire son histoire [11].
Le plus ancien de ces récits comporte six pages et est écrit sur trois
feuilles d’un registre de comptabilité, rédigé entre l’été de 1831 et
novembre 1832. L’analyse de l’écriture montre que le récit a été écrit par
Frederick G. Williams, secrétaire du prophète et conseiller dans la
Première Présidence. Étant donné qu’il fut converti au mormonisme à
l’automne de 1830 et partit immédiatement en mission au Missouri, la
rédaction de cette histoire n’a pas pu être antérieure à sa rencontre avec
Joseph Smith à la mi-1831. Elle n’a pas non plus été écrite après le 27
novembre 1832, puisque à cette date le registre dans lequel elle avait été
écrite fut converti en recueil de lettres pour noter les documents
historiques importants de l’Église. Un certain nombre d’éléments
confirment cette thèse.
Premièrement, bien qu’elles
aient été détachées plus tard du livre, les trois feuilles contenant
l’histoire correspondent aux lignes de coupe et à la qualité et aux
marquages des extrémités de page. Les lettres finales de mots coupés quand
les pages ont été détachées correspondent aussi. Les talons des pages
coupées précèdent immédiatement la note du 27 novembre 1832 sur la
première des pages restantes.
Deuxièmement, la
numérotation des documents révèle cette disposition. Les pages de
l’histoire étaient numérotées de 1 à 6 et la lettre du 27 novembre
commence à la page « 1a ». L’histoire et la lettre sont toutes deux de la
main de Williams. Il n’aurait pas eu besoin de commencer la page contenant
la lettre par « 1a » si elle n’avait pas été précédée par d’autres pages
numérotées. Ce qui nous amène au troisième point.
Outre le fait que le
recueil de lettres débute le 27 novembre 1832, Joseph Smith commence aussi
un journal personnel quotidien. Ce jour-là il écrit avoir acheté un livre
dans le but de « faire un récit détaillé de tout ce qu’il m’est donné
d’observer [12] ». Le fait que le journal et le
recueil de lettres commencent le même jour est plus que de la coïncidence.
Non seulement il nous donne la limite extrême pour la datation du récit
historique le plus ancien connu de la vie du prophète, mais il fixe le
début d’un précédent important dans la conservation de l’histoire de
l’Église. Seule la défection de ses secrétaires ou l’intrusion d’autres
circonstances indépendantes de sa volonté interrompirent la poursuite de
ce précédent. Chose significative, ces écrits constituèrent des sources
importantes pour la rédaction ultérieure de l’histoire officielle de Joseph
[13].
L’histoire de 1831-1832
reproduite ici contient le récit le plus ancien de la Première Vision de
Joseph Smith [14].
RECIT
1831-1832
« Histoire
de la vie de Joseph Smith fils récit de sa merveilleuse expérience et de
toutes les grandes choses qu’il fait au nom de Jésus-Christ le Fils du
Dieu vivant dont il rend témoignage et aussi récit de la naissance de
l’Église du Christ au soir du temps selon ce que le Seigneur a fait
paraître et fondée par sa main recevant premièrement le témoignage d’en
haut deuxièmement le ministère d’Anges troisièmement la réception de la
sainte Prêtrise par le ministère d’Anges pour administrer la lettre de
l’Évangile - la Loi et les commandements tels qu’ils lui ont été donnés -
et les ordonnances, quatrièmement la confirmation et la réception de la
haute Prêtrise selon le saint ordre du fils du Dieu vivant pouvoir et
ordonnance d’en haut de prêcher l’Évangile dans l’administration et la
démonstration de l’esprit les Clefs du Royaume de Dieu conférées sur lui
et la poursuite des bénédictions que Dieu lui a données etc.
Je suis né dans la ville de
Charon dans l’État de Vermont en Amérique du Nord le 23e jour de décembre
1805 de bons parents qui n’ont épargné aucun effort pour m’instruire de la
religion chrétienne à l’âge d’environ dix ans mon Père Joseph Smith père
s’est installé à Palmyra Comté d’Ontario dans l’État de New York et étant
dans une situation d’indigence nous avons dû travailler dur pour
entretenir une grande famille ayant neuf enfants et comme cela exigeait
les efforts de tous ceux qui étaient capables d’apporter une aide
quelconque pour le soutien de la famille c’est pourquoi nous avons été
privés du bénéfice de l’instruction qu’il suffise de dire que j’ai
simplement appris à lire à écrire et les règles de base de l’Arithmétique
qui constituaient toute mon instruction. Vers l’âge de douze ans mon
esprit devint sérieusement préoccupé en ce qui concerne les questions
capitales du bien-être de mon âme immortelle ce qui m’amena à sonder les
Écritures croyant comme on me l’avait enseigné, qu’elles contenaient la
parole de Dieu m’appliquant donc à les étudier et ma connaissance intime
de personnes de différentes confessions m’amenèrent à m’étonner
extrêmement car je découvris qu’ils ne faisaient pas honneur à ce qu’ils
professaient en marchant dans la sainteté et par une conversation pieuse
conformément à ce que je trouvais contenu dans cet ouvrage sacré ce fut un
chagrin pour mon âme ainsi de l’âge de douze ans à quinze je méditai
beaucoup de choses dans mon cœur concernant la situation du monde de
l’humanité les querelles et les divisions la méchanceté et les
abominations et les ténèbres qui y régnaient dans l’esprit ni de
l’humanité mon esprit fut pris d’une détresse extrême car je me sentis
condamné pour mes Péchés et en sondant les Écritures je découvris que
l’humanité n’allait pas vers le Seigneur mais qu’elle avait apostasié de
la foi vraie et vivante et qu’il n’y avait pas de société ni de confession
qui était édifiée sur l’Évangile de Jésus-Christ comme le rapporte le
Nouveau Testament et j’avais envie de me lamenter sur mes propres péchés
et sur les péchés du monde car j’avais appris dans les Écritures que Dieu
était le même hier aujourd’hui et à jamais qu’il ne faisait pas acception
de personnes car il était Dieu car je contemplais le soleil le glorieux
luminaire de la terre et aussi la lune roulant dans leur majesté dans les
cieux et aussi les étoiles qui brillaient dans leur coure et la terre
aussi sur laquelle je me trouvais et les animaux des champs et les oiseaux
du ciel et les poissons de l’eau et aussi l’homme marchant sur la face de
la terre avec majesté et avec la force de la beauté dont le pouvoir et
l’intelligence pour gouverner les choses qui sont si extrêmement grandes
et merveilleuses même à la ressemblance de celui qui les a créés et quand
j’ai réfléchi à ces choses mon âme s’est exclamée c’est à juste titre que
le sage a dit que c’est un insensé qui dit dans son cœur il n’y a pas de
Dieu mon cœur s’est exclamé tout cela rend témoignage et révèle une
puissance omnipotente et omniprésente un être qui fait des lois et décrète
et affecte à toutes choses leurs limites qui remplit l’éternité qui était
et est et sera de toute éternité à toute éternité et quand j’ai réfléchi à
toutes ces choses et que cet être cherche pour l’adorer ceux qui l’adorent
en esprit et à en vérité c’est pour quoi je priai le Seigneur pour qu’il
m’accorde de la miséricorde car il n’y avait personne d’autre vers qui je
pouvais aller pour obtenir miséricorde et le Seigneur entendit mon cri
dans le désert et tandis que j’étais occupé à invoquer le Seigneur dans la
16e année de mon âge une colonne de lumière dépassant l’éclat du soleil à
midi descendit d’en haut et reposa sur moi et je fus rempli de l’Esprit de
Dieu et le Seigneur ouvrit les cieux sur moi et je vis le Seigneur et il
me parla disant Joseph mon fils te sont pardonnés va ton chemin marche
dans mes statuts et garde les commandements voici je suis le Seigneur de
gloire j’ai été crucifié pour le monde pour que tous ceux qui croient en
mon nom aient la vie éternelle voici le monde est actuellement dans le
péché et il n’y a personne qui fasse le bien, non pas un seul ils se sont
détournés de l’Évangile et ne gardent pas mes commandements ils
s’approchent de moi des lèvres tandis que leur cœur est loin de moi et ma
colère est allumée contre les habitants de la terre pour intervenir contre
eux selon cette impiété et réaliser ce qui a été dit par la bouche des
prophètes et des apôtres voici je viens rapidement comme c’est écrit à mon
sujet dans la nuée revêtu de la gloire de mon Père et mon âme fut remplie
d’amour pendant de nombreux jours je pus me réjouir d’une grande joie et
le Seigneur était avec moi mais je ne pouvais trouver personne qui voulait
croire en la vision céleste... »
En octobre 1834, Oliver
Cowdery, rédacteur du Messenger and Advocate, introduisit la
première histoire publiée de l’Église. Cette oeuvre fut présenté sous la
forme d’une correspondance entre Cowdery et William W. Phelps et devait
être « l’histoire complète de la naissance de l’Église des saints des
derniers jours et les parties les plus intéressantes de ses progrès
jusqu’à l’époque actuelle ». Le rédacteur annonça en outre : « Notre frère
J. Smith, fils, a proposé de nous aider. Il y a, en effet, beaucoup de
points relatifs à la première partie de ce sujet qui rendent sa
participation indispensable. Avec sa participation et avec les documents
authentiques qui sont actuellement en notre possession, nous espérons
faire de ceci un récit plaisant et agréable [15]. »
Dans La série de huit lettres qui suivirent, Cowdery présenta, dans le
désordre, des événements historiques, commençant dans le numéro d’octobre
1834 de la publication par le récit du rétablissement de la prêtrise et
finissant dans le numéro d’octobre 1835 par la visite de Moroni à Joseph
Smith.
Une copie des huit lettres fut
transcrite en 1835 dans le journal du prophète. Le 29 octobre, Joseph
écrivit qu’il allait avec son secrétaire nouvellement désigné, Warren
Parrish, obtenir son « grand journal » auprès de Frederick G. Williams.
Plus tard, le même jour, Parrish commença à écrire « l’histoire de la vie
de Joseph » en terminant « la deuxième lettre du président Cowdery à W. W.
Phelps, que le président Williams avait commencée [16].»
La vérification de l’écriture dans le journal révèle l’endroit où Parrish
a commencé à copier la deuxième partie de la lettre de Cowdery à Phelps.
Elle montre aussi que Parrish a continué à écrire jusqu’à la fin de la
huitième lettre. Cependant, à cet endroit, contrairement au récit publié,
celui du journal ne prend pas fin, mais continue dans un style différent.
La transition est marquée par un changement d’écriture, de celle de Warren
Parrish à celle de Warren A. Cowdery et commence par l’introduction
suivante : « Le lecteur remarquera ici que le récit change de forme. Le
sujet devient de plus en plus quotidien, l’auteur a estimé qu’il
s’indiquait de faire un récit clair, simple et fidèle de tout ce qui se
passait d’important de jour en jour... [17] »
Viennent alors 142 pages d’entrées quotidiennes, de type journal
personnel, écrites à la troisième personne du singulier, commençant le 22
septembre 1835 et continuant jusqu’au 18 janvier 1836. Dans ce journal, à
la date du 9 novembre 1835, on trouve un entretien avec un rabbin juif
dans lequel Joseph Smith raconte de nouveau le récit de sa Première Vision
[18].
RECIT 1835
« Lundi 9
novembre... Pendant qu’il était chez lui ce matin, entre dix et onze
heures, un homme entra et se présenta à lui en se donnant le nom de Joshua
le rabbin juif. Son aspect était assez singulier : il avait une barbe
d’environ 8 cm de long qui était toute grise, il avait également les
cheveux longs et rendus considérablement argentés par les années. Il avait
l’apparence d’un homme de cinquante à cinquante-cinq ans. Il était grand
et droit, élancé, les yeux bleus, visage mince et teint clair. Il portait
une redingote verte et des pantalons de la même couleur. Il avait un
chapeau de fourrure noire avec un bord étroit. En parlant, il fermait
souvent les yeux et fronçait les sourcils. Joseph s’enquit de son nom,
mais ne reçut pas de réponse précise. La conversation ne tarda pas à
s’orienter sur le sujet de la religion et après avoir fait quelques
réflexions concernant la Bible, il commença à lui faire le récit des
circonstances liées à la parution du Livre de Mormon, qui étaient
quasiment comme suit. Ayant l’esprit agité concernant le sujet de la
religion, en regardant les différents systèmes enseignés aux enfants des
hommes, je ne savais pas qui avait raison ou tort, mais je considérais que
c’était de toute première importance pour moi d’avoir raison, dans un
domaine aussi important, domaine comportant des conséquences éternelles.
Ainsi donc, ne sachant que penser, je me retirai dans le bosquet
silencieux et me prosternai devant le Seigneur, pleinement conscient (si
la Bible était vraie) demandez et vous recevrez, frappez et l’on vous
ouvrira, cherchez et vous trouverez, et en outre, si quelqu’un manque de
sagesse, qu’il la demande à Dieu qui donne à tous libéralement et sans
reproche. Ce que je désirais le plus à ce moment-là, c’était être informé
et bien décidé à l’être, j’invoquai le Seigneur pour la première fois dans
l’endroit précité, en d’autres termes, je fis une tentative vaine de
prier. Ma langue semblait être enflée dans ma bouche, de sorte que je ne
pouvais m’exprimer, j’entendis un bruit derrière moi comme si quelqu’un
s’approchait de moi. Je m’efforçai de nouveau de prier, mais ne le pus ;
le bruit des pas semblait se rapprocher, je me relevai d’un bond et
regardai autour de moi, mais ne vis personne ou chose susceptible de
produire le bruit de pas. Je m’agenouillai de nouveau, ma bouche fut
ouverte et ma langue déliée ; j’invoquai le Seigneur avec ferveur. Une
colonne de lumière apparut au-dessus de ma tête et reposa bientôt sur moi
et me remplit d’une joie indicible. Un personnage apparut au milieu de
cette colonne de flammes qui était répandue tout autour sans rien
consumer. Un autre personnage semblable au premier apparut bientôt : il me
dit tes péchés te sont pardonnés. Il me témoigna aussi que Jésus-Christ
est le fils de Dieu. Je vis beaucoup d’anges dans cette vision. J’avais
environ 14 ans quand je reçus cette première communication... »
Le 14 novembre 1835, cinq
jours après le récit ci-dessus, Warren A. Cowdery nota aussi la visite d’Erastus
Holmes de Newbury (Ohio), qui interrogea Joseph Smith sur la fondation de
l’Église et à qui fut donnée « un bref compte-rendu de son expérience de
jeunesse, disons de l’âge de six ans jusqu’au moment où il reçut la
première visite d’anges, ce qui se produisit alors qu’il avait environ
quatorze ans. Il lui fit aussi le récit de la révélation qu’il reçut plus
tard concernant la parution du Livre de Mormon... [19]
»
La rédaction du manuscrit de
la History of the Church of Jesus Christ of Latter-day Saints de
Joseph Smith, éditée par B. H. Roberts et publiée en 1902, fut commencée
le 11 juin 1839, quand Joseph commença à dicter à son secrétaire James
Mulholland. Il lui remit son journal contenant l’histoire de 1835 et
celui-ci fut utilisé pour devenir le Livre A-1 de l’ouvrage en plusieurs
volumes qui en résulta. Des indications dans les premières pages de la «
History » montrent que Mulholland commença à écrire en se basant sur un
récit qui avait été écrit l’année précédente. Cela ressort clairement des
allusions à la page 1 de la « History » à la « huitième année depuis
l’organisation de ladite Église [20] » et à la page
8 à « ce jour, qui est le deuxième jour de mai, mil huit cent trente-huit
[21] ». En outre, le 27 avril 1838, Joseph écrit
avoir passé la journée à « écrire l’histoire de l’Église depuis le tout
début de son existence jusqu’à ce jour [22] » et
les 1-4 mai, il écrit que « la Première Présidence s’est occupée à écrire
l’histoire de l’Église [23]. »
Cette dernière allusion
comparée à ce qui est dit à la page 8 de l’histoire confirme que c’était
le récit écrit le 2 mai 1838.
Le fait que James Mulholland
intégra, en 1839, les premières pages du manuscrit actuel Volume A-1 dans
la « History » de Joseph Smith sur la base du récit rédigé l’année
précédente ressort de ce qui suit : premièrement, les 59 premières pages
du livre sont de l’écriture de Mulholland, qui n’a commencé à écrire pour
Joseph Smith que le 3 septembre 1838. Il cessa d’écrire pendant
l’incarcération du prophète au Missouri et ne recommença que le 22 avril
1839 [24]. Deuxièmement, le mardi 11 juin 1839,
Joseph écrit : « J’ai commencé à dicter mon histoire pour que mon
secrétaire, James Mulholland, l’écrive [25]. »
Troisièmement, Mulholland confirme la note portée le 11 juin par Joseph
Smith dans son journal personnel en écrivant ce jour-là qu’il était occupé
à « écrire etc. pour l’histoire de l’Église [26] ».
Ce qui suit est le récit bien
connu de la Première Vision que l’on trouve dans cette « History » écrite
par Mulholland en 1839. Comme il est mort le 3 novembre 1839, cela exclut
le fait qu’il ait pu écrire le récit après cette date [27] :
RECIT 1838
« Étant donné les nombreuses
rumeurs qui ont été mises en circulation par des personnes mal
intentionnées et intrigantes à propos de la naissance et des progrès de
l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours, rumeurs qui ont
toutes été conçues par leurs auteurs pour militer contre la réputation de
l'Église et ses progrès dans le monde, j'ai été amené à écrire cette
histoire pour désabuser l'opinion publique et pour que tous ceux qui
cherchent la vérité soient mis en possession des faits tels qu'ils se sont
passés, soit en ce qui me concerne, soit en ce qui concerne l'Église, dans
la mesure où j'ai ces faits en ma possession.
Dans cette histoire, je
présenterai, en toute vérité et en toute justice, les divers événements
relatifs à l'Église tels qu'ils ont eu lieu ou tels qu'ils existent
actuellement [1838] en cette huitième année depuis l'organisation de
ladite Église. Je suis né en l'an de grâce mil huit cent cinq, le
vingt-troisième jour de décembre, dans l'arrondissement de Sharon, comté
de Windsor, État de Vermont. Mon père, Joseph Smith, père, quitta l'État
de Vermont lorsque j'étais à peu près dans ma dixième année et alla
s'installer à Palmyra, comté d'Ontario (maintenant Wayne), dans l'État de
New York.
Quelque quatre ans après son
arrivée à Palmyra, mon père alla s'installer avec sa famille à Manchester,
dans ce même comté d'Ontario. Sa famille se composait de onze personnes:
mon père, Joseph Smith, ma mère, Lucy Smith (dont le nom, antérieurement à
son mariage, était Mack, fille de Solomon Mack), mes frères, Alvin (qui
mourut le 19 novembre 1823, dans sa vingt-sixième année), Hyrum, moi-même,
Samuel Harrison, William et Don Carlos, et mes sœurs, Sophronia, Catherine
et Lucy. À un moment donné, au cours de la deuxième année qui suivit notre
installation à Manchester, il y eut, dans l'endroit où nous vivions, une
agitation peu commune à propos de la religion. Elle commença chez les
méthodistes, mais devint bientôt générale chez toutes les confessions de
cette région du pays. En effet, toute la contrée paraissait en être
affectée, et de grandes multitudes s'unirent aux différents partis
religieux, ce qui ne causa pas peu de remue-ménage et de divisions parmi
le peuple, les uns criant : « Par ici ! », les autres : « Par là ! » Les
uns tenaient pour les méthodistes, les autres pour les presbytériens,
d'autres pour les baptistes. Car, en dépit du grand amour que les
convertis de ces diverses confessions exprimaient au moment de leur
conversion et du grand zèle manifesté par leurs clergés respectifs qui
s'employaient activement à animer et à favoriser ce tableau extraordinaire
de sentiment religieux, dans le but de voir tout le monde converti, ainsi
qu'ils se plaisaient à appeler cela, quelle que fût la confession à
laquelle ils se joignaient, cependant, quand les convertis commencèrent à
se disperser, les uns vers un parti, les autres vers un autre, on
s'aperçut que les bons sentiments apparents des prêtres et des convertis
étaient plus prétendus que réels, car il s'ensuivit une grande confusion
et de mauvais sentiments, prêtre luttant contre prêtre et converti contre
converti; de telle sorte que tous les bons sentiments qu'ils avaient les
uns pour les autres, s'ils avaient jamais existé, se perdirent tout à fait
dans une querelle de mots et un combat d'opinions.
J'étais alors dans ma
quinzième année. Les membres de la famille de mon père se laissèrent
convertir à la foi presbytérienne, et quatre d'entre eux se firent membres
de cette Église : ma mère, Lucy, mes frères Hyrum et Samuel Harrison, et
ma sœur Sophronia.
Pendant cette période de
grande agitation, mon esprit fut poussé à réfléchir sérieusement et à
éprouver un grand malaise; mais quoique mes sentiments fussent profonds et
souvent poignants, je me tins cependant à l'écart de tous ces partis tout
en suivant leurs diverses assemblées aussi souvent que j'en avais
l'occasion. Avec le temps, mon esprit se sentit quelque inclination pour
la confession méthodiste, et j'éprouvai un certain désir de me joindre à
elle; mais la confusion et la lutte entre les diverses confessions étaient
si grandes, qu'il était impossible à quelqu'un d'aussi jeune et d'aussi
peu au courant des hommes et des choses que moi de décider d'une manière
sûre qui avait raison et qui avait tort. Il y avait des moments où mon
esprit était fortement agité, tant les cris et le tumulte étaient grands
et incessants. Les presbytériens étaient absolument contre les baptistes
et les méthodistes et utilisaient toutes les ressources aussi bien du
raisonnement que de la sophistique pour prouver leurs erreurs ou du moins
pour faire croire aux gens qu'ils étaient dans l'erreur. D'autre part, les
baptistes et les méthodistes, eux aussi, montraient autant de zèle à
tenter d'imposer leur doctrine et à réfuter toutes les autres.
Au milieu de
cette guerre de paroles et de ce tumulte d'opinions, je me disais souvent
: Que faut-il faire ? Lequel de tous ces partis a raison ? Ou ont-ils tous
tort, autant qu'ils sont ? Si l'un d'eux a raison, lequel est-ce, et
comment le saurai-je ? Tandis que j'étais travaillé par les difficultés
extrêmes causées par les disputes de ces partis de zélateurs religieux, je
lus, un jour, l'épître de Jacques, chapitre 1, verset 5, qui dit : Si
quelqu'un d'entre vous manque de sagesse, qu'il la demande à Dieu, qui
donne à tous simplement et sans reproche, et elle lui sera donnée. Jamais
aucun passage de l'Écriture ne toucha le cœur de l'homme avec plus de
puissance que celui-ci ne toucha alors le mien. Il me sembla qu'il
pénétrait avec une grande force dans toutes les fibres de mon cœur. J'y
pensais constamment, sachant que si quelqu'un avait besoin que Dieu lui
donne la sagesse, c'était bien moi; car je ne savais que faire, et à moins
de recevoir plus de sagesse que je n'en avais alors, je ne le saurais
jamais, car les professeurs de religion des diverses confessions
comprenaient si différemment les mêmes passages de l'Écriture que cela
faisait perdre toute confiance de régler la question par un appel à la
Bible. Enfin, j'en vins à la conclusion que je devais, ou bien rester dans
les ténèbres et la confusion, ou bien suivre le conseil de Jacques,
c'est-à-dire demander à Dieu. Je me décidai finalement à «demander à
Dieu», concluant que s'il donnait la sagesse à ceux qui en manquaient, et
la donnait libéralement et sans faire de reproche, je pouvais bien
essayer. Ainsi donc, mettant à exécution ma détermination de demander à
Dieu, je me retirai dans les bois pour tenter l'expérience. C'était le
matin d'une belle et claire journée du début du printemps de mil huit cent
vingt. C'était la première fois de ma vie que je tentais une chose
pareille, car au milieu de toutes mes anxiétés, je n'avais encore jamais
essayé de prier à haute voix.
Après
m'être retiré à l'endroit où je m'étais proposé, au préalable, de me
rendre, ayant regardé autour de moi et me voyant seul, je m'agenouillai et
me mis à exprimer à Dieu les désirs de mon cœur. À peine avais-je commencé
que je fus saisi par une puissance qui me domina entièrement et qui eut
sur moi une influence si étonnante que ma langue fut liée, de sorte que je
ne pouvais pas parler. Des ténèbres épaisses m'environnèrent, et il me
sembla un moment que j'étais condamné à une destruction soudaine. Mais
comme je luttais de toutes mes forces pour implorer Dieu de me délivrer de
la puissance de cet ennemi qui m'avait saisi et au moment même où j'étais
prêt à sombrer dans le désespoir et à m'abandonner à la destruction — non
à un anéantissement imaginaire, mais à la puissance d'un être réel du
monde invisible qui possédait une puissance étonnante comme je n'en avais
encore senti de pareille en aucun être — juste à cet instant de grande
alarme, je vis, exactement au-dessus de ma tête, une colonne de lumière,
plus brillante que le soleil, descendre peu à peu jusqu'à tomber sur moi.
À peine était-elle apparue que je me sentis délivré de l'ennemi qui
m'enserrait. Quand la lumière se posa sur moi, je vis deux Personnages
dont l'éclat et la gloire défient toute description, et qui se tenaient
au-dessus de moi dans les airs. L'un d'eux me parla, m'appelant par mon
nom, et dit, en me montrant l'autre: Celui-ci est mon Fils bien-aimé.
Écoute-le ! Mon but, en allant interroger le Seigneur, était de savoir
laquelle des confessions avait raison, afin de savoir à laquelle je devais
me joindre. C'est pourquoi, dès que je fus assez maître de moi pour
pouvoir parler, je demandai aux Personnages qui se tenaient au-dessus de
moi, dans la lumière, laquelle de toutes les confessions avait raison (car
à l'époque, il ne m'était jamais venu à l'idée qu'elles étaient toutes
dans l'erreur), et à laquelle je devais me joindre. Il me fut répondu de
ne me joindre à aucune, car elles étaient toutes dans l'erreur; et le
Personnage qui me parlait dit que tous leurs credo étaient une abomination
à ses yeux; que ces docteurs étaient tous corrompus; que : «ils
s'approchent de moi du bout des lèvres, mais leur cœur est éloigné de moi;
ils enseignent pour doctrine des commandements d'hommes, ayant une forme
de piété, mais ils en nient la puissance. » Il me défendit de nouveau de
me joindre à aucune d'elles et me dit encore beaucoup d'autres choses que
je ne puis écrire maintenant. Quand je revins à moi, j'étais couché sur le
dos, regardant au ciel. Lorsque la lumière eut disparu, je demeurai sans
forces; mais je ne tardai pas à récupérer dans une certaine mesure et
rentrai chez moi. Comme je m'appuyais au manteau de la cheminée, ma mère
me demanda ce qui se passait. Je lui répondis : « Ce n'est rien, tout va
bien, je ne me sens pas mal. » Je dis ensuite à ma mère : « J'ai appris
personnellement que le presbytérianisme n'est pas vrai. » On aurait dit
que l'adversaire était, dès les premiers temps de ma vie, conscient du
fait que j'étais destiné à me révéler être un trouble-fête et un gêneur
pour son royaume; sinon pourquoi les puissances des ténèbres se
seraient-elles unies contre moi ? Pourquoi l'opposition et les
persécutions qui se dressèrent contre moi, presque dans ma prime enfance ?
Quelques jours après avoir eu cette vision, il m'arriva de me trouver en
compagnie d'un des prédicateurs méthodistes, qui était très actif dans
l'agitation religieuse mentionnée précédemment; et comme je parlais de
religion avec lui, je saisis l'occasion pour lui faire le récit de la
vision que j'avais eue. Je fus fort surpris de son attitude; il traita mon
récit non seulement avec légèreté, mais aussi avec un profond mépris,
disant que tout cela était du diable, que les visions ou les révélations,
cela n'existait plus de nos jours, que toutes les choses de ce genre
avaient cessé avec les apôtres et qu'il n'y en aurait jamais plus.
Cependant je m'aperçus bientôt que le fait de raconter mon histoire
m'avait beaucoup nui auprès des adeptes des autres confessions et était la
cause d'une grande persécution, qui allait croissant; et quoique je fusse
un garçon obscur de quatorze à quinze ans à peine, et que ma situation
dans la vie fût de nature à faire de moi un garçon sans importance dans le
monde, pourtant des hommes haut placés me remarquèrent suffisamment pour
exciter l'opinion publique contre moi et provoquer une violente
persécution; et ce fut une chose commune chez toutes les confessions :
toutes s'unirent pour me persécuter.
Je me fis sérieusement la
réflexion alors, et je l'ai souvent faite depuis, qu'il était bien étrange
qu'un garçon obscur, d'un peu plus de quatorze ans, qui, de surcroît,
était condamné à la nécessité de gagner maigrement sa vie par son travail
journalier, fût jugé assez important pour attirer l'attention des grands
des confessions les plus populaires du jour, et ce, au point de susciter
chez eux l'esprit de persécution et d'insulte le plus violent. Mais aussi
étrange que cela fût, il en était ainsi, et ce fut souvent une cause de
grand chagrin pour moi. Cependant, il n'en restait pas moins un fait que
j'avais eu une vision. J'ai pensé depuis que je devais ressentir plus ou
moins la même chose que Paul quand il se défendit devant le roi Agrippa et
qu'il raconta la vision qu'il avait eue, lorsqu'il avait aperçu une
lumière et entendu une voix; et cependant, il y en eut peu qui le crurent;
les uns dirent qu'il était malhonnête, d'autres dirent qu'il était fou; et
il fut ridiculisé et insulté. Mais tout cela ne détruisait pas la réalité
de sa vision. Il avait eu une vision, il le savait, et toutes les
persécutions sous le ciel ne pouvaient faire qu'il en fût autrement. Et
quand bien même on le persécuterait à mort, il savait néanmoins, et
saurait jusqu'à son dernier soupir, qu'il avait vu une lumière et entendu
une voix qui lui parlait; et rien au monde n'aurait pu le faire penser ou
croire autrement. Il en était de même pour moi. J'avais réellement vu une
lumière, et au milieu de cette lumière, je vis deux Personnages, et ils me
parlèrent réellement; et quoique je fusse haï et persécuté pour avoir dit
que j'avais eu cette vision, cependant c'était la vérité; et tandis qu'on
me persécutait, qu'on m'insultait et qu'on disait faussement toute sorte
de mal contre moi pour l'avoir racontée, je fus amené à me dire en mon
cœur : Pourquoi me persécuter parce que j'ai dit la vérité ? J'ai
réellement eu une vision, et qui suis-je pour résister à Dieu ? Et
pourquoi le monde pense-t-il me faire renier ce que j'ai vraiment vu ? Car
j'avais eu une vision, je le savais, et je savais que Dieu le savait, et
je ne pouvais le nier ni ne l'osais; du moins je savais qu'en le faisant
j'offenserais Dieu et tomberais sous la condamnation. Je savais donc à
quoi m'en tenir en ce qui concernait le monde sectaire: il n'était pas de
mon devoir de me joindre à l'une d'elles, mais de rester comme j'étais,
jusqu'à ce que je reçusse d'autres directives. J'avais découvert que le
témoignage de Jacques était vrai: que quelqu'un qui manquait de sagesse
pouvait la demander à Dieu et l'obtenir sans qu'il lui fût fait de
reproche… »
En résumé, l’étude de la
rédaction de l’histoire de Joseph Smith montre que bien que le récit
officiel de sa Première Vision n’ait été élaboré que relativement tard
dans sa vie, le décalage apparent dans le temps entre la vision et la mise
par écrit de l’événement est plus supposé que réel. Compte tenu de la
jeunesse du prophète, des conditions primitives dans lesquelles il vivait,
de son manque de scolarisation, de l’absence de toute directive officielle
pour l’inciter à écrire et de la réception hostile qu’il reçut dès
l’instant où il raconta ce qui lui était arrivé, il n’y a rien d’étrange à
ce qu’il n’ait pas conservé le récit de sa Première Vision pendant la
décennie 1820-1830. Néanmoins, une fois qu’une révélation lui eut
commandé, en 1830, de tenir une histoire, Joseph agit avec toute la
rapidité que des responsabilités exigeant beaucoup de temps et les
contrariétés qu’il rencontrait lui permettaient. Cela semble
particulièrement évident lorsque l’on envisage ce facteur dans le contexte
des débuts fragmentaires de l’histoire qui sont parvenus jusqu’à nous et
la masse de données historiques conservées par le prophète au cours des
quatorze dernières années de sa vie. En trois occasions, à notre
connaissance, avant 1839, lorsqu’il entreprit la rédaction officielle des
événements de sa vie, Joseph Smith présenta son récit de la Première
Vision comme partie intégrante de ses efforts pour tenir une histoire.
LA LETTRE À WENTWORTH
[28]
La lettre de Joseph Smith à
John Wentworth fut publiée dans le numéro du 1er mars 1842 du Times and
Seasons à Nauvoo (Illinois). Bien que la totalité de la lettre prenne
environ trois pages complètes, le récit des événements de la Première
Vision ne prend qu’une page et demie. Le prophète lui-même l’appelle une «
esquisse », une « histoire brève ». La lettre se termine par la profession
de foi que l’on a appelée plus tard les articles de foi.
[1] M.
Jessee fait partie du personnel
du bureau de l’historien de l’Église à Salt Lake City.
[2] Joseph
Smith, « History of the Church », (MS, Bibliothèque de l’Historien de
l’Église) C-1, p. 954.Voir aussi Joseph Smith, History of the
Church of Jesus Christ of Latter-day Saints, B. H. Roberts, dir.
de publ., Salt Lake City, 1948, vol. 3, p. 375.
(Désigné dorénavant par
DHC.)
[3] A
ce propos, les contradicteurs
ont mis en doute le sérieux du récit de la Première Vision, arguant du
fait que l’élaboration tardive de la « History », combinée à l’absence
de mention de la Première Vision dans les premières publications
mormones, indique que Joseph Smith avait un mobile caché pour
présenter la Première Vision au monde. Dans sa biographie du prophète,
Fawn Brodie avance l’hypothèse que « la vision impressionnante qu’il
décrit des années plus tard n’a peut-être été… qu’une pure invention
créée quelque temps après 1834 quand s’est présentée la nécessité
d’introduire une tradition magnifique… »
No Man Knows My History,
New York, 1963, p. 25.
D’autres ont affirmé que l’absence d’allusions à la Première Vision
dans les premières publications mormones « réfute l’histoire que le
Père et le Fils sont apparus en 1820 à Joseph Smith » et « prouve
d’une manière absolue que les premiers membres de l’Église mormone ne
savaient rien d’une Première Vision. »
Jerald et Sandra Tanner,
Joseph Smith’s Strange Account of the First Vision, Salt Lake
City, n.d., p. 3. Voir aussi Wesley P. Walters, « New Light on Mormon
Origins from Palmyra (N.Y.) Revival », Bulletin of Evangelical
Theological Society, vol. 10, automne 1967, p. 228.
[4] Les
premiers mots de la révélation donnée à Joseph Smith le 6 avril 1830
lors de l’organisation de l’Église, sont : « Voici, un registre sera
tenu parmi vous… » D&A
21:1.
[5]
DHC,
vol. 4, pp. 88-89.
[6]
Smith, « History », C-1, p.
1023. Voir aussi DHC,
Vol. 4, p. 89.
[7]
DHC,
Vol. 4, p. 89.
[8] Id.,
Vol. 4, p. 470. Le manuscrit de la « History
» montre que les 59 premières pages ont été écrites par James
Mulholland, que Robert B. Thompson a écrit au moins une partie des 16
suivantes et que William W. Phelps avait écrit 82 pages avant que
Willard Richards ne se mette à écrire. Ce n’est qu’après la nomination
de Richards en décembre 1841 que la rédaction de la « History » se mit
à avancer sérieusement…
[9] Smith, « History »,
C-1, p. 1260. Voir aussi DHC, vol. 4,
p. 470. Parlant en février 1835 aux Douze, qui venaient d’être
désignés, Joseph Smith dit : « Si j’avais maintenant en ma possession
toutes les décisions qui ont été prises sur des sujets importants de
doctrine et de devoirs depuis le commencement de cette œuvre, je ne
m’en séparerais pour aucune somme d’argent; mais nous avons négligé de
dresser des procès-verbaux de ce genre de choses, pensant peut-être
qu’elles ne nous profiteraient jamais par après… et maintenant nous ne
pouvons pas rendre témoignage à l’Église et au monde des
manifestations grandes et glorieuses qui nous ont été données, avec
autant de puissance et d’autorité que nous le pourrions si nous
avions maintenant ces documents à publier au dehors » Smith, « History
», B-1, p. 575.
[10]
Id
[11] Le prophète
écrivit très peu lui-même. Le 5 juillet 1839, il note : « J’ai dicté
de l’histoire. Je dis dicter, car il est rare que je prenne moi-même
la plume. Je dicte toujours toutes mes communications, mais je me sers
d’un secrétaire pour les écrire » « History », C-1, p. 963. Voir aussi
DHC, vol. 4, p. 1. La rareté extrême des textes holographiques
parmi les documents créés par Joseph Smith confirme cette parole.
C’est dans cette perspective qu’il faut considérer la rédaction des
trois récits historiques donnés dans ces pages.
[12]
Joseph Smith, « Journal » (MS,
Bibliothèque de l’Historien de l’Église), 1832-1834, p. 1.
[13]
Ces documents ont été la source
de base de l’histoire « officielle » composée plus tard.
[14] «Kirtland Letter
Book» (MS, Bibliothèque de l’Historien de l’Église), 1829-1835, pp.
1-6. Ce récit est présenté ici avec la ponctuation de l’original. Il a
été daté par erreur « vers 1833 » à cause de l’ajout d’une page
volante portant la signature de Williams, datée de 1833. Cette page,
qui n’appartient pas au même stock de papier que les autres pages du
registre, a été ajoutée par après. (NdT : Il n’a pas été possible de
reproduire dans la traduction toutes les particularités du texte
anglais, telles que coquilles, particularités orthographiques,
ratures, surcharges, etc. , mais la ponctuation – ou plutôt son
absence – a été respectée.)
[15]
Messenger and Advocate,
Kirtland, (Ohio), octobre
1834, p. 13.
[16]
Smith, « History », B-1, p.
631. Voir aussi DHC,
vol. 2, p. 293.
[17]
Smith,
« History », A-1, p. 105 (numérotation à partir de la fin du livre).
[18]
Id., pp. 120-122. Cité
avec la ponctuation de l’original.
[19]
Id., p. 129.
[20]
Comparer avec DHC, vol. 1, p. 2.
[21]
Id., pp. 18-19.
[22]
Smith, « History », B-1, p.
791. Voir aussi DHC,
vol. 3, p. 25.
[23]
Id., B-l, p. 794.
DHC, vol. 3, p. 26.
[24]
James Mulholland, « Journal » (MS,
Bibliothèque de l’Historien de l’Église), sous les dates indiquées.
[25]
Voir
note 1.
[26]
Mulholland, « Journal », 11 juin 1839. À plusieurs reprises, à partir
du 11 juin, il signale qu’il écrit l’histoire de l’Église.
[27]
Smith, « History » A-1, pp. 1-4.
Ponctuation de l’original.
Trois notes sont insérées dans le texte de ce récit,
notes contenant des informations ajoutées par Joseph Smith après le
commencement de cette « History ». La première, appelée « Note A »,
contient le récit du déménagement de la famille Smith du Vermont à New
York avant le commencement du ministère public de Joseph, ce qui peut
expliquer qu’on ne la trouve pas dans l’histoire imprimée. La « Note
B » dit ce qui suit et se trouve dans le texte imprimé actuel : «
Lorsque la lumière eut disparu, je demeurai sans forces; mais je ne
tardai pas à récupérer dans une certaine mesure et rentrai chez moi.
Comme je m’appuyais au manteau de la cheminée, ma mère me demanda ce
qui se passait. Je lui répondis : ‘Ce n’est rien, tout va bien, je ne
me sens pas mal.’ Je dis ensuite à ma mère : ‘J’ai appris
personnellement que le presbytérianisme n’est pas vrai.’ On aurait dit
que l’adversaire était, dès les premiers temps de ma vie, conscient du
fait que j’étais destiné à me révéler être un trouble-fête et un
gêneur pour son royaume; sinon pourquoi les puissances des ténèbres se
seraient-elles unies contre moi ? Pourquoi l’opposition et les
persécutions qui se dressèrent contre moi, presque dans ma prime
enfance ? » « History », A-1, p. 132-133.
La « Note C », qui apparaît plus loin dans le
texte, contient le correctif que Joseph apporte à sa déclaration qu’il
avait été conduit dans « diverses tentations », note dans laquelle il
affirme : « Bien que je fasse cette confession, il ne faut pas penser
que je me rendis coupable d’avoir péché gravement… » Id p. 133.
Étant donné qu’aucune de ces insertions n’apparaît dans le premier
récit publié de cette « History » dans le Times and Seasons en
1842, mais que les deux dernières trouvent dans le texte imprimé
actuel, les contradicteurs ont considéré ceci comme un exemple de
manipulation du texte. Étant donné le contenu des notes, il est peu
probable qu’elles aient pu provenir de quelqu’un d’autre que Joseph
Smith. Mais il y a plus important : les trois notes apparaissent dans
le livre A-1, de la main de Willard Richards. Étant donné qu’il n’a
commencé à travailler comme secrétaire pour la « History » qu’à partir
de décembre 1841 et que son mandat a pris fin en mars 1844, il est
évident que ces trois insertions ont été ajoutées pendant que Joseph
supervisait la « History ».
[28] Extrait de la lettre
de Wentworth :
« 1er mars 1842 – À la demande de Monsieur John
Wentworth, rédacteur et propriétaire du Democrat de Chicago,
j’ai écrit l’esquisse suivante de la naissance, des progrès, des
persécutions et de la foi des saints des derniers jours dont j'ai
l'honneur, sous la direction de Dieu, d'être le fondateur. Monsieur
Wentworth dit qu'il souhaite fournir ce document à Monsieur Bastow, un
de ses amis, qui est occupé à rédiger l'histoire du New Hampshire.
Étant donné que Monsieur Bastow a pris les dispositions qui
conviennent pour obtenir des renseignements exacts, tout ce que je
demanderai de lui, c’est qu'il publie le récit en entier, sans
l'étoffer et sans le déformer. Je suis né le 23 décembre 1805, à
Sharon, comté de Windsor, Vermont. Lorsque j'ai eu dix ans, mes
parents sont allés s'installer à Palmyra, dans l'État de New York, où
nous avons résidé pendant quatre ans environ, et de là nous sommes
allés nous installer à Manchester. Mon père était fermier et m'a
enseigné l'art de l'agriculture. À l'âge de quatorze ans environ, j'ai
commencé à réfléchir à l'importance d'être préparé pour un état futur,
et en m'informant à propos du plan du salut, j'ai découvert qu'il y
avait de grands conflits d’opinion en matière de religion ; si je me
rendais dans une société, on me renvoyait à un plan, une autre à un
autre, chacune disant de sa doctrine qu'elle était le summum bonum
de la perfection. Considérant que toutes ne pouvaient pas avoir
raison et que Dieu ne pouvait pas être l'auteur de tant de confusion,
j'ai décidé d'étudier la question d'une manière plus complète, croyant
que si Dieu avait une Église, elle ne serait pas divisée en factions
et que s'il enseignait à une société de rendre le culte d'une certaine
façon et d’administrer un ensemble d'ordonnances, il n'enseignerait
pas à une autre des principes qui y étaient diamétralement opposés.
Croyant en la parole de Dieu, j'avais confiance en la déclaration de
Jacques : « Si quelqu’un d'entre vous manque de sagesse, qu’il la
demande à Dieu, qui donne à tous simplement et sans reproche, et elle
lui sera donnée. » Je me suis retiré dans un endroit secret dans un
bosquet et je me suis mis à invoquer le Seigneur. Pendant que j'étais
occupé à supplier avec ferveur, mon esprit a été emporté loin des
objets qui m'entouraient et j'ai été enveloppé dans une vision
céleste, et j'ai vu deux personnages glorieux, qui se ressemblaient
parfaitement de visage et d'aspect, entourés d'une lumière brillante
qui éclipsait celle du soleil à midi. Ils m’ont dit que toutes les
confessions religieuses croyaient en des doctrines incorrectes et
qu'aucune d'entre elles n'était reconnue de Dieu comme son Église et
son royaume ; et il m’a été expressément commandé de ne pas aller
après elles et j‘ai reçu en même temps la promesse que la plénitude
de l'Évangile me serait un jour révélée. »
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