La force de la personnalité de Joseph Smith
Par Jeffrey Marsh

Joseph Smith avait un charisme personnel irrésistible qui lui valait l’attachement de beaucoup de gens, y compris même certains de ses ennemis. Frère Parley P. Pratt, qui passa beaucoup de temps avec le prophète Joseph, observa que : « Il était à l’aise et familier... Il intéressait et édifiait et, en même temps, il amusait et divertissait son public; et aucun de ceux qui l’écoutaient ne se lassait jamais de son discours. Je l’ai même vu retenir une assemblée d’auditeurs bien disposés et passionnés pendant plusieurs heures d’affilée au milieu du froid ou du soleil, de la pluie ou du vent, riant à un moment donné, pleurant l’instant suivant. Même ses ennemis les plus jurés étaient généralement vaincus s’il pouvait retenir un instant leur attention. [1]

Un incident survenu à Far West, Missouri (siège de l’Église en 1838) illustre une situation de ce genre. Joseph Smith était chez ses parents à écrire une lettre. La mère du Prophète décrit la situation :

« Huit [membres de la milice de l’État] entrèrent dans la maison. Pensant qu’ils étaient venus pour un rafraîchissement, je leur offris des chaises.
- Nous ne choisissons pas de nous asseoir, nous sommes venus ici pour tuer Jo Smith et tous les Mormons.
- Ah, dis-je, qu’est-ce que Joseph Smith a fait pour que vous vouliez le tuer ?
- Il a tué sept hommes dans le comté de Davies, répondit le chef, et nous sommes venus le tuer, lui et toute son église.
- Il n’a pas été dans le comté de Davis, répondis-je, par conséquent, le rapport doit être faux. En outre, si vous le voyiez, vous ne voudriez pas le tuer.
- Il ne fait aucun doute que le rapport est parfaitement correct, répliqua l’officier, il nous est parvenu directement, et je le crois; et nous avons été envoyés pour tuer le Prophète et tous ceux qui croient en lui, et je serai d--- si je n’exécute pas mes ordres.
- Je suppose, dis-je, que vous avez l’intention de me tuer avec le reste ?
- Oui, répondit l’officier.
- Très bien, continuai-je, je veux que vous agissiez en gentleman et que vous en finissiez vite. Tuez-moi tout de suite, alors je serai au repos; mais je ne voudrais pas être assassinée par petits morceaux.
- Et ça recommence, dit-il. On dit à un mormon qu’on va le tuer, et il répond : « Ce n’est rien , si vous nous tuez, nous serons heureux. »
Juste à ce moment-là Joseph avait fini d’écrire sa lettre, et, voyant qu’il était disponible, j’ai dit:
- Messieurs, permettez-moi de vous présenter Joseph Smith, le Prophète.
Ils l’ont regardé comme s’il était un spectre. Il a souri, et s’avançant vers eux, leur a donné la main à chacun d’une manière qui les convainquit qu’il n’était ni coupable ni un hypocrite. Joseph s’est alors assis et leur a expliqué les idées et les sentiments, etc., de l’Église, et son historique en plus de la façon dont elle avait été traitée par ses ennemis depuis le commencement. Il a également soutenu que si l’un des frères avait enfreint la loi, il devrait être jugé par la loi, avant que quelqu’un d’autre ne soit molesté. Après avoir parlé de cette façon avec eux un certain temps, il a dit: « Maman, je crois que je vais rentrer à la maison maintenant, Emma va m’attendre. »
Là-dessus, deux des hommes se levèrent d’un bond et déclarèrent qu’il ne devait pas y aller seul, car ce serait dangereux, qu’ils allaient l’accompagner, afin de le protéger. En conséquence, ils sont partis tous les trois et, pendant leur absence, j’ai entendu la conversation suivante entre les officiers qui restaient sur le seuil :
1er officier. « Vous n’avez pas eu une drôle d’impression quand Smith vous a donné la main? Je n’ai jamais ressenti ça de toute ma vie. »
2ème officier. « Je ne pouvais pas bouger. Pour rien au monde je ne ferais le moindre mal à un cheveu de la tête de cet homme. »
3e officier. « C'est la dernière fois qu’on m’y prend à aller tuer Joe Smith ou les Mormons. »
1er officier. « Je crois que c’est ma dernière expédition contre cet endroit. Je n’ai jamais vu un homme aussi inoffensif et aussi innocent que le Prophète mormon. »
2ème officier. « Cette histoire qu’il aurait tué ces hommes, c’est un damné mensonge il n’y a aucun doute là-dessus ; on s’est donné tout ce mal pour rien ; mais on ne m’y prendra plus, ça je vous le garantis. » [2]

Joseph avait une attitude positive et avait un « tempérament naturellement jovial » qui attirait les gens vers lui (voir Joseph Smith-Histoire 1:28). Sa personnalité avait le même effet sur les Saints. Après sa mort, sa femme, Emma, écrivit une lettre à l’un de leurs fils et dit:

« Je ne m’attends pas à ce que tu puisses en faire beaucoup plus dans le jardin que ton père et je n’ai jamais voulu qu’il sorte dans le jardin pour travailler car s’il le faisait, il n’y était pas de quinze minutes qu’il y avait trois ou quatre ou parfois une demi-douzaine d’hommes autour de lui et ils piétinaient le sol plus vite qu’il ne pouvait le houer. » [3]

Un historien du nom de Samuel Smucker a écrit : « On ne peut nier que [Joseph Smith] était l’une des personnes les plus extraordinaires de son temps, un homme de génie qui a accompli une œuvre beaucoup plus grande qu’il ne le pensait et dont le nom, quel qu’il ait pu être pendant sa vie, prendra sa place parmi les notables du monde. » [4]

Même le New York Times du 4 septembre 1843 (quelques mois avant la mort du Prophète), publia cette déclaration : « Ce Joe Smith doit être un personnage extraordinaire. Il est l’un des grands hommes de notre époque et, dans l’histoire future, il sera classé avec ceux qui, d’une manière ou d’une autre, ont fortement marqué la société de leur empreinte. »

L’une des raisons de son influence sur les gens était l’amour et la compassion qu’il leur montrait. Il a dit un jour : « Les prêtres sectaires crient à mon sujet et demandent : « Pourquoi ce babillard gagne-t-il tant d’adeptes et les retient-t-il ? » Je réponds, c’est parce que je possède le principe de l’amour. Tout ce que je peux offrir au monde, c’est un bon cœur et un bon coup de main. [5]

Outre sa personnalité vibrante, Joseph était aussi une personne aux grandes réalisations. Avec seulement trois ans d’études primaires, Joseph devint un autodidacte et un grand partisan de l’éducation. Il créa des programmes d’éducation pour adultes, des écoles de formation missionnaire et des cours de niveau universitaire à Kirtland, Ohio, et obtint une charte pour une université à Nauvoo.

Il croyait que « tous les esprits que Dieu a jamais envoyés dans le monde sont susceptibles d’épanouissement ». [7] Il enseigna aux saints : « Il est impossible à un homme d’être sauvé dans l’ignorance » (D&C 131:6). Il croyait que l’éducation a un impact éternel et que « quel que soit le degré d'intelligence que nous atteignions dans cette vie, il se lèvera avec nous dans la résurrection. Et si, par sa diligence et son obéissance, une personne acquiert dans cette vie plus de connaissance et d'intelligence qu'une autre, elle en sera avantagée d'autant dans le monde à venir. » (D&A 130:18-19).

Ainsi, Joseph a appris que « l’obéissance » aux commandements de Dieu nous permet d’avancer dans la compréhension spirituelle (l’intelligence), tout comme l’effort « diligent » nous permet de progresser intellectuellement (dans la connaissance).

Joseph était un traducteur et fut parmi les premiers à l’époque moderne à traduire un livre complet à partir d’un texte égyptien antique. Il apprit aussi l’hébreu, le grec et l’allemand. Il a fait remarquer un jour que s’il vivait assez longtemps, il désirait apprendre toutes les langues. [9]

Il fonda un certain nombre de villes. Il conçut et planifia la ville de Sion à Independence, Missouri. Il planifia et organisa la ville de Nauvoo qui devint l’une des plus grandes villes de l’Illinois à l’époque. De nombreuses autres villes à travers l’ouest des États-Unis (y compris Salt Lake City) sont modelées d’après ses conceptions. En 1996, il reçut un prix à titre posthume de l’American Planning Association, qui compte 30 000 membres, pour sa vision lors de la création d’un plan de conception urbaine qui accordait une grande valeur à l’environnement urbain, au développement d’une communauté cohérente qui permettait une interaction sociale et s’est avérée réalisable sur le plan agricole. [10]

Le prophète Joseph était le lieutenant-général de la Légion de Nauvoo, une milice d’environ 3 000 hommes enrôlés. Pour recevoir cet honneur, il fut choisi par un vote du peuple et validé par le gouverneur de l’Illinois. Il dirigea également le camp de Sion, une marche militaire de l’Ohio au Missouri. L’organisation qu’il créa pour le camp de Sion fut reproduite plus tard par le président Brigham Young lors du grand exode des saints vers les montagnes Rocheuses.

Au moment de sa mort, Joseph Smith était maire de Nauvoo et candidat à la présidence des États-Unis. Plusieurs de ses propositions de campagne sur la meilleure façon d’aider son pays sont encore d’actualité (comme la réforme des prisons, et le nombre d’élus et le salaire de ceux qui siègent au Congrès). Si Joseph avait été élu et si sa plate-forme avait été mise en œuvre, cela aurait pu modifier radicalement l’histoire américaine. Par exemple, l’une de ses plates-formes demandait au gouvernement fédéral de vendre des terres publiques et d’utiliser l’argent recueilli pour acheter la liberté de tous les esclaves. Son plan était d’abolir l’esclavage pour 1850. [11] L’impact socio-économique de son leadership visionnaire aurait été stupéfiant.

Le célèbre historien russe Léon Tolstoï a visité l’Amérique en 1892 et un journaliste lui a demandé : « Dans votre étude des grands Américains de l’année dernière, qui considérez-vous comme le plus grand? » Sa réponse: « Vous n’avez eu qu’un seul véritable grand Américain, un homme qui a donné au monde des idées qui pourraient changer tout le destin du genre humain : Joseph Smith, le prophète mormon. » [12]

Joseph était un homme extraordinaire qui possédait une grande force de caractère, mais ce n’est pas ce qui l’a qualifié pour recevoir l’appellation de « prophète ». Il a été désigné comme tel dans une révélation du Sauveur donnée le jour même de l’organisation de l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours : « Voici... tu… seras appelé voyant… prophète, apôtre de Jésus-Christ,... par la volonté de Dieu le Père, et par la grâce de ton Seigneur Jésus-Christ " (D&C 21:1). Joseph Smith était une personne d’une grande force, mais l’Église qu’il a fondée n’a pas été construite sur lui et son succès ne repose pas sur sa personnalité. Certains pensaient que l’Église finirait avec la mort de Joseph Smith, mais Joseph a témoigné : « J’ai obtenu du pouvoir sur la base de principes de vérité et de vertu qui dureront quand je serai mort et enterré. » [13]

L’œuvre fondée par Joseph Smith est plus grande que le prophète Joseph lui-même parce que c’est l’œuvre de Dieu dont l’influence bénéfique augmente dans le monde entier. Vraiment, Joseph Smith était un homme qui correspondait au message.

Notes

[1] Historical Record, vol. 7, janvier 1888, 575-6.
[2] History of Joseph Smith by His Mother Lucy Mack Smith,(Salt Lake City: Bookcraft, 1958) 254-6.
[3] Comme cité dans Neal A. Maxwell, We Talk of Christ, 86.
[4] Smucker, History of the Mormons, Philadelphie, 1856, p. 181-183.
[5] Histoire de l’Église, 5:498.
[6] À propos de cette université, Joseph a déclaré qu’elle « nous permettra d’enseigner à nos enfants la sagesse, de les instruire dans toutes les connaissances, dans les arts, les sciences, et les professions libérales. Nous espérons faire de cette institution l’une des grandes lumières du monde, et par et à travers elle diffuser ce genre de connaissance qui sera d’utilité pratique, et pour le bien public, et aussi pour le bonheur privé et individuel. (Voir Histoire de l’Église, 4:269.)
[7] Histoire de l’Église, 6:311.
[8] Le Livre de Mormon a été écrit en « égyptien réformé » (voir Mormon 9:32).
[9] The Personal Writings of Joseph Smith, comp. et ed. Dean C. Jessee, Deseret Book, ??
[10] « 1833 Plat of Zion « , remporte l’honneur national, " Church News, dimanche25 mai 1996, 11.
[11] Voir Church History in the Fulness of Times, 269-70.
[12] Comme rapporté par William E. Berrett, « The Life and Character of the Prophet Joseph Smith », BYU Speeches of the Year, 21 avril 1964, 2. Le célèbre auteur russe a partagé son opinion sur l’avenir du « mormonisme » avec le Dr Andrew D. White, ancien président de l’Université Cornell et ambassadeur des États-Unis en Allemagne, tel que raconté par Frère LeGrand Richards (Voir The Improvement Era, février 1939, p. 94.) Tolstoï aurait dit : « Le peuple mormon enseigne la religion américaine ; leurs principes enseignent non seulement les cieux et les gloires qui s’y trouvent, mais aussi à vivre de manière que leurs relations sociales et économiques reposent sur une base solide. Si le peuple suit les enseignements de cette Église, rien ne peut arrêter leur progression - elle sera illimitée. De grands mouvements ont été lancés dans le passé, mais ils sont morts ou ont été modifiés avant d’arriver à maturité. Si le mormonisme est capable de persévérer sans modification jusqu’à ce qu’il atteigne la troisième et la quatrième génération, il est destiné à devenir la plus grande puissance que le monde ait jamais connue.
13] Religion 345, Institute Student Manual, Church Educational System, (Salt Lake City: The Church of Jesus Christ of Latter-day Saints, 1979], 25.