LES PAPYRUS EGYPTIENS DE 1967

 

Pourquoi la traduction des papyrus égyptiens trouvés en 1967 ne correspond-elle pas au texte du livre d'Abraham dans la Perle de Grand Prix ?

Michael D. Rhodes
Ensign, juillet 1988, pp. 51-53, rubrique : J’ai une question

Les papyrus en question font partie de la collection de momies et de papyrus égyptiens que le prophète Joseph Smith avait achetés en 1835 à Michael Chandler. Après la mort du prophète, l’Église perdit les papyrus. Mais en 1966, le Dr. Aziz S. Atiya, spécialiste du Proche-Orient à l'université d'Utah, découvrit, au Metropolitan Museum of Art de New York, vingt-deux fragments de papyrus qui faisaient clairement partie de la collection originale de Joseph Smith. Les papyrus furent acquis par l'Église et se trouvent maintenant à l'université Brigham Young.

Le plus célèbre de ces fragments est sans aucun doute celui qui apparaît dans le livre d'Abraham sous le titre fac-similé n° 1. Il représente, nous dit-on, Abraham en train d’être sacrifié sur un autel par le prêtre d'Elkéna. Cette image peut se rattacher à plusieurs des autres fragments de papyrus, qui ont trait au texte d'un document religieux égyptien antique connu sous le nom de « Livre des Sensen » ou « Livre des Respirations ». Abraham renvoie à une image dans le texte du livre d'Abraham (Abraham 1:12) et cette image est présumée être celle que nous appelons le fac-similé n° 1. Certains en ont donc conclu que c’est ce Livre des Respirations qui doit être le texte que Joseph Smith a utilisé pour traduire le livre d'Abraham.

Cette théorie se heurte cependant à de sérieux problèmes. Tout d'abord, pour des raisons paléographiques et historiques, le papyrus du Livre des Respirations peut à coup sûr être daté aux environs de 60 apr. J.-C., beaucoup trop tard pour que ce soit Abraham qui l'ait écrit. Naturellement, cela pourrait être une copie – ou une copie d'une copie – de l'original écrit par Abraham. Toutefois, un deuxième problème surgit quand on compare le texte du livre d'Abraham à une traduction du Livre des Respirations ; il est clair que ce n’est pas la même chose. Les ennemis de l'Église l’ont remarqué et, sans tenir compte de quoi que ce soit d’autre, ils ont considéré que cela prouvait que la traduction du prophète était un faux.

En réalité, il y a deux explications possibles au fait que le texte des papyrus récemment découverts ne correspond pas à celui de la Perle de Grand Prix.

La première, c’est qu'elle a pu avoir été prise d'une partie différente des rouleaux de papyrus possédés par Joseph Smith. En d'autres termes, nous n'avons pas tous les papyrus que Joseph Smith avait et ce que nous avons n'est évidemment pas le texte du livre d'Abraham. Le prophète a décrit en ces termes le papyrus qu'il a employé dans la traduction : « Les annales… trouvées avec les momies sont joliment écrites sur du papyrus, avec de l’encre ou de la peinture noire et une petite partie en rouge, dans un parfait état de conservation. » (History of the Church, 2:348.) Le papyrus du Livre des Respirations n'a aucune écriture à l’encre rouge et est dans un très mauvais état de conservation. Il devait être essentiellement dans le même état du temps de Joseph Smith, lorsque des fragments en furent collés au petit bonheur avec d'autres papyrus qui n’avaient absolument rien à voir avec eux. En fait, certains de ces fragments non apparentés sont insérés dans une partie du bord externe du fac-similé n° 2 du livre d'Abraham.

Bien que l'image qui apparaît comme fac-similé n° 1 dans le livre d'Abraham se trouve au début du Livre des Respirations, ceci ne signifie pas nécessairement qu'il appartient au texte. Les Égyptiens mettaient souvent des vignettes à côté de textes qui n'avaient aucun rapport avec elles. J. C. Goyon, dans son étude du papyrus du Louvre n° 3279 (qui est d’ailleurs un texte du Livre des Respirations), dit que les vignettes des papyrus religieux n’ont souvent qu’un rapport très lointain avec le sujet du texte qui les accompagne. (Bibliothèque d’étude, vol. XLII, « Le papyrus du Louvre N. 3279 », Le Caire, 1966, p. 2.) Edouard Naville, dans sa publication inestimable de la version thébaine du Livre des Morts, note également que les vignettes de beaucoup de papyrus du Livre des Morts n'ont absolument rien à voir avec le texte qu'elles accompagnent et il est clair qu’elles ne sont pas censées illustrer ce texte. (Das Aegyptische Totenbuch der XVIII, bis XX, Dynastie, Einleitung, Berlin, 1886, p. 39.) Ainsi, le texte qui est à l’origine du livre d'Abraham a pu se trouver ailleurs sur le même papyrus ou même sur un autre.

Mais si le texte était sur les mêmes papyrus, qu'est-ce qu’un texte écrit par Abraham ou attribué à Abraham fait avec un groupe de textes religieux païens quelques deux mille années après son temps ? En fait, ce n'est pas vraiment aussi invraisemblable qu’on pourrait l’imaginer. Les Égyptiens avaient la manie des choses du passé. Il n'est pas déraisonnable de supposer que les annales anciennes d'Abraham pourraient avoir été copiées de nombreuses fois au cours des générations et avoir été considérées, au cours des siècles ultérieurs, comme précieuses à cause de leur antiquité. C’est peut-être justement une des copies faites au cours de nombreuses générations qui s’est finalement retrouvée avec les momies et les documents qui sont devenus la possession de Michael Chandler, un texte que nous n'avons plus maintenant.

Une deuxième explication tient compte de ce que Joseph Smith entendait par le mot traduction. Pendant la traduction du Livre de Mormon, il utilisa l'urim et le thummim plutôt que les dictionnaires et les grammaires de la langue. La traduction à l’aide de l’urim et du thummim est de toute évidence un processus très différent de l’utilisation des outils de la recherche scientifique.

La section sept des Doctrine et Alliances nous donne un bon exemple de ce processus. C'est une révélation donnée au prophète à l’aide de l’urim et du thummim, « traduction des écrits faits sur parchemin par Jean [le Révélateur] et cachés par lui-même. » (Voir chapeau de la section 7.) En d'autres termes, le prophète n’était même pas en possession du document qu’il traduisait ; il fut cependant en mesure de le traduire à l’aide de l’urim et du thummim.

Sa traduction de la Bible, dont on trouve des extraits dans le livre de Moïse, dans la Perle de Grand Prix, il l’a également faite sans avoir le texte original sous les yeux. Ce qui s’est passé, c’est que tandis qu’il utilisait la King James Version de la Bible, la signification ou le contenu correct lui était révélé, notamment des révélations détaillées sur Hénoc et Moïse qui ne se trouvent pas dans la King James Version.

Nous pouvons imaginer qu’un processus semblable a pu fonctionner dans la traduction des papyrus que Joseph Smith avait obtenus de Michael Chandler. Au lieu de faire une traduction traditionnelle, comme les savants emploieraient le terme, il se servit de l'urim et du thummim pour recevoir la révélation. Même si une copie des annales d'Abraham a pu passer par les mains de beaucoup de scribes et avoir été retouchée au point de ne plus avoir que peu de ressemblance avec l'original, le prophète, à l’aide de l’urim et du thummim ou simplement par révélation, a pu obtenir la traduction ou, comme Joseph Smith utilisait le mot, il a pu avoir reçu la signification ou le contenu du texte original, comme il l’a fait pour sa traduction de la Bible. Cette explication signifierait que Joseph Smith reçut le texte de notre livre d'Abraham actuel de la même manière qu'il reçut la traduction du parchemin de Jean le Révélateur : il n’avait même pas besoin d’avoir le texte lui-même sous les yeux.

En réalité, la méthode utilisée par Joseph Smith est bien moins importante que le livre d'Écriture qui en est résulté. Mais ici les détracteurs du prophète préfèrent ignorer les preuves fournies par le texte lui-même. Le livre d'Abraham doit être évalué sur la base de ce qu'il affirme être : des annales d'Abraham. Une documentation abondante sur Abraham a paru depuis la publication du texte du prophète et le livre d'Abraham correspond étonnamment bien à ces documents. (Hugh Nibley a traité en détail des correspondances entre le livre d'Abraham et les textes découverts plus tard sur Abraham. Voir Abraham in Egypt, 1981, et The Message of the Joseph Smith Papyri, An Egyptian Endowment, 1975, tous deux édités par Deseret Book Company. [Ndlr: F.A.R.M.S. a également publié en 2001 un ouvrage intitulé Traditions about the Early Life of Abraham, contenant de nombreuses correspondances avec le livre d’Abraham.])

Mais en dernière analyse, la preuve de la véracité du livre d'Abraham ne s’obtient pas par des moyens humains. Comme pour tous les aspects de l'Évangile rétabli, « par le pouvoir du Saint-Esprit [nous pouvons] connaître la vérité de toutes choses. » (Moroni 10:5.) J'ai étudié le livre d'Abraham et sa véracité m’a été communiquée d'une manière que je ne peux pas nier. Je sais que quiconque veut sincèrement savoir si le livre d'Abraham est vrai peut également recevoir ce même témoignage et cette même connaissance de Dieu.