La véracité de l'Eglise de Jésus-Christ des
Saints des Derniers Jours est indissolublement liée à l'authenticité du
Livre de Mormon. Ou bien celui-ci est véritablement le document historique
qu'il affirme être, et dans ce cas ni Joseph Smith, ni personne d'autre,
que ce soit au 19e siècle ou de nos jours, n'aurait pu en être l'auteur,
ou bien c'est un faux, et alors il sera inévitablement démasqué par les
progrès des connaissances scientifiques, et l'Eglise se révélera être une
fausse église. Or, depuis une cinquantaine d'années, les indices en faveur
de l'authenticité historique du Livre de Mormon n'ont cessé de se
multiplier au point que quiconque veut mettre le Livre de Mormon (et
l'Eglise) en doute ne peut plus - s'il est intellectuellement honnête -
les ignorer. L'article suivant traite d'un de ces indices.
"L'endroit qui était appelé Nahom"
lumière nouvelle apportée par
le Yémen de l'Antiquité
S. Kent Brown
Journal of Book of Mormon Studies, vol. 8, n° 1, 1999, pp. 66-67
Un autel gravé récemment découvert dans le sud-ouest de la péninsule
arabique fournit un nouvel indice spectaculaire permettant de situer "l'endroit qui était appelé Nahom" dont parle Néphi dans son récit.
Nahom était l'endroit où Ismaël, beau-père de Néphi, fut enterré (voir
1 Néphi 16:34). Les efforts pour localiser cet endroit dans le vaste désert
d'Arabie ont suscité pour les lecteurs des annales néphites des problèmes
qui ne sont toujours pas résolus. Certains érudits de l'Eglise cherchent
depuis des années à identifier l'emplacement de Nahom pour comprendre les
circonstances sociales et géographiques du voyage de Léhi à travers
l'Arabie désertique et saisir plus complètement ce qui est arrivé au
groupe de Léhi tandis qu'il y séjournait.
Hugh Nibley et d'autres après lui, ont fait remarquer que l'expression à la
voix passive "l'endroit qui était appelé Nahom" (italiques de l'auteur)
implique que le nom avait déjà été donné à cette région par les habitants
locaux avant l'arrivée du clan de Léhi. Au contraire du cas de "la vallée
de Lémuel", Léhi n'a pas donné un nom de son invention à cet endroit.
D'autres personnes étaient déjà là et le petit groupe à dû s'arranger de
leur présence. On a même supposé que la famille a connu une dépendance
économique et sociale vis-à-vis des habitants locaux pendant et
après leur séjour à Nahom. Les premiers enfants des couples récemment
mariés sont probablement nés dans cette région (voir 1 Néphi 16:7 ; 17:1) ,
et il est possible que ce soit là que Jacob, frère de Néphi est né. En
outre, le groupe y est apparemment resté un certain temps.
Quand les voyageurs ont quitté Nahom et repris leur route, leur itinéraire
a bifurqué "presque dans la direction de l'est" (1 Néphi 17:1). Ce chemin
les a conduits au bord de la mer, qu'ils ont appelée "Irreantum", qui
bordait le pays qu'ils appelèrent Abondance. Pourquoi se sont-ils arrêtés
à Nahom? D'autres voyageurs ont fait tout le voyage de Jérusalem à la
côte de l'océan indien en quelques mois, alors qu'eux, ils l'ont fait en
huit ans (voir 1 Néphi 17:4). Cet endroit a-t-il été un genre de "quartier d'hiver", un répit qui leur a permis de récupérer du choc de la
première longue partie de leur voyage pendant qu'ils se préparaient pour
la dernière partie, la plus dure?
Une des difficultés que les chercheurs de l'Eglise ont rencontrées a été
de déterminer où un tel endroit pouvait bien se trouver. Ils ont cherché
dans des sources anciennes d'informations des indices qu'il y ait eu un
endroit et une population que l'on appelait Nahom. La première
confirmation a été trouvée il y a vingt ans, quand Ross T. Christensen,
professeur d'archéologie à l'université Brigham Young, maintenant décédé,
a découvert un endroit appelé "Nehhm" sur une carte du 18e siècle
dessinée par le célèbre explorateur allemand Carsten Niebuhr. On suppose
que le nom Nahom s'épelait avec les trois même consonnes, N-H-M, assurant
ceux qui connaissent bien les langues sémitiques que "Nahom" pouvait
très bien être lié à "Nehhm" . En hébreu, la combinaison de ces trois
consonnes renvoie à une racine qui peut signifier "réconfort" ou "compassion" (les significations sont différentes dans la vieille langue
arabe du sud.) La raison pour laquelle Néphi mentionne ce nom tout en
restant silencieux sur tous les autres noms de lieux rencontrés au cours
de leur voyage (avec peut-être l'exception de Shazer) était
vraisemblablement qu'il considérait que le nom de l'endroit qui existait
déjà, "consolation" dans sa langue, était la preuve de ce que la main du
Seigneur était sur eux, bien que la famille d'Ismaël (y compris la femme
de Néphi) ne semble pas avoir été positive du tout (voir 1 Néphi 16:35).
Warren et Michaela Aston ont été les plus persévérants à suivre l'indice
proposé par Christensen. Dans leur livre, ils ont rassemblé des allusions
à un certain nombre de sources arabes qui antidatent l'œuvre de Niebuhr de
plusieurs siècles. Ces auteurs arabes, Ibn al-Kalbi et al-Hamdani, parlent
entre autres d'un dieu païen appelé Nuhum (Ibn al-Kalbi), d'un ancêtre
tribal appelé Nuham (Ibn al-Kalbi) et d'une région et d'une tribu appelées
Nihm (al-Hamdani), tout cela dans le sud-ouest de l'Arabie. Malgré tout,
ces allusions viennent de la plume de personnes qui vivaient au 9e et au
10e siècles de notre ère, quatorze cents ans ou davantage après que le
groupe de Léhi soit passé par la région. Dans leur conclusion, les Aston
avancent la thèse que ces termes existaient d'une manière continue dans
cette région depuis un millénaire et demi parce que d'autres l'avaient
supposé. Après tout, il y a encore à ce jour une tribu et une région
appelée Nihm. Bien entendu, cette théorie pouvait se discuter, en
particulier parce que les auteurs gréco-romains qui avait précédemment
écrit sur l'Arabie ne parlent nulle part d'une région ou d'une tribu du
nom de Nihm ou Nehem. Mais maintenant les choses ont changé.
Une équipe archéologique allemande, sous la direction de Burkhard Vogt, a
fait des fouilles dans le temple de Bar'an, à Marib, l'antique capitale du
royaume sabéen située à environ cent dix kilomètres à l'est de la Sanaa
moderne, capitale du Yémen. (Il est probable que la reine de Saba est
partie de Marib dans son voyage pour rendre visite au roi
Salomon.) Parmi les objets découverts dans le temple, les fouilles ont mis
à jour un autel gravé qu'ils datent du 7e ou du 6e siècle avant
Jésus-Christ, c'est-à-dire de l'époque de Léhi et de sa famille. Un
certain "Bi'athar, fils de Sawad, fils de Naw'an, le Nihmite" a fait don
de l'autel au temple. L'autel fait partie de l'exposition itinérante
d'objets du Yémen antique qui a été présentée d'abord à Paris et tout
récemment à Vienne.
La mention de la tribu des Nihm, inscrite sur cet autel, est la mention la
plus ancienne de ce nom, ou en est une variante. Elle antidate de près de
quinze cents ans les sources arabes citées par les Aston qui mentionnent
ce terme. De plus, l'inscription prouve qu'une tribu de ce nom avait un
membre suffisamment riche pour faire don au temple d'un autel finement
gravé. Bien que nous ne puissions pas déterminer qu'à ce moment là il y
avait un endroit appelé Nihm ou Nehem, il est raisonnable de supposer que
la tribu a donné son nom à la région où elle résidait, de toute évidence à
quelques dizaines de kilomètres au nord de la Sanaa moderne sur les
plateaux qui surplombent le nord de l'Oued Jawf. Est-ce ce nom-là que
Néphi a rendu par Nahom dans ses annales? Très probablement.
Illustrations

Autel gravé dédié par un homme appelé Bi'athar de la tribu de Nihm
au 7e ou 6e siècle av. J.-C. Photo publiée avec la permission de Philippe
Maillard.

Le Djebel (mont) Nihm est situé à une cinquantaine de kilomètres au nord
de Sanaa, capitale moderne du Yémen.

Djebel (mont) Nihm. Photo publiée avec la permission de David J. Johnson.
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