CHAPITRE 9 : LE POINT DE NON RETOUR

 

«Mais quiconque rompt cette alliance après l'avoir reçue et s'en détourne complètement n'aura pas la rémission des péchés dans ce monde ni dans le monde à venir.» (D&A 84:41)

 

Il est vrai que le grand principe du repentir est toujours à notre disposition, mais pour les méchants et les rebelles il y a des réserves graves à cela. Par exemple le péché a le grand pouvoir de créer des habitudes et pousse parfois des hommes au point tragique de non retour. Sans le repentir, il ne peut y avoir de pardon, et sans pardon toutes les bénédictions de l'éternité sont en danger. A mesure que le transgresseur s’enfonce dans son péché, que l'erreur s'incruste plus profondément et que la volonté de changer s'affaiblit, la situation devient de plus en plus désespérée; il glisse de plus en plus bas, jusqu'à ce qu'il ne veuille plus remonter ou ait perdu le pouvoir de le faire.

 

Eternellement trop tard

 

C'est le Livre de Mormon qui contient sans doute les meilleurs exemples et les meilleures références à ce sujet. Pour employer les termes d'Amulek:

 

«Car voici, si vous avez différé le jour de votre repentance, même jusqu'à la mort, voici, vous vous êtes assujettis à l'esprit du diable, et il vous scelle à lui comme siens; c'est pourquoi, l'Esprit du Seigneur s'est retiré de vous, et n'a aucune place en vous, et le diable a tout pouvoir sur vous; et c'est là l'état final du méchant» (AIma 34:35)

 

Cette dernière phrase a un ton définitif bien triste. EIle fait écho aux paroles de Samuel le Lamanite adressées à ceux qui remettaient à plus tard le jour de leur salut «Il (est) éternellement trop tard, et votre destruction est assurée» (Hél. 13:38); elle rappelle la formule de Mormon à propos de ses contemporains méchants «le chagrin des damnés» (Mormon 2:13).

 

Le facteur-clef dans une telle situation est le retrait de l'Esprit du Seigneur. Dans les derniers jours de bataille des Jarédites, «l'Esprit du Seigneur avait cessé de lutter avec eux, et Satan avait plein pouvoir sur le cœur du peuple... » (Ether 5:19) et les Néphites à un moment donné persistèrent dans leur méchanceté jusqu'à ce qu'ils fussent laissés à eux-mêmes pour «regimber contre les aiguillons».

 

«Et ils voyaient qu'ils étaient devenus faibles, semblables à leurs frères, les Lamanites, et que l'Esprit de Dieu ne les préservait plus; oui, il s'était retiré d'eux, parce que l'Esprit du Seigneur n'habite pas des temples impurs… C'est pourquoi, le Seigneur cessa de les préserver de son pouvoir miraculeux et incomparable, car ils étaient tombés dans un état d'incrédulité et de terrible perversité» (Hél. 4:24,25).

 

Les péchés qui mènent à la mort

 

En discutant du sujet du péché et en déclarant que le Seigneur et son Eglise pardonnent les transgressions, il convient de dire nettement qu'il y a «des péchés qui mènent à la mort», Jean nous dit:

 

«Il y a un péché qui mène à la mort; ce n'est pas pour ce péché-là que je dis de prier. Toute iniquité est un péché, et il y a tel péché qui ne mène pas à la mort. (1 Jean 5:16,17).

 

En d'autres termes, les péchés comportent divers degrés de gravité. Il y en a que l'on peut pardonner et d'autres pour lesquels on ne peut pas promettre de pardon. Le péché qui mène à la mort est d'une nature tellement grave qu'on nous dit de ceux qui le commettent:

 

«…nul homme au monde ne connaît sa fin et ne la connaîtra jamais, jusqu'à ce qu'il vienne devant moi en jugement» (D&A 43:33).

 

Le péché impardonnable, souvent mentionné, est d'importance monumentale. Joseph Smith le prophète a dit à ce sujet:

 

Tous les péchés seront pardonnés, excepté le péché contre le Saint-Esprit; car Jésus sauvera tout le monde excepté les fils de perdition. Que doit faire un homme pour commettre le péché impardonnable? Il doit recevoir le Saint-Esprit, voir les cieux ouverts devant lui, connaître Dieu, et alors pécher contre Lui. Après qu'un homme a péché contre le Saint-Esprit, il n'y a pas de repentance possible pour lui. Il doit dire que le soleil ne brille pas alors qu'il le voit; il doit renier Jésus-Christ alors que les cieux lui ont été ouverts, et renier le plan du salut alors que ses yeux en voient la vérité. Et à partir de ce moment-là il commence à être un ennemi. C'est là le cas de beaucoup d'apostats de l'Eglise de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours… Lorsqu'un homme commence à devenir l'ennemi de cette oeuvre, il se met à me pourchasser, il essaye de me tuer, et ne cesse jamais d'avoir soif de mon sang. Il reçoit l'esprit du diable - le même esprit qui possédait ceux qui ont crucifié le Seigneur de la Vie - ce même esprit qui pèche contre le Saint-Esprit. Vous ne pouvez sauver de telles personnes; vous ne pouvez les amener à la repentance; ils font la guerre totale comme le diable, et terribles en sont les conséquences[1]

 

Pour ce qui est de l'effusion du sang innocent, dans un sens, sang innocent pourrait être interprété comme étant le sang des personnes qui sont sans fraude, ou des petits enfants qui n'ont pas péché. On pourrait aussi le considérer comme étant le sang des autres que l'assassin tue délibérément. Assurément la crucifixion du Fils parfait de Dieu constituait une effusion de sang innocent. Le sang de Joseph Smith versé dans la prison de Carthage était innocent - du moins il a dit: «J'ai la conscience libre de toute offense envers Dieu et envers tous les hommes.» Les Ecritures modernes donnent l'interprétation suivante

 

«Le blasphème contre le Saint-Esprit qui ne sera pas pardonné dans le monde ni hors du monde, consiste à commettre un meurtre dans lequel on verse le sang innocent et consent à ma mort après avoir reçu la nouvelle alliance éternelle, dit le Seigneur Dieu... » (D&A 132:27).

 

Joseph Fielding Smith nous éclaire encore davantage sur ceci:

 

«… l'effusion du sang innocent consiste, selon les Ecritures, en ce que l'on consent à la mort de Jésus-Christ et en ce qu'on l'expose à l'ignominie. Pour ceux qui ont eu le témoignage du Saint-Esprit, combattre avec une haine méchante contre ses serviteurs autorisés, c'est la même chose, car si on le fait à eux, on le fait aussi contre lui. Pour les hommes qui ont eu la lumière du Saint-Esprit et qui se détournent et luttent contre la vérité avec une haine meurtrière, et ceux qui sont autorisés à la proclamer, il n'y a pas de pardon dans ce monde ni dans le monde à venir[2]

 

Ceci cadre bien avec l'enseignement donné dans Hébreux:

 

«Car il est impossible que ceux qui ont été une fois éclairés, qui ont goûté le don céleste, qui ont eu part au Saint-Esprit, qui ont goûté la bonne parole de Dieu et les puissances du siècle à venir, et qui sont tombés, soient encore renouvelés et amenés à la repentance, puisqu'ils crucifient pour leur part le Fils de Dieu et l'exposent à l'ignominie» (Hébr. 6:4-6).

 

Pendant son ministère, le Sauveur a fait un commentaire instructif sur le péché contre le Saint-Esprit, qui est rendu comme suit dans la Version Inspirée de la Bible par Joseph Smith:

 

«C'est pourquoi je vous dis: Tout péché et tout blasphème sera pardonné aux hommes qui me reçoivent et se repentent; mais le blasphème contre le Saint-Esprit ne sera point pardonné aux hommes. Quiconque parlera contre le Fils de l'Homme, il lui sera pardonné; mais quiconque parlera contre le Saint-Esprit, il ne lui sera pardonné ni dans ce monde, ni dans le monde à venir» (Version Inspirée, Matt. 12:31-32).

 

Les mots en italique dans le passage ci-dessus semblent limiter les péchés impardonnables à ceux qui ont reçu l'évangile. Ainsi donc, «les œuvres mortes» ne sauveront personne. La sincérité, la foi, le repentir et la dignité doivent caractériser celui qui reçoit l'ordonnance.

 

«C'est pourquoi, un homme fût-il baptisé cent fois, cela ne lui sert à rien, car vous ne pouvez pas entrer par la porte étroite, par la loi de Moïse, ni par vos œuvres mortes» (D&A 22:2).

 

Persévérez jusqu'à la fin

 

Ayant reçu les ordonnances salvatrices nécessaires: le baptême, le don du Saint-Esprit, les ordonnances du temple et les scellements, on doit vivre selon les alliances contractées. On doit persévérer dans la foi. Quelques brillants qu'aient été les services rendus par l'évêque ou le président de pieu ou quelqu'un d'autre, s'il faiblit plus tard dans la vie et ne vit pas en justice «jusqu'à la fin», les bonnes œuvres qu'il a accomplies sont toutes en danger. En fait, celui qui sert et ensuite s'écarte, peut se trouver dans la catégorie dont a parlé Pierre: 

 

«Le chien est retourné à ce qu'il avait vomi, et la truie lavée s'est vautrée dans le bourbier» (voir 2 Pierre 2:22).

 

«Et celui qui ne persévère pas jusqu'à la fin, celui-là sera abattu et jeté au feu, d'où personne ne revient plus à cause de la justice du Père» (3 Néphi 27:17).

 

Corianton était apparemment en danger de ne pas persévérer jusqu'à la fin (s'étant rendu coupable d'immoralité) quand son père, Alma, lui dit:

 

«Car voici, si tu nies le Saint-Esprit, une fois qu'il a eu place en toi, et que tu saches que tu le nies, voici c'est un péché impardonnable; oui, et quiconque commet un meurtre contre la lumière et la connaissance de Dieu, il ne lui est pas facile d'obtenir le pardon.» (Alma 39:6).

 

Dans quelle mesure le Saint-Esprit doit-il avoir «une place en vous»? Joseph F. Smith a dit ceci:

 

«Nul ne peut pécher contre la lumière tant qu'il ne l'a pas; ni contre le Saint-Esprit, tant qu'il ne l'a pas reçu par le don de Dieu par le moyen désigné. Pécher contre le Saint-Esprit, l'Esprit de vérité, le Consolateur, le Témoin du Père et du Fils, le reniant volontairement et le défiant, après l'avoir reçu constitue ce péché…[3]

 

Il est important pour tous les hommes qu'ils veillent à ne même pas approcher du point tragique du péché impardonnable. De nombreuses personnes ont perdu l'Esprit par immoralité et par la rébellion suscitées par les sophismes et la philosophie des hommes, et parfois suite à des offenses imaginaires. L'aigreur a une manière bien à elle d'empoisonner et de tuer l'esprit. On ne doit pas prendre le risque de laisser de telles situations s'envenimer et se gangrener, car qui peut dire où l'on pourrait glisser de l'autre côté de la ligne. Le faire plutôt que de persévérer jusqu'à la fin, c'est peut-être se trouver dans la catégorie que Pierre a décrite:

 

«En effet, si après s'être retiré des souillures du monde, par la connaissance du Seigneur et Sauveur Jésus-Christ, ils s'y engagent de nouveau et sont vaincus, leur dernière condition est pire que la première. Car mieux valait pour eux n'avoir pas connu la voie de la justice, que de se détourner, après l'avoir connue, du saint commandement qui leur avait été donné» (2 Pierre 2:20-21).

 

Le péché contre le Saint-Esprit

 

Les péchés qui mènent à la mort peuvent être considérés comme assez difficiles à définir et à délimiter avec précision. D'après les paroles de Joseph Smith citées ci-dessus, nous remarquons que «... beaucoup d'apostats de l'Eglise de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours» tomberont dans cette catégorie. Nous ne pouvons les désigner individuellement avec précision étant donné qu'il nous est impossible de connaître l'étendue de leur connaissance, la profondeur de leur illumination et la sûreté de leur témoignage avant leur chute.

 

Quand on a reçu le Saint-Esprit, on a un compagnon qui nous inspirera et nous instruira constamment (voir Moroni 10:5). S'il n'est pas chassé par l'impureté ou par une méchanceté persistante, le Saint-Esprit rendra toujours un témoignage croissant de la vérité de l'Evangile. La puissance de son influence est soulignée dans cette explication de Joseph Fielding Smith:

 

«La raison pour laquelle le blasphème contre le Fils de Dieu peut être pardonné, même si le Fils s'est manifesté dans une vision ou un songe, est que pareille manifestation ne frappe pas l'âme d'une manière aussi profonde que le témoignage du Saint-Esprit. L'influence du Saint-Esprit est celle de l'Esprit qui parle à l'esprit, et l'impression indélébile est une impression telle qu'elle produit dans l'âme la conversion et la conviction comme ne pourrait le faire aucune autre influence. Le Saint-Esprit révèle la vérité d'une manière évidente qui ne laisse aucun doute et est par conséquent bien plus impressionnante qu'une vision reçue par l'œil[4]

 

La profondeur et le caractère durable des impressions données par «un Esprit parlant à un esprit» expliquent peut-être pourquoi le Seigneur a dit à Thomas après sa résurrection:

 

«Parce que tu m'as vu, tu as cru. Heureux ceux qui n'ont pas vu, et qui ont cru» (Jean 20:29).

 

Il faisait là allusion à un témoignage plus sûr. Les yeux peuvent être séduits, tout comme peuvent l'être les autres sens physiques, mais le témoignage du Saint-Esprit est certain.

 

Le péché contre le Saint-Esprit exige une connaissance telle qu'il est manifestement impossible à la masse des membres de commettre pareil péché. Il y a relativement peu de membres de l'Eglise qui commettent un meurtre où ils versent le sang innocent, et nous espérons que peu seulement nieront le Saint-Esprit.

 

Le serment et l'alliance de la prêtrise

 

Dans le cadre de ce sujet rentrent les paroles du Seigneur relatives au serment et à l'alliance de la prêtrise. Il y est dit, entre autres:

 

«Car tous ceux qui, par leur fidélité, obtiennent ces deux prêtrises dont j'ai parlé et magnifient leur appel, sont sanctifiés par l'Esprit et leur corps sera renouvelé. Ils deviennent les fils de Moïse et d'Aaron, la postérité d'Abraham, l'Eglise et le royaume, et les élus de Dieu» (D&A 84:33-34).

 

Dans les termes «magnifient leur appel», il y a bien plus, semble-t-il, que le simple fait d'aller aux réunions de la prêtrise, d'administrer la Sainte-Cène, de faire l'imposition des mains aux malades et de travailler dans l'Eglise. Une condition que tous les hommes ne remplissent sans doute pas, c'est la manifestation d'une fidélité suffisante pour avoir le droit de recevoir la prêtrise. Et magnifier leurs appels semble impliquer une totalité que peu d'hommes, s'il en est, atteignent dans la mortalité. La perfection de corps et d'esprit semble y être postulée. En outre, dans les cinq versets suivants, il y a beaucoup de choses qui sont sous-entendues mais ne sont pas pleinement détaillées:

 

«Et tous ceux qui reçoivent cette prêtrise, me reçoivent, dit le Seigneur; Car celui qui reçoit mes serviteurs me reçoit, et celui qui me reçoit reçoit mon Père, et celui qui reçoit mon Père, reçoit le royaume de mon Père, c'est pourquoi tout ce que mon Père possède lui sera donné. Et ceci est conforme au serment et à l'alliance qui appartiennent à la prêtrise» (D&A 84:35-39).

 

Le mot «recevoir» dans ces phrases a un sens profond. Recevoir, dans cet ordre d'idées, signifie plus que simplement accepter négligemment, mais magnifier, développer et traduire dans la réalité. Recevoir les serviteurs peut signifier accepter des appels et des responsabilités et servir bien et fidèlement; recevoir le Seigneur signifie l'aimer et obéir à tous ses commandements; recevoir le Père signifie ne rien négliger pour arriver à la perfection personnelle; et tout cela signifie l'exaltation et la vie éternelle, car la promesse est le royaume et «tout ce que le Père possède». Un instant de réflexion nous rappellera la connaissance infinie, le pouvoir, la domination, les royaumes, les exaltations et la joie qui nous sont offerts ici dans un serment et une alliance que le Père ne peut enfreindre. Si nous nous montrons à la hauteur, des bénédictions sans limites nous sont garanties. Et pour que l'énorme difficulté de la tâche ne nous décourage pas d'accepter la prêtrise, le Seigneur a donné cet avertissement:

 

«Et malheur à tous ceux qui ne viennent pas à cette prêtrise...» (D&A 84:42).

 

J'ai connu des gens qui ont refusé d'être baptisés et confirmés, et qui n'ont pas voulu recevoir la prêtrise à cause des graves responsabilités qu'il leur faudrait assumer en l'acceptant. Il est clair qu'on n'échappera pas à la condamnation en refusant d'accepter la responsabilité.

 

De même, le Seigneur spécifie les conditions dans lesquelles nous recevons la prêtrise:

 

«C'est pourquoi, tous ceux qui reçoivent la Prêtrise, reçoivent ce serment et cette alliance de mon Père, qu'il ne peut rompre et qui est immuable. Mais quiconque rompt cette alliance après l'avoir reçue et s'en détourne complètement n'aura pas le pardon de ses péchés dans ce monde ni dans le monde à venir» (D&A 84:40-41).

 

Le verset 41 pourrait bien nous remplir le cœur de terreur quand nous nous rendons compte de ses implications et cependant, dans nos faiblesses et notre incapacité à être pleinement à la hauteur, nous nous réjouissons de ce que le mot «complètement» ait été inséré. Il semble impliquer le rejet que celui qui rejette le programme et ne fait aucun effort pour s'y conformer n'aura pas la bénédiction promise. Il semble impliquer aussi que tant que l'on fait tous ses efforts pour être à la hauteur, quoique l'on n'atteigne pas la perfection, on peut garder l'espoir.

 

Les fils de perdition

 

Ceux qui ont suivi Lucifer dans sa rébellion dans la vie prémortelle et ceux qui, dans la mortalité, pèchent contre le Saint-Esprit sont les fils de perdition. Les fils de perdition de la mortalité ressusciteront comme tous les autres; mais ils subiront finalement la seconde mort, la mort spirituelle, car «ils sont de nouveau retranchés des choses de la justice» (voir Hélaman 14:18).

 

Il y avait apparemment à l'époque du rétablissement des gens qui enseignaient que le diable et ses anges et les fils de perdition seraient un jour sauvés. Joseph Smith le prophète se refusa à cautionner cet enseignement, et sanctionna la décision de l'évêque selon laquelle quiconque l'enseignait serait exclu de la communion des Saints[5].

 

Dans les régions de la perdition ou le royaume des ténèbres, où il n'y a pas de lumière, Satan et les esprits non incarnés de la préexistence demeureront ensemble avec ceux de la condition mortelle qui rétrogradent au niveau de la perdition. Ceux-ci ont perdu tout pouvoir de régénération. Ils sont descendus si bas qu'ils ont perdu toute inclination et toute capacité de se repentir et, en conséquence, le plan de l'Evangile est inutile pour eux en tant qu'instrument de croissance et de développement.

 

«Et celui qui n'est pas capable de se conformer à la loi d'un royaume téleste ne peut supporter une gloire téleste; c'est pourquoi il ne convient pas pour un royaume de gloire. C'est pourquoi il doit demeurer dans un royaume qui n’est pas un royaume de gloire» (D&A 88:24).

 

«Ainsi dit le Seigneur concernant tous ceux qui connaissent mon pouvoir et à qui il a été donné d'y prendre part, qui ont permis au pouvoir du diable de les vaincre, et de leur faire renier la vérité et défier mon pouvoir – Ce sont ceux qui sont les fils de perdition, de qui je déclare qu'il aurait mieux valu pour eux qu'ils ne fussent jamais nés; car ils sont les vases de colère, condamnés à subir la colère de Dieu avec le diable et ses anges pour l'éternité, à propos desquels j'ai dit qu'il n'y a pas de pardon dans ce monde ni dans le monde à venir - Car ils ont renié le Saint-Esprit après l'avoir reçu, ont renié le Fils unique du Père, l'ont crucifié et l'ont exposé à une honte ouverte. Ce sont ceux qui s'en iront dans le lac de feu et de soufre avec le diable et ses anges, les seuls sur lesquels la seconde mort aura un pouvoir quelconque. Oui, en vérité, les seuls qui ne seront pas rachetés au temps fixé par le Seigneur, après avoir souffert sa colère» (D&A 76:31-38).

 

Ceux-ci renient le Fils et l'Evangile de repentance et perdent ainsi le pouvoir de se repentir. Leur demeure sera là où «... le feu ne s'éteint pas, ce qui est leur tourment et nul n'en connaît la fin, ni le lieu, ni leur tourment. Et cela n'a pas été révélé à l'homme, ne l'est pas et ne le sera jamais, si ce n'est à ceux qui y sont condamnés» (D&A 76:44-46).

 

Joseph Smith le prophète nous donne encore ce tableau:

 

«Ceux qui commettent le péché impardonnable sont condamnés à Gnolom à demeurer en enfer à toute éternité. De même qu'ils ont ourdi des scènes d'effusion de sang dans ce monde, de même ils se lèveront dans cette résurrection qui est comme l'étang de feu et de soufre. Certains ressusciteront dans les embrasements éternels de Dieu; car Dieu demeure dans des embrasements éternels et il y en a qui ressusciteront pour la damnation de leur propre impureté, qui est un tourment aussi raffiné que l'étang de feu et de soufre[6]

 

Il est inutile de spéculer sur le point de savoir qui sera fils de perdition. Certains, se basant sur des passages scripturaux, ont envoyé Judas Iscariot à cette condamnation (voir Jean 12:6; 6:70; 17:12; Actes 1:20). Joseph F. Smith met en doute cette interprétation:

 

«Il m'apparaît fortement qu'aucun des disciples ne possédait suffisamment de lumière, de connaissance ou de sagesse au moment de la crucifixion pour être soit exalté, soit condamné; car c'est plus tard que leur esprit a été ouvert pour comprendre les Ecritures et qu'ils ont été dotés de la puissance d'en haut; dépourvus de cela ils n'étaient que des enfants en connaissance par comparaison avec ce qu'ils devinrent plus tard sous l'influence de l'Esprit[7]

 

Le meurtrier

 

Jean a écrit: «Aucun meurtrier n'a la vie éternelle demeurant en lui.» Le meurtrier se prive du salut dans le royaume céleste et, dans ce sens, il ne peut lui être pardonné pour son crime. Le cas du premier meurtre est instructif. Bien que ses parents lui eussent enseigné pleinement l'Evangile, Caïn «aima Satan plus que Dieu». Il devint rebelle, «charnel, sensuel et diabolique». Caïn allait devenir le père des mensonges de Satan et être appelé perdition. Son péché suprême fut l'assassinat de son frère Abel, qu'il commit en faisant alliance secrète avec Satan et pour obtenir les biens d'Abel. Pour le punir, le Seigneur condamna le méchant Caïn à être un fugitif et un vagabond et mit sur lui un signe qui révélerait son identité.

 

A propos de la triste personnalité de Caïn, il y a une histoire intéressante qui nous est racontée dans le livre de Lycurgus A. Wilson sur la vie de David W. Patten. Je cite de ce livre un extrait d'une lettre d'Abraham O. Smoot, donnant ses souvenirs du récit fait par David Patten de sa rencontre avec «un personnage très remarquable qui s'était présenté comme étant Caïn».

 

«Tandis que je chevauchais ma mule, je remarquai soudain qu'un personnage très étrange marchait à côté de moi... Sa tête était à peu près à la hauteur de mes épaules quand j'étais assis en selle. Il ne portait pas de vêtements, mais était couvert de poils. Sa peau était très sombre. Je lui demandai où il habitait et il répondit qu'il n'avait pas de demeure qu'il errait sur la terre et voyageait çà et là. Il dit qu'il était malheureux et que, pendant son séjour sur la terre, il avait recherché avec ferveur la mort, mais qu'il ne pouvait mourir et que sa mission était de détruire l'âme des hommes. Quand il eut dit cela, je le réprimandai au nom du Seigneur Jésus-Christ et en vertu de la Sainte Prêtrise, et je lui commandai de s'éloigner, et il disparut immédiatement de ma vue…[8]

 

Un autre personnage scriptural qui commit le meurtre - et ceci en même temps que l'adultère - ce fut le grand roi David. Après cela, il rechercha pendant toute sa vie le pardon de son terrible crime. Certains psaumes décrivent l'angoisse de son âme, et cependant David paie toujours pour son péché. Il ne reçut pas la résurrection au moment de la résurrection de Jésus-Christ. Pierre déclara que son corps était toujours au tombeau (voir Actes 2:29-34).

 

Joseph F. Smith a fait ce commentaire sur la situation de David:

 

«Mais même David, quoique coupable d'adultère et du meurtre d'Urie, obtint la promesse que son âme ne resterait pas en enfer, ce qui signifie, si je le comprends bien, que même lui échappera à la seconde mort[9]

 

Joseph Smith le prophète a souligné la gravité du péché du meurtre pour David, comme pour tous les hommes, et le fait qu'il n'y a pas de pardon pour ce péché:

 

«Un meurtrier, par exemple, quelqu'un qui répand le sang innocent, ne peut pas recevoir le pardon. David, se repentant du meurtre d'Urie, chercha à obtenir le pardon de Dieu, et y mit tous ses soins et toutes ses larmes. Mais il ne put l'obtenir qu'en passant par l'enfer; néanmoins, il obtint la promesse que son âme ne serait pas laissée en enfer. Bien que David fût roi, il n'obtint jamais l'esprit ni le pouvoir d'Elie, ni la plénitude de la prêtrise. Et la prêtrise qu'il reçut, ainsi que son trône et son royaume lui seront enlevés et donnés à un autre du nom de David dans les derniers jours, lequel sera issu de lui[10]

 

Il se peut qu'une des raisons pour lesquelles le meurtre est si atroce, c'est que l'homme ne peut rendre la vie qu'il a prise. La vie mortelle de l'homme lui est donnée pour se repentir et se préparer pour l'éternité, et si l'un de ses semblables met fin à sa vie et limite ainsi sa progression en tendant son repentir impossible, c'est un acte atroce, une responsabilité immense que le meurtrier pourrait être incapable d'expier de son vivant.

 

Bien entendu, les lois tant du pays que de Dieu reconnaissent qu'il y a une grande différence entre l'assassinat ou homicide volontaire et l'homicide non prémédité. De même, les hommes doivent malheureusement ôter la vie aux autres dans la guerre. Certains de nos jeunes gens scrupuleux ont été troublés et préoccupés parce qu'ils étaient obligés de tuer. Il y a des circonstances atténuantes, mais assurément le blâme et la responsabilité reposent lourdement sur la tête de ceux qui ont amené la guerre, rendant nécessaire d'ôter la vie. Il est concevable que même dans la guerre, il puisse y avoir beaucoup d'occasions où il y a un choix légitime et où des combattants ennemis pourraient être faits prisonniers plutôt que tués.

 

Voici un extrait du message de la Première Présidence du 6 avril 1942:

 

«Le monde entier est au milieu d'une guerre qui semble être la pire de tous les temps. L'Eglise est une Eglise mondiale. Ses membres dévoués se trouvent dans les deux camps. Ils sont les instruments innocents de leur gouvernement en guerre. De part et d'autre ils croient qu'ils luttent pour leur foyer, leur pays et leur liberté. De part et d'autre, nos frères prient le même Dieu, au même nom, pour avoir la victoire. Les deux parties ne peuvent avoir pleinement raison; peut-être ne sont-elles pas sans torts l'une et l'autre. Dieu établira en son temps et de sa manière souveraine la justice et le bon droit du conflit, mais il ne tiendra pas pour responsables du conflit les instruments innocents de la guerre, nos frères en armes. C'est là une grande crise dans la vie de l'homme dans le monde. Dieu est au gouvernail.»

 

Même parmi les meurtriers volontaires, il y a des degrés et des catégories. Il y a les Hérode, les Eichmann et les Heydrich qui tuent par plaisir sadique. Il y a ceux qui tuent en état d'ivresse, dans leur rage, leur colère, leur jalousie. Il y en a qui tuent pour le gain, pour le pouvoir, par peur. Il y en a qui tuent par passion. Ils subiront certainement des degrés différents de châtiment dans l'au-delà. Le châtiment terrestre approprié pour le crime est clairement exposé dans les Ecritures et appliqué à toutes les époques du monde. Ce châtiment est la prérogative et la responsabilité des autorités gouvernementales, étant donné qu'aucune personne non autorisée ne peut faire justice soi-même et tuer un de ses semblables:

 

«Si quelqu'un verse le sang de l'homme, par l'homme son sang sera versé, car Dieu a créé l'homme à son image» (Gen. 9:6).

 

«Celui qui frappera un homme mortellement sera puni de mort» (Exode 21:12).

 

«Celui qui frappera un homme mortellement sera puni de mort» (Lév. 24 :17).

 

«Tu ne tueras point; mais celui qui tue mourra» (D&A 42:19).

 

Chose regrettable aussi, il y a des gens qui, quand ils sont finalement découverts dans leurs détournements de fonds, dans des transgressions graves dans le domaine de la morale et qui affectent famille et amis, et dans d'autres péchés, commencent à envisager le suicide. Parfois la tentation du suicide vient quand une personne est accablée de douleur par la perte d'un être cher ou qu'elle a le sentiment de ne pas pouvoir affronter et régler les situations difficiles qu'elle rencontre. En finir! Mais ce grand crime ne met fin à rien du tout. Quand il a tous ses esprits, seul un insensé pourrait jamais envisager de s'ôter la vie.

 

L'Eglise et le meurtrier

 

De temps en temps, des gens qui ont assassiné viennent à l'Eglise demander le baptême, ayant pris partiellement conscience de l'énormité du délit. Les missionnaires quand ils sont au courant de la situation, ne baptisent pas ces gens-là. Plutôt que d'assumer cette grande responsabilité, ils réfèrent le problème à leur président de mission qui, de son côté, en réfère à la Première Présidence de l'Eglise. Cette réaction cadre avec le commentaire de Joseph Smith sur les meurtriers et en particulier ceux du Sauveur: Pierre fit mention du même sujet le jour de la Pentecôte, mais la multitude ne fut pas revêtue du même pouvoir que Pierre; mais, plusieurs jours plus tard, les gens demandèrent: «Hommes frères, que ferons-nous?» Et Pierre dit: «Je sais que vous avez fait cela par ignorance», parlant de la crucifixion du Sauveur, etc. Il ne leur dit pas «Repentez-vous et soyez baptisés pour la rémission de vos péchés», mais «Repentez-vous donc et convertissez-vous, pour que vos péchés soient effacés, afin que des temps de rafraîchissement viennent de la part du Seigneur» (Actes 3:19).

 

C'est le cas des meurtriers. Ils ne purent donc pas être baptisés pour la rémission de leurs péchés, parce qu'ils avaient versé le sang innocent[11]

 

La parole est claire pour les membres de l'Eglise:

 

«Et maintenant, voici, je parle à l'Eglise. Tu ne tueras point; celui qui tue n'aura pas de pardon dans ce monde ni dans le monde a venir» (D&A 42:18).

 

«Et il arrivera que si une personne quelconque parmi vous tue, elle sera livrée et traitée selon les lois du pays; car souvenez-vous qu'il n'y a pas de pardon pour elle; et les preuves seront établies selon les lois du pays» (D&A 42:79).

 

Quand un membre de l'Eglise est jugé coupable de meurtre ou de ce qui semble approcher de ce terrible crime, il convient d'envisager l'excommunication qui est dans la plupart des cas le châtiment requis.

 

Eviter les premiers pas

 

Même les péchés impardonnables exigent que l'on s'en repente. Le meurtrier n'a pas la vie éternelle demeurant en lui, mais Dieu, qui est miséricordieux, accordera à toute âme des récompenses adaptées pour chaque bonne action qu'elle accomplit. Dieu est juste. Il récompensera tout effort pour faire le bien, se repentir, vaincre le mal. Même le meurtrier est justifié quand il se repent, répare et constitue un crédit en sa faveur.

 

Il vaut beaucoup mieux éviter les étapes qui mènent au péché impardonnable. C'est ainsi qu'en fait de mesure préventive contre le meurtre, on devrait éviter la colère et la haine, la cupidité et l'avarice, et toutes les autres impulsions qui sont à la source de cet acte. Néphi dit que ses frères étaient des meurtriers dans leur cœur. On commet ordinairement souvent l'acte dans ses pensées avant de le commettre délibérément dans la réalité.

 

De même, le membre de l'Eglise qui est sage, ne fera pas le premier pas consistant à se séparer de l'Eglise, comme le font beaucoup par l'apostasie. Il priera fréquemment et régulièrement, lira les Ecritures, et restera généralement proche du Seigneur. Il accomplira diligemment ses devoirs dans l'Eglise et la famille et suivra les instructions de ses chefs spirituels. Ce faisant, il pourra toujours se repentir de ses péchés en suivant le chemin escarpé; il n'approchera jamais du péché impardonnable, il ne s'approchera jamais du point de non retour.

 


 


[1] Smith, Enseignements du prophète Joseph Smith, pp. 504-505.

[2] Joseph Fielding Smith, «The Sin against the Holy Ghost, Improvement Era, Juillet 1955 p. 494.

[3] Smith, Gospel Doctrine, p. 434.

[4] Smith, The Improvement Era, juillet 1955, p. 494.

[5] Voir Smith, Enseignements du prophète Joseph Smith, p. 27.

[6] Documentary History of the Church, vol. 6, p. 317.

[7] Smith, Gospel Doctrine, p. 433.

[8] Lycurgus A. Wilson, Life of David W. Patten (Salt Lake City Deseret News, 1900), p. 50.

[9] Smith, Gospel Doctrine, p. 434.

[10] Smith, Enseignements du prophète Joseph Smith, p. 477.

[11] Idem.

 

 

 

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