CHAPITRE 1 :
INTRODUCTION - L'ETABLISSEMENT DE L'EGLISE DU CHRIST
1. Une croyance commune à toutes les sectes et Eglises professant le
christianisme est que Jésus-Christ, le Sauveur et le Rédempteur de la race
humaine, établit son Eglise sur terre par son ministère personnel au midi
des temps. L'histoire ecclésiastique, à la différence de l'histoire
séculière, traite des expériences de l'Eglise depuis le moment de son
établissement. Ce sont d'abord les conditions de la fondation de l'Eglise
qui réclament notre attention.
2. Au début de l'ère chrétienne, les Juifs, comme la plupart des autres
nations, étaient des sujets de l'empire romain[1]. Ils jouissaient en
général d'un degré de liberté considérable pour conserver leurs pratiques
religieuses et leurs coutumes nationales, mais leur statut était loin
d'être celui d'un peuple libre et indépendant.
3. C'était une période de paix relative, un temps marqué par moins de
guerres et de dissension que l'empire n'en avait connues pendant de
nombreuses années. Ces conditions étaient favorables pour la mission du
Christ et la fondation de son Eglise sur terre.
4. Les religions subsistant au temps du ministère terrestre du Christ
peuvent se classer en principe en juive et païenne, avec en plus une
petite minorité, les Samaritains, qui était essentiellement un mélange des
deux autres. Les enfants d'Israël étaient les seuls à professer
l'existence du Dieu vrai et vivant; ils étaient les seuls à attendre la
venue du Messie qu'ils attendaient, se méprenant, sous forme d'un
conquérant qui viendrait pour écraser les ennemis de leur nation. Tous les
autres peuples, nations et langues s'inclinaient devant des divinités
païennes, et leur culte ne comprenait que les rites sensuels de
l'idolâtrie païenne. Le paganisme[2] était une religion de forme et de
cérémonie, basée sur le polythéisme, la croyance dans l'existence d'une
multitude de dieux, lesquelles divinités étant sujettes à tous les vices
et passions de l'humanité, tout en s'en distinguant par l'immunité contre
la mort. La moralité et la vertu étaient des éléments inconnus du service
païen; et l'idée dominante du culte païen était de se rendre les dieux
favorables dans l'espoir de détourner leur colère et d'acheter leur
faveur.
5. Les Israélites, ou Juifs pour employer le terme collectif par lequel on
les connaissait, se distinguaient ainsi d'entre les nations comme de fiers
détenteurs d'une connaissance supérieure, avec une lignée et une
littérature, avec une organisation sacerdotale et un système de lois qui
les mettaient à part en tant que peuple à la fois singulier et choisi.
Alors que les Juifs considéraient leurs voisins idolâtres avec horreur et
mépris, ils étaient à leur tour traités avec dérision de fanatiques et
d'inférieurs.
6. Mais les Juifs, tout en se distinguant ainsi du reste du monde en tant
que peuple, ne constituaient pas un groupe uni; au contraire, la division
régnait parmi eux en matière de doctrine et de pratique religieuses. En
premier lieu, une haine mortelle opposait les Juifs proprement dits aux
Samaritains. Ces derniers étaient un mélange de gens peuplant une province
distincte s'étendant principalement entre la Judée et la Galilée, composé
principalement de colons assyriens qui avaient contracté des mariages
mixtes avec les Juifs. Tout en affirmant croire au Jéhovah de l'Ancien
Testament, ils pratiquaient de nombreux rites appartenant au monde païen
qu'ils prétendaient avoir abandonné. Ils étaient considérés et réprouvés
par les Juifs proprement dits comme peu orthodoxes.
7. Ensuite, les Juifs eux-mêmes étaient alors divisés en beaucoup de
sectes et de partis rivaux dont les principaux étaient les pharisiens et
les saducéens; avec en plus, comme nous le disent les Ecritures, les
esséniens, les galiléens, les hérodiens, etc.
8. Les Juifs vivaient selon la loi de Moïse, dont l'observance extérieure
était mise en vigueur par la règle sacerdotale, tandis que l'esprit de la
loi était très généralement négligé aussi bien par les prêtres que par le
peuple. Paul affirma par la suite dans son épître aux Galates que la loi
de Moïse avait été donnée en préparation de quelque chose de plus
important: « Ainsi la loi a été comme un pédagogue pour nous conduire à
Christ[3].» Et le fait qu'une loi supérieure devait remplacer la loi
inférieure apparaît beaucoup dans les propres enseignements du Sauveur:
«Vous avez entendu qu'il a été dit aux anciens: Tu ne tueras point; celui
qui tuera mérite d'être puni par les juges. Mais moi, je vous dis que
quiconque se met en colère contre son frère mérite d'être puni par les
juges; . . . Vous avez appris qu'il a été dit: Tu ne commettras point
d'adultère. Mais moi, je vous dis que quiconque regarde une femme pour la
convoiter a déjà commis un adultère avec elle dans son cœur.... Vous avez
encore appris qu'il a été dit aux anciens- Tu ne te parjureras point, mais
tu t'acquitteras envers le Seigneur de ce que tu as déclaré par serment.
Mais moi, je vous dis de ne jurer aucunement . . . Vous avez appris qu'il
a été dit: Oeil pour oeil, et dent pour dent. Mais moi, je vous dis de ne
pas résister au méchant . . . Vous avez appris qu'il a été dit: Tu aimeras
ton prochain, et tu haïras ton ennemi. Mais moi, je vous dis: Aimez vos
ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous
haïssent, et priez pour ceux qui vous maltraitent et qui vous
persécutent[4].»
9. Ces enseignements, basés sur l'amour, si différents de l'esprit de
revanche auquel il s'était accoutumé sous la loi, causèrent de grandes
surprises parmi le peuple; cependant, pour affirmer que l'on ne pouvait
négliger la loi et qu'elle ne pouvait être remplacée que par son
accomplissement, le Maître dit: «Ne croyez pas que je sois venu pour
abolir la loi ou les prophètes; je suis venu non pour abolir, mais pour
accomplir. Car, je vous le dis en vérité, tant que le ciel et la terre ne
passeront point, il ne disparaîtra pas de la loi un seul iota ou un seul
trait de lettre, jusqu'à ce que tout soit arrivé[5]. »
10. Il est très évident que
le Maître était venu avec une doctrine plus grande que ce qu'on
connaissait alors et que les enseignements de l'époque étaient
insuffisants: «Car, je vous le dis, si votre justice ne surpasse pas celle
des scribes et des pharisiens, vous n'entrerez point dans le royaume des
cieux[6].»
11. Jésus se soumettait lui-même rigoureusement à toutes les exigences
légitimes de la loi; mais il refusait de reconnaître que l'on observât
seulement la lettre, quelle que soit la rigidité avec laquelle on le
demandait, au lieu de se soumettre à l'esprit de l'injonction mosaïque.
12. Les enseignements et les préceptes excellents de vraie moralité que le
Christ inculquait préparaient l'esprit de ceux qui croyaient en sa parole,
à l'introduction de l'Evangile dans sa pureté et à l'établissement de
l'Eglise du Christ comme organisation terrestre.
13. D'entre les disciples qui le suivaient, et dont certains avaient reçu
l'honneur d'appels préliminaires, il choisit douze hommes qu'il ordonna à
l'apostolat: il en établit douze pour les avoir avec lui, et pour les
envoyer prêcher[7].» Encore: «Quand le jour parut, il appela ses
disciples, et il en choisit douze, auxquels il donna le nom d'apôtres[8].»
Les douze témoins spéciaux pour lui et pour son oeuvre furent envoyés
prêcher dans les différentes villes des Juifs. Lors de cette mission, leur
première, ils reçurent l'instruction de limiter leur ministère à la maison
d'Israël et le contenu de leur message était: «Le royaume des cieux est
proche[9].» Il leur fut dit d'utiliser le pouvoir dont ils avaient été
investis par ordination pour prêcher, pour guérir les malades, même pour
ressusciter les morts et pour soumettre les mauvais esprits; l'exhortation
du Maître était la suivante: «Vous avez reçu gratuitement, donnez
gratuitement.» Ils devaient voyager sans argent ni provisions, se fiant à
un pouvoir supérieur pour subvenir à leurs besoins par l'intermédiaire de
ceux à qui ils offriraient le message de vérité. Ils furent avertis des
difficultés possibles qui les attendaient et de la persécution qui serait
certainement leur lot tôt ou tard.
14. Plus tard, le Christ
appela d'autres personnes à l’œuvre du ministère et les envoya par deux
pour le précéder et préparer les gens à sa venue. C'est ainsi que nous
entendons parler des «soixante-dix» qui avaient reçu des instructions
formulées d'une manière pratiquement identique à celle de la commission
apostolique[10]. Le succès qui accompagna leur ministère montre bien
l'autorité et le pouvoir qui présidaient à leur investiture et que ce
n'était pas seulement une question de forme; car à leur retour ils
rendirent triomphalement compte: «Seigneur, les démons mêmes nous sont
soumis en ton nom[11].»
15. La commission spécifique donnée aux apôtres au moment de leur
ordination fut mise en valeur par la suite. Ils firent l'expérience de
l'ordonnance particulièrement solennelle que l'on nomme le lavement des
pieds, si nécessaire qu'en réponse à l'objection de Pierre, le Seigneur
dit: «Si je ne te lave, tu n'auras point de part avec moi[12].» Et aux
onze qui restèrent fidèles, le Seigneur ressuscité donna ses instructions
de séparation, - immédiatement avant l'ascension: «Allez par tout le
monde, et prêchez la bonne nouvelle à toute la création.» Après le départ
de notre Seigneur, les apôtres s'engagèrent dans le ministère avec
énergie: «Et ils s'en allèrent prêcher partout. Le Seigneur travaillait
avec eux, et confirmait la parole par les miracles qui
l'accompagnaient[13].»
16. Ces Ecritures montrent l'autorité des apôtres pour l'administration
des affaires de l'Eglise après l'ascension du Messie ressuscité. De
l'exhortation spéciale du Sauveur sur les rives de la mer de Tibériade[14]
découle le fait que Pierre, le doyen du conseil des apôtres, reçut le
poste de président.
17. Les Ecritures prouvent abondamment que les apôtres comprirent que,
bien que le Maître fût parti, il leur avait laissé l'autorité et le
commandement d'édifier l'Eglise comme une organisation établie. Ils
s'occupèrent d'abord de remplir le poste vacant dans le conseil président
ou «collège» de douze, vacance due à l'apostasie et à la mort de Judas
Iscariot. La façon de procéder à cet acte officiel est instructive.
L'installation d'un nouvel apôtre n'était pas déterminée par les onze
seulement; nous lisons que les disciples (ou membres de l'Eglise) furent
rassemblés, et ils étaient environ cent vingt. Pierre leur présenta
l'affaire à résoudre et mit l'accent sur le fait que l'homme à choisir
devait être une personne ayant une connaissance et un témoignage
personnels du ministère du Seigneur, étant ainsi qualifié pour parler en
tant que témoin spécial du Christ, qualification qui est un caractère
distinctif de l'apostolat. «Il faut donc», dit Pierre, que, parmi ceux qui
nous ont accompagnés tout le temps que le Seigneur Jésus a vécu avec nous,
depuis le baptême de Jean jusqu'au jour où il a été enlevé du milieu de
nous, il y en ait un qui nous soit associé comme témoin de sa
résurrection[15].» Il nous est dit par la suite que deux hommes furent
nommés et que le pouvoir divin fut invoqué pour montrer si l'un ou l'autre
et, dans ce cas, lequel, était le choix du Seigneur. Puis on tira au sort
«et le sort tomba sur Matthias, qui fut associé aux onze apôtres».
18. Il est évident que les apôtres considéraient que leur conseil, ou
collège, était définitivement organisé avec un nombre limite de douze
membres; et que l’œuvre de l'Eglise demandait que l'organisation fût
complétée. Néanmoins, nous ne retrouvons pas trace écrite d'autres
personnes choisies par la suite pour remplir les vacances dans le conseil
des douze. Paul qui, avant sa conversion, était connu comme Saul de Tarse,
reçut une manifestation spéciale dans laquelle il entendit la voix du
Seigneur ressuscité qui déclarait- «Je suis Jésus que tu persécutes» [16],
et devint ainsi un témoin spécial du Seigneur Jésus et fut à ce titre en
fait un apôtre, bien que nous n'ayons pas d'Ecriture qui dise qu'il fut
jamais appelé membre du conseil des douze. Pour montrer l'importance de
l'ordination à un office sous les mains d'autorités dûment appelées, nous
avons l'exemple de l'ordination de Paul. Bien que sa conversion se fit par
l'opération de Jésus ressuscité, bien qu'il eût été l'objet d'une
manifestation spéciale de pouvoir divin dans le rétablissement de sa vue,
il dut néanmoins être baptisé; et, il fut chargé par la suite du travail
du ministère par l'imposition des mains selon l'autorité[17].
19. Un autre exemple
d'action officielle pour choisir et mettre à part des hommes à des offices
spéciaux dans l'Eglise apparut peu après l'ordination de Matthias. Il
apparaît qu'un trait de l'organisation de l'Eglise dans les premiers jours
des apôtres fut une mise en commun des choses matérielles, la distribution
se faisant selon les besoins. A mesure que les membres devenaient plus
nombreux, on trouva irréalisable que les apôtres consacrent l'attention et
le temps nécessaires à ces sujets temporels; ils firent donc appel aux
membres pour qu'ils choisissent sept hommes honnêtes que les apôtres
chargeraient de s'occuper spécialement de ces affaires. Ces hommes furent
mis à part par la prière et par l'imposition des mains[18]. L'exemple est
instructif en ceci qu'il montre que les apôtres ont compris qu'ils
possédaient l'autorité de diriger dans les affaires de l'Eglise, et qu'ils
observaient très fidèlement le principe du consentement commun dans
l'administration de leur office élevé. Ils exerçaient leur pouvoir
sacerdotal dans un esprit d'amour et en prenant dûment en considération
les droits des gens sur lesquels ils présidaient de par leur position.
20. Sous l'administration des apôtres et d'autres personnes qui
travaillaient selon leurs directives dans des postes de moindre autorité,
l'Eglise se développa en nombre et en influence[19]. Pendant dix à douze
ans après l'ascension du Christ, Jérusalem resta le siège de l'Eglise,
mais des branches ou, comme on les désigne dans les annales écrites,
diverses «églises», furent établies dans les provinces éloignées. A mesure
que l'on organisa des branches de ce genre, des évêques, des diacres et
d'autres officiers furent choisis et sans aucun doute ordonnés par
autorité à remplir leur ministère dans des affaires locales[20].
21. Si l'on en juge par la croissance rapide de l'Eglise dans les premiers
temps apostoliques, il est évident que la charge confiée aux apôtres par
le Seigneur Jésus qui leur dit de répandre l'Evangile fut exécutée avec
rapidité et avec zèle[21].
Ecrivant vers les années 64 ap. J.-C., environ trente ans après
l'ascension, Paul déclara que l'Evangile avait déjà été porté à toutes les
nations, «prêché à toute créature sous le ciel» [22], expression par
laquelle l'apôtre veut sans doute dire que le message de l'Evangile avait
été proclamé si généralement que tous ceux qui le voulaient pouvaient
l'entendre.
22. Les détails sur l'organisation de l'Eglise du temps des apôtres ne
sont pas donnés en abondance. Comme on l'a déjà montré, l'autorité
présidente était détenue par les douze apôtres; de plus, l'appel spécial
des soixante-dix reçut une certaine attention; mais en outre, il y avait
des évangélistes, des pasteurs et des docteurs [23] et, en plus, des
souverains sacrificateurs [24], des anciens [25], des évêques [26], etc.
La raison d'être de ces divers offices est expliquée par Paul: «pour le
perfectionnement des saints en vue de l’œuvre du ministère et de
l'édification du corps du Christ» [27]. L'Eglise avec sa hiérarchie
d'offices et ses dons spirituels a été justement comparée à un corps
parfait avec ses divers organes et ses membres individuels, chacun étant
nécessaire au bien-être de tous, cependant aucun n'étant indépendant du
reste. Il en est de l'Eglise du Christ comme de l'organisme humain:
personne ne peut dire à juste titre: «Je n'ai pas besoin de vous [28].»
23. Nous avons vu, avec les
Ecritures juives à l'appui, comment l'Eglise fut établie et rendue forte
en Asie et en Europe au midi des temps et immédiatement après. Les
Ecritures citées sont telles qu'elles s'adressent à tous les chrétiens
honnêtes; l'autorité est celle du Nouveau Testament. Nous devons
maintenant considérer l'établissement de l'Eglise parmi ceux qui
constituaient une autre partie de la maison d'Israël, un peuple qui
habitait ce que l'on appelle maintenant le continent américain.
24. Au profit de ceux qui ne sont pas familiarisés avec les Ecritures
néphites, publiées au monde sous la forme du Livre de Mormon, un bref
résumé historique est présenté ici [29]. En 600 av. J.-C., pendant le
règne du roi Sédécias, une petite colonie quitta Jérusalem sous la
direction d'un prophète inspiré du nom de Léhi. Ces gens furent conduits
sur les rives de la mer d'Arabie avec l'aide divine; ils y construisirent
un vaisseau dans lequel ils traversèrent les grandes eaux en direction de
la côte occidentale de l'Amérique du Sud. Ils abordèrent en 590 av. J.-C.
Le peuple ne tarda pas à se diviser en deux parties, dirigées
respectivement par Néphi et par Larnan, des fils de Léhi. Ces factions
devinrent les nations adverses connues sous les noms de Néphites et
Lamanites dans l'histoire. La première nation se développa tandis que la
deuxième rétrograda en ce qui concerne les arts de la civilisation. Les
prophètes néphites prédirent la venue sur terre du Messie, de même que son
ministère, sa crucifixion et sa résurrection.
25. Les annales rapportent que le Messie apparut en personne parmi les
Néphites sur le continent américain. Ce fut après son ascension du mont
des Oliviers. Une préfiguration de ce grand événement fut donnée par le
Christ dans une déclaration qu'il fit pendant qu'il vivait sur terre. Se
comparant au bon berger qui donne sa vie pour les brebis, il dit: «J'ai
encore d'autres brebis, qui ne sont pas de cette bergerie; celles-là, il
faut que je les amène; elles entendront ma voix, et il y aura un seul
troupeau, un seul berger [30].»
26. Selon les annales des Néphites, certains signes prédits de la mort du
Sauveur s'étaient accomplis. Des tremblements de terre destructeurs et
d'autres terribles commotions de la nature avaient eu lieu dans l'ouest
(le continent américain –N. d.T.), tandis que la tragédie suprême se
déroulait sur le Calvaire. Les habitants du pays d'Abondance, comprenant
la partie septentrionale de l'Amérique du Sud, s'étonnaient encore des
grandes commotions qui les avaient terrifiés quelques semaines auparavant
et, étant un jour rassemblés pour discuter à ce sujet, ils entendirent une
voix qui semblait venir des cieux disant: «Voici mon Fils bien-aimé, en
qui je me complais, en qui j'ai glorifié mon nom - écoutez-le [31].»
Levant les yeux, ils contemplèrent un homme qui descendait. Il était vêtu
d'une robe blanche et, quand il atteignit la terre, il dit: «Voici, je
suis Jésus-Christ, de qui les prophètes ont témoigné qu'il viendrait au
monde . . . Levez-vous et venez à moi afin de mettre les mains dans mon
côté, et aussi toucher la marque des clous dans mes mains et mes pieds,
afin que vous sachiez que je suis le Dieu d'Israël et le Dieu de toute la
terre, et que j'ai été mis à mort pour les péchés du monde [32].»
27. S'étant ainsi déclaré, le Christ se mit à enseigner le plan de
l'Evangile au peuple comme il l'avait prêché et la constitution de
l'Eglise comme il l'avait établie dans l'est (la Palestine - N. d.T.). Il
visita le peuple néphite encore plusieurs fois par la suite, lui enseigna
beaucoup des préceptes donnés préalablement aux Juifs; souligna la
doctrine du baptême et d'autres ordonnances essentielles au salut;
institua la Sainte-Cène en souvenir de sa mort expiatoire; choisit douze
apôtres et les chargea d'une mission; leur conféra l'autorité de l'Eglise;
expliqua l'importance de désigner l'organisation par son nom correct:
l'Eglise du Christ; et annonça l'accomplissement de la loi de Moïse et le
fait qu'elle était dorénavant remplacée par l'Evangile qui se
matérialisait dans l'Eglise telle qu'elle était établie par lui. Pour ce
qui est le plan de l'organisation, la doctrine et le précepte et les
ordonnances prescrites, l'Eglise du Christ à l'ouest (continent américain
– N. d.T.) était le pendant de l'Eglise en Palestine.
28. C'est ainsi qu'au midi des temps l'Eglise de Dieu fut fondée des deux
côtés de la terre. Dans sa simplicité et sa beauté originelles se
manifeste la majesté d'une institution divine. C'est maintenant notre
triste devoir de considérer le déclin du pouvoir spirituel dans l'Eglise,
et finalement l'apostasie de l'Eglise elle-même.
* * * * * * *
[1] Voir note 1 à la fin du chapitre.
[2] Voir note 2 à la fin du chapitre.
[3] Galates 3:24.
[4] Matt. 5:21-44; lire le chapitre entier.
[5] Matthieu 5:17-18.
[6] Matthieu 5:20.
[7] Marc 3:14.
[8] Luc 6:13; comparer avec Matthieu 10: 1-2.
[9] Matthieu 10:7; étudier le chapitre entier.
[10] Luc 10; comparer avec Matthieu 10.
[11] Luc 10: 17.
[12] Jean 13:4-9.
[13] Marc 16:14-20; comparer avec Matthieu 28:19-20.
[14] Jean 21:15-17.
[15] Actes 1:21-22; lire les versets 15 à 26 inclus.
[16] Actes 9:5; lire les versets 1 à 22.
[17] Actes 13:1-3.
[18] Actes 6:1-7.
[19] Voir note 3 à la fin du chapitre.
[20] Voir Philippiens 1:1; comparer avec 1 Timothée 3:1-2, 8, 10.
[21] Actes 6:7; 12:24; 19:20.
[22] Colossiens 1:23; comparer avec le verset 6.
[23] Ephésiens 4: 11.
[24] Hébreux 5: 1-5.
[25] Actes 14:23; 15: 6; 1 Pierre 5: 1.
[26] 1 Timothée 3: 1.
[27] Ephésiens 4:12; lire aussi les versets 13-16.
[28] Voir 1 Corinthiens 12. Voir note 4 à la fin du chapitre.
[29] Voir note 5, à la fin du chapitre.
[30] Jean 10:16; lire les versets 1 à 18 inclus. Comparer avec 3 Néphi
15:21.
[31] 3 Néphi 11:7; lire le chapitre entier.
[32] Versets 10 et 14.
NOTES
1. Conditions prévalant au début de l'ère chrétienne. «A la naissance du
Christ, cette étonnante fédération de la terre en une grande monarchie
avait finalement été atteinte. Auguste, à Rome, était le seul pouvoir vers
lequel se tournaient toutes les nations ... Aucun prince, aucun roi, aucun
potentat, quel que fût son nom, ne pouvait briser le calme qu'assurait une
telle domination universelle. C'est à cette époque unique que naquit
Jésus-Christ. Toute la terre se trouvait dans une paix profonde. Les pays
étaient ouverts au message de miséricorde et d'amour qu'il venait
annoncer. Lors de la naissance du Christ, les conditions sociales et
morales du monde entier étaient aussi idéales pour son avènement que les
conditions politiques. Le prix du pouvoir universel, pour lequel on avait
combattu pendant soixante ans de complots et de guerres civiles
destructives, avait été finalement gagné par Auguste. Sylla et Marius,
Pompée et César, avaient fait s'affronter leurs légions, aussi bien en
Italie que dans les provinces, et avaient abreuvé la terre de sang.
Auguste lui-même n'était monté sur le trône qu'après treize ans de guerres
impliquant des régions séparées les unes des autres. Le monde était épuisé
par l'agonie prolongée d'une telle lutte; il aspi rait à se reposer»
(Cunningham Geikie, The Life and Works of Christ, New York, 1894, volume
1, p. 25). « A la naissance du Christ l'empire romain était moins agité
par des guerres et des troubles qu'il ne l'avait été pendant de nombreuses
années auparavant. Car bien que je ne puisse me ranger à l'opinion de ceux
qui, suivant ce qu'en dit Orose, soutiennent que le f temple de Janus fut
alors fermé et que les guerres et les discordes cessèrent complètement
dans le monde entier, il est cependant certain que la période à laquelle
notre Sauveur descendit sur terre peut être appelée à juste titre d'époque
pacifique», si nous la comparons aux temps qui précédèrent. De fait, la
tranquillité qui régnait alors fut nécessaire pour permettre aux ministres
du Christ d'accomplir avec succès leur mission sublime auprès de l'espèce
humaine» (Mosheim, EcclesiasticalHistory, Cent. 1, part. 1, eh. 1:4).
2. Le paganisme au début de l'ère chrétienne. «Chaque nation avait alors
ses propres dieux sur lesquels présidait un dieu d'une qualité supérieure
au reste; cette divinité suprême étant cependant elle-même sous la
domination rigide des faits ou de ce que les philosophes appelaient de
conditionnement externe». Les dieux de l'est (Orient - N.d.T.) étaient
différents de ceux des Gaulois, des Germains et des autres nations
nordiques. Les divinités grecques différaient largement de celles des
Egyptiens qui déifiaient les plantes, les animaux et une grande variété
des produits de la nature et des arts. Chaque peuple avait aussi sa propre
manière d'adorer et d'apaiser ses divinités respectives, entièrement
différente des rites sacrés d'autres pays . . . Une chose qui, à première
vue, pareil: digne d'être remarquée, est que cette variété de religions et
de dieux n'entraînait ni guerres ni dissensions parmi les différentes
nations, à l'exception des Egyptiens. Et peut-être même n'est-il pas
nécessaire de les mettre à part puisque les guerres qu'ils entreprenaient
pour leurs dieux ne peuvent, à proprement parler, être considérées comme
étant de nature religieuse. Les nations supportaient que leurs voisins
suivent leur propre méthode de culte, adorent leurs propres dieux,
jouissent de leurs propres rites et cérémonies. Elles n'éprouvaient aucun
signe de mécontentement devant la diversité de sentiments en affaires
religieuses. Cependant, il n'y a rien de très étonnant dans cet esprit de
tolérance mutuelle si nous considérons que tous regardaient le monde comme
un grand empire divisé en un nombre de provinces, sur chacune desquelles
présidait une certaine classe de divinités; de sorte qu'aucune nation ne
pouvait considérer avec mépris les dieux des autres ni forcer des
étrangers à rendre hommage aux siens. Us Romains pratiquaient cette
tolérance avec la plus grande libéralité. Car, bien qu'ils n'autorisaient
pas de changements dans les religions publiquement établies dans l'empire,
ni que de nouvelles formes de culte fussent introduites ouvertement, ils
accordaient cependant à leurs citoyens la liberté totale d'observer en
privé les rites sacrés des autres nations et d'honorer des divinités
étrangères (dont le culte ne contenait rien qui aille à l'encontre des
intérêts et des lois de la république) avec des fêtes, des temples, des
bois sacrés et d'autres marques d'hommage et de respect du même genre»
(Mosheim, Ecclesiastical History, Cent. 1, part. 1, ch. 1: 7-8).
3. Rapide croissance de l’Eglise. Eusèbe, qui écrivit au début du
quatrième siècle, dit à propos de la première décennie qui suivit
l'ascension du Sauveur: «Ce fut ainsi, grâce sans doute à une puissance et
à une assistance céleste, que la doctrine du salut, telle un rayon de
soleil, éclaira soudainement toute la terre. Aussitôt, suivant les
Ecritures divines, sur toute la terre retentit la voix de ses divins
évangélistes et apôtres, et jusqu'aux extrémités de l'univers leurs
paroles. Et vraiment dans chaque ville, dans chaque bourg, comme dans une
aire pleine, se constituaient en masse des Eglises fortes de milliers
d'hommes et remplies de fidèles. Ceux qui, d'après la tradition ancestrale
de l'antique erreur, avaient été retenus dans la vieille maladie d'une
superstition idolâtrique, ont été par la puissance du Christ, grâce à
l'enseignement en même temps qu'aux miracles de ses disciples, délivrés en
quelque sorte de maîtres cruels et ont trouvé la libération de très
lourdes chaînes» (Eusèbe, Histoire ecclésiastique, Livre 11, chapitre 3).
4. Intervention divine dans
le ministère apostolique. «Si nous examinons le progrès rapide du
christianisme parmi les nations des Gentils et les pauvres et faibles
instruments par lesquels cet événement grand et étonnant fut immédiatement
accompli, nous recourons naturellement à une main toute puissante et
invisible comme sa vraie cause appropriée. Car, à moins que nous ne
voyions là une intervention divine, comment fut-il possible que des
hommes, dénués de tout appui humain, sans crédit ni richesse, sans
culture, sans éloquence, pussent, en si peu de temps, persuader une partie
considérable de l'humanité d'abandonner la religion de leurs ancêtres?
Comment une poignée d'apôtres, qui en tant que pêcheurs ou publicains
devaient s'attirer le mépris de leur propre nation, et en tant que Juifs
devaient être odieux aux yeux de toutes les autres, purent-ils inciter les
érudits et les puissants aussi bien que les simples et les gens de basse
condition, à abandonner leurs préjugés favoris et à embrasser une nouvelle
religion qui était l'ennemie de leurs passions corrompues? Il y avait
indubitablement des marques d'un pouvoir céleste qui accompagnaient le
ministère. Il y avait dans leur langage même une énergie incroyable, un
pouvoir étonnant d'éclairer l'entendement et de convaincre les cœurs»
(Mosheim, EcclesiasticalHistory, cent. 1, part. 1, ch. 4:8).
5. Néphites et Lamanites. Les ancêtres de la nation néphite «furent
emmenés de Jérusalem, vers l'an 600 av. J.-C. par Léhi, prophète juif de
la tribu de Manassé. Sa famille immédiate, à l'époque de leur départ de
Jérusalem, comprenait sa femme Sariah, et leurs fils Laman, Lémuel, Sam et
Néphi; à un stade ultérieur de leur histoire des filles sont mentionnées,
mais on ne nous dit pas s'il y en a parmi elles qui naquirent avant
l'exode de la famille. Outre sa propre maison, la colonie de Léhi
comprenait Zoram et Ismaël, ce dernier étant un Israélite de la tribu
d'Ephraïm. Ismaël et sa famille se joignirent au groupe de Léhi dans le
désert, et ses descendants furent comptés avec la nation dont nous
parlons. Il apparaît que le groupe voyagea plus ou moins vers le sud-est,
en restant à proximité du rivage de la mer Rouge; ensuite, changeant leur
orientation vers l'est, ils traversèrent la péninsule arabique et là, sur
les rives de la mer d'Oman, construisirent un navire, qu'ils chargèrent de
provisions et dans lequel ils s'en remirent à la providence divine sur les
flots. On croit que leur navigation les emmena vers l'est, à travers
l'océan Indien, puis à travers le Pacifique jusqu'à la côte occidentale de
l'Amérique, où ils débarquèrent vers 590 av. J. -C.... Le peuple s'établit
sur ce qui était pour lui la terre promise; de nombreux enfants naquirent
et, après quelques générations, le pays fut occupé par une postérité
nombreuse. Après la mort de Léhi, le peuple se divisa, une partie
reconnaissant comme chef Néphi, qui avait été dûment désigné à l'office de
prophète, tandis que l'autre partie proclamait Laman, le fils aîné de
Léhi, comme son chef. Dès lors, les deux groupes de ce peuple maintenant
divisé prirent respectivement le nom de Néphites et de Lamanites. Par
intervalles, ils observaient entre eux un semblant de relations amicales;
mais généralement, ils furent ennemis, les Lamanites manifestant une
hostilité et une haine implacables envers leurs frères néphites. Les
Néphites se développèrent dans les arts de la civilisation, bâtirent de
grandes villes et des royaumes prospères. Cependant, ils tombaient souvent
en transgression, et le Seigneur les châtiait en permettant à leurs
ennemis héréditaires de les vaincre. On croit traditionnellement qu'ils se
répandirent vers le nord pour occuper un territoire considérable en
Amérique Centrale et s'étendirent ensuite vers l'est et vers le nord sur
une partie de ce qui est maintenant les Etats-Unis d'Amérique. Les
Lamanites, tout en croissant en nombre, subirent la malédiction du
courroux divin; ils devinrent sombres de peau et enténébrés d'esprit,
oublièrent le Dieu de leurs pères, menèrent une vie nomade sauvage et
dégénérèrent pour en arriver à l'état déchu dans lequel les Indiens
américains -leurs descendants en ligne directe - furent trouvés par ceux
qui redécouvrirent le continent occidental. beaucoup plus tard» (du même
auteur, Articles de Foi, 320, 321, 322).
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