CHAPITRE 17 : LA DISPERSION D'ISRAËL
ARTICLE 10. - Nous croyons au rassemblement littéral d'Israël et à la
restauration des Dix Tribus...
Israël. - Combinaison de nom et de titre, Israël dans le sens originel du
mot, exprimait la pensée de quelqu'un qui avait été heureux dans ses
supplications au Seigneur, « Soldat de Dieu », « celui qui lutte avec Dieu
», « prince de Dieu » sont parmi les équivalents français communs. Le nom
paraît pour la première fois dans l'Ecriture Sainte comme titre conféré à
Jacob, lorsque ce dernier réussit, par sa détermination, à s'assurer une
bénédiction de son visiteur céleste dans le désert. Il reçut cette
promesse: « Ton nom ne sera plus Jacob, mais tu seras appelé Israël; car
tu as lutté avec Dieu et avec des hommes et tu as été vainqueur ». [1]
Nous lisons plus loin: « Dieu apparut encore à Jacob, après son retour de
Paddan-Aram, et il le bénit. Dieu lui dit: Ton nom est Jacob, tu ne seras
plus appelé Jacob, mais ton nom sera Israël. Et il lui donna le nom
d'Israël ». [2]
Mais le nom-titre ainsi accordé dans des circonstances solennelles, prit,
dans la suite, un sens plus large et s'appliqua à la postérité d'Abraham,
par Isaac et Jacob, [3] avec chacun desquels le Seigneur avait fait
l'alliance que, par sa postérité, toutes les nations de la terre seraient
bénies. [4] Le nom du patriarche se généralisa ainsi pour désigner un
peuple comprenant les douze tribus qui portèrent avec fierté le nom
d'Israélites ou enfants d'Israël. C'est de ce nom qu'on les appelait
collectivement au cours des jours sombres de leur captivité en Egypte, [5]
pendant les quarante années d'exode et de voyage vers la terre promise,
[6] pendant toute leur existence de peuple puissant sous le gouvernement
des Juges et de nation unie au cours des cent vingt années des règnes
successifs de Saül, David et Salomon. [8]
A la mort de Salomon, probablement vers 975 av. J.-C., le royaume fut
divisé. La tribu de Juda, et une partie de la tribu de Benjamin
reconnurent Roboam, fils et successeur de Salomon, comme leur roi; tandis
que le reste du peuple, ordinairement appelé les « Dix Tribus », se
révolta contre Roboam, rompant ainsi sa fidélité à la maison de David et
choisit Jéroboam comme roi. Les Dix Tribus, sous Jéroboam, conservèrent le
nom de Royaume d'Israël bien que ce royaume fût aussi appelé d'Ephraïm,
[9] du nom de sa tribu la plus puissante. Roboam et ses sujets prirent le
nom de Royaume de Juda. Pendant deux cent cinquante ans environ, les deux
royaumes maintinrent une existence séparée; après quoi, vers 721 av.
J.-C., le royaume d'Israël perdit son indépendance et le peuple fut emmené
en captivité par les Assyriens, sous Salmanazar. Le Royaume de Juda fut
encore reconnu pendant près d'un siècle, puis Nebucadnetsar y mit fin en
inaugurant la captivité de Babylone. Pendant soixante-dix ans, le peuple
demeura assujetti, selon ce que Jérémie avait prophétisé; [10] alors le
Seigneur adoucit le cœur des rois régnants, et l’œuvre d'émancipation fut
commencée par Cyrus le Perse. Le peuple hébreu reçut la permission de
retourner en Judée et de rebâtir le Temple de Jérusalem.
Le peuple appelé communément, à l'époque, Hébreux ou Juifs, [11] conserva
le nom d'Israël comme nom de sa nation, bien qu'il fût à peine composé de
deux tribus complètes sur les douze. Le nom d'Israël, conservé ainsi avec
une louable fierté par le reste d'une nation autrefois puissante, fut
employé dans un sens figuré pour désigner le peuple de l'alliance qui
constituait l'Eglise du Christ; [11] et il est encore employé dans ce
sens. Les Israélites, à l'époque où ils apparaissent pour la première fois
dans l'histoire, formaient un peuple uni. Afin que nous puissions savoir
la portée réelle du rassemblement mentionné dans le dixième Article de
Foi, il est nécessaire que nous considérions tout d'abord la dispersion
qu'a subie le peuple d'Israël. Les Ecritures abondent en prédictions
concernant ces dispersions; l'Ecriture et l'histoire séculière
s'accordent, en général en témoignage de l'accomplissement de ces
prophéties.
La dispersion d'Israël prédite. - Il a été dit que « si l'histoire
complète de la maison d'Israël était écrite, elle serait l'histoire des
histoires, la clef de l'histoire du monde pendant les vingt derniers
siècles ». [12] Le fait qui justifie une déclaration aussi générale est
que les Israélites ont été si complètement dispersés parmi les nations,
qu'ils représentent un facteur extrêmement important dans le développement
et la grandeur de presque chaque groupe important de la famille humaine.
Cette oeuvre de dispersion fut réalisée en de nombreux stades et s'étendit
sur des millénaires. Elle fut prévue par les anciens prophètes; et les
chefs spirituels de toutes les générations qui précédèrent l'ère
messianique et qui la suivirent immédiatement, prédirent que la dispersion
du peuple serait le résultat prévu de son iniquité grandissante ou bien
lui rappelèrent les anciennes prophéties sur la dispersion, déjà
accomplies à l'époque et prédirent une dispersion, plus complète encore,
de la nation.
Les prophéties bibliques. - Au cours de l'exode d'Egypte, où les
Israélites avaient vécu dans l’esclavage, à la terre de Canaan, la terre
de leur héritage promis, le Seigneur leur donna de nombreuses lois et
établit des ordonnances pour les gouverner dans les affaires temporelles
et spirituelles. Il leur fit contempler des bénédictions que
l'intelligence humaine seule ne peut concevoir, les leur promettant à
condition qu'ils obéissent aux lois de la justice et lui fussent fidèles,
à lui, leur Dieu et Roi. Par contraste avec cette description de
prospérité bénie, le Seigneur dépeignit, avec une précision terrible et
des détails, saisissants, l'état de misère abjecte et de souffrances
atroces dans lequel ils tomberaient sûrement s'ils quittaient les sentiers
de la droiture et adoptaient les pratiques pécheresses des peuples païens
avec lesquels ils seraient en contact. Les parties les plus sombres de ce
tableau étaient celles qui décrivaient le démembrement futur de la nation
et la dispersion du peuple parmi ceux qui ne connaissaient point Dieu.
Cependant ces calamités extrêmes ne devaient s'abattre sur Israël que si
des châtiments moins sévères s'avéraient inefficaces. [13]
Lorsque le voyage qui suivit l'exode toucha à sa fin et que les Israélites
se préparèrent à traverser le Jourdain pour prendre possession de la terre
promise, lorsque Moïse, patriarche, législateur et prophète, fut sur le
point d'entreprendre l'ascension du Nébo, d'où il pourrait voir le beau
pays et où il devait être enlevé de la terre, il répéta l'histoire des
bénédictions et des malédictions inséparablement liées à l'alliance de
Dieu avec son peuple. « L'Eternel te fera battre par tes ennemis », leur
fut-il déclaré de nouveau, et, de plus: « L'Eternel te fera marcher, toi
et ton roi que tu auras établi sur toi, vers une nation que tu n'auras
point connue, ni toi ni tes pères. Et là tu serviras d'autres dieux, du
bois et de la pierre. Et tu seras un sujet d'étonnement, de sarcasme et de
raillerie parmi tous les peuples chez qui l'Eternel. te mènera ». Et, plus
loin encore: « L'Eternel fera partir de loin, des extrémités de la terre,
une nation qui fondra sur toi d'un vol d'aigle, une nation dont tu
n'entendras point la langue, une nation au visage farouche, et qui n'aura
ni respect pour le vieillard, ni pitié pour l'enfant... l'Eternel te
dispersera parmi tous les peuples, d'une extrémité de la terre à l'autre;
et là, tu serviras d'autres dieux que n'ont connus ni toi, ni tes pères,
du bois et de la pierre ». [14]
Au fur et à mesure que l'histoire sainte se déroule, il est clair
qu'Israël choisit le mauvais chemin, perdant ainsi tout droit aux
bénédictions et récoltant les malédictions. Lorsque le fils de Jéroboam
pécheur fut malade et presque mourant, le roi, troublé, envoya sa femme,
sous un déguisement, chez Achija, le prophète aveugle d'Israël, pour
l'interroger au sujet du sort de l'enfant. Le prophète, voyant au-delà de
la cécité physique de son grand âge, prédit la mort de l'enfant et le
renversement de la maison de Jéroboam, et il déclara en outre: « L'Eternel
frappera Israël, et il en sera de lui comme du roseau qui est agité dans
les eaux; il arrachera Israël de ce bon pays qu'il avait donné à leurs
pères, et il les dispersera de l'autre côté du fleuve, parce qu'ils se
sont fait des idoles, irritant l'Eternel. ». [15]
Par Esaïe, le Seigneur justifie les châtiments qu'il envoie sur le peuple,
comparant celui-ci à un vignoble sans profit qui, en dépit de la haie
protectrice et des soins les plus attentifs, n'a porté que des raisins
sauvages, et n'est bon qu'à être foulé aux pieds, « c'est pourquoi »,
continue-t-il, « mon peuple sera soudain emmené captif » [16] Et cependant
d'autres tribulations encore devaient suivre, contre lesquelles le peuple
fut mis en garde, de peur qu'il ne se détournât entièrement du, Dieu de
ses pères: « Que ferez-vous au jour du châtiment et de la ruine, qui, du
lointain fondra sur vous ? Vers qui fuirez-vous pour avoir du secours ? ».
[17] Le prophète attire l'attention de son peuple plongé dans l'erreur sur
le fait que ses tribulations viennent du Seigneur. « Qui a livré Jacob au
pillage et Israël aux pillards ? N'est-ce pas l'Eternel ? Nous avons péché
contre lui. Ils n'ont point voulu marcher dans ses voies et ils n'ont
point écouté sa loi. Aussi a-t-il versé sur Israël l'ardeur de sa colère
et la guerre ». [18]
Après la captivité d'Ephraïm ou royaume d'Israël, comme on l'appelait plus
particulièrement, le peuple de Juda eut néanmoins besoin d'autres
avertissements. Le sort de leurs frères leur fut rappelé par la bouche de
Jérémie ensuite, devant la persistance et l'accroissement de leurs
iniquités, le Seigneur dit: « Je vous rejetterai loin de ma face, comme
j'ai rejeté tous vos frères, toute la postérité d'Ephraïm ». [19] Leur
pays serait dévasté; toutes les villes de Juda seraient réduites en désert
[20] et le peuple serait dispersé parmi les royaumes de la terre. [21]
D'autres prophètes [22] révélèrent les paroles de colère et les
avertissements sévères du Seigneur; et voici le décret divin qui a été
rapporté: « Je secouerai la maison d'Israël parmi toutes les nations,
comme on secoue avec le crible ». [23] Et aussi: « Je les disperserai
parmi les peuples, et au loin ils se souviendront de moi » [24].'
Les prédictions du Livre de Mormon. - Les annales faites par la partie de
la maison d'Israël qui quitta Jérusalem pour aller s'établir sur le
continent américain vers600 av. J.-C., contiennent de nombreuses allusions
aux dispersions qui avaient déjà eu lieu et à la continuation de la
dispersion, qui était encore future pour les écrivains du Livre de Mormon.
Au cours du voyage vers la côte, alors qu'il était campé, avec sa
compagnie, dans la vallée de Lémuel, sur les bords de la mer Rouge, le
prophète Léhi annonça ce qu'il avait appris, par révélation, sur l'avenir
« que les Juifs tomberaient dans l'incrédulité », qu'ils crucifieraient le
Messie, et qu'ils seraient dispersés « sur toute la surface de la terre »
[25] Il compara Israël à un olivier, [26] dont les branches devaient être
rompues et dispersées; et il reconnut en l'exode de sa colonie et en leur
voyage au loin un incident dans le cours général de la dispersion. [27]
Néphi, fils de Léhi, contempla aussi en vision la dispersion du peuple de
l'alliance de Dieu, et il ajouta, sur ce point, son témoignage à celui du
prophète, son père. [28] Il vit aussi que la postérité de ses frères,
connue dans la suite sous le nom de Lamanites, serait châtiée pour son
incroyance, assujettie aux Gentils et dispersée devant ceux-ci. [29] Au
cours de cette vision prophétique des âges à venir, il vit aussi
l'apparition d'annales sacrées, autres que les annales connues alors «
pour convaincre les Gentils et le reste de la postérité de mes frères,
[30] ainsi que les Juifs qui étaient dispersés sur toute la surface de la
terre ». [31]
Après leur arrivée sur la terre promise, les colons conduits par Léhi
reçurent de nouveaux détails concernant la dispersion d'Israël. Le
prophète Zénos, [32] cité par Néphi, avait prédit l'incrédulité de la
maison d'Israël, à la suite de quoi le peuple serait « errant dans la
chair, ils périront, et deviendront un objet de moquerie et de dérision,
et seront parmi toutes les nations ». [33] Les frères de Néphi, sceptiques
vis-à-vis de ces enseignements, lui demandèrent si les choses dont il
parlait devaient se réaliser dans un sens spirituel ou plus littéralement;
et il leur fut dit: « la maison d'Israël sera, tôt ou tard, dispersée sur
toute la surface de la terre, parmi toutes les nations »; et, plus loin,
faisant allusion aux dispersions déjà accomplies, que « la plus grande
partie de toutes les tribus a été emmenée et elles sont dispersées çà et
là sur les îles de la mer » [34]; et puis, prédisant d'autres divisions,
d'autres séparations encore, Néphi ajoute qu'il sera donné aux Gentils
pouvoir sur le peuple d'Israël, et que par eux « notre postérité sera
dispersée ». [35] Bien qu'un océan séparât leur pays natal du pays où ils
avaient été miraculeusement conduits, les enfants de Léhi apprirent par
révélation de la bouche de Jacob, le frère de Néphi, la captivité des
Juifs qu'ils avaient laissés à Jérusalem. [36] Néphi leur fit connaître
ensuite les malheurs qui menaçaient leur ville natale et la dispersion
ultérieure de leur famille, les Juifs. [37]
Les Lamanites, partie de la postérité de Léhi, devaient aussi être séparés
et dispersés, comme l'attestent les paroles de Samuel, prophète de ce
peuple plongé dans les ténèbres. [38] Néphi, le troisième prophète de ce
nom et petit-fils d'Hélaman, souligne la dispersion de son peuple en
affirmant que les emplacements de ses demeures « deviendront désolés.»
[39] Jésus lui-même, après sa résurrection, alors qu'il visitait cette
partie de son troupeau qui se trouvait dans l'hémisphère occidental,
mentionne solennellement « le reste de leur postérité, qui sera dispersé
sur la surface de la terre, à cause de son incrédulité ». [40]
D'après ces citations, il est clair que ceux qui suivirent Léhi, ce qui
comprend sa propre famille, Zoram [41] et Ismaël et sa famille,[42] dont
sortirent ces peuples puissants, les Néphites dont la nation fut
exterminée à cause de leur infidélité et les Lamanites qui, connus
maintenant sous le nom d'Indiens américains, ont continué leur existence
troublée jusqu'à ce jour, tous ceux qui suivirent Léhi apprirent, par
révélation, la dispersion de leurs anciens compatriotes dans le pays de
Palestine et leur propre condamnation certaine s'ils continuaient à
désobéir aux lois de Dieu. Nous avons dit que le transfert de Léhi et de
sa colonie du Proche-Orient au continent américain était lui-même une
partie de la dispersion générale. Il faut aussi se rappeler qu'une autre
colonie juive vint s'établir sur le continent américain, son départ se
situant environ onze ans après le départ de Léhi. Cette deuxième compagnie
était conduite par Mulek, un des fils de Sédécias qui fut le dernier roi
de Juda; ils quittèrent Jérusalem immédiatement après la prise de la ville
par Nebucadnetsar, vers 588 av. J-C. [43]
L'accomplissement de ces prophéties. - Les Ecritures sacrées aussi bien
que les autres écrits qui ne sont pas considérés comme relevant de
l'inspiration directe, rapportent l'accomplissement littéral de la
prophétie par la ruine de la maison d'Israël. La division de la nation en
deux royaumes séparés, Juda et Israël, mena à leur chute à tous deux. Au
fur et à mesure que le peuple s'enfonçait plus profondément dans le mépris
des lois de ses pères, il fut permis à ses ennemis de triompher de lui.
Après quelques revers de moindre importance, le royaume d'Israël subit une
défaite écrasante de la part des Assyriens, en ou vers 721 av. J.-C. Nous
lisons que Salmanasar IV, roi d'Assyrie, assiégea Samarie, la troisième et
dernière capitale du royaume, [44] et que, après trois ans, la ville fut
prise par Sargon, successeur de Salmanasar. Le peuple d'Israël fut emmené
en captivité en Assyrie et réparti entre les villes des Mèdes[45].Ainsi
fut accomplie la terrible prédiction d'Achija à la femme de Jéroboam.
Israël fut dispersé au-delà du fleuve, [46] probablement l'Euphrate et, à
partir de cette époque, les Dix Tribus sont perdues pour l'histoire.
Le triste sort du royaume d'Israël eut comme effet d'éveiller
partiellement le peuple de Juda au sentiment de son propre destin
imminent. Ezéchias régna pendant vingt-neuf ans et se révéla une brillante
exception dans la lignée de mauvais rois qui l'avaient précédé. De lui il
est dit: « Il fit ce qui est droit aux yeux de l’Eternel ».[47] Au cours
de son règne, les Assyriens, sous la conduite de Sennachérib, envahirent
le pays; mais le Seigneur avait, en partie, rendu sa faveur au peuple et
Ezéchias détermina celui-ci à mettre sa foi en son Dieu, l'exhortant à
prendre courage et à ne pas craindre le roi assyrien et ses armées, « car
», dit ce juste prince, « avec nous il y a plus qu'avec lui. Avec lui est
un bras de chair, et avec nous l'Eternel, notre Dieu, qui nous aidera et
qui combattra pour nous ». [48] L'armée assyrienne fut miraculeusement
détruite. [49] Mais Ezéchias mourut et Manassé lui succéda sur le trône;
ce roi fit ce qui est mal aux yeux du Seigneur [50] et l'iniquité du
peuple continua pendant plus d'un demi-siècle, interrompue seulement par
les bonnes oeuvres d'un seul roi juste, Josias. [51]
Alors que Sédécias se trouvait sur le trône, Nebucadnetsar, roi de
Babylone, mit le siège devant Jérusalem, [52] prit la ville vers 588 av.
J.-C. et emmena peu après le peuple en captivité à Babylone, mettant ainsi
virtuellement fin au royaume de Juda. Le peuple fut dispersé dans les
villes d'Asie et gémit sous les vicissitudes de la captivité babylonienne
pendant près de soixante-dix ans, après quoi, Cyrus le Perse, qui avait
soumis l'empire de Babylone, lui donna la permission de retourner à
Jérusalem. Des multitudes de Juifs exilés profitèrent de cette occasion,
quoiqu'un grand nombre d'entre eux demeurèrent dans le pays de leur
captivité. Ceux qui retournèrent, firent tous leurs efforts pour se
rétablir à l'échelle de leur ancienne puissance, mais ils ne furent plus
jamais vraiment indépendants. Ils furent assaillis par la Syrie et par
l'Egypte et devinrent plus tard, tributaires de Rome, condition dans
laquelle ils se trouvaient à l'époque du ministère personnel de
Jésus-Christ parmi eux.
La prophétie de Jérémie n'était pas encore tout à fait accomplie, mais le
temps prouva que pas un seul mot de cette prophétie ne devait faillir: «
Tout Juda est emmené captif, il est emmené tout entier captif », [53]
telle était la prédiction. Un mouvement de rébellion parmi les Juifs donna
à leurs maîtres romains un semblant d'excuse pour les châtier, châtiment
dont le point culminant fut la destruction de Jérusalem, en 71 ap. J.-C.
La ville tomba après un siège de six mois, devant les armées romaines
conduites par Titus, fils de l'empereur Vespasien. Josèphe, le fameux
historien, à qui nous devons la plus grande partie de ce que nous savons
des détails de cette lutte, résidait lui-même en Galilée et fut emmené à
Rome parmi les captifs. D'après son récit, nous apprenons que plus d'un
million de Juifs perdirent la vie au cours de la famine qui accompagna le
siège; beaucoup plus encore furent vendus comme esclaves et innombrables
furent ceux qui durent s'exiler. La ville fut entièrement détruite et
l'emplacement sur lequel se tenait le Temple fut passé à la charrue par
les Romains qui essayaient de découvrir des trésors. C'est ainsi que les
paroles du Christ furent accomplies littéralement: « Je vous le dis en
vérité, il ne restera pas ici pierre sur pierre qui ne soit renversée ».
[54]
Depuis la destruction de Jérusalem et la désintégration finale de
l'autonomie juive, les Juifs ont erré sur toute la face de la terre,
peuple sans pays, nation sans foyer. La prophétie prononcée autrefois par
Amos s'est accomplie littéralement: Israël a bien été secoué parmi les
nations, « comme le grain est passé au crible ». [55] Qu'on se souvienne
cependant que cette terrible prédiction est accompagnée de la promesse: «
Sans qu'il tombe à terre un seul grain ».
Les Tribus Perdues. - Comme il a déjà été dit, lors de la séparation des
Israélites, après la mort de Salomon, dix tribus s'érigèrent en un royaume
indépendant. Ce royaume, le royaume d'Israël, prit fin, pour l'histoire,
par la captivité assyrienne en 721 av. J.-C. Le peuple fut emmené en
Assyrie, et disparut plus tard si complètement qu'il a été appelé les
Tribus Perdues. Il semble qu'elles quittèrent l'Assyrie et bien que nous
soyons sans renseignements précis quant à leur destination finale et leur
situation actuelle, il existe des preuves abondantes qu'elles se
dirigèrent vers le nord. [56] La parole du Seigneur, par Jérémie, promet
qu'elles seront ramenées « du pays du septentrion » [57] et une promesse
semblable a été faite par révélation divine dans la dispensation actuelle.
[58]
Dans les écrits d'Esdras, qui ne sont cependant pas inclus parmi les
livres canoniques de la Bible mais qui sont rangés parmi les apocryphes,
nous trouvons des passages qui ont trait à la migration des Dix Tribus
vers le nord, qu'elles entreprirent en suivant un plan pour échapper aux
païens en se rendant « dans un pays très éloigné où l'homme n'avait jamais
habité, afin de pouvoir y garder leurs statuts, qu'ils n'avaient jamais
gardés dans leur propre pays » [59] Le même écrivain nous apprend qu'ils
voyagèrent un an et demi dans le pays du nord, mais il nous donne des
preuves que beaucoup demeurèrent -dans le pays de leur captivité.
Lorsqu'il visita les Néphites sur le continent américain, le Christ
ressuscité mentionna de façon explicite les « autres tribus de la maison
d'Israël, que le Père a emmenées hors du pays »; [60] et il en parla
également lorsqu'il mentionna « d'autres brebis qui ne sont pas de ce
pays, ni du pays de Jérusalem, ni d'aucun pays aux alentours, où je suis
allé exercer mon ministère ». [61] Le Christ déclara que le Père lui avait
ordonné de se révéler à elles. Le séjour actuel des Tribus Perdues n'a pas
été révélé.
* * * * * * *
[1] Gen. 32: 28.
[2] Gen. 35 9, 10.
[3] 1 Sam. 25:1; Es. 48:1; Rom. 9:4; 11:1.
[4] Gen. 12: 1-3; 17: 1-8; 26: 3, 4; 28: 13-15.
[5] Voir Ex. 1:1, 7; 9:6, 7; 12:3, etc.
[6] Voir Ex. 12: 35, 40; 13:19; 15: 1; 35: 20, 30; Lév. 1: 2; Nom. 20: 1,
19, 24, etc.
[7] Voir passages en grand nombre dans les livres des Juges, 1 et 2 Sam.
et 1 et 2 Rois.
[8] Voir ES. 11: 13; 17: 3; Ez. 37: 16-22; Os. 4: 17.
[9] Voir Jér. 25:11, 12; 29: 10.
[10] Voir notes 1 et 2, à la fin du chapitre.
[11] Voir Rom. 9: 6; Gal. 6: 16.
[12]Compendium, p. 84 (Ed. 1914).
[13] Lire les prédictions fatidiques dans Lév. 26: 14-33.
[14] Deut. 28: 25-64.
[15] 1 Rois 14: 15.
[16] Es. 5: 1-7, 13.
[17] Es. 10: 3. 1 Es. 42: 24, 25.
[18] Jér. 7: 12,15.
[19] Voir Jér. 9: 11 10: 22.
[20] Voir Jér. 34: 17.
[21] Voir Ex. 20: 33; 22: 15; 34:6; 36: 19
[22] Amos 7: 17; 9: 9; Mich. 3: 12.
[23] 1 Amos 9: 1
[24] Zach. 10: 9.
[25] 1 Néphi 10: 11, 12.
[26] Voir 1 Néphi 15: 12, 13; Jacob, chaps. 5, 6.
[27] Voir 1 Néphi 10: 13.
[28] Voir 1 Néphi 14 .14.
[29] Voir 1 Néphi 13: 11-14.
[30] Partie de la postérité de Léhi, appelée plus tard Lamanites.
[31] 1 Néphi 13:39.
[32] Voir note 3, à la fin du chapitre.
[33] 1 Néphi 19: 12-14.
[34] 1 Néphi 22:1-4.
[35] 1 Néphi 22: 7.
[36] Voir 2 Néphi 6: 8.
[37] Voir 2 Néphi 25: 14, 15.
[38] Voir Hélaman 15: 12. [39] 3 Néphi 10: 7.
[40] 3 Néphi 16: 4.
[41] Voir 1 Néphi 4: 20-26, 30-37.
[42] Voir 1 Néphi 7: 2-6, 19, 22; 16: 17.
[43] Voir Omni 14-19; Mosiah 25: 2-4; Alma 22: 30-32; Hélaman 6: 10, 8:
21, p. 324.
[44] Sichem fut la première capitale du royaume d'Israël (1 Rois 12:25);
plus tard Thirtsa devint la capitale; elle était renommée pour sa beauté
(1 Rois 14: 17; 15: 33; 16: 8, 17, 23; C. des C. 6: 4); et enfin Samarie
(1 Rois 16: 24).
[45] Voir 2 Rois 17: 5, 6; 18: 9-11.
[46] Voir 1 Rois 14 - 15.
[47] 2 Rois 18:1-3; 2 Chron. 29: 1-11.
[48] 2 Chron. 32: 7,8.
[49] Voir 2 Chron. 32; 21, 22.
[50] Voir 2 Chron. 33: 1-10; 2 Rois 21:1-9.
[51] Voir 2 Rois 22: 1; 2 Chron. 34: 1.
[52] Voir 2 Rois 25: 1-3; 2 Chron. 36: 17.
[53] Jér. 13: 19.
[54] Matt. 24: 1, 2; voir aussi Luc 19: 44; voir Jesus the Christ, pp.
563, 586.
[55] Amos 9:9.
[56] Voir Jér. 3: 12.
[57] Jér. 16: 15; 23: 8; 31:8.
[58] Voir D. & A. 133: 26, 27.
[59] 2 Esdras 13; voir note 4, à la fin du chapitre.
[60] 3 Néphi 15:15.
[61] 3 Néphi 16: 1.
NOTES DU CHAPITRE
1. Hébreux. - Sem est appelé « le père de tous les enfants d'Héber »,
comme Cham est appelé père de Canaan. Les Hébreux et les Canaanites
étaient souvent amenés en contact et révélaient les caractéristiques
respectives des Sémites et des Chamites. Le terme « Hébreux » est dérivé
ainsi d' « Héber ». (Gen. 10: 21; cp. Nom. 24: 24.) - Bible Cyclopedia,
par Faussett.
L'écrivain de l'article « Hébreu » dans le Cassell's Bible Dictionary
doute des preuves sur lesquelles la dérivation du mot « Hébreu » d' « Eber
» ou « Héber » est basée et dit: « Tout ce qui peut être affirmé avec
certitude c’est que le terme est employé pour désigner Abraham et les
descendants de Jacob en général. L'intérêt qu'on attache au mot, joint à
son origine obscure, suffit pour expliquer les nombreuses spéculations à
son sujet. On peut ajouter que quelques érudits ont trouvé le mot «
Hébreux » légèrement altéré, sur les monuments d'Egypte. Si cette
interprétation est vérifiée, elle aura de la valeur, montrant que, si les
Egyptiens appelèrent Joseph un Hébreu, ils employèrent la désignation qui
était acceptée parmi eux. »
2. Juifs. - Le terme signifie proprement « un homme de Juda ou un
descendant de Juda, mais le mot fut appliqué à tous, ceux qui étaient
encore appelés « Hébreux ». Il ne semble être entré en usage que longtemps
après la révolte de Jéroboam et des dix tribus, et 4~ aussi longtemps que
le royaume exista, il fut employé naturellement par les citoyens du
royaume de Juda (2 Rois 16: 6; 25: 25), mais on le voit rarement dans ce
sens. Après l'exil, il prit la signification étendue qu'il a de nos jours.
Il fut adopté par le reste de toutes les tribus et fut le seul nom par
lequel les descendants de Jacob furent connus dans l'ancien monde; il fut
certainement beaucoup plus commun que « Hébreu ». Il apparaît dans les
livres d'Esdras, de Néhémie, d'Esther, de Daniel, etc., il se trouve dans
les Apocryphes et est commun dans Josèphe et dans le Nouveau Testament ».
Cassell’s Bible Dictionary.
« Sous la théocratie, on les appelle Hébreux, sous la monarchie Israélites
et pendant la domination étrangère Juifs. Les représentants modernes de
cette souche se donnent le nom d'Hébreux en race et en langue et
Israélites en religion, mais Juifs dans les deux sens. » - Standard
Dictionarv.
3. Zenos. - « Prophète hébreu, cité souvent par les serviteurs Néphites de
Dieu. Tout ce que nous savons de son histoire personnelle est qu'il fut
tué parce qu'il proclama hardiment ce que Dieu lui avait révélé. La
parabole merveilleuse et presque incomparable de la vigne, donnée en
détail par Jacob, montre que ce fut un homme grandement béni du Seigneur
par l'esprit de prophétie. (Jacob chap. 5.) Ses prophéties sont aussi
citées par Néphi. (1 Néphi 10: 10; 12, 16), Alma (Alma 33:3, 13, 15),
Amulek, Alma (34: 7), Samuel le Lamanite (Hélaman 15: 11) et Mormon (3
Néphi 10: 16). - Dictionary of the Book of Mormon, par l'ancien George
Reynolds.
4. Le voyage des Tribus Perdues. - Esdras, dont les livres, comme il est
dit dans le texte, sont classés parmi les Apocryphes, décrit une vision
dans laquelle les dix tribus sont citées comme suit: « Ce sont les tribus
qui furent emmenées captives hors de leur pays au temps d'Osée le roi, que
Salmanasar, roi des Assyriens, fit captives et emmena, au-delà du fleuve;
ainsi elles furent emmenées dans un autre pays. Mais décidèrent en commun
de quitter la multitude des païens et d'aller dans un pays lointain où
jamais l'homme n'habita, afin de pouvoir garder leurs statuts qu'elles ne
gardèrent jamais dans leur propre pays. Et elles traversèrent à l'endroit
de l'étroit passage de l'Euphrate. Car le Très-Haut leur montra alors des
signes et arrêta les vagues du flot jusqu'à ce qu'elles fussent passées.
Et elles firent un grand voyage à travers le pays, un voyage d'un an et
demi, et cette région est appelée Arsareth (ou Ararah). Et elles y
habiteront jusqu'aux derniers temps, et lorsqu'elles reviendront, le
Très-Haut retiendra de nouveau les vagues du fleuve, afin qu'elles
puissent le traverser. » - 2 Esdras 13.
Concernant les voyages des tribus vers le Nord, l'Ancien George Reynolds,
dans son petit ouvrage Are we of Israël ? dit: « Elles décidèrent d'aller
dans un pays « où jamais l'homme n’habita » afin qu'elles pussent être
libres de toute influence contaminatrice. Ce pays ne pouvait se trouver
que dans le Nord. Le sud de l'Asie était déjà le siège d'une civilisation
comparativement ancienne; l'Egypte fleurissait dans le nord de l'Afrique,
et l'Europe du Sud se peuplait rapidement des futurs dirigeants du monde.
C'est pourquoi elles n'avaient d'autre choix que d'aller vers le Nord. La
première partie de leur voyage ne se fit cependant pas vers le Nord;
suivant le récit d'Esdras, elles paraissent s'être dirigées d'abord vers
leur ancien foyer, et il est possible qu'elles commencèrent à l'origine
avec l'intention d'y retourner; ou probablement afin de tromper les
Assyriens, elles commencèrent comme si elles retournaient à Canaan et
lorsqu'elles eurent traversé l'Euphrate et qu'elles furent hors de danger
des armées Mèdes et Perses, elles changèrent leur direction vers l'étoile
polaire. Esdras dit qu'elles entrèrent dans l'étroit passage de
l'Euphrate, le Seigneur retenant les vagues du flot jusqu'à ce qu'elles
l'eussent passé. Le point de l'Euphrate où elles traversèrent devait
nécessairement être dans la partie supérieure car plus bas il eût été trop
au sud pour leur but. Le cours supérieur de l'Euphrate est traversé de
montagnes élevées; près du village de Pastash, il plonge dans une gorge
formée par des précipices de plus de trois cent cinquante mètres de haut
et si étroite qu'il y a un pont au sommet; et peu après, il entre dans les
plaines de la Mésopotamie. Combien exactement cette partie du fleuve
répond à la description d'Esdras des « passages étroits, que les
Israélites traversèrent. »
« Les tribus viendront, elles ne sont pas perdues pour le Seigneur elles
seront ramenées comme il a été prédit; et je vous dis qu'il y en a qui
vivent maintenant - oui, quelques-uns qui sont présents ici - qui vivront
pour lire les annales des Tribus Perdues d'Israël, qui seront réunies aux
annales des Juifs, la Sainte Bible, et aux annales des Néphites, le Livre
de Mormon, tout comme le Seigneur l'a prédit; et ces annales
qu'apporteront les tribus perdues pour l'homme, mais qui seront
retrouvées, parleront de la visite du Christ ressuscité, après sa
manifestation aux Néphites sur ce continent. » D'un discours par l'auteur,
le 8 octobre 1916; voir Proceedings of 87th Semi-annual Conference of the
Church.
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