Quand on regarde de plus près la structure des textes du Livre de Mormon
et que l’on prend conscience de sa complexité et du soin que ses auteurs
ont mis à l’écrire, cela renforce notre conviction que le document est
authentique. En voici encore un exemple.
Pourquoi le Sermon au Temple se répercute-t-il
dans le reste de 3 Néphi ? Par
Book of Mormon Central · 12 octobre 2016
Ce que l’on
sait
Dans 3 Néphi 12–14, Jésus prononce le discours connu
sous le nom de Sermon au Temple [1]. Or, quand on continue à lire 3 Néphi,
il devient évident que des mots et des groupes de mots du sermon sont
dispersés partout dans le reste du texte [2]. On peut se demander, dans un
premier temps, pourquoi ces enseignements et ces concepts sont répétés
tout au long de 3 Néphi. John W. Welch a fait remarquer que le sermon
n’est pas cité au hasard, mais que les chapitres suivants de 3 Néphi ont
été soigneusement conçus comme un moyen de jeter un éclairage sur le
sermon lui-même [3].
Par exemple, dans 3 Néphi 16, le Christ
enseigne : « Bénis sont les Gentils, à cause de leur croyance », mais met
en garde : « Malheur, dit le Père, aux incrédules parmi les Gentils » (3
Néphi 16:6, 8). Il ajoute que « si les Gentils se repentent et reviennent
[au Père], voici, ils seront comptés parmi [le peuple de la maison
d’Israël] » qui ne sera pas autorisé à les « fouler aux pieds » (versets
13-14). Par contre, si les Gentils rejettent l’alliance, la maison
d’Israël « les foule[ra] aux pieds, et ils seront comme du sel qui a perdu
sa saveur, qui ne sert plus qu'à être jeté dehors, et foulé aux pieds par
mon peuple, ô maison d'Israël » (v. 15) [4].
Cet exposé sur les
Gentils suppose que l’auteur est au courant de 3 Néphi 12:13 où Jésus dit
aux Néphites que s’ils ne vivent pas à la hauteur de leur rôle comme sel
de la terre, ils seront « foulés aux pieds par les hommes ». Cependant,
dans 3 Néphi 16, Jésus applique cette condamnation aux Gentils [5]. Jésus
explique ainsi ce que cela implique et ce que cela signifie quand le « sel
perd sa saveur ». Il déclare que, lorsque les Gentils « rejetteront la
plénitude de mon Évangile, et seront enflés dans l'orgueil de leur cœur
par-dessus toutes les nations... et seront remplis de toutes sortes de
mensonges, et de tromperies, et de malfaisance, et de toutes sortes
d'hypocrisie, et de meurtres, et d'intrigues de prêtres, et de
fornication, et d'abominations secrètes », c’est à ce moment-là qu’ils
risquent d’être « foulés aux pieds. » (3 Néphi 16:10, 15)
Il est
clair que la répétition ici des mots de 3 Néphi 12-14 n’est pas le fait du
hasard ou une coïncidence. En effet, 3 Néphi répète systématiquement le
contenu du Sermon au Temple, mais en sens inverse :
1. Si le sel
perd sa saveur (12:13) 2. Soyez la lumière pour les
hommes (12:14–16) 3. Ne
croyez pas que je sois venu pour abolir la loi ou les prophètes (12:16-17)
4. En moi elle a été toute accomplie (12:18)
4.La loi est accomplie (15:4–6, 8)
3. Je ne détruis pas les prophètes (15:6–7 ; gardez la loi et les
prophètes (15:9–10) 2. Vous êtes une lumière pour ce
reste (15:12) comme j’accomplis mon alliance (15:13–16:14 1. Ceux qui
ne se tournent pas vers le Sauveur seront comme le sel qui a perdu sa
saveur (16:15) [6]
Selon une pratique littéraire ancienne appelée
Loi de Seidel, une pratique liée au chiasme, les éléments des textes
anciens étaient souvent répétés dans l’ordre inverse comme moyen de
démontrer que l’auteur citait quelque chose d’autre [7]. Nous avons ici un
exemple d’école de ce style, montrant que 3 Néphi utilise consciemment et
explique le Sermon au Temple.
Ceci est vrai deux chapitres plus tard, à
la fin de 3 Néphi 18 :
1. Pas de disputes (11:28), bénis êtes-vous
(12:1) 2. Que votre lumière luise (12:16)
3. Demandez, et l’on vous donnera (14:7)
4. Bâtis sur le roc (14:24), pas sur le sable (14:26)
4. Bâtis sur mon roc (18:12), pas sur une fondation de sable (18:13)
3. Demandez… et l’on vous donnera (18:20) 2. Élevez
votre lumière, afin qu’elle brille (18:24) 1. Bénis êtes-vous, pas de
controverses (18:34)
Le pourquoi
L’intégration soigneuse du Sermon au Temple tout au long de 3 Néphi
fournit un moyen de comprendre des parties apparemment obscures du texte,
comme mentionné ci-dessus, mais elle fait aussi quelque chose d’autre.
Welch fait remarquer : « Le lecteur peut avoir l’impression que c’est...
redondant de la part de Jésus de se citer lui-même si souvent, mais ce
faisant, il enseigne à son peuple l’importance cruciale de ce sermon
fondamental, que l’on allait devoir se rappeler et utiliser avec
précision, dans certains cas « sans rien changer » aux mots que Jésus
lui-même avait utilisés (3 Néphi 19:8) [9]. » Par le biais de ses
citations de ces points de doctrine établis, Jésus « renvoie aux
enseignements plus complets qu’il a déjà donnés, précisément parce que ces
mots ont déjà été acceptés par ces gens par alliance (3 Néphi 18:10) [10].
»
La décision du Christ de prononcer le sermon dans le cadre d’un
temple a probablement donné encore plus de poids au sermon. « Ainsi, la
réutilisation de ces mots sacrés par Jésus auront profondément
impressionné l’auditoire néphite, le réengagement de manière indélébile à
suivre ces enseignements [11]. » En fin de compte, « l’utilisation de ce
matériel tout au long de 3 Néphi soutient l’idée que le sermon a été
immédiatement accepté comme écriture, sans aucun doute l’écriture la plus
sainte que ces gens avaient jamais connue [12] . »
L’apparition si
fréquente du Sermon au Temple dans 3 Néphi témoigne de son importance. Ce
n’est pas simplement un sermon intéressant que Jésus a donné avant de
passer à des choses plus importantes ; c’est le cœur de son message. Loin
d’être un signe de redondance maladroite, ces répétitions invitent le
lecteur à se connecter et à appliquer le Sermon plus soigneusement et plus
délibérément. Mais c’est aussi une invitation à lire tout 3 Néphi plus
attentivement pour permettre aux paroles de Jésus dans ce livre
d’expliquer le Sermon d’une manière plus complète, afin que tous les
lecteurs puissent en arriver à comprendre le « Sermon des sermons » de
Jésus dans toute son intention et toute sa puissance.
Autres lectures
John W. Welch, “Echoes from the Sermon on
the Mount”, dans The Sermon on the Mount in Latter-day Scripture, dir. de
publ. Gaye Strathearn, Thomas A. Wayment et Daniel L. Belnap, Provo, UT,
Religious Studies Center, Université Brigham Young; Salt Lake City,
Deseret Book, 2010, p. 314–315; réimpimé sous le titre “Reusages of the
Words of Christ”, Journal of Book of Mormon Studies and Other Restoration
Scripture, 22 n° 1, 2013, p. 63-71. Jeffrey R. Holland, Christ and the
New Covenant, Salt Lake City, UT, Deseret Book, 1997, p. 249–275.
Robert J. Matthews, “Jesus the Savior in 3 Nephi”, dans The Book of
Mormon: 3 Nephi 8 Through 30, This is My Gospel, dir. de publ. Monte S.
Nyman et Charles D. Tate, Jr., Provo, UT, Religious Studies Center,
Université Brigham Young, 1993, p. 25–39.
Notes
[1] Voir Book of Mormon Central, “Why Did Jesus Deliver a
Version of the Sermon on the Mount at the Temple in Bountiful? (3 Nephi
12:6)”, KnoWhy p. 203, 6 octobre 2016. [2] Dans 3 Néphi 15:2-3, par
exemple, le peuple s’étonne de ce que « les choses anciennes ont pris fin,
et toutes choses sont devenues nouvelles ». Ceci est tiré du Sermon au
Temple dans 3 Néphi 12:47 : « Les choses anciennes ont pris fin, et toutes
choses sont devenues nouvelles. » Jésus explique ensuite que « la loi est
accomplie » (15:4-5), comme il le dit dans 3 Néphi 12:18: « En moi [la
loi] a été toute accomplie. » Il réaffirme ensuite : « Je ne détruis pas
les prophètes » (15:6), ainsi que : « c’est là la loi et les prophètes »
(15:10). Ces passages renvoient à 3 Néphi 12:17 (« Je ne suis pas venu
pour abolir ») et 3 Néphi 14:12 (« c’est la loi et les prophètes »). Il
dit alors : « Vous êtes une lumière » (15:12), tout comme il dit dans 3
Néphi 12:14 : (« Je vous donne d’être la lumière de ce peuple »). Voir
John W. Welch, “Echoes from the Sermon on the Mount”, dans The Sermon on
the Mount in Latter-day Scripture, dir. de publ. Gaye Strathearn, Thomas
A. Wayment et Daniel L. Belnap, Provo, UT, Religious Studies Center,
Université Brigham Young; Salt Lake City, Deseret Book, 2010, p. 314–315.
[3] Welch, «Echoes », p. 313–314. [4] Welch, «Echoes », p. 315. [5]
Welch, «Echoes », p. 315. [6] Welch, «Echoes », p. 316. [7] Voir M.
Seidel, Studies in Scripture, Jérusalem, Mosad Harav Kook, 1978. Voir
aussi Dave Bokovoy, “Inverted Quotations in the Book of Mormon”, Insights:
A Window on the Ancient World 20, n° 10, octobre 2000, p. 2; David E.
Bokovoy et John A. Tvedtnes, Testaments: Links Between the Book of Mormon
and the Hebrew Bible, Tooele, UT, Heritage Press, 2003, p. 56–60. [8]
Welch, «Echoes », p. 317. [9] Welch, «Echoes », p. 319. [10] Welch,
«Echoes », p. 319. [11] Welch, «Echoes », p. 319. [12] Welch,
«Echoes », p. 319.
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