Nous avons vu dans le discours du roi Benjamin http://www.idumea.org/Etudes/Ecritures/LM/Fetes_israelites.htm et http://www.idumea.org/Etudes/Ecritures/LM/Soukkot.htm, transparaître des éléments des grandes fêtes juives qu’étaient le Nouvel-An, le jour des Expiations et la fête des Tabernacles donnant à penser qu’il a fait son discours lors d’un événement combinant les trois célébrations. L’article qui suit montre que le discours d’Abinadi contient divers éléments de la fête des Semaines ou Pentecôte, donnant à penser que les Néphites célébraient aussi cette fête.

 

 

La prophétie d’Abinadi a-t-elle eu lieu pendant la Pentecôte ?

Par Book of Mormon Central,· 1er mai 2016

 

« Son visage brillait d'un resplendissement extrême, comme celui de Moïse pendant qu'il était sur la montagne du Sinaï, pendant qu'il parlait avec le Seigneur.» (Mosiah 13:5).

 

Ce que l’on sait

Dans Mosiah 12, il est question du retour d’Abinadi auprès du peuple du roi Noé deux ans après le rejet de son message. Lors de cette précédente occasion, il avait prophétisé le jugement qui allait être lancé par le Seigneur contre le roi Noé et son peuple. La réponse du roi Noé avait été : « Qui est Abinadi, pour que moi et mon peuple devions être jugés par lui, ou qui est le Seigneur, qui fera venir sur mon peuple une si grande affliction? » (Mosiah 11:27). Noé a ordonné l’arrestation d’Abinadi pour incitation au mécontentement et provocation de querelles (Mosiah 11:28). Sachant qu’il serait probablement appréhendé à vue, Abinadi est revenu prêcher, mais cette fois sous un déguisement (Mosiah 12:1), en espérant encore trouver un grand public pour écouter sa prophétie annonçant de nouveau des afflictions et des destructions. À cette deuxième occasion, Abinadi s’est sans doute dit qu’il pourrait être arrêté, allant jusqu’à espérer obtenir une audience auprès du roi Noé lui-même.

 

Abinadi n’aurait pas pu trouver de meilleur moment pour ces deux prophéties que la fête israélite de la Pentecôte (en grec, pentekoste, « cinquantième » ; en hébreu, chavouot, « semaines »), qui semble correspondre parfaitement au message et à la situation d’Abinadi. La Pentecôte est une fête de pèlerinage qui a lieu au printemps, le cinquantième jour après la pâque et qui commémore le jour où la Loi fut donnée à Moïse sur le mont Sinaï (voir Exode 34:22; Deutéronome 16:10). La Pentecôte était une occasion où tout le peuple se rassemblait au temple pour célébrer la première récolte de grain et commémorer la délivrance du peuple de son esclavage en Égypte.

 

Selon les spécialistes mormons John W. Welch, Gordon C. Thomasson et Robert F. Smith :

« Les deux discours d’Abinadi traitent de thèmes de la Pentecôte. Il inverse les bénédictions et les réjouissances de la fête et les transforme en malédictions et en prédictions sinistres. À un moment où une récolte généreuse de grain aurait été imminente, Abinadi maudit les cultures... (Mosiah 12:6). Alors que l’on fêtait traditionnellement la délivrance d’Israël de l’esclavage, Abinadi fait appel à la terminologie de l’Exode pour proclamer que la servitude et les fardeaux vont s’abattre sur les méchants dans la ville de Néphi (Mosiah 11:21, 23). [1]

 

Ils vont ensuite faire ressortir un certain nombre de parallèles très intéressants entre la mission prophétique d’Abinadi et la fête de la Pentecôte, notamment les points suivants :

  • La mention des dix commandements : À un moment où les prêtres du roi Noé sont censés commémorer et jurer fidélité aux dix commandements donnés à Moïse, Abinadi répète ces commandements et les accuse de ne pas les enseigner, de ne pas les vivre ni même de ne pas les comprendre correctement (Mosiah 12:27–37).
  • Le visage brillant : Le visage d’Abinadi « brillait d’un resplendissement extrême, comme celui de Moïse pendant qu’il était sur la montagne du Sinaï » (Mosiah 13:5, comparer avec Exode 34:29–30 ).
  • Trois jours : La fête de la Pentecôte durait apparemment trois jours (voir Exode 19:11), ce qui est peut-être la raison pour laquelle le procès de Abinadi sera reporté à trois jours (Mosiah 17:6).
  • Psaumes 50 et 81 : Moshé Weinfeld, professeur à l’Université hébraïque, dit que les Psaumes 50 et 81 étaient probablement chantés à la Pentecôte [2]. Il y a plusieurs parallèles entre le texte des paroles d’Abinadi et ces psaumes [3].
    • « Il vient, notre Dieu » (Psaume 50:3); « Le troisième jour l’Éternel descendra » (Exode 19:11); « Dieu lui-même descendra » (Mosiah 15:1).
    • On a dit de Psaume 50:4–7 que c’était le procès de Dieu contre son peuple ; les paroles d’Abinadi ont été qualifiées de « procès prophétique » [4].
    • Pour enseigner la loi, on doit la respecter sous peine d’être maudit (Psaume 50:16, 22) ; c’est la teneur de l’accusation d’Abinadi : « Si vous enseignez la loi de Moïse, pourquoi ne la gardez-vous pas ? » (Mosiah 12:29).
    • Psaume 50:15 promet que si les justes font appel à Dieu « au jour de la détresse », il les délivrera. Abinadi déclare que si le peuple méchant du roi Noé invoque Dieu, il « n’entendr[a] pas ses prières, ni ne le délivrer[a] » (Mosiah 11:25). [5]
    • L’utilisation de Psaume 50:16-21 à la Pentecôte pourrait indiquer que le jour passe pour être devenu un sévère avertissement. Ceux qui rejetaient les enseignements et collaboraient avec les délinquants étaient rabroués. Les transgresseurs étaient réprimandés publiquement. Ces traditions s’alignent sur la façon dont Abinadi aborde sa mission de remettre le message du Seigneur au roi Noé. [6]
    • « Je suis l’Éternel, ton Dieu, qui t’ai fait sortir du pays d’Égypte, de la maison de servitude » (Exode 20:2). Ces paroles du Seigneur à Moïse sur le Sinaï trouvent un écho à la fois dans Psaume 81:10 et Mosiah 12:34.

Le pourquoi

Quand le lecteur comprend le contexte de la prophétie d’Abinadi contre le roi Noé et son peuple, cela l’aide à apprécier l’impact de son message. Ses paroles et ses actions étaient ancrées sur les paroles du Seigneur, l’héritage des prophètes et la compréhension culturelle de son peuple.

Abinadi a dû décider d’entrer dans la ville de Néphi pour prêcher à un moment où il y avait un grand groupe de personnes rassemblées pour entendre son message. Un jour de fête était le moment idéal pour Abinadi pour revenir remettre le message de jugement que le Seigneur voulait que le peuple et le roi Noé en particulier, entendent.

Le jour de fête le plus indiqué pour remettre ce message de jugement était certainement la fête de la Pentecôte ou fête des Semaines, le jour où l’on commémorait la Loi. L’étude attentive des paroles attribuées à Abinadi révèle de nombreux parallèles avec les thèmes et les images de la Pentecôte.

Abinadi a-t-il prophétisé contre le roi

Noé lors de la Pentecôte ?

 

Pentecôte israélite                                                      Abinadi

 

Fête des prémices (récolte du blé)

Maudit le grain (Mosiah 12:6)

Réjouissances à cause de l’abondance

Envoie la grêle, les vents, les insectes (Mosiah 12:6)

Cinquante jours après la pâque

Jour exact inconnu

Délivrés de l’esclavage en Égypte

Prophétise que le peuple sera réduit en esclavage (Mosiah 11:21)

Rappel des dix commandements donnés à Moïse (Exode 20)

Récite les dix commandements donnés à Moïse (Mosiah 13:12–24)

Le visage de Moïse brille (Exode 14)

Le visage d’Abinadi brille (Mosiah 13:5)

Le Sinaï devient une fournaise (Exode 19)

Prophétise que la vie de Noé sera comme un vêtement dans une fournaise (Mosiah 12:3)

Fête d’une durée de trois jours ((Exode 19:11)

Jeté en prison pendant trois jours (Mosiah 17:6)

Exhortations sévères

Exhortations sévères

Utilisation du psaume 50

Utilisation d’idées tirées du psaume 50

« Il vient, notre Dieu » (Psaume 5)

« Dieu… descendra » (Mosiah 15:1)

« Tu énumères mes lois » (Psaume 50:16)

« Qu’enseignez-vous donc à ce peuple ? » (Mosiah 12:27)

« Ta part est avec les adultères (Psaume 50:18)

« Pourquoi commettez-vous la fornication ? » (Mosiah 12:29)

 

 

À cette occasion, avec Abinadi qui avertissait le peuple que « des fardeaux [lui seraient liés] sur le dos » (Mosiah 12:5), son public n’aurait eu aucun peine à se rappeler les fardeaux que ses ancêtres israélites avaient dû subir en Égypte. Pendant qu’il répétait les dix commandements justement à cette époque de l’année, les membres désobéissants de son auditoire ont dû être particulièrement interpellés. Quand le visage d’Abinadi a brillé, dans ce contexte similaire, même Noé et ses prêtres ont dû voir le rapport, ce qui les a incités à faire marche arrière (Mosiah 13:5), permettant à Abinadi de parler « avec le pouvoir et l’autorité de Dieu » pendant le reste des chapitres 13, 14, 15 et 16. Ce jour-là, c’était pour eux comme si Moïse lui-même se tenait devant eux et déclarait les paroles que Dieu avait envoyé son prophète exprimer.

En fin de compte, Abinadi fut injustement mis à mort par le feu, ayant commencé par lancer une malédiction similaire contre la vie de Noé, à savoir que la vie de celui-ci serait « estimée comme un vêtement dans une fournaise ardente » (Mosiah 12:3). Un jour de Pentecôte, il ne pouvait échapper à qui que ce soit que cette allusion à une « fournaise » rappelait le mont Sinaï. Il était recouvert d’éclairs, de feu et de fumée, « comme la fumée d’une fournaise » (Exode 19:18), tandis que Moïse montait sur la montagne pour parler avec Dieu, alors que le peuple indigne restait en bas « de peur que [le Seigneur] ne [le] frappe de mort » et ne [le] consume par le feu.

Comme en conclut John W. Welch, professeur de droit à BYU :

« Pris dans leur ensemble, ces détails vont tous dans le sens de cette conclusion : aucun autre jour dans le calendrier israélite antique ne correspond plus précisément ou plus justement au message, aux paroles et à l’expérience du prophète Abinadi que la fête israélite antique de la Pentecôte. Il est donc ironique que c’est au moment même où Noé et son peuple étaient censés commémorer la Loi que s’est produit le résultat judiciaire le plus regrettable de l’histoire néphite. [7]

Autres lectures

John W. Welch et J. Gregory Welch, Charting the Book of Mormon, Provo, UT, FARMS, 1999, schéma 124.

John W. Welch, Gordon C. Thomasson et Robert F. Smith, “Abinadi and Pentecost,” dans Reexploring the Book of Mormon, dir. de publ. John W. Welch, Salt Lake City, Deseret Book et FARMS, 1992, p. 135–138.

John W. Welch, The Legal Cases in the Book of Mormon, Provo, UT, BYU Press et le Neal A. Maxwell Institute for Religious Scholarship, 2008, p. 188–209.

[1] John W. Welch, Gordon C. Thomasson, and Robert F. Smith, “Abinadi and Pentecost,” in Reexploring the Book of Mormon, dir. de publ. John W. Welch, Salt Lake City, Deseret Book et FARMS, 1992, p. 136.

[2] Moshé Weinfeld, “The Decalogue in Israel’s Tradition,” dans Religion and Law: Biblical/Judaic and Islamic Perspectives, dir. de publ. Edwin Firmage, Bernard Weiss et John Welch, Winona Lake, Indiana, Eisenbrauns, 1990, p. 38–47.

[3] On trouvera le traitement complet des parallèles entre le Psaume 50 et les paroles d’Abinadi dans Welch et autres, “Abinadi and Pentecost,” p. 137–138. On trouvera un tableau énumérant les nombreux parallèles entre la Pentecôte et les paroles d'Abinadi dans “Did Abinadi Prophesy against King Noah on Pentecost?,” dans John W. Welch et J. Gregory Welch, Charting the Book of Mormon, Provo, UT, FARMS, 1999, schéma 124.

[4] Voir Richard McGuire, “Prophetic Lawsuits in the Hebrew Bible and Book of Mormon”, Provo, UT, FARMS, 1983.

[5] John W. Welch, The Legal Cases in the Book of Mormon, Provo, UT, BYU Press et le Neal A. Maxwell Institute for Religious Scholarship, 2008, p., 192.

[6] Welch, The Legal Cases, 192.

[7] Welch, The Legal Cases, 193.