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Dans l’article « La trente-quatrième année » (http://idumea.org/Etudes/Ecritures/LM/Destructions.htm),
Bart J. Kowallis a démontré que la catastrophe qui s’est abattue sur les
peuples du Livre de Mormon avant l’apparition du Christ ressuscité dans 3
Néphi avait toutes les caractéristiques d’un phénomène géologique. Le
géologue Jerry D. Grover, dans son livre « Geology of the Book of
Mormon », paru en 2014, fait une étude approfondie du terrain qui donne
des résultats remarquables en matière de localisation et de variation
d’intensité des phénomènes dans les diverses régions décrites par le Livre
de Mormon.
« Les grands et terribles jugements du Seigneur »: La destruction
catastrophique dans 3 Néphi et la géologie de la Mésoamérique
Neal Rappleye
Interpreter: A Journal of Mormon Scripture
15 (2015), p.
143-157
Examen de Jerry D. Grover, Jr.,
Geology of the Book of Mormon.
Vineyard, UT: Auto-publié, 2014. 233 pages + xi, y compris index et
références.
Résumé : Ces
dernières décennies, plusieurs savants et scientifiques mormons ont
proposé des analyses et des comparaisons entre des événements géologiques
et la destruction rapportée dans 3 Néphi 8-9. Jerry Grover apporte une
contribution importante à cette littérature en expliquant les processus et
les phénomènes géologiques, en détaillant les caractéristiques géologiques
de la région de Tehuantepec (Mésoamérique) et en appliquant ces
informations non seulement à la description de 3 Néphi 8-9, mais à
d’autres incidents dans le Livre de Mormon vraisemblablement liés à des
événements géologiques. Ce faisant, il apporte une perspective nouvelle
aux récits qu’il examine et ajoute de la clarté à des détails
géographiques qui ont fait l’objet d’interprétations variées.
La destruction des pays et des villes néphites et lamanites mentionnée dans 3 Néphi a été soumise à diverses reprises à des analyses géologiques dans le but de mieux comprendre le ou les catastrophes naturelles décrites dans le texte. On retrouve ce genre d’effort dans des études réparties sur plusieurs dizaines d’années. Bien qu’il existe des exemples encore plus anciens, il semble suffisant ici de commencer par le père de pratiquement tous les types de commentaires et de recherches sur Livre de Mormon aujourd’hui — Hugh Nibley. Dans Since Cumorah, tout d’abord publié sous forme de livraisons entre 1964 et 1966, il comparait les descriptions mentionnées dans 3 Néphi avec diverses descriptions de tremblements de terre et de phénomènes qui les accompagnaient, dont les éruptions volcaniques [1].
Vingt ans plus tard, John L. Sorenson et James L. Baer, l’un
anthropologue, l’autre géologue, approfondissaient ce type d’analyse.
L’ouvrage fondateur de Sorenson, Un environnement pour le Livre de
Mormon dans l’Amérique ancienne comprend non seulement un traité sur
le genre de catastrophe naturelle qui provoque des destructions telles que
celles décrites dans 3 Néphi, en se concentrant principalement sur les
éruptions volcaniques, mais s’inspire aussi des indices géologiques et
archéologiques pour montrer qu’en fait un tel événement s’est produit au
bon endroit au bon moment ou presque [2].
Baer, le premier géologue véritable (que j’aie pu
trouver) qui ait jeté un coup d’œil sur cet aspect du Livre de Mormon, a
publié une brève note dans Dialogue en 1986, en répondant à cinq
questions précises sur la géologie de la catastrophe [3].
Les années 1990 ont vu une prolifération d’études géologiques sur les
événements de 3 Néphi. Russell H. Ball a avancé l’hypothèse que la
destruction a été causée par une activité sismique et que les trois jours
de ténèbres venaient de ce qu’un nuage de cendres volcaniques avait
recouvert le pays. Il compare le récit du Livre de Mormon avec la
description de l’éruption du Vésuve faite par Pline [4].
John A. Tvedtnes a recueilli et résumé les comptes
rendus de plusieurs tremblements de terre et d’éruptions volcaniques
permettant la comparaison avec le récit de 3 Néphi [5].
John Gee a comparé la description du Livre de Mormon à celle de la stèle
de Karnak, que les savants rattachent à l’éruption volcanique de Thera
vers 1530 av. J.-C. [6].
L’étude la plus approfondie de celles qui ont été faites à cette époque
était celle de Bart J. Kowallis, professeur de géologie à l’Université
Brigham Young. Kowallis a fait une analyse approfondie du texte et des
récits d’éruptions volcaniques pour en arriver à dire, de manière assez
convaincante, qu’une éruption volcanique explosive unique pourrait
expliquer l’ensemble des destructions mentionnées dans 3 Néphi [7].
Le géologue et océanographe Benjamin R. Jordan a écrit une courte note
ajoutant la « liquéfaction » aux divers phénomènes décrits par Kowallis
[8].
On a continué à répéter l’idée dans divers écrits jusque dans les années
2000, mais on n’a pas fait grand-chose pour pousser cette théorie plus
loin. Une poignée de notes brèves ont été publiées sur les possibilités de
recherches plus poussées [9],
et Benjamin Jordan a ajouté un article important sur le
potentiel des carottes de glace comme preuve d’une telle éruption, y
décelant quelques signes possibles d’une éruption majeure entre 30 et 40
de notre ère dans divers échantillons de carottes de glace [10].
Mais d’une manière générale, la plupart des publications ne faisaient que
répéter des publications antérieures ou y faire écho.
Dans certains cas, ces examens géologiques ont été utilisés pour rattacher
le texte du Livre de Mormon à une région géographique donnée. Nibley
observe : « Comme chacun sait, l’Amérique centrale se trouve dans la
ceinture des tremblements de terre violents » tout en étant une région
côtière et une zone volcanique — la configuration idéale pour toutes les
catastrophes que le Livre de Mormon décrit si succinctement et si bien
[11]. »
Nibley en conclut : « [le récit de 3 Néphi]
prouve de manière convaincante que la personne qui l’a écrit a dû faire
l’expérience personnelle d’un séisme majeur en Mésoamérique ou a dû avoir
accès aux récits authentiques d’un tel événement [12]. »
Sorenson était, bien entendu, d’accord avec cette évaluation. Baer, fait
aussi ce lien d’une manière générale : « Les côtes occidentales de
l’Amérique centrale et du Sud ont les caractéristiques géologiques que
l’on s’attendrait à trouver sur le site d’une catastrophe [telle que
décrite dans 3 Néphi] [13]. »
Il observe : « Cette zone
générale de la Mésoamérique est sismiquement fort active et de vastes
régions sont couvertes de coulées de lave et de cendres volcaniques
[14]. »
Dans
une longue note de bas de page, Kowallis fait un pas de plus et se pose la
question de savoir où, en Mésoamérique, l’éruption a eu lieu.
Dans le cadre de nos recherches pour comprendre cet événement du Livre de
Mormon et en nous servant comme guide de la géographie de Sorenson, je
dirais que le centre éruptif a dû se situer au nord de l’isthme de
Tehuantepec (dans le pays situé du côté du nord où la destruction a été
maximale) et probablement le long de la côte où l’éruption pouvait générer
un raz de marée. Cependant, il faut davantage de renseignements
géologiques et géochronologiques pour pouvoir avancer d’autres théories
[15].
Dans son chef d’œuvre de 2013, Sorenson a examiné plusieurs rapports
archéologiques et géologiques qui indiquent une activité volcanique et ses
effets sur toute la Mésoamérique aux environs du premier siècle de notre
ère [16].
Malgré tout le chemin déjà parcouru, Jerry D. Grover Jr., ingénieur et
géologue de métier, nous apporte des perspectives nouvelles importantes en
faisant franchir un pas de plus à son niveau d’analyse. Dans son ouvrage
récemment publié, Geology of the
Book of Mormon, il ne se contente pas de montrer comment les
phénomènes géologiques et volcaniques se comparent avec le texte, ni ne se
borne à attirer l’attention sur des rapports éclectiques de phénomènes de
ce genre dans ce que l’archéologie nous fournit ou simplement à noter que
la Mésoamérique est une région idéale pour ce genre de phénomène. Ce qu’il
fait, c’est utiliser ce que l’on sait géologiquement sur la région pour
dégager le scénario qui convient le mieux et étoffer les rapports et les
localisations géographiques. Comme tel, son livre est incontournable pour
quiconque s’intéresse à la géologie ou à la géographie du Livre de Mormon.
Vue d’ensemble
Grover commence par recueillir et imprimer tous les passages qui décrivent
les destructions de 3 Néphi, y compris les descriptions prophétiques de
gens tels que Néphi 1, Zénos et Samuel le Lamanite (p. 1-6). Il passe
ensuite en revue le modèle de Sorenson qu’il prend comme point de départ
pour ses recherches géologiques (p. 7-17). Puis il explique de manière
simple mais utile les principes géologiques de base associés à différents
types de catastrophes naturelles. Cette explication est donnée de telle
sorte que quelqu’un comme moi, qui n’y connais pas grand-chose à la
géologie, peut saisir ces éléments fondamentaux importants. Il y traite
des différents types de lignes de faille et des différentes sortes de
tremblements de terre qu’elles causent, des différents types de volcans et
d’éruptions volcaniques et des différents outils pour mesurer l’ampleur de
ces événements géologiques. Il détaille également chacune des failles
majeures et des volcans principaux (et les données d’éruption pour
certains) dans la région autour de l’isthme de Tehuantepec en Mésoamérique
(p. 19-49). Ensuite, il commente les différents types de dégâts causés par
les éruptions volcaniques, y compris les coulées pyroclastiques et les
nuées ardentes, les glissements de débris volcaniques, les lahars, les
chutes de cendres et de téphra, les séismes volcaniques, les tsunamis et
les coulées de lave. Si certains de ces termes vous semblent étrangers, ne
vous inquiétez pas ; il explique chacun de ces phénomènes. Il explique les
dégâts des tremblements de terre et des ouragans et fournit un tableau des
dégâts décrits dans 3 Néphi (p. 51-72). Il revoit également la chronologie
des événements dans 3 Néphi, explore différents scénarios et propose une
analyse textuelle de la géographie de 3 Néphi (p. 73-153). Partant de là,
il fournit une analyse plus spécifique que je vais commenter dans un
instant.
Tout au long du livre, il fournit généreusement des photographies, des
tableaux, des diagrammes, des illustrations et des graphiques en couleur.
Dans l’ensemble, le livre recueille beaucoup d’informations importantes et
utiles pour examiner les événements géologiques décrits dans le Livre de
Mormon et est donc une sorte de dossier source technique essentiel pour
toute personne intéressée à faire des recherches plus poussées dans ce
domaine.
Un modèle géographique solide comme le roc
Après avoir donné un aperçu des descriptions faites par les textes, des
données géologiques de base, des volcans et des failles ainsi que des
dégâts associés aux éruptions et aux tremblements de terre, il s’attaque à
la tâche de déterminer si la destruction a été causée par (1) seul un
volcan, (2) un volcan et un tremblement de terre ou (3) un volcan, un
tremblement de terre et un ouragan/orage. Comme souligné plus haut,
Kowallis prétendait qu’un volcan pouvait, à lui tout seul, expliquer tout
ce qui est mentionné dans le récit de 3 Néphi. Bien que l’argument de
Kowallis soit convaincant, il lui manque la dimension importante que peut
donner un contexte géographique. Il se sert du modèle de Sorenson pour
émettre une théorie sur l’emplacement du volcan, mais ne passe pas à
l’étape logique suivante : qu’est-ce que ce modèle et les distances
auxquelles se trouvaient les villes touchées par la catastrophe naturelle
nous racontent sur le type d’événement que cela a dû être ?
Grover
ajoute cette dimension à son analyse quand il se pose la question de
savoir si un volcan seul pourrait expliquer tout ce qui se passe dans 3
Néphi. Sa recherche indique que « la plupart des séismes de type
volcanique ont une magnitude inférieure à 2 ou 3 et se produisent à moins
de 10 km sous un volcan » (p. 77). À cela, il ajoute : « Les tremblements
de terre volcaniques ayant une importance tectonique quelconque sont
extrêmement rares. On n’a mesuré sur terre que trois séismes volcaniques
d’une magnitude de 7 (Mw) au cours du siècle écoulé » (p. 78) [17].
Sur la base de l’échelle de Mercalli modifiée, une mesure de l’intensité
des tremblements de terre, il fait remarquer que les dommages rapportés
dans le Livre de Mormon indiquent un tremblement de terre de niveau VIII
au moins. À l’aide d’une formule visant à convertir les magnitudes Mw à
l’échelle de Mercalli, il observe : « Lorsqu’on applique l’équation à un
tremblement de terre de 7,1 Mw, qui est le plus grand observé en un
siècle, on constate que les dégâts causés par un tremblement de terre de
niveau VIII se produisent depuis le centre du volcan jusqu’à une distance
de 2,3 kilomètres. […] Il est clair que les dommages causés par un
tremblement de terre volcanique sont essentiellement limités à la
proximité du volcan lui-même » (p. 81). En appliquant simplement la
dimension que les distances ajoutent au problème, il détermine qu’un
tremblement de terre volcanique ne suffirait pas pour expliquer les dégâts
telluriques signalés dans le texte. « Pour expliquer les destructions
décrites dans 3 Néphi, conclut-il, il est clair qu’il faut l’intervention
d’un volcan et d’un tremblement de terre régional » (p. 119).
Puisque les tremblements de terre peuvent couramment déclencher des
éruptions volcaniques, il n’est pas étonnant que les deux se soient
produits simultanément (p. 137).
Sachant
qu’une éruption volcanique et un tremblement de terre régional sont
requis, Grover peut maintenant examiner les systèmes de failles et les
volcans de Mésoamérique pour dégager le scénario qui convient le mieux. Il
détermine que, sur la base du genre de dommages décrits dans le Livre de
Mormon, les lieux de l’activité sismique se situent probablement dans une
zone de failles de décrochement avec un volcan actif à proximité (p.
139-141) et qu’il devait se trouver dans le pays situé du côté du nord,
puisque 3 Néphi 8:12 indique que c’est là qu’il y avait le plus de dégâts.
Il se trouve qu’en Mésoamérique il n’y a qu’un seul système de failles qui
réponde à ces critères et il se trouve dans le pays situé du côté du nord
de Sorenson (et de la plupart des autres modèles), traversant l’isthme de
Tehuantepec et entrant partiellement dans le pays situé du côté du sud.
Le segment de faille de Veracruz remplit toutes les conditions nécessaires
indiquées dans le Livre de Mormon comme principal système de failles
sismiques. C’est une faille de décrochement, qui génère habituellement des
ruptures de surface, des fractures ou des affaissements. Il est situé dans
le pays situé du côté du nord où les dommages les plus graves ont eu lieu.
Une partie du segment de la faille se trouve dans le pays situé du côté du
sud et pourrait causer des dommages dans celui-ci. Elle est située sur et
à proximité des plaines côtières. Il se produit dans des zones ayant une
population importante à l’époque. … Un volcan majeur se trouve directement
sur le système de failles, le volcan San Martín. (p. 148)
La datation des éruptions volcaniques est chose difficile et imprécise,
mais le volcan de San Martín compte plusieurs événements éruptifs
documentés dans une période de temps qui inclut le premier siècle de notre
ère (p. 39).
Partant de là, Grover commence à analyser les détails de la géographie de
Sorenson et les événements décrits dans le Livre de Mormon en partant de
l’idée qu’un tremblement de terre de niveau 8 (à l’épicentre) le long de
la faille de Veracruz et une éruption du San Martín sont les principales
causes des dégâts signalés dans le texte.
Les points suivants résument les résultats de son analyse :
Ce bref résumé ne rend pas justice à l’analyse de Grover et d’autres
villes font partie de son analyse. Dans le cas de chaque ville/pays
mentionné dans 3 Néphi 8-9 comme ayant été détruit, il analyse
soigneusement la description de la façon dont il a été détruit et sa
position par rapport au tremblement de terre/volcan (quand c’est possible,
sur la base du modèle de Sorenson, mais toutes les villes mentionnées ne
sont pas situées dans sa géographie globale, car elles ne sont mentionnées
que dans ce seul endroit du texte), ensuite il propose l’explication qui
convient le mieux. Tout au long de cette analyse, il est frappant de
constater à quel point le modèle de Sorenson tient le coup devant ce test
géologique approfondi. Dans un cas seulement — celui de Moronihah
mentionné ci-dessus — il est nécessaire d’ajuster l’emplacement suggéré
par Sorenson pour laisser la place à l’explication géologique
correspondant le mieux à la destruction, et c’est le seul cas où il n’y
avait pas grand-chose comme données textuelles sur lesquelles Sorenson
pouvait se baser. Dans de multiples cas, les emplacements précédemment
identifiés par Sorenson se trouvent également être les emplacements
géologiquement idéaux.
Autres événements du Livre de Mormon
En plus de nous proposer le regard le plus approfondi sur la catastrophe
naturelle rapportée et décrite dans 3 Néphi 8, Grover étend son analyse à
d’autres événements mentionnés dans le Livre de Mormon qui semblent, sur
la base de la description donnée par le texte, impliquer des tremblements
de terre ou des éruptions volcaniques. Parmi eux, un événement sans doute
volcanique au pays de Néphi pendant le voyage missionnaire de Néphi et de
Léhi (voir Hélaman 5:20-49), un tremblement de terre à Ammonihah (voir
Alma 14:25-29) et quelques événements jarédites qui pourraient être liés à
des activités géologiques (voir Éther 9:29-35 ; 10:18-19 ; 11:5-7). Ces
événements sont traités de manière moins approfondie, mais les bases
avaient déjà été posées en grande partie lorsque l’état des lieux a été
fait en vue de l’étude des catastrophes de 3 Néphi (p. 191-210).
Une fois de plus, en ce qui concerne les tests géologiques pour la
géographie, le modèle de Sorenson marche remarquablement bien. Son pays de
Néphi est situé près du volcan Pacaya, qui est « un excellent candidat
pour la source et la cause de l’incident à la prison dans le pays de
Néphi » (p. 196). Dans l’ensemble, « la géologie environnante est
hautement corroborante » (p. 197). Ammonihah, dans le modèle de Sorenson,
se trouve dans « une zone sismique active » (p. 198) et les formations
géologiques sous-jacentes créent les conditions nécessaires pour provoquer
un bang sonique, l’événement probable derrière le « grand bruit » (Alma
14:29) signalé dans le texte (p. 200-201).
Il propose de nouvelles explications concernant la cause potentielle de la
famine et la pénurie et l’infestation de serpents qui en ont résulté (voir
Éther 9:28-35). Pour ce faire, il montre du doigt les effets
climatologiques des éruptions volcaniques (p. 205-206) : « Il est depuis
longtemps reconnu que les éruptions volcaniques influent sur le climat
mondial... et peuvent provoquer des sécheresses ou un refroidissement
important à l’échelle régionale loin de l’éruption volcanique » (p. 205).
Il peut aussi tuer « tous les oiseaux sur des centaines de kilomètres
alentour » (p. 205). Si un événement volcanique éloigné, non observé par
les scribes jarédites, a été la cause de la disette, cela pourrait être la
recette parfaite pour une infestation de serpents. Il explique :
Les serpents migrent souvent en masse sur une base saisonnière et on sait
qu’ils migrent à la recherche d’eau au milieu de la sécheresse. En 2007,
une forte migration de serpents bruns venimeux a envahi la ville et la
banlieue de Sydney, de Darwin et d’autres régions d’Australie qui avaient
connu la pire sécheresse en un siècle, mordant beaucoup de gens. (p. 208)
Cela ressemble beaucoup à l’événement d’Éther 9:31. Il y a des chances que
les serpents étaient « à la recherche d’eau et peut-être que quand ils ont
trouvé de l’eau et les habitats humides (peut-être un cours d’eau?) ils se
sont arrêtés » (p. 208). Étant donné que des cours d’eau s’étendent sur
toute la partie nord de l’isthme de Tehuantepec (voir la carte p. 204)
[19],
la ligne de démarcation entre le pays situé du côté du
nord et le pays situé du côté du sud, de Sorenson, cela correspond
parfaitement une fois de plus au modèle de celui-ci.
Ces sécheresses ne sont pas forcément causées par des éruptions
volcaniques, mais d’autres détails de l’infestation de serpents chez les
Jarédites correspondent parfaitement à une telle explication.
La description dans Éther de serpents qui conservent une forte densité de
population, bloquant ou « dressant une barrière » empêchant le passage à
un certain endroit pendant une période de temps peut s’expliquer par
l’absence ou la diminution des prédateurs des serpents en même temps
qu’une abondance de ressources alimentaires due au fait de la réduction
importante d’oiseaux prédateurs locaux comme il a été prouvé que cela se
produit à la suite d’une éruption volcanique. Il n’y n’aurait aucune
concurrence de la part des oiseaux pour l’approvisionnement en rongeurs ou
en lézards et il n’y aurait pas d’oiseaux mangeurs de serpents venimeux
pour en limiter la population. (p. 208)
Un certain nombre d’espèces d’oiseaux dans la région autrefois occupée par
les Olmèques (terres jarédites dans pratiquement tous les modèles
mésoaméricains) se nourrissent de serpents (p. 209-210) et « la décimation
[temporaire] de ces espèces a dû réduire radicalement les prédateurs des
serpents, éliminant de surcroît la concurrence qu’ils constituaient pour
les proies des serpents » (p. 210). Plus tard, une fois la population de
ces oiseaux de proie rétablie, ceux-ci ont dû commencer à réguler la
population des serpents, la réduisant à un niveau normal, ce qui semble
correspondre au récit d’Éther où les serpents finissent par ne plus
dresser de barrière entre le pays situé du côté du nord et celui du côté
du sud (voir Éther 10:19).
Ainsi donc, les effets d’une éruption volcanique sur un environnement
peuvent expliquer de manière convaincante un événement dont les critiques
modernes du texte se sont souvent moqués, le considérant comme ridicule ou
fantaisiste. Il est difficile d’imaginer un cadre géologique, géographique
et écologique plus parfait pour les événements décrits dans Éther 9.
Implications pour la géographie du Livre de Mormon
Les recherches de
Grover dans la géologie du Livre de Mormon ont des implications
pour la géographie du Livre de Mormon. Cela ne devrait pas étonner
étant donné que les volcans et les lignes de fracture font intrinsèquement
partie du paysage. Tandis que d’autres auteurs, comme indiqué plus haut,
ont relevé quelques vagues implications ou conditions géographiques créées
par l’analyse géologique, l’analyse approfondie faite par Grover pour
trouver la meilleure correspondance possible, ville par ville, catastrophe
par catastrophe, génère des critères rigoureux qui doivent être pris en
compte dans tout modèle géographique des pays du Livre de Mormon. Grover
définit utilement les critères minimum qui découlent de son étude :
Un volcan actif dans le pays situé du côté du nord, avec des éruptions à
l’époque de 3 Néphi
Un système de failles régionales dans le pays situé du côté du nord avec
une présence ou un effet dans le pays situé du côté du sud capable de
générer des intensités au moins de niveau VIII sur l’échelle d’intensité
de Mercalli
L’obligation pour la ville d’Ammonihah de se trouver dans une région
capable de produire un tremblement de terre d’une intensité minimale de
niveau VIII sur l’échelle d’intensité de Mercalli.
L’emplacement du pays de Néphi
dans le voisinage d’un volcan actif durant le premier siècle avant notre
ère.
(p. 211)
Il explique ensuite : « Une fois que les critères de sélection de base
sont remplis, il est nécessaire d’évaluer les emplacements réels des
villes et des incidents géologiques » (p. 211). Comme indiqué plus haut,
le modèle de Sorenson répond non seulement aux critères minimum mais s’en
tire remarquablement bien dans les détails. Qu’en est-il des autres
modèles géographiques ?
Selon Grover : « La nécessité de la présence d’un volcan actif élimine
essentiellement tous les modèles géologiques du Livre de Mormon qui le
situent dans le centre et l’est des États-Unis, en Basse-Californie et
dans toutes les régions d’Amérique centrale au sud du Costa Rica comme
modèles viables d’emplacements pour le Livre de Mormon » (p. 211). Son
analyse met en évidence plusieurs faits dont la meilleure explication est
qu’il s’agit là des effets d’une éruption volcanique plutôt que d’un
tremblement de terre, mais la raison la plus évidente en est les trois
jours de ténèbres constantes. Étant donné que certains ont attiré
l’attention sur les rapports de témoins oculaires d’un tremblement de
terre en 1811 dans l’est des États-Unis, qui décrivent une « terrible
obscurité de l’atmosphère » [20]
pour tenter d’expliquer ce fait sans volcan, les
commentaires de Grover sur ce genre de phénomène sont importants :
Les brouillards ou vapeurs de ténèbres sont décrits comme étant très
répandus. La seule explication réaliste de ce phénomène est un nuage de
cendres volcaniques/tephra diffusé suite à une éruption volcanique. Il
arrive que durant les premiers moments d’un tremblement de terre de la
poussière soit produite par des édifices ébranlés ou par un bref
dégagement de gaz parfois âcres en provenance du sol, mais, selon les
observations faites lors de tremblements de terre modernes, cela ne dure
jamais plus de quelques heures, et ceci est confirmé dans les anecdotes
historiques concernant les tremblements de terre pré-modernes. On n’a
jamais vu la poussière des tremblement de terre empêcher quelque chose de
s’enflammer. Les documents historiques prouvent que la diffusion de
cendres volcaniques empêche la combustion et dure des jours d’affilée. (p.
156)
En outre, la vaste distribution des ténèbres requise pour couvrir
l’ensemble ou la plupart des pays situés du côté du nord ou du sud n’est
pas un résultat de tremblements de terre mais d’éruptions volcaniques. En
fait, il a été établi, lors d’une éruption de ce même volcan que Grover
pense être à l’origine de l’obscurité dans 3 Néphi : « L’éruption
volcanique de San Martín de 1793 est un exemple récent qui montre qu’avec
une grande dispersion des cendres, la plupart sinon la totalité des pays
du Livre de Mormon ont pu être soumis aux effets des cendres volcaniques »
(p. 157 ; voir p. 39 la carte de la dispersion de son nuage de cendres).
Étant donné que la nécessité de la présence d’un volcan élimine
essentiellement tous les modèles extérieurs à la Mésoamérique, Grover ne
consacre pas de temps à étudier ces modèles. Il passe toutefois un certain
temps à explorer le modèle de V. Garth Norman (et de Kirk Magleby, qui
correspond en grande partie à celui de Norman) dans la mesure où il
diffère de Sorenson [21].
Les
principales différences sont que Norman préfère l’Usumacinta comme fleuve
Sidon, ce qui déplace Zarahemla dans ce bassin, et la côte de la mer de
l’est et ses villes sont déplacées du golfe du Mexique vers la côte
orientale de la péninsule du Yucatan. Étant donné que Joseph L. Allen
déplace également le littoral sud-est vers la côte est du Yucatan, et que
F. Richard Hauck préfère, lui aussi, l’Usumacinta [22],
le résultat de cette comparaison s’applique également en gros à leurs
modèles, au moins en ce qui concerne les observations générales mais pas
forcément dans les détails. Voici un bref résumé des points les plus
saillants de cette analyse :
Bien que certains de ces problèmes soient plus graves que d’autres, de
manière générale, il est clair que les modèles qui décalent le bord de la
mer de l’est vers la côte caraïbe et placent de grandes parties de la
population dans le Yucatan conviennent géologiquement moins que le modèle
de Sorenson.
Si la géologie n’est qu’un des nombreux facteurs à prendre en
considération lors de la construction d’une géographie des pays du Livre
de Mormon, elle n’en est pas moins importante. Les volcans et les failles
ne disparaissent pas. Il est essentiel pour toute géographie qu’ils soient
aux bons endroits et actifs au bon moment (bien que les données relatives
au timing ne soient pas forcément disponibles ou aussi précises qu’on le
voudrait). Et on est certainement en position de force quand on peut
expliquer un maximum des dégâts signalés dans Néphi 8-9 sans avoir à
multiplier les catastrophes. C’est une preuve de la pertinence et la
durabilité du modèle de Sorenson que trente ans après sa publication, il
reste non seulement géologiquement mais exceptionnellement viable alors
que les modèles concurrents s’avèrent être géologiquement déficients à
d’importants égards.
Conclusion
Indépendamment des préférences que l’on peut avoir pour des modèles
géographiques, le livre de Grover sur la géologie devrait intéresser tous
ceux qui étudient le Livre de Mormon. Il fait avancer considérablement le
débat sur la géologie dans le Livre de Mormon, l’interaction de celui-ci
avec la géographie du texte et l’aide qu’il peut apporter dans la
modélisation de la géographie (Grover a déterminé l’emplacement
vraisemblable de dix villes non localisées par Sorenson). Les
renseignements généraux sur la géologie et les éléments géologiques de la
région mésoaméricaine en font à eux seuls un outil particulièrement utile
pour tous ceux qui veulent étudier le Livre de Mormon dans son
environnement le plus probable dans le nouveau monde. Toutes les aides
visuelles richement colorées mentionnées plus haut renforcent
considérablement la lecture.
Je recommande vivement Geology of
the Book of Mormon.
NOTES
[1] Hugh Nibley, Since Cumorah, 2e éd., Salt Lake City, Utah,
Deseret Book/FARMS, 1988, p. 231–238.
[2] John L. Sorenson, An Ancient American Setting for the Book of
Mormon, Salt Lake City, Utah, Deseret Book/FARMS, 1985, p. 129,
318–323.
[3] James L. Baer, “The Third Nephi Disaster: A Geological View,”
Dialogue: A Journal of Mormon Thought 19/1 (Spring 1986): p. 129–132.
[4] Russell H. Ball, “An Hypothesis concerning the Three Days of Darkness
Among the Nephites”, Journal of Book of Mormon Studies 2/1 (1993):
p. 107–123.
[5] John A. Tvedtnes, “Historical Parallels to the Destruction at the Time
of the Crucifixion”, Journal of Book of Mormon Studies 3/1 (1994),
p. 170–186.
[6] John Gee, “Notes and Communications: Another Note on the Three Days of
Darkness”, Journal of Book of Mormon Studies 6/2 (1997), p.
235–244.
[7] Bart J. Kowallis, “In the Thirty and Fourth Year: A Geologist’s View
of the Great Destruction in 3 Nephi,” BYU Studies 37/3 (1997–98),
136–190.
[8] Benjamin R. Jordan, “‘Many Great and Notable Cities Were Sunk’:
Liquefaction in the Book of Mormon,” BYU Studies 38/3 (1999), p.
119–122.
[9] Voir “Volcanic and Ice Dating in the New World”, Journal of Book of
Mormon Studies 10/1 (2001), p. 75; “When Day Turned to Night”,
Journal of Book of Mormon Studies 10/2 (2001), p. 66–67; Benjamin R.
Jordan, “Investigating New World Volcanism at the Time of Christ’s Death”,
Insights 23/6 (2003), p. 3–4; Matthew Roper, “A Note on Volcanism
and the Book of Mormon”, Insights 29/4 (2009), p. 4.
[10] Benjamin R. Jordan, “Volcanic Destruction in the Book of Mormon:
Possible Evidence from Ice Cores”, Journal of Book of Mormon Studies
12/1 (2003), p. 78–87.
[11] Nibley, Since Cumorah, p. 236–237.
[12] Nibley, Since Cumorah, p. 238.
[13] Baer, “The Third Nephi Disaster”, p. 131.
[14] . Ball, “An Hypothesis”, p. 112.
[15] Kowallis, “In the Thirty and Fourth Year”, p. 188, n. 80.
[16] John L. Sorenson, Mormon’s Codex: An Ancient American Book,
Salt Lake City, Utah, Deseret Book and the Neal A. Maxwell Institute for
Religious Scholarship, 2013), p. 641–649.
[17] Mw représente l’intensité d’un tremblement de terre dans “Moment
Magnitude Scale” (p. 79).
[18] John L. Sorenson, Mormon’s Map, Provo, Utah, FARMS, 2000), p.
118, 119 (carte).
[19] Cette carte était à l’origine la carte 11 dans Sorenson, Mormon’s
Codex.
[20] Lettre d’Eliza Bryan, 22 mars 1816, en ligne dans
http://www.hsv.com/genlintr/newmadrd/accnt1.htm
(vsitée le 1er avril 2015).
[21] Voir V. Garth Norman, Book of Mormon—Mesoamerican Geography:
History Study Map, American
Fork, Utah: ARCON/Ancient America Foundation, 2008; Capitan Kirk (Kirk
Magleby), “Book of Mormon Model” sur Book of Mormon Resources, 28
juillet 2012 (mis à jour le 2 octobre 2013), en ligne sur
http://bookofmormonresources.blogspot.com/2012/07/book-of-mormon-model.html
(visité le 1er avril 2015).
[22] Voir Joseph L. Allen et Blake J. Allen, Exploring the Lands of the
Book of Mormon, éd. rév., American Fork, Utah, Covenant
Communications, 2011 ; F. Richard Hauck, Deciphering the Geography of
the Book of Mormon, Salt Lake City, Utah, Deseret Book, 1988).
[23]
J’ajouterai brièvement que le modèle de Hauck comprime le pays situé du
côté du sud dans une petite région qui est habituellement la région la
plus méridionale dans la plupart des autres modèles. Ce genre de
configuration soulève la question de savoir si une partie quelconque
de son pays situé du côté du sud aurait été recouverte par un nuage de
cendres produit par une éruption volcanique loin au nord dans les monts
Tuxtla. Il met aussi toutes ses villes beaucoup plus loin de l’activité
sismique de la faille de Veracruz et cela peut nécessiter un deuxième
volcan et un deuxième tremblement de terre pour expliquer tous les dégâts
mentionnés dans le texte. Une fois de plus, le rasoir d’Occam semble
applicable ici, bien qu’une analyse plus sérieuse du modèle de Hauck par
quelqu’un de plus qualifié que moi serait probablement nécessaire pour
parvenir à des conclusions plus fermes. |