L’épée de Laban : comment était-elle ?

Par Book of Mormon Central · 23 janvier 2018

« Sa poignée était d'or pur, et son exécution était extrêmement fine, et je vis que sa lame était de l'acier le plus précieux. »
1 Néphi 4:9

L’épée de Laban est un des objets les plus emblématiques du Livre de Mormon. Elle a été transmise de génération en génération (Mosiah 1:16) et était apparemment toujours utilisée au combat du temps du roi Benjamin (Paroles de Mormon 1:13). En juin de 1829 [1], le Seigneur dit à Oliver Cowdery, à David Whitmer et à Martin Harris : « Vous verrez les plaques et également le pectoral, l'épée de Laban » (Doctrine et Alliances 17:1). Selon David Whitmer, cette prophétie ne tarda pas à se réaliser [2].

Pourtant le Livre de Mormon ne donne pas beaucoup de renseignements sur l’aspect de l’épée. Néphi dit simplement que « sa poignée était d'or pur, et son exécution était extrêmement fine, et... sa lame était de l'acier le plus précieux » (1 Néphi 4:9) [3].

Cependant, grâce aux découvertes archéologiques des dernières décennies, nous avons maintenant plus d’informations sur ce à quoi cette épée pourrait avoir ressemblé [4]. Dans les années 1980, les archéologues ont découvert une épée qui ressemble fort à l’épée de Laban [5]. On l’a trouvée à Jéricho, une ville près de Jérusalem, d’où provenait l'épée de Laban, et elle date des environs de 620 av. J.-C., du vivant de Laban [6]. La chose la plus surprenante de toutes est qu’elle était faite d’acier, juste comme celle de Laban [7]. La plupart des épées survivantes de cette période du Proche-Orient antique étaient faites de fer ou de bronze, de sorte que cette épée, faite d’acier, ressemble remarquablement à l’épée de Laban décrite dans le Livre de Mormon [8].

Epee de Laban

L’épée de Jéricho a quatre-vingt-dix centimètres de long et sept centimètres de large, ce qui est étonnamment long pour le Proche-Orient antique [9]. Cependant, il aurait été beaucoup plus difficile pour Néphi de trancher la tête de Laban si l’épée avait été plus courte [10] ; il est donc probable que l’épée de Laban avait aussi à peu près cette taille [11].

Un autre détail intéressant est que, selon une étude métallurgique de l’épée de Jéricho, « le fer a été délibérément durci pour en faire de l’acier [12]. » Les métallurgistes peuvent produire accidentellement un acier de qualité inférieure lors du processus de fusion, mais ce fer a été intentionnellement durci pour en faire un acier de grande qualité [13]. Si cela a également été le cas de l’épée de Laban, cela pourrait expliquer le commentaire de Néphi qu’elle était faite « de l’acier le plus précieux » (1 Néphi 4:9) [14].

Enfin, il est possible que des mots aient été gravés sur l’épée de Laban. Joseph Smith et Oliver Cowdery ont vu une fois une grande salle qui contenait de nombreuses plaques. « La première fois qu’ils y sont allés, l’épée de Laban était accrochée au mur ; mais quand ils y sont retournés, elle avait été décrochée et posée sur la table en travers des plaques d’or ; elle était dégainée et les mots suivants y étaient écrits: « Cette épée ne sera plus jamais remise au fourreau jusqu'à ce que les royaumes de ce monde deviennent le Royaume de notre Dieu et de son Christ » [15]. »

Il est difficile de savoir si c’était une vision quelque peu symbolique, une vision d’un endroit réel avec des objets réels, ou une grotte véritable où ils se sont rendus dans l’état de New York. En tout cas, si c’est l’épée réelle de Laban qu’ils  ont vue, que ce soit en vision ou en personne, cela nous donne un peu plus de détails sur son aspect.

Avant que les archéologues ne découvrent la longue épée d’acier à Jéricho, la description de l’épée de Laban dans le Livre de Mormon a pu paraître trop fantastique pour être vraie [16]. L’idée qu’il ait pu y avoir une épée en acier à Jérusalem en 600 av. J.-C. en a fait rire certains [17]. De même, l’idée qu’une ancienne épée au Proche-Orient ait pu être assez longue pour que Néphi puisse décapiter Laban de la manière décrite dans le Livre de Mormon a pu sembler, elle aussi, incroyable [18]. Et puis, cent cinquante ans après la publication du Livre de Mormon, les archéologues ont découvert un objet qui a montré que le récit du Livre de Mormon n’était pas si incroyable que cela après tout.

Selon Matt Roper, « une des premières critiques du Livre de Mormon a été que Laban n’aurait pas pu avoir une lame d’épée en acier, parce que l’acier n’avait été inventé que beaucoup plus tard [19]. » Donc pendant environ cent cinquante ans, les gens qui croyaient au Livre de Mormon ont dû le faire, hantés par cette énigme [20]. Cependant, ce problème a finalement été résolu et ceux qui ont cru au Livre de Mormon, à l’épée de Laban et à tout le reste, on leur a enfin donné raison [21]. L’archéologie n’avait tout simplement pas encore rattrapé le Livre de Mormon.

Cette situation peut être riche en leçons précieuses pour nous aujourd'hui. Lorsque nous avons des questions au sujet du Livre de Mormon, pour lesquelles nous n’avons pas de bonnes réponses pour le moment, contentons-nous de nous rappeler l’épée de Laban et disons-nous que la réponse finira par arriver [22]. Neal Rappleye, commentant l’étude de cas révélatrice de Sam Wineburg sur la réflexion historique [23], explique que « Wineburg a constaté que les penseurs dans le domaine de l’histoire qui ont de la maturité font preuve de patience devant l’inconnu. Ils ont pu attirer l’attention sur les contradictions apparentes sans chercher immédiatement à les résoudre. » Bien que cela mette mal à l’aise, « les penseurs dans le domaine de l’histoire qui ont de la maturité ‘ont vécu avec ce malaise’ tout en poursuivant l’examen de sources supplémentaires. » Ce faisant, « ils ont exercé ce que Wineburg appelle la ‘spécification de l’ignorance’ : une pratique d’identification lorsqu’on n’en sait pas assez pour comprendre quelque chose. » Il faut alors conclure en « ‘cultivant la perplexité’ : en étant capable de ‘prendre du recul par rapport à une première impression, mettre en doute…  ... de grand bonds dans la pensée et assurer le suivi... des questions qui, ensemble, orientent... dans la direction de nouvelles connaissances.’ [24] »

Si nous mettons pour l’instant certaines de nos questions de côté, sachant qu’elles finiront par trouver une réponse par la suite, nous pouvons développer une foi mûre qui résistera à l’épreuve du temps.

Notes

[1] Voir Richard O. Cowan, “Sword of Laban” dans Book of Mormon Reference Companion, dir. de publ. Dennis Largey, Salt Lake City, UT, Deseret Book, 2003, p. 748.

[2] Voir Reed A. Benson, “Sword of Laban”, dans Encyclopedia of Mormonism, 4 vols., dir. de publ. Daniel H. Ludlow, New York, NY, Macmillan, 1992, 3:1427–1428.

[3] Une des raisons pour lesquelles on a pu le qualifier de “précieux” est la difficulté de produire un acier utilisable à cette époque. Voir James D. Muhly, “Mining and Metalwork in Ancient Western Asia”, dans Civilizations of the Ancient Near East, dir. de publ. Jack M. Sasson, New York, Charles Scribner’s Sons, 1995, 3:1515.

[4] Pour un résumé de cette information, voir Neal Rappleye, ”‘Put Away Childish Things’: Learning to Read the Book of Mormon with Mature Historical Understanding”, présenté à la conference de FairMormon du 3 août 2017, en ligne sur fairmormon.org.

[5] Voir William J. Adams Jr., “Nephi’s Jerusalem and Laban’s Sword”, dans Pressing Forward with the Book of Mormon: The FARMS Updates of the 1990s, dir. de publ. John W. Welch et Melvin J. Thorne, Provo, UT, FARMS, 1999, p. 11–13.

[6] Adams, “Nephi’s Jerusalem and Laban’s Sword”, p. 11.

[7] Voir Jeffrey R. Chadwick, “All That Glitters is Not … Steel”, Journal of Book of Mormon Studies 15, no. 1, 2005, p. 66–67.

[8] Voir Adams, “Nephi’s Jerusalem and Laban’s Sword”, p. 12. Pour une description de l’épée, voir Jeffrey R. Chadwick, “Lehi’s House at Jerusalem and the Land of His Inheritance”, dans Glimpses of Lehi’s Jerusalem, dir. de publ. John W. Welch, David Rolph Seely et Jo Ann H. Seely, Provo, UT, FARMS, 2004, p. 115, Figure 11.

[9] Voir Hershal Shanks, “Antiquities director confronts problems and controversies”, Biblical Archaeology Review 12, n° 4, juillet-août 1986: 33, 35. Voir aussi Brant A. Gardner, Second Witness: Analytical and Contextual Commentary on the Book of Mormon, 6 vols., Salt Lake City, UT, Greg Kofford Books, 2007, 1:117.

[10] Nibley fait remarquer que l’épée devait être aiguisée et lourde pour faire le travail. Voir Hugh Nibley, Lehi in the Desert/The World of the Jaredites/There Were Jaredites, The Collected Works of Hugh Nibley, Volume 5, Salt Lake City et Provo, UT, Deseret Book et FARMS, 1988, p. 101.

[11] Voir John A. Tvedtnes, “The Workmanship thereof was Exceedingly Fine”, dans Pressing Forward with the Book of Mormon: The FARMS Updates of the 1990s, dir. de publ. John W. Welch et Melvin J. Thorne, Provo, UT, FARMS, 1999, p. 14–16.

[12] Voir Avraham Eitan, “Rare Sword of the Israelite Period Found at Vered Jericho”, Israel Museum Journal 12, 1994, p. 61–62, citation p. 62. Voir aussi Hershel Shanks, “BAR Interviews Avraham Eitan”, Biblical Archaeology Review 12, n° 4, 1986, p. 33.

[13] Voir Philip J. King et Lawrence E. Stager, Life in Biblical Israel, Louisville, KY, Westminster/John Knox, 2001, p. 169; Naama Yahalom-Mack et Adi Elyahu-Behar, “The Transition from Bronze to Iron in Canaan: Chronology, Technology, and Context”, Radiocarbon 57, n° 2, 2015, p. 285–305.

[14] Italiques ajoutés. Il s’avère qu’on aurait pu trouver de l’acier précieux comme celui-là même plus ancien de quelques siècles : « Il semble évident que, dès le début du dixième siècle av. J.-C., des forgerons trempaient intentionnellement le fer. » Robert Maddin, James D. Muhly et Tamara S. Wheeler, “How the Iron Age Began”, Scientific American 237, n° 4, octobre 1977, p. 127. « Le fer forgé chauffé au contact avec du charbon de bois brûlant, carbone à haute température produit du fer carbonisé ou de l’acier, qui est plus malléable que la fonte. » King and Stager, Life in Biblical Israel, Louisville, KY: Westminster/John Knox Press, 2001, p. 169.

[15] Brigham Young, Journal of Discourses, Liverpool, UK, George Q. Cannon, 1878, 19:38. On trouvera une analyse des récits et rapports divers de cette expérience dans Cameron J. Packer, “Cumorah’s Cave”, Journal of Book of Mormon Studies 13, n° 1–2, 2004, p. 50–57, 170–71.

[16] Voir Matthew Roper, “‘To Inflict Wounds of Death’: Mesoamerican Swords and Cimeters in the Book of Mormon”, exposé à FairMormon en 2016 en ligne sur fairmormon.org.

[17] Voir Roper, “‘To Inflict Wounds of Death’“, en ligne sur fairmormon.org.

[18] Voir Roper, “‘To Inflict Wounds of Death’“, en ligne sur fairmormon.org.

[19] Roper, “‘To Inflict Wounds of Death’“, en ligne sur fairmormon.org.

[20] Ils auraient campé sur leurs croyances face à des critiques disant des choses telles que : « C’est la mention la plus ancienne de l’acier que l’on trouve dans l’histoire. » E. D. Howe, Mormonism Unvailed, 1834, p. 25–26. « L’épée de Laban était en acier, alors qu’il est bien connu que les Israélites ne savaient rien de l’acier des centaines d’années plus tard encore. Qui d’autre que quelqu’un d’aussi ignorant que Rigdon aurait commis toutes ces erreurs ? » Clark Braden dans Public Discussion, 1884, p. 109. « On nous dit que Laban est tué par un certain Néphi quelque six cents ans avant Jésus-Christ, avec une épée « de l’acier le plus précieux », des centaines d’années avant que l’acier ne soit connu de l’homme ! » Daniel Bartlett, The Mormons or, Latter-day Saints, 1911, p. 15. « [Le Livre de Mormon] parle de « l’acier le plus précieux », avant que l’on puisse rêver de l’acier le plus courant. » C. Jones Sheridan, The Truth about the Mormons, 1920, p. 4–5. « Néphi... brandit une épée ‘de l’acier le plus précieux’. Mais l’acier n’était pas connu de l’homme à l’époque. » Stuart Martin, The Mystery of Mormonism, 1920, p. 44. « Laban avait une épée en acier longtemps avant que l’acier ne commence à être utilisé. » George Arbaugh, Revelation in Mormonism, 1932, p. 55. « Chaque commentateur du Livre de Mormon a souligné les nombreux anachronismes historiques et culturels, tels que l’épée d’acier de Laban en 600 av. J.-C. » Thomas O'Dea, The  Mormons, 1957, p. 39. « Personne ne croit que l’acier ait existé, que ce soit pour Laban ou pour qui que ce soit d’autre en 592 av. J.-C. » William Whalen, The Latter-day Saints in the Modern World, 1964, p. 48.

[21] En fin de compte, ceux qui ont conservé la foi dans le Livre de Mormon se sont vus amplement justifiés, car on peut maintenant trouver de nombreux exemples d’acier antique au Proche-Orient. Voir, par exemple, Erik Tholander, “Evidence of the Use of Carburized Steel and Quench Hardening in Late Bronze Age Cyprus”, Opuscula Atheniensia 10, 1971, p.15–22; Anthony M. Snodgrass, “Iron and Early Metallurgy in the Mediterranean”, dans The Coming Age of Iron, dir. de publ. Theodore A. Wertime et James D. Muhly, New Haven, CT, Yale University Press, 1980, p. 341; D. Davis, R. Maddin, J.D. Muhly et T. Stech, “A Steel Pick from Mt. Adir in Palestine”, Journal of Near Eastern Studies 4, 1985, p. 41–51; James D. Muhly, “How Iron technology changed the ancient world and gave the Philistines a military edge”, Biblical Archaeology Review 8, n° 6, novembre–décembre 1982, p. 50; Amihai Mazar, Archaeology of the Land of the Bible 10,000–586 B.C.E., New York, NY, Doubleday, 1990, p. 361; Herbert Maryon, “Early Near Eastern Steel Swords”, American Journal of Archaeology 65, n° 2, avril 1961, p. 173–184.

[22] On trouvera d’autres exemples dans Book of Mormon Central, “Why are Horses Mentioned in the Book of Mormon?, Enos 1:21”, KnoWhy 75, 11 avril 2016; Book of Mormon Central, “How Can Barley in the Book of Mormon Feed Faith?, Mosiah 9:9”,  KnoWhy 87, 27 avril 2016; Book of Mormon Central, “Why Does the Book of Mormon Use the Phrase ‘Secret Combinations?’, 3 Nephi 7:6”, KnoWhy 377, 31 octobre, 2017.

[23] Sam Wineburg, Historical Thinking and Other Unnatural Acts, Philadelphie, PA, Temple University Press, 2001, p. 20–22.

[24] Rappleye, “‘Put Away Childish Things’”, 19, en ligne sur fairmormon.org.