« D’autres » ont-ils influencé
les peuples du Livre de Mormon ?
Par Book of
Mormon Central, 21 mai 2018
« Et la centième partie des
actions de ce peuple, lequel commençait maintenant à être nombreux, ne
peut être écrite sur ces plaques », Jacob 3:13
Les recherches
anthropologiques modernes nous disent que le Nouveau Monde était déjà
largement peuplé quand les Jarédites, les Léhites et les Mulékites sont
arrivés. Cela peut amener des lecteurs à se demander pourquoi les autres
sociétés ne sont jamais mentionnées dans le Livre de Mormon. La première
chose à considérer est qu’il y a en réalité des indices dans le texte qui
donnent à penser que « d’autres » vivaient dans les régions où ces
colonies se sont installées. La liste suivante récapitule certains de ces
indices [1] : 1. La taille des premières populations néphites, les
récits de leurs guerres et leurs mariages polygames non autorisés nous
indiquent tous qu’ils avaient un taux de croissance de population
incroyablement élevé [2]. Cela veut dire que des populations extérieures
se sont mêlées à elles et ont grossi leur nombre dès le début. 2. Dans
le livre de Jarom, le lecteur apprend que les chasseurs-cueilleurs
lamanites étaient devenus « extrêmement plus nombreux » que les Néphites
qui cultivaient la terre (Jarom 1:6). Cette situation va à l’encontre de
la tendance historique qui veut que la croissance démographique soit plus
élevée parmi les sociétés agricoles. Il fallait forcément un apport de
gens du dehors pour gonfler la population lamanite d’une manière aussi
disproportionnée [3]. 3. Certains chercheurs ont estimé que ce que
Jacob dit à propos de Shérem, à savoir qu’il « chercha vivement une
occasion » de parler avec Jacob et qu’il « avait la connaissance parfaite
de la langue du peuple », donne à penser que Shérem était quelqu’un
d’étranger à la société néphite (Jacob 7:3–4) [4], cela parce que cela n’a
guère de sens de faire remarquer que quelqu’un faisant partie de la
communauté avait une bonne connaissance de la langue ou qu’il aurait du
mal à se ménager une rencontre avec Jacob. 4. Pour plusieurs raisons,
il aurait été peu probable que les Néphites acquièrent rapidement la
capacité de cultiver le maïs et d’élever des troupeaux de gros et de petit
bétail s’ils n’avaient obtenu ces connaissances auprès des indigènes
locaux [5]. 5. La langue des Mulékites s’est, semble-t-il, « corrompue
» trop vite pour que ce soit une évolution linguistique naturelle. Cela
indique que leur langue se mélangeait avec une ou plusieurs autres langues
appartenant à des groupes extérieurs (Omni 1:17) [6]. 6. Les termes «
Néphite » et « Lamanite » étaient suffisamment généraux pour comporter une
diversité de groupes ethniques et culturels [7]. En outre, il y a des
exemples de sociétés du Livre de Mormon qui adoptent le nom d’un groupe
hôte en se joignant à lui [8]. 7. La façon dont la culture et les noms
jarédites ont été conservés parmi les Néphites montre bien que le texte ne
se donne pas la peine de mentionner ni d’expliquer l’influence culturelle
d’un groupe sur un autre [9]. 8. L’utilisation de certains termes ou
désignations de groupes, comme « Lamanitish servants (serviteurs
lamanitiques, rendu par ‘serviteurs lamanites’ dans la version française
actuelle) » (Alma 17:26) ou « Ismaelitish women (femmes ismaélitiques,
rendu par ‘femmes ismaélites’ dans la version française actuelle » (Alma
3:7), fait penser à des groupes de gens de l’extérieur associés à ceux du
Livre de Mormon [10].Si les serviteurs ou les femmes en question
appartenaient à l’un des groupes nommés dans le Livre de Mormon, on
s’attendrait à ce qu’ils soient désignés clairement comme tels. Au lieu de
cela, le « ish » (-ique) indique qu’il s’agissait probablement d’étrangers
adoptés dans les groupes tribaux lamanite et ismaélite. 9. Plusieurs
interprétations prophétiques d’Ésaïe donnent à penser que les Néphites se
souciaient du bien-être spirituel d’ « autres » dans le pays [11]. Ces
indices trouvés dans le texte nous disent que le Livre de Mormon et
l’histoire profane de l’Amérique sont effectivement d’accord sur la
présence d’autres peuples dans le pays. Cependant, ces indices
n'expliquent toujours pas pourquoi les gens du dehors ne sont jamais
mentionnés directement dans le texte. On peut trouver une réponse probable
en comparant le Livre de Mormon avec d’autres documents historiques
américains anciens. L'anthropologue John L. Sorenson a constaté que les
récits historiques méso-américains anciens sont, eux aussi,
ethnocentriques, ce qui signifie que, comme le Livre de Mormon, ils se
concentrent presque exclusivement sur une société ou une lignée bien
déterminée et qu’ils excluent les données politiques, culturelles ou
religieuses qui ne portent pas directement sur le sujet [12]. Au vu du
contexte américain antique, l’absence d’information dans le Livre de
Mormon sur les sociétés extérieures est tout à fait compréhensible et même
attendue. Commentaire Ces constatations font penser que l’absence de
détails dans le Livre de Mormon concernant les populations et les cultures
environnantes est une preuve subtile de son authenticité historique. Cela
cadre aussi avec ce que disent plusieurs auteurs du Livre de Mormon à
savoir qu’ils ne pourraient même pas écrire la « centième partie » de
l’histoire de leurs peuples [13]. Ils nous disent directement qu’il se
passe bien d’autres choses en arrière-plan. C’est pourquoi nous ne
devrions pas être surpris de découvrir que de grandes quantités
d’informations historiques ou culturelles, telles que les descriptions
d’autres sociétés, manquent dans le texte. Comme le président Anthony W.
Ivins, de la Première Présidence, l’a déclaré en 1929, « nous devons être
prudents dans les conclusions auxquelles nous parvenons. Le Livre de
Mormon... ne nous dit pas qu’il n’y avait personne ici avant lui. Il ne
nous dit pas que des gens ne sont pas venus plus tard [14]. » La forte
probabilité qu’il y avait d’autres populations dans le pays a des
implications pour les études sur l’ADN. L’article de l’Église sur ce sujet
explique : « Quand une petite population se mêle à une grande, les
combinaisons de marqueurs autosomes typiques du plus petit groupe sont
rapidement submergées par celles du plus grand. Les marqueurs du plus
petit groupe ne tardent pas à devenir rares dans l’ensemble de la
population et peuvent disparaître sous l’effet de la dérive génétique [15]
». En d’autres termes, quand une petite colonie comme les Jarédites,
les Léhites ou les Mulékites se mêle à une population plus importante,
comme celle qu’elle a forcément trouvée dans l’Amérique antique, il y a de
grandes chances pour que l’ADN des immigrants disparaisse en seulement
quelques générations. Pour cette raison et d’autres encore, « on ne peut
pas utiliser de manière décisive les recherches en matière d’ADN que ce
soit pour confirmer ou réfuter l’authenticité historique du Livre de
Mormon [16] ». Enfin, le silence sur la présence d’autres peuples
devrait nous aider à nous rappeler pourquoi le Livre de Mormon a
fondamentalement été écrit. Néphi explique : « Je n'écris sur des plaques
que ce que je pense être sacré » (1 Néphi 19:6) [17]. Mormon affirme de
même que ses annales ont été écrites pour qu’un reste de son peuple «
[sache] ce qui concerne [ses] pères, et aussi les œuvres merveilleuses qui
ont été accomplies parmi eux par le pouvoir de Dieu » (Mormon 7:9) [18].
En substance, le Livre de Mormon est une histoire spirituelle et
religieuse. Il est centré sur des groupes bien déterminés de personnes,
sur leurs révélations sacrées et sur leurs expériences miraculeuses. Il ne
devait jamais être un aperçu culturel des Néphites et des Jarédites ni
d’aucun des autres peuples qui ont interagi avec eux. Son étroite
focalisation spirituelle peut nous aider à donner, nous aussi, la priorité
aux choses spirituelles, surtout à la réalité et aux enseignements de
Jésus-Christ, dans notre propre vie. Comme l’a expliqué Russell M.
Nelson, « Certains auteurs ont mis l’accent sur des récits [du Livre de
Mormon], son peuple ou ses fenêtres sur l’histoire. D’autres ont été
intrigués par la structure de sa langue ou ses mentions d’armes, de
géographie, de vie animale, de techniques de construction ou ses systèmes
de poids et mesures. Aussi intéressants que soient ces sujets, c’est
quand on se concentre sur son objectif premier, témoigner de Jésus-Christ,
que l’étude du Livre de Mormon est la plus enrichissante. Comparés à cela,
tous les autres sujets sont accessoires [19] ».
Notes [1] Ces
indices textuels sont principalement adaptés et résumés à partir de John
L. Sorenson, « When Lehi’s Party Arrived in the Land, Did They Find Others
There? »Journal of Book of Mormon Studies 1, n° 1, 1992, p. 1-34. [2]
Voir Sorenson, « When Lehi’s Party Arrived », p. 1–4. [3] Voir
Sorenson, « When Lehi’s Party Arrived », p. 26–32. [4] Voir Sorenson, «
When Lehi’s Party Arrived », 4 ; A. Keith Thompson, « Who Was Sherem? »
Interpreter: A Journal of Mormon Scripture 14 (2015): p. 1–15; Kevin
Christensen, « The Deuteronomist De-Christianizing of the Old Testament »,
FARMS Review 16, n° 2, 2004, p. 86‒88. [5] Voir Sorenson, « When Lehi’s
Party Arrived », p. 4-6. [6] Voir Sorenson, « When Lehi’s Party Arrived
», p. 18–19. [7] Voir Sorenson, « When Lehi’s Party Arrived », p. 8-17.
[8] Voir Book of Mormon Central,« What Does the Book of Mormon Teach about
Families? (Mosiah 25:12) », KnoWhy 382, 16 novembre 2017); Book of Mormon
Central, « Why Did Lehi Divide His People into Seven Tribes? (Jacob 1:13)
», KnoWhy 319, 29 mai 2017. [9] Voir Sorenson, « When Lehi’s Party
Arrived », 19–21. Voir aussi Hugh Nibley, Lehi in the Desert/The World of
the Jaredites/There Were Jaredites, The Collected Works of Hugh Nibley,
Volume 5, Salt Lake City et Provo, UT: Deseret Book et FARMS, 1988, p.
242–263. [10] Voir Sorenson, « When Lehi’s Party Arrived », p. 31.
[11] Voir Book of Mormon Central, Did Interactions with ‘Others’ Influence
Nephi’s Selection of Isaiah? (2 Néphi 24:1) », KnoWhy 45, 2 mars 2016.
[12] Voir John L. Sorenson, Mormon’s Codex: An Ancient American Book, Salt
Lake City et Provo, UT: Deseret Book et Neal A. Maxwell Institute for
Religious Scholarship, 2013, p. 104–106. [13] Voir Jacob 3:13 ; Paroles
de Mormon 1:5 ; Hélaman 03:14 ; 3 Néphi 5:8 ; 26 : 6-7 ; 4 Néphi 1:40-42 ;
Éther 15:33. [14] Anthony W. Ivins, dans Conference Report, avr. 1929,
15; cité dans « Book of Mormon and DNA Studies »,” Gospel Topics, en ligne
sur lds.org. [15] « Book of Mormon and DNA Studies » en ligne sur
lds.org. [16] « Book of Mormon and DNA Studies », Matthew Roper, «
Nephi’s Neighbors: Book of Mormon Peoples and Pre-Columbian Populations »,
FairMormon Conference, 2003, en ligne sur archive.bookofmormoncentral.org;
Book of Mormon Central, « Why Hasn’t Lehi’s DNA Been Found? (Introduction)
», KnoWhy 280 27 février 2018). [17] Voir Book of Mormon Central, « Why
Do the Authors on the Small Plates Follow a Pattern? (Jacob 7:27) »,
KnoWhy 74, 8 avril 2016. [18] Voir Book of Mormon Central, « What Was
Mormon’s Purpose in Writing the Book of Mormon? (Mormon 5:14) », KnoWhy
230, 14 novembre 2016. [19] Russell M. Nelson, « A Testimony of the
Book of Mormon », Ensign, novembre 1999, en ligne sur lds.org.
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