La véracité de l'Eglise de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours est indissolublement liée à l'authenticité du Livre de Mormon. Ou bien celui-ci est véritablement le document historique qu'il affirme être, et dans ce cas ni Joseph Smith, ni personne d'autre, que ce soit au 19e siècle ou de nos jours, n'aurait pu en être l'auteur, ou bien c'est un faux, et alors il sera inévitablement démasqué par les progrès des connaissances scientifiques, et l'Eglise se révélera être une fausse église. Or, depuis une cinquantaine d'années, les indices en faveur de l'authenticité historique du Livre de Mormon n'ont cessé de se multiplier au point que quiconque veut mettre le Livre de Mormon (et l'Eglise) en doute ne peut plus - s'il est intellectuellement honnête - les ignorer. L'article suivant traite d'un de ces indices.

L'orge et le blé dans le Livre de Mormon

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Rapport mis à jour pour la dernière fois en août 2000

Sur la trentaine de fois que le grain est mentionné dans le Livre de Mormon, l'orge l'est quatre fois (Mosiah 7:22 ; 9:9 ; Alma 11:7, 15) et le blé une fois (Mosiah 9:9). Ces mentions de l'orge et du blé dans un document de l’Amérique ancienne ont intrigué certains lecteurs parce que l'on pense généralement que ce sont les Européens qui ont introduit l'orge et le blé domestiques dans le Nouveau Monde après 1492.

Les recherches dans ce domaine soutiennent deux explications possibles. Premièrement, les termes orge et blé, tels que le Livre de Mormon les utilise, peuvent désigner d'autres plantes cultivées dans le Nouveau Monde auxquelles on a donné des noms de plantes de l'Ancien Monde. Deuxièmement, les termes peuvent désigner des variétés authentiques d'orge et de blé du Nouveau Monde.

1. Attribution par analogie de noms aux céréales du Nouveau Monde

Il est possible que les Léhites aient utilisé les termes traduits dans le Livre de Mormon par orge  et blé pour désigner d'autres plantes ou espèces de céréales du Nouveau Monde qui ressemblaient à l'orge et au blé. « C'est un fait bien connu », écrit le professeur Hildegard Lewy, spécialiste des langues assyrienne et babylonienne (akkadiennes) anciennes, « que les noms de plantes et particulièrement de [céréales] sont appliqués dans diverses langues et dialectes à différentes espèces. » Lewy note que cela pose souvent un problème d'interprétation des mentions de céréales dans les documents du Proche-Orient. Quand on le fait, « on doit déduire la signification de ces vieux termes assyriens à partir des seuls vieux textes assyriens sans tenir compte de leur signification dans les sources provenant de Babylonie et des autres régions voisines de l'Assyrie. » D'autres assyriologues ont observé que le vieux terme assyrien shéum a été utilisé à différentes époques pour désigner l'orge, les céréales en général et même les pignons.

Il vaut la peine de noter que shéum est également mentionné dans le Livre de Mormon dans un contexte agricole (voir Mosiah 9:9). Il désigne apparemment une céréale du Nouveau Monde cultivée au pays de Néphi, qui était désignée par un terme de l'Ancien Monde. L'utilisation de ce terme dans le Livre de Mormon est lui-même significatif puisqu'on n'a pu déchiffrer l'akkadien que des décennies après la publication du Livre de Mormon. Par conséquent le terme shéum ne pouvait pas être connu de Joseph Smith.

Dans le Nouveau Monde, de nombreux noms espagnols ont été appliqués aux plantes américaines après la conquête, à cause de la ressemblance manifeste des plantes avec des plantes européennes, alors même que les plantes du Nouveau Monde étaient, du point de vue botanique, d'une espèce ou d'une variété différente. Par exemple, les Espagnols appelaient le fruit de l'oponce (figuier de Barbarie) « figue » et les émigrants venus d'Angleterre appelaient le maïs « corn », terme anglais désignant les céréales en général. Les gens du Livre de Mormon ont pu avoir recours au même genre de pratique quand ils ont rencontré pour la première fois les espèces végétales du Nouveau Monde.

2. Variétés domestiques de l'orge et blé en Amérique ancienne

Il est bien entendu également possible que les mentions d'orge et de blé dans le Livre de Mormon désignent effectivement des variétés réelles de ces céréales qu'ont rencontré les gens du Livre de Mormon dans le Nouveau Monde. Des indices archéologiques récents donnent à penser que les Américains précolombiens ont cultivé l'orge pendant une longue période de temps. Un article paru en 1983 dans Science 83 décrit des fouilles archéologiques sur le site hohokam de La Ciudad, près du centre de Phoenix, Arizona (la culture hohokam a fleuri dans le sud-ouest de l'Amérique du Nord de 300 av. J.-C. à 1450 apr. J.-C. environ). L'auteur déclare : « La preuve sans doute la plus surprenante du niveau d'évolution de l'agriculture hohokam a été fournie l'année dernière, lorsque les archéologues ont trouvé des grains conservés de ce qui ressemble à de l'orge domestique, le premier que l'on ait jamais trouvé dans le Nouveau Monde. » Peu de temps après, d'autres échantillons étaient découverts sur d'autres sites archéologiques d'Oklahoma et d'Illinois. A propos des découvertes faites en Illinois, une étude récente dit qu' « un type de semence précédemment non identifié… a maintenant été identifié comme étant du petit orge (hordeum pusillum) et il y a de fortes indications que ce grain doive être ajouté » à la liste des féculents que l'on cultivait dans la région il y a 2000 ans. »

Les échantillons d'orge remontant aux périodes des cultures du Woodland moyen (premiers siècles de notre ère) et du Woodland récent (600-1050 apr. J.-C.) indiquent que l'orge précolombien a été connu et cultivé pendant une période de temps prolongée dans le Nouveau Monde. « Il est raisonnable de conclure », dit l'archéologue Vorsila L. Bohrer, qui a dirigé les travaux au cours desquels ces découvertes ont été faites, « que nous voyons là une céréale nord-américaine domestiquée dont on ne soupçonnait pas l'existence. »

Ce que l'on sait maintenant de l'orge précolombien en Amérique doit être un avertissement pour les lecteurs du Livre de Mormon qu'ils ne doivent pas trop se hâter de balayer la mention de blé précolombien comme étant un anachronisme.

Perspective historique

En 1973, Robert F. Smith, autorité en langues proche-orientales anciennes, a fait observer que « shéum » correspond exactement à « l'orge » akkadien [she'um] (vieil assyrien « blé »), le nom de céréale le plus courant dans la Mésopotamie ancienne (Robert F. Smith, « Some 'Neologisms' from the Mormon Canon », dans Conference on the Language of the Mormons, Provo (Utah), Brigham Young University Language Center, 1973, p. 66). Ce sujet a été repris par d'autres spécialistes mormons lors de traitements ultérieurs du sujet.