UN BAPTEME POUR LES
MORTS PRATIQUE JADIS EN UKRAINE
Marvin Van Dam
© Meridian Magazine
Sergeï Antonenko, un éminent
spécialiste russe de la religion, a étudié et écrit d'une manière admirablement
objective sur la théologie et les ordonnances des saints des derniers jours. Ses écrits
sur luvre pour les morts et les origines chrétiennes antiques de cette
uvre sont particulièrement intéressants.
Dans un article intitulé
Recherche et Documentation analytique, il cherche à expliquer les préventions en Russie
et dans d'autres pays de l'Est contre l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers
Jours. Pour lui, ces préventions sont le résultat « d'un manque d'information objective
ou de mythes répandus par malveillance ».
Il explique cette
caractérisation défavorable des saints des derniers jours comme suit :
« L'influence extrêmement
négative est provoquée par l'absence dune perspective élargie, dun manque
defforts pour inclure les phénomènes « exotiques » (mais le plus souvent
simplement inhabituels) dans une vue panoramique de l'histoire spirituelle de l'humanité.
Ce dernier facteur explique, à notre avis, les appréhensions manifestes vis-à-vis de
certaines pratiques religieuses de l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers
Jours (telles que le baptême par procuration, le scellement du mariage pour l'éternité
avec le conjoint décédé). Ces rites religieux sont traditionnels pour leur culte, mais
on pourrait aussi trouver des choses semblables dans lhistoire chrétienne. »

Le monastère orthodoxe
ukrainien sur les hauteurs de Kiev qui donnent sur le Dniepr.
Le libre arbitre et le
salut au delà de la tombe
Antonenko creuse cependant plus
loin que les préventions courantes et analyse une pratique remarquablement commune entre
les églises chrétiennes orthodoxes orientales (par opposition à l'Église catholique
occidentale) et l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours, à savoir le
fait que l'humanité croyait autrefois de manière implicite qu'il y a un lien entre les
mondes des vivants et des morts et que « ils se préoccupaient des défunts, au lieu de
les abandonner
Nous parlons en particulier de la croyance en la résurrection et en
la conservation de certaines possibilités pour les morts dans lautre monde. »
Antonenko, qui est historien de
la religion et grand spécialiste des religions chrétiennes orthodoxes orientales
anciennes et modernes (c'est-à-dire de la « famille » des églises chrétiennes
orthodoxes de Russie, dUkraine, de Biélorussie, de Bulgarie, dArménie,
etc.), dit que pendant des siècles, la préoccupation principale de la conscience
religieuse, en ce qui concerne le problème de l'immortalité, était de savoir si le
libre arbitre serait maintenu derrière la tombe.
Se basant sur ses connaissances
historiques objectives et étant relativement dégagé des conceptions apostates par
rapport à la doctrine originelle et des perversions des vérités historiques qui ont
affecté le monde catholique, Antonenko écrit ces mots importants :
« Dans l'Église ancienne
existait la croyance quà partir du moment où le Christ a libéré de l'enfer les
esprits de ceux qui l'avaient attendu avec foi (nous lisons cela dans les messages des
apôtres Pierre et Paul : 1 Pierre 3:18-20 ; 4:6 ; Éphésiens 4:8-10), le salut des
défunts est possible. »
Il cite en outre un texte
biblique apocryphe, Jes. Sir. 7:36 : « Que la grâce soit donnée à tous les vivants,
mais ceux qui sont morts ne seront pas privés de la grâce non plus. »
Lorthodoxie
orientale et l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours
Antonenko relie ensuite sa
compréhension de la théologie orthodoxe orientale ancienne à celle de l'Église de
Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours :
« Historiquement, le sentiment
que l'unité spirituelle des vivants et des morts fait partie intégrante de
lexpérience spirituelle de la vie a été conservé dans un très petit nombre de
ramifications [églises] du christianisme. Par exemple, pour le protestantisme, il est
typique de nier tout rapport effectif entre [ceux] qui vivent sur la terre et [ceux qui
sont] partis vers Dieu. »
Il voit un « paradoxe » dans
le fait que « des cultes chrétiens aussi différents » que l'orthodoxie orientale et «
les mormons » ont des croyances remarquablement semblables en ce qui concerne l'état et
le bien-être des morts :
« L'orthodoxie enseigne
quil faut considérer le corps du frère décédé comme une graine
[quelque chose qui peut avoir une vie renouvelée et se développer], qui doit être
revêtue de l'incorruptibilité et de l'immortalité. Les croyants orthodoxes ne mettent
pas fin à l'amour pour les morts après l'enterrement. Suivant une coutume ancienne, les
chrétiens orthodoxes prient avec ferveur pour eux [leurs proches récemment décédés]
et apportent des sacrifices non sanglants pendant les 40 premiers jours.
« Aujourd'hui dans les
églises orthodoxes, on achète et allume des bougies pour les morts aussi bien que pour
soi-même et les autres personnes qui sont encore vivantes.
« L'Église de Jésus-Christ
des Saints des Derniers Jours va encore plus loin dans ce domaine. Elle ne pratique pas
des prières spéciales pour les morts à la suite des obsèques, mais les membres de
l'Église ont l'espoir remarquable de recevoir une bénédiction divine spéciale pour
leurs parents et leurs ancêtres. Chaque membre de l'Église peut donner à ses parents
décédés loccasion de faire un choix dans l'éternité après avoir fait le
baptême par procuration pour eux. »
Ensuite il explique ce point de
doctrine et cette pratique des saints des derniers jours.
Le baptême pour les
morts dans le passé
Antonenko déclare que le
baptême par procuration des morts a ses racines dans le christianisme antique : « Ceux
qui sont avancés dans létude de la religion peuvent conclure que le baptême par
procuration a existé dans l'histoire de l'Église chrétienne. » Citant comme exemple la
déclaration explicite de lapôtre Paul sur le sujet (voir 1 Corinthiens 15:29), il
continue : « La signification directe [littérale] du verset implique que le
baptême pour les morts pour les anciens chrétiens était la confirmation de leur
foi de leur croyance en la résurrection. »
Il ajoute : « Il est évident
que le baptême pour les morts a été pratiqué dans certaines des premières
communautés chrétiennes jusqu'à ce qu'il soit interdit par décret du Concile de
Carthage. »
Le baptême médiéval
des morts en Russie (maintenant lUkraine)
Antonenko continue :
« Cependant, la tradition des
baptêmes posthumes a continué à exister dans les périodes postérieures. On la
connaissait aussi dans la Russie ancienne. En 1044, Iaroslav, surnommé le Sage, grand duc
pieux de Kiev [capitale de la République actuelle dUkraine], a introduit
[physiquement] dans l'église deux de ses oncles, Oleg et Jaropolk, qui étaient morts
bien avant cela et étaient officiellement païens [non baptisés au moment de leur
décès].
« Pour dire la vérité, dans
ce cas-ci on peut difficilement parler de baptême par procuration. Les chroniques disent
que les os des ducs furent exhumés des tombeaux, baptisés et puis enterrés dans la
cathédrale de la Sainte Vierge des Dîmes. Au sujet d'Oleg et de Jaropolk, on sait qu'ils
ont été élevés et éduqués par leur grand-mère, la grande duchesse Olga, et qu'ils
croyaient au Christ et que sils nont pas été baptisés, cest à cause
de circonstances défavorables
tués dans des querelles intestines.
« Iaroslav le Sage était
convaincu que c'était son devoir daider ses oncles décédés prématurément à
mener à bonne fin leur choix chrétien
L'exemple donné est très important : le
baptême des morts fut accompli officiellement dans l'église construite par saint
Vladimir.

Reconstitution actuelle de la grande porte de Kiev.
La statue est celle du grand duc Iaroslav le Sage.
Lexemple du grand
duc Vladimir ?
En agissant comme cela, le
grand duc Iaroslav a-t-il suivi un exemple donné plusieurs décennies auparavant par le
grand duc Vladimir, dont on dit aussi quil a baptise les morts ?
En échange de son aide pour
écraser les soulèvements en Bulgarie et en Anatolie contre l'empereur byzantin Basile
II, le grand duc Vladimir reçut Anna, la sur de l'empereur, comme épouse
à
condition qu'il devienne chrétien. Il fut dûment baptisé en 988 et reçut son épouse
byzantine. Il fit alors du christianisme la religion d'État et commanda et finalement
força ses sujets à se faire baptiser, et il construisit des églises, des écoles et des
bibliothèques chrétiennes.
On raconte que « Vladimir
était tellement impressionné par l'importance du baptême et sa nécessité pour être
sauvé qu'il fit exhumer les ossements de ses frères et les fit baptiser chrétiens
littéralement un baptême pour les morts. » (Tiré d'une lettre écrite en 2007
par un certain Irvin Moritzky, Américain dorigine ukrainienne, qui renvoie au
Déclin et Chute de lEmpire romain, de Gibbons.)
Étant donné les parallèles
remarquables entre les « baptêmes dossements » de Iaroslav et de Vladimir, on est
en droit de se demander s'il ne sagit pas dune seule et même histoire,
lune des deux étant attribuée par erreur à lun des deux grands ducs et à
la mauvaise année. Limportant est cependant la déclaration des savants orthodoxes
que des baptêmes pour les morts étaient pratiqués dans l'Église chrétienne ancienne
et qu'il y a eu au moins un cas de ce genre de baptême qui est attesté dans l'Église
russe ancienne.

Tableau représentant la grande porte de Kiev par
Hartmann (XIXe siècle). Cette représentation fantasmée a inspiré la « scène » de la
grande porte dans la suite musicale de Moussorgski, Tableaux dune exposition.
De vraies ordonnances
du temple en Ukraine
Cest il y a mille ans que
des baptêmes chrétiens pour les morts ont été faits à Kiev. Le 23 juin 2007, le
premier coup de pioche était donné pour un temple de l'Église de Jésus-Christ des
Saints des Derniers Jours à Kiev. Après presque une décennie de problèmes consécutifs
à l'annonce du temple en 1998, ce dernier est maintenant en construction. De vrais
baptêmes pour les morts seront bientôt faits en Ukraine par des saints des derniers
jours qui détiennent l'autorité de la prêtrise divinement rétablie pour ce faire.

Maquette du temple de Kiev dévoilée lors du
premier coup de pioche en juin 2007.
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