Écritures
Auteurs: DAVIES, W.D. et MADSEN, TRUMAN G.

Bien que le mot «Écritures» désigne habituellement des documents écrits, dans les sources mormones il se définit aussi comme «tout ce qu’ils [les représentants de Dieu] diront sous l’inspiration du Saint-Esprit» (D&A 68:2-4; cf. 1:38; 2 Pi. 2:21; 2 Ti. 3:16). Cette compréhension plus large du terme est à la fois un principe global et une définition fonctionnelle, tenant compte des modes écrits et verbaux de l’inspiration.
Le corpus des Écritures mormones est sensiblement plus volumineux que celui du canon protestant traditionnel. Il comprend la Bible, le Livre de Mormon (531 pages, édition anglaise de 1981), les Doctrine et Alliances (294 pages, édition de 1981) et la Perle de Grand Prix (61 pages, édition de 1981). Dès le départ, l’engagement des saints des derniers jours vis-à-vis de la Bible et du Livre de Mormon et leur tentative de formuler et de standardiser immédiatement leur enseignement par rapport aux cultures environnantes ont fait d’eux un peuple «livresque». Par contraste, dans le judaïsme, le christianisme et l’Islam, le processus de compilation et de fixation des écrits sacrées comme «canoniques» a eu lieu relativement longtemps après leur origine et dans chaque cas le processus a eu comme conséquence un canon fermé.
Les saints des derniers jours acceptent la Bible comme étant la parole de Dieu «dans la mesure où elle est traduite correctement» (8e A de F). Ils reconnaissent que bien que les messages de l’Écriture soient d’origine et d’impulsion divines, les paroles dans lesquels elles sont formulées sont d’origine humaine (cf. Mrm. 8:16-17; Ét. 12:23-27). La page de titre du Livre de Mormon dit: «S’il y a des fautes, ce sont les erreurs des hommes.» Pour certains, de telles affirmations renforcent plutôt que d’affaiblir leur respect pour la révélation véritable (Stendahl, p. 100). Cette prise de position évite à la fois la doctrine de l’inerrance verbale et le point de vue naturaliste que la Bible est un document entièrement humain et vieillissant en plus.
Les Écritures des saints des derniers jours sont qualifiées d’ouvrages canoniques. Le mot «canon» est rarement utilisé, en partie parce qu’il suggère la finitude, l’achèvement, la clôture. En principe et en fait, des ajouts aussi bien que des clarifications et des traductions officielles occasionnelles, sont apportés aux ouvrages canoniques dans le double processus de la présentation par les dirigeants vivants et, en accord avec la loi du consentement commun, l’acceptation par les membres de l’Église. De cette façon, les saints des derniers jours s’engagent par alliance à les considérer comme Écriture. L’ajout aux Doctrine et Alliances d’une révélation au sujet du royaume céleste reçue par Joseph Smith et d’une vision de la rédemption des morts reçue par Joseph F. Smith en sont des exemples modernes (D&A 137, 138).
Le caractère perpétuel de l’Écriture, un corpus sans cesse augmenté par des témoins vivants dans un cadre de prophétie et de témoignage, est un signe et un symbole de l’universalité de la foi des saints (Davies, p. 61). Pareille position fait contraste avec la conception minimaliste («un seul canon suffit»). Les Samaritains, par exemple, n’accordaient le statut d’Écriture qu’au seul Pentateuque. Pour les saints des derniers jours, l’Écriture n’est pas une «révélation définitive». Il n’y a pas de «cercle de la foi» non extensible. Il n’y a aucun texte sacré qui, à cause de sa sainteté reconnue, interdise l’addition d’autres textes sacrés. Aucun document ou recueil ne suffit en lui-même pour la rédemption, pour le salut, pour l’éclaircissement complet ou pour le perfectionnement de l’âme.
Deux principes se dégagent quand il s’agit de définir ce qui doit être considéré comme Écriture. D’abord, on ne sait si un autre parle avec l’autorité du Saint-Esprit que grâce à l’influence du Saint-Esprit. C’est ainsi qu’en dernière analyse, c’est au lecteur et à l’auditeur qu’incombe la responsabilité de prouver le statut scripturaire d’un document (cf. Brigham Young, JD 7:2). Les saints des derniers jours enseignent que tous ont droit à cette assurance et à ce témoignage. En second lieu, le président de l’Église et ceux qui lui sont associés comme prophètes, voyants et révélateurs ont reçu une dotation et une juridiction spirituelles spéciales. Seul le président parle ou écrit pour l’Église et à l’Église dans son ensemble. Les autres peuvent fonctionner de la même manière mais seulement dans leur office et appel propre. De plus, «un prophète n’est pas toujours prophète; uniquement quand il agit comme tel» (HC 5:265; 2:302; EPJS, p. 224). Ceux qui sont officiellement appelés et ordonnés pour diriger sont, selon la terminologie des saints, «les oracles vivants» et «là où les oracles de Dieu ne sont pas, le royaume de Dieu n’est pas» (WJS, p. 156). Seul le président de l’Église a la responsabilité et la charge d’exercer toutes les clefs de la présentation et de la proclamation des Écritures. Ces principes et ces pratiques sont établis pour sauvegarder la sainteté et veiller à l’application des paroles et des écrits inspirés, tant passés que présents.
Au-dessus de l’autorité du document écrit se trouve l’autorité du prophète vivant et, au-delà de lui, l’autorité suprême du Seigneur lui-même. «Vous pouvez étreindre la Bible tout contre vous, a dit Joseph Smith, mais si vous ne pouvez pas, par la foi en elle, obtenir la révélation pour vous-même, la Bible ne vous profitera guère» (Osborne). De plus, «La meilleure manière d’obtenir la vérité et la sagesse n’est pas de la demander à des livres, mais d’aller trouver Dieu dans la prière et d’obtenir l’enseignement divin» (EPJS, p. 154). Brigham Young a affirmé: «Je préfère avoir les oracles vivants que tout ce qui est écrit dans les livres» (cité dans CR, oct. 1897, pp. 22-23). Mais les oracles vivants et les laïcs responsables ne sont pas, dans la théorie ou dans la tradition, complètement indépendants de l’écrit. B. H. Roberts, historien de seconde génération faisant autorité et Autorité générale, a écrit à propos du corpus de l’Écriture: Il fixe de manière permanente les vérités générales que Dieu a révélées. Il préserve, pour tous les temps et pour toutes les générations des hommes, le grand cadre du plan de salut: l’Évangile. Il y a des vérités qui ne sont pas affectées par les circonstances sans cesse changeantes, des vérités qui sont toujours les mêmes, aussi souvent qu’elles soient révélées, des vérités qui sont élémentaires, permanentes, fixées, dont on ne doit ni ne peut s’écarter sans risquer la condamnation. La parole de Dieu mise par écrit protège le peuple de Dieu des traditions vaines et insensées, qui, tandis qu’elles dérivent le long du fleuve du temps, sont sujettes à des changements par déformation, par ajouts ou soustractions ou par le jeu capricieux de la fantaisie d’esprits fantasques auxquels on ne peut pas se fier. Elle constitue un critère grâce auquel même les oracles vivants de Dieu peuvent s’instruire, s’évaluer et se corriger. Elle met à la portée du peuple le pouvoir de confirmer les paroles et le ministère des oracles vivants, et d’ajouter ainsi la foi à la foi et la connaissance à la connaissance [IE 3, mai 1900, pp. 576-577].
Par contraste, dans le judaïsme, le remplacement des prophètes par des rabbins ou des savants comme gardiens et interprètes de l’Écriture a été poussé à l’extrême: «Même s’ils [les sages] te disent que la gauche est la droite et que la droite est la gauche, écoute ce qu’ils disent» (Midrash Siphre sur De. 17:10-11; cf. Talmud de Jérusalem, traité Horayoth 1:1, 45d). Ce qui rassurait face à l’erreur, même les erreurs de la communauté, c’était que même les erreurs commises dans les décisions de la loi faisaient force de loi. Dans un cas spectaculaire, Rabbi Eliezer prétendit qu’une voix céleste avait sanctionné son opinion minoritaire. Mais Rabbi Joshua insista sur le fait que la Torah, ou texte d’Écriture, est non dans le ciel mais sur la terre et que c’était l’opinion de la majorité qui devait l’emporter (voir aussi Davies, Paul and Rabbinical Judaism, 1980, pp 374, 212n). Dans le christianisme traditionnel, les conseils ecclésiastiques se sont parfois arrogé des prérogatives semblables.
Dans leur doctrine concernant les Écritures, les saints des derniers jours ont réduit ces tensions et d’autres encore de ce type qui existent entre le judaïsme biblique et le judaïsme talmudique (c.-à-d., entre la loi écrite et la loi orale) ou, comme dans les traditions chrétiennes romaine et orientale, entre l’héritage biblique et les affirmations de la tradition et des credo ou, comme dans le protestantisme, entre l’intention originale associée à l’esprit de l’Écriture et l’affirmation que l’interprétation personnelle est valide.
L’idée d’un canon ouvert a signifié historiquement une certaine ouverture à d’autres sources historiques, apocryphes et pseudépigraphiques. L’Écriture moderne assure aux saints des derniers jours que des documents importants vont encore venir au jour (cf. 2 Né. 29:10-14; 9e A de F). Les Apocryphes de l’Ancien Testament contiennent beaucoup de choses «qui sont vraies» mais également beaucoup d’interpolations (D&A 91). «À ceux qui le désirent, il devrait être donné par l’Esprit de discerner le vrai du faux» (HC 1:363). Par analogie, d’autres documents récemment récupérés (par exemple, les manuscrits de la mer Morte, la bibliothèque de Nag Hammadi et les inscriptions et les fragments qui y ont trait) sont considérés comme instructifs, bien que non canoniques. Dans certains cas, leurs enseignements précèdent et font écho à des documents scripturaires authentiques.
L’importance des approches linguistique, contextuelle, historique et littéraire de l’Écriture a été soulignée de plusieurs manières dans l’Église: une école des prophètes a été organisée dans les tout débuts de l’Église, où l’on étudiait l’hébreu, le grec et l’allemand en tant qu’aides bibliques; on se servait des traductions alternatives de la Bible, notamment les révisions de la Traduction de la Bible par Joseph Smith (TJS); on préférait officiellement la King James Version en raison de son style littéraire et de son accessibilité à d’autres groupes chrétiens, et d’autres; on se servait de diverses éditions des Écritures bibliques et modernes, y compris des textes critiques, des dictionnaires bibliques et on faisait une utilisation sélective des efforts naissants des sciences bibliques mondiales (voir Erudition bibique).
Il y a toute une constellation de significations qui accompagne la notion de parole vivante venant de la voix d’un prophète vivant. De plus, la voix vivante est généralement plus riche que n’importe quel écrit, qui est tout au plus une synthèse à décrypter. C’est pour cela que Joseph Smith disait qu’on ne devrait jamais croire qu’une lettre puisse dire ce qui pourrait être dit de vive voix. «Aussi pures que soient vos intentions, aussi élevée que soit votre position, vous ne pouvez pas toucher le cœur de l’homme quand vous êtes absent autant que quand vous êtes présent» (Woman’s Exponent 3, 1er avril 1875, p. 162). Les risques de malentendus sont sensiblement accrus quand on n’a que le texte.
Dans l’histoire du canon, diverses étapes ou périodes ont été témoins d’exégèses, d’expansions ainsi que de gloses et d’altérations stylistiques qui changent également le contenu. On peut avancer l’argument qu’au cours des siècles ce processus a contribué à l’amélioration et à la force des textes, mais on peut également affirmer qu’il y a eu des écarts, de la dilution et de la corruption des textes. Les saints des derniers jours estiment que les deux processus ont joué. «Des traducteurs ignorants, les copistes négligents ou des prêtres conspirateurs et corrompus ont commis beaucoup d’erreurs» (EPJS, pp. 264-265). D’autre part, la Bible et d’autres textes sont conservés d’une manière impressionnante, avec suffisamment de lumière pour bénir et condamner. Pour leur part, les saints des derniers jours font finalement confiance à l’inspiration de l’Esprit.
Les saints des derniers jours ne sont pas les seuls à penser ainsi. Par exemple, H. J. Schoeps montre que la critique juive des idées du temple et du sacrifice a été modifiée quand la Bible a été assemblée (Davies, p. 61). Et au fil des siècles, les changements ont souvent éloigné plutôt que rapproché d’un affinement des normes et des pratiques chrétiennes originales.
Le pouvoir de révélation des Écritures dépend en partie de sa faculté d’adaptation. Le Seigneur dit à propos des Écritures modernes et, implicitement, de toutes les Écritures antérieures: «Ces commandements sont de moi et ont été donnés à mes serviteurs dans leur faiblesse, selon leur langage, afin qu’ils les comprennent» (D&A 1:24).
Le sens évident a également été un principe directeur dans l’exégèse des saints. «Mon âme met ses délices dans la clarté», dit le prophète du Livre de Mormon Néphi 1 (2 Né. 31:3). Rien ne peut l’emporter sur la signification évidente du texte (cf. traité talmudique Shabbath 63a). Cette position n’est ni un refus de voir les significations subtiles et sous-jacentes du texte ni un a priori théologique permettant des excès allégoriques, comme dans les enseignements de certains rabbins et de certains érudits chrétiens d’autrefois. On ne peut pas superposer les significations plus profondes à un texte d’Écriture; on doit les trouver avec l’aide divine dans l’intention et l’esprit de l’auteur original (cf. 2 Pi. 1:20-21). Malgré toute leur complexité et toute leur diversité, les Écritures sont rédigées en une langue ordinaire; par exemple, le vocabulaire fonctionnel du Livre de Mormon comporte moins de 2.300 mots de base.
Dans la pratique, les saints des derniers jours considèrent certains autres textes avec un respect spécial, basé sur leur utilisation, chacun avec sa propre mesure d’autorité. Par exemple, des prières fixes sont indiquées pour le baptême et pour la Sainte-Cène (voir Prière de baptême; Prière). Les autres textes et paroles faisant autorité – avec des niveaux différents d’autorité – sont les messages de la Première Présidence, les ordonnances et les alliances du temple, les bénédictions patriarcales, le livre de cantiques, les manuels pour la prêtrise et les organisations auxiliaires et les manuels pour enseigner dans les diverses organisations de paroisse.
C’est une unité de la foi, souvent considérée comme remarquable, qui découle de cette ouverture sans pareille à davantage de révélations et du système de freins et de contrepoids de l’Église. La participation des laïcs de l’Église, qui nécessite le partage des responsabilités, et la loi du consentement commun fonctionnent ensemble lors du processus de présentation, de confirmation et d’acceptation des paroles inspirées.
Pour les saints des derniers jours, on ne peut pas réduire les Écritures à l’histoire scientifique, à la sociologie ou au folklore, à un simple ensemble de principes fondamentaux, de commandements et d’appareil juridique, à des paraboles pleines de charme, à des noms ésotériques et cachés avec des liens mystiques qui auraient un pouvoir et une vie propres. Les Écritures sont le résultat d’un déversement d’en haut dont la signification et l’application actuelles à une personne donnée nécessitent une étude soigneuse et l’inspiration directe.
Martin Buber, faisant objection à ceux qui considèrent la Torah comme un monde fermé, écrit: «Pour vous, Dieu est quelqu’un qui a créé dans le passé et ne crée plus; mais pour nous, Dieu est celui qui ‘renouvelle chaque jour l’œuvre de la création’. ‘Pour vous, Dieu est quelqu’un qui s’est révélé dans le passé et ne se révèle plus; mais pour nous il parle depuis le buisson ardent du présent… dans les révélations du fond de notre cœur – plus grandes que les paroles» (p. 204). Cette déclaration exprime une grande partie de l’esprit de la façon dont les saints des derniers jours abordent les Écritures. La signification et la force se dressent contre le «durcissement» des traditions et favorisent la confiance dans le témoignage vivant de l’Esprit pour illuminer, clarifier et sanctifier les Écritures en tant que «vérité actuelle».

Bibliographie
Buber, Martin. Great Jewish Thinkers of the Twentieth Century, dir. de publ. S. Noveck. Clinton, Mass., 1963.
Clark, J. Reuben, Jr. "When Are Church Leaders’ Words Entitled to Claim of Scripture?" Church News, 31 juillet 1954, pp. 9-11.
Davies, W. D. "Reflections on the Mormon Canon." Harvard Theological Review 79, 1986, pp. 44-66. Réimprimé dans Christians Among Jews and Gentiles, dir. de publ. G. W. E. Nicklesburg et George W. MacRae, S.V., pp. 44-66. Philadelphia, 1986.
Osborne, D. Juvenile Instructor 27, 15 mars 1892, p. 173.
Stendahl, Krister. "The Sermon on the Mount and Third Nephi in the Book of Mormon." Dans Meanings, p. 100. Philadelphie, 1984.
Welch, John W., et David J. Whittaker. "Mormonism’s Open Canon: Some Historical Perspectives on Its Religious Limits and Potentials." F.A.R.M.S. Paper. Provo, Utah, 1986.
W. D. DAVIES
TRUMAN G. MADSEN

Écritures: Autorité des Écritures
Auteur: JACKSON, KENT P.

Pour les saints des derniers jours, la notion d’Écriture entraîne deux définitions complémentaires, une définition générale, qui englobe toute révélation de Dieu comme étant «Écriture», et une vision plus restreinte, qui n’inclut que les ouvrages canoniques comme «Écriture». Les deux catégories font autorité puisque les deux sont considérées comme venant de Dieu.
La première définition utilise le mot «Écriture» comme synonyme de termes tels que «inspirée» ou «divinement révélée». Pour ce qui concerne ceux qui ont été appelés et ordonnés pour proclamer la parole de Dieu, c’est une révélation des Doctrine et Alliances qui fournit la base: «Tout ce qu’ils diront sous l’inspiration du Saint-Esprit sera Écriture, sera la volonté du Seigneur, sera l’avis du Seigneur, sera la parole du Seigneur, sera la voix du Seigneur et le pouvoir de Dieu pour le salut» (D&A 68:4). Dans cette lumière, les saints des derniers jours tiennent en haute estime les paroles des dirigeants de l’Église à tous les niveaux. Font particulièrement autorité les déclarations officielles de la Première Présidence et du Collège des douze apôtres qui sont soutenus par les membres de l’Église comme «prophètes, voyants et révélateurs». Leurs écrits et leurs discours – en particulier ceux de conférence générale – sont cités fréquemment comme guides pour la vie et comme interprétation autorisée en matière de doctrine. Les déclarations publiées par la Première Présidence représentent la position et la politique officielles de l’Église.
Joseph Smith a enseigné que «un prophète n’est pas toujours prophète; uniquement quand il agit comme tel» (HC 5:224). Ainsi donc, les paroles des prophètes n’ont force d’Écriture que quand elles sont prononcées sous l’influence du Saint-Esprit. Les saints des derniers jours reconnaissent volontiers cette influence divine dans les enseignements et les conseils des dirigeants et considèrent que c’est une bénédiction d’être instruits par eux. Ils considèrent cette direction inspirée comme étant «Écriture» au sens général du terme et s’efforcent d’y faire coïncider leur vie.
La conception plus restrictive de ce qui constitue l’Écriture ne comprend que ce qui est appelé «les Écritures» c’est-à-dire les quatre ouvrages canoniques: la Bible, le Livre de Mormon, les Doctrine et Alliances et la Perle de Grand Prix. Ils constituent le corpus canonisé, faisant autorité des Écritures révélées par rapport auquel tout le reste est évalué. Le président Joseph Fielding Smith a enseigné: «Mes paroles et les enseignements de n’importe quel autre membre de l’Église, grand ou petit, s’ils ne cadrent pas avec les révélations, nous ne devons pas les accepter… Nous avons accepté les quatre ouvrages canoniques comme critères ou balances que nous utilisons pour mesurer les doctrines de tous les hommes» (DS3, p. 183).
Bien que l’Église considère ses Écritures comme un canon dans un sens strict, elle ne considère pas celui-ci comme fermé. La doctrine de la révélation continue est l’une des croyances fondamentales de l’Église. Comme l’a dit Joseph Smith, «nous croyons tout ce que Dieu a révélé, tout ce qu’il révèle maintenant, et nous croyons qu’il révélera encore beaucoup de choses grandes et importantes concernant le royaume de Dieu» (9e A de F). Tout en acceptant «tout ce que Dieu a révélé», que ce soit canonisé dans les Écritures ou pas, les saints des derniers jours croient également que la révélation continue à éclairer leurs dirigeants. De plus, elle s’attend à des directives divines supplémentaires parce que Dieu «révélera encore beaucoup de choses grandes et importantes». Ces futures révélations seront Écriture, selon la définition générale, et il est probable que certaines d’entre elles seront ajoutées en temps voulu aux Écritures.

Bibliographie
Jackson, Kent P. "Latter-day Saints: A Dynamic Scriptural Process." Dans The Holy Book in Comparative Perspective, dir. de publ. F. Denny and R. Taylor, pp. 63-83. Columbia, S.C., 1985.
Jackson, Kent P. "The Sacred Literature of the Latter-day Saints." Dans The Bible and Bibles in America, dir. de publ. E. Frerichs, pp. 163-91. Atlanta, Ga., 1988.
Talmage, James E. AF, pp. 291-387.
KENT P. JACKSON

Écriture: Paroles des prophètes vivants
Auteur: ANDERSON, A. GARY

Tout message qui vient de Dieu à l’homme par le pouvoir du Saint-Esprit est Écriture pour celui qui le reçoit, que ce soit sous forme écrite ou verbale (MD, p. 682; cf. 2 Né. 32:3). Paul a écrit à Timothée que «Toute Écriture est inspirée de Dieu, et utile pour enseigner, pour convaincre, pour corriger, pour instruire dans la justice» (2 Ti. 3:16). De plus, toute personne peut recevoir des révélations personnelles pour son profit personnel. Néanmoins, Dieu a toujours désigné des prophètes pour parler pour lui, ce qui est à l’origine des Écritures saintes. Quand Aaron fut appelé comme porte-parole de Moïse, le Seigneur dit: «Il parlera pour toi au peuple; il te servira de bouche, et tu tiendras pour lui la place de Dieu» (Ex. 4:15-16).
Les membres de l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours croient en la révélation continue, particulièrement aux prophètes qui dirigent l’Église. Ce point de doctrine a été annoncé dans une révélation reçue par le prophète Joseph Smith en novembre 1831: «Et tout ce qu'ils [les serviteurs de Dieu] diront sous l'inspiration du Saint-Esprit sera Écriture, sera la volonté du Seigneur, sera l'avis du Seigneur, sera la parole du Seigneur, sera la voix du Seigneur et le pouvoir de Dieu pour le salut» (D&A 68:4). Les paroles inspirées du prophète et président de l’Église ont été et peuvent à l’avenir être ajoutées aux ouvrages canoniques par le consentement commun de l’Église.
Les saints des derniers jours soutiennent la Première Présidence et le Collège des douze apôtres comme prophètes, voyants et révélateurs. Puisque le prophète et président de l’Église est soutenu comme prophète, voyant, et révélateur, il est le porte-parole officiel qui parle au nom du Seigneur à l’Église (D&A 21:4-5; 28:2). Ces autres prophètes, voyants et révélateurs ont le droit, le pouvoir et l’autorité de déclarer la volonté de Dieu à son peuple, mais dépendent de l’autorité du président (D&A 132:7).
Les paroles inspirées du président de l’Église ont force de loi sur les membres de l’Église, qu’elles soient acceptées officiellement comme élément du canon écrit ou pas. Les paroles inspirées du prophète vivant remplacent et deviennent plus importantes pour des saints des derniers jours que le canon écrit ou les déclarations prophétiques antérieures (D&A 5:10). Le salut et l’exaltation des membres de l’Église dépendent de leur acceptation de cette inspiration divine par le prophète vivant, qui vient comme une voix d’avertissement au monde (D&A 1:4-5).
Ce point de doctrine apparaît dans l’Ancien Testament. Par exemple, les gens n’auraient pu être sauvés du déluge qu’en écoutant la voix de Dieu par son prophète Noé. De même, il était attendu des Israélites qu’ils acceptent et obéissent de manière responsable aux paroles de Moïse comme si le Seigneur lui-même les avait prononcées (De. 18:18-22). Le Seigneur a également enseigné que «Lorsqu’il y aura parmi vous un prophète, c’est dans une vision que moi, l’Éternel, je me révélerai à lui, c’est dans un songe que je lui parlerai» (No. 12:6).
On peut trouver l’insistance des premiers chrétiens sur «la voix vivante» dans les écritures de Papias (v. 130 apr. J.-C.): «S’il arrivait à quelqu’un de venir qui avait été réellement disciple des anciens, je m’informais sur les discours des anciens, de ce qu’André ou Pierre disaient ou Philippe ou Thomas ou Jacques ou Jean ou Matthieu ou tout autre des disciples du Seigneur…. Car je pensais que ce qui était dans les livres ne me profitait pas autant que les paroles d‘une voix vivante et durable» (Eusèbe, Histoire ecclésiastique 3.39.4).
Les saints des derniers jours acceptent la doctrine que ce que Dieu déclare, «que ce soit par [sa] propre voix ou par la voix de [ses] serviteurs, c’est la même chose» (D&A 1:38). D’autre part, les prophètes ont droit à leur opinion personnelle, par conséquent tout ce qu’ils disent n’est pas considéré comme une déclaration ou une interprétation officielle d’Écriture. Ce n’est que quand ils sont inspirés à parler à l’Église par le Saint-Esprit qu’ils parlent Écriture. Pour que l’auditeur détermine si un prophète parle en tant que tel, le pouvoir du Saint-Esprit doit lui témoigner que le message est divinement inspiré. Le Saint-Esprit est donné à tous pour connaître la vérité de toutes choses (Mro. 10:5).

Bibliographie
Benson, Ezra Taft. "Fourteen Fundamentals in Following the Prophet." BYU Speeches of the Year, 1977 -80, pp. 26-30. 26 févr. 1980.
Département d’Education de l’Église. Teachings of the Living Prophets, pp. 6-22. Salt Lake City, 1982.
Clark, J. Reuben, Jr. "When Are Church Leaders' Words Entitled to Claim of Scripture?" Church News, 31 juillet 1954, pp. 9-11.
Horton, George A., Jr. Keys to Successful Scripture Study, pp. 2-11. Salt Lake City, 1989.

A. GARY ANDERSON

Écritures: Écritures à venir
Auteur: CLOWARD, ROBERT A.

Les saints des derniers jours croient que Dieu «révélera encore beaucoup de choses grandes et importantes» (9e A de F), que les cieux ne sont pas fermés et que Dieu continue à «déverser la connaissance du haut des cieux sur [leur] tête» (D&A 121:33). On s’attend à ce que les révélations à venir incluent à la fois des vérités antiques rétablies et de nouvelles vérités dévoilées.
Les Écritures prédisent spécifiquement le rétablissement de beaucoup de livres qui feront connaître les choses claires et précieuses ôtées du monde (1 Né. 13:39-40). Celles-ci comprennent le livre d’Hénoc (D&A 107:57), un récit complémentaire des événements qui se sont produits sur la montagne de la Transfiguration (D&A 63:20-21), la totalité du livre de Jean et des visions au sujet de la fin du monde (1 Né. 14:18-27; Ét. 4:16; D&A 93:6, 18), la partie scellée du Livre de Mormon, y compris la vision du frère de Jared (2 Né. 27:7-11; Ét. 3:25-27; 4:7), les plaques d’airain (Alma 37:4-5; voir aussi Plaques et Annales du Livre de Mormon), un compte rendu plus complet des enseignements de Jésus-Christ aux Néphites (3 Né. 26:6-11) et les annales des tribus perdues d’Israël (2 Né. 29:12-13).
Nous ignorons comment ou quand ces Écritures paraîtront au-delà de la croyance générale que d’autres révélations viendront au temps voulu par le Seigneur lorsque les hommes se repentiront, feront preuve de foi et seront prêts à les recevoir (2 Né. 28:30; Ét. 4:1-12). Les saints des derniers jours croient que le monde n’a vu que le commencement du grand rétablissement doctrinal et scripturaire par lequel la volonté de Dieu réunira «toutes choses en Christ» (Ép. 1:10). Les annales célestes et terrestres de toutes les dispensations doivent être rassemblées (1 Né. 13:41), et «rien ne sera retenu» (D&A 121:28).

Bibliographie
Maxwell, Neal A. "God Will Yet Reveal." Ensign 16, nov. 1986, pp. 52-59.
McConkie, Bruce R. "The Doctrinal Restoration." Dans The Joseph Smith Translation, dir. de publ. M. Nyman et R. Millet, pp. 1-22. Provo, Utah, 1985.
ROBERT A. CLOWARD

Écriture, interprétation dans l’Écriture
Auteur: THOMAS, CATHERINE

La clef de l’interprétation des passages scripturaires se situe souvent dans le corps même de l’Écriture. Par exemple, certains passages de l’Ancien Testament reçoivent un commentaire et une interprétation dans le Nouveau Testament. Jésus-Christ enseignait fréquemment à l’aide de l’Ancien Testament, donnant non seulement une interprétation, comme dans l’incident où David doit manger les pains de proposition du temple (1 S. 21:1-6) pour justifier le fait que ses disciples arrachaient des épis de blé le jour du sabbat (Mc. 2:23-26), mais soulignant souvent aussi que les Écritures témoignent qu’il était le Messie (Lu. 4:18-21; Jn. 5:39). Les Écritures supplémentaires que les saints des derniers jours acceptent – le Livre de Mormon, les Doctrine et Alliances et la Perle de Grand Prix – citent et interprètent aussi la Bible. En fait, beaucoup d’entre les interprétations les plus claires de la doctrine proviennent des révélations modernes ou des Écritures rétablies.
Dans la Perle de Grand Prix, le livre de Moïse et le livre d’Abraham détaillent le récit de la Création donné par la Genèse de l’Ancien Testament (Moï. 2-3; Abr. 4-5), affirment le libre arbitre de l’homme (Moï. 3:17; 7:32), éclaircissent la chute d’Adam (Moï. 4; Abr. 5) et expliquent par conséquent la nécessité d’un Rédempteur (Moï. 6:59; cf. 4:1-2; 5:7-8). En outre, ces deux livres ajoutent des informations sur les prétentions de Satan et le fait que c’est le Christ qui a été choisi dans le monde prémortel (Moï. 4:1-4; Abr. 3:27-28) où tous les esprits de l’humanité ont vécu avant leur arrivée sur la terre (voir Vie prémortelle).
Dans Joseph Smith–Matthieu, le prophète Joseph Smith reçoit des éclaircissements sur les commentaires du Sauveur dans Matthieu 24 concernant les événements qui doivent précéder la chute de Jérusalem et ceux qui doivent précéder la venue de Jésus dans les derniers jours. Selon Joseph Smith–Histoire, Moroni 2 lui cite Malachie 4:6 différemment de la version de l’Ancien Testament, suggérant que l’expression «les pères» se rapporte aux Patriarches, particulièrement à Abraham, avec qui Dieu fit des alliances concernant la postérité d’Abraham, qui porterait les ordonnances de la prêtrise au monde pour l’exaltation de la famille humaine (JS–H 1:39; D&A 27:9-10).
Le Livre de Mormon éclaircit beaucoup d’écrits des prophètes de l’Ancien Testament. Le prophète Néphi 1 cite Ésaïe 48-49 (1 Né. 20-21) et fait ensuite un commentaire clair sur les points principaux de ces chapitres dans 1 Néphi 22, soulignant que les Néphites sont un reste de l’Israël dispersé, qui serait par la suite rassemblé avec l’aide des Gentils. Dans un autre exemple, vers 148 av. J.-C., le prophète néphite Abinadi identifie «l’homme de douleur» d’Ésaïe 53 comme étant Jésus-Christ (Mos. 15:2-5) et amplifie les commentaires d’Ésaïe sur l’expiation du Messie (Mos. 14-15).
Le Livre de Mormon illumine également le sermon sur la montagne (Mt. 5-7). Dans un sermon semblable donné sur le continent américain (3 Né. 12-14), Jésus ressuscité dit: «Bénis sont les pauvres en esprit qui viennent à moi» (3 Né. 12:3; italiques ajoutés). Ces mots supplémentaires, plus le contexte dans lequel le discours de Jésus est donné, indiquent qu’on doit aller au Sauveur par le baptême et par la justice pour recevoir les bénédictions promises dans les béatitudes.
Les Doctrine et Alliances proposent une interprétation sur plusieurs points obscurs du livre de l’Apocalypse qui concernent des événements des derniers jours, tels que le rassemblement d’Israël et le fait qu’il va recevoir les ordonnances de la prêtrise (D&A 77:8-9, 11). On trouve spécialement dans Doctrine et Alliances 45 et 86 des éclaircissements sur des passages bibliques traitant des signes des derniers jours qui précéderont l’avènement de Jésus. Tandis qu’il méditait sur 1 Pierre 3:18-20, le président Joseph F. Smith reçut une vision de la rédemption des morts (maintenant D&A 138) qui éclaircissait et étendait l’œuvre rédemptrice du Sauveur au monde d’esprit après sa crucifixion.
Le prophète Joseph Smith a reçu beaucoup de révélations modernes en réponse aux questions découlant de son travail sur la traduction de Joseph Smith de la Bible (TJS). Par exemple, en méditant sur la résurrection pour la vie ou la damnation mentionnée dans Jean 5:29, Joseph Smith et Sidney Rigdon reçurent la révélation sur les degrés de gloire dans la résurrection (D&A 76). Joseph Smith a noté plusieurs cas où, tout en réfléchissant à un passage d’Écriture (par exemple, Ja. 1:5, une invitation à demander au Seigneur la sagesse), il a prié et a reçu du Seigneur des Écritures supplémentaires qui rendaient le premier plus de clair ou en confirmait la réalité (JS–H 1:11-20). Pendant qu’il traduisait les plaques du Livre de Mormon, Joseph Smith et Oliver Cowdery prièrent après avoir lu un passage qui avait trait au baptême. En réponse à cela, Jean-Baptiste vint avec de l’autorité et des instructions sur le baptême (JS–H 1:68-72). Après leur baptême, le prophète écrivit qu’ils étaient remplis du Saint-Esprit: «Notre esprit étant maintenant éclairé, nous commençâmes à voir les Écritures se dévoiler à notre entendement, et la véritable signification et le sens des passages les plus mystérieux se révéler à nous d'une manière à laquelle nous n'avions jamais pu parvenir précédemment, à laquelle nous n'avions même jamais pensé auparavant» (JS–H 1:74).
Néphi dit qu’il est essentiel d’avoir l’esprit de prophétie pour saisir le sens correct des Écritures. Il mentionne en particulier Ésaïe, «car, si les paroles d'Ésaïe ne sont pas claires pour vous, néanmoins elles sont claires pour tous ceux qui sont remplis de l'esprit de prophétie» (2 Né. 25:4). Aux chapitres 25-30, Néphi donne une explication prophétique des enseignements d’Ésaïe.
La révélation moderne et les Écritures rétablies offrent des interprétations indispensables de la Bible, aidant les saints des derniers jours à la comprendre plus complètement. Jésus réprimanda ceux qui avaient emporté la «clef de la connaissance» ou le moyen de comprendre les écrits bibliques (TJS Lu. 11:53), causant de ce fait la confusion dans l’interprétation des Écritures. Le Seigneur a dit: «Parce que vous avez une Bible, vous ne devez pas penser qu'elle contient toutes mes paroles; et vous ne devez pas non plus penser que je n'en ai pas fait écrire davantage… Je parlerai aux Juifs, et ils l'écriront; et je parlerai aussi aux Néphites, et ils l'écriront; et je parlerai aussi aux autres tribus de la maison d'Israël, que j'ai emmenées, et elles l'écriront; et je parlerai aussi à toutes les nations de la terre, et elles l'écriront… et ma parole sera aussi rassemblée en une seule» (2 Né 29:10, 12, 14; cf. Éz. 37:16-20). Les saints des derniers jours interprètent la Bible à la lumière de l’Écriture rétablie et de la révélation moderne parce que celles-ci ont rétabli la clef perdue de la connaissance.

Bibliographie
Gileadi, Avraham. "Isaiah: Four Latter-day Keys to an Ancient Book." Dans Isaiah and the Prophets, dir. de publ. M. Nyman. Provo, Utah, 1984.
McConkie, Bruce R. "The Bible, a Sealed Book." Dans Supplement to a Symposium on the New Testament, Département d’Education de l’Eglise, pp. 1-7. Salt Lake City, 1984.
Rust, Richard Dilworth. “’All Things Which Have Been Given of God…Are the Typifying of Him’: Typology in the Book of Mormon." Dans Literature of Belief, dir. de publ. N. Lambert. Provo, Utah, 1981.
CATHERINE THOMAS

 

Éducation
[Cette rubrique traite des sujets suivants: Éducation : Positionnement vis-à-vis de l'éducation. Éducation : Niveau atteint Voir aussi Académies ; Université Brigham Young ; Département d’éducation de l’Église (DEE) ; Histoire intellectuelle ; Écoles; Histoire sociale et culturelle.]

Éducation : Positionnement vis-à-vis de l'éducation
Auteur : GARDNER, DAVID P.

Les Articles de foi soulignent le rôle profond et fondamental que joue la connaissance dans les enseignements de l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours : « Nous recherchons tout ce qui est vertueux ou aimable, tout ce qui mérite l'approbation ou est digne de louange. » (13e A de F). À propos de l’intérêt des saints pour les études et l'éducation, M. Lynn Bennion a écrit : « Je doute qu’il existe une organisation qui oriente plus complètement son peuple vers une éducation de plus en plus poussée que l'Église mormone. Le programme éducatif de l'Église est aujourd'hui le prolongement cohérent des théories promulguées par ses fondateurs »(Bennion, p. 2).
Les idées et les pratiques de l'Église sont directement issues de certaines révélations reçues par Joseph Smith, qui soulignent la nature éternelle de la connaissance et le rôle vital que joue dans le développement spirituel, moral et intellectuel de l'humanité. Par exemple: « Il est impossible à un homme d'être sauvé dans l'ignorance » (D&A 131:6 ) de sa nature et de son rôle éternels. « La gloire de Dieu c’est intelligence ou, en d'autres termes, la lumière et la vérité » (D&A 93:36 ). « Quel que soit le principe d'intelligence nous atteignions dans cette vie, il se lèvera avec nous dans la résurrection. Et si, par sa diligence et son obéissance, une personne acquiert dans cette vie plus de connaissance et d'intelligence qu'un autre, elle en sera avantagée d’autant dans le monde à venir » (D&A 130:18-19). « La connaissances sauve l’homme. Et dans le monde des esprits, nul ne peut être exalté autrement que par la connaissance » (EPJS, p. 289). Un passage fréquemment cité du Livre de Mormon dit : «Être instruit est une bonne chose si on écoute les recommandations de Dieu » (2 Néphi 9:29). En juin 1831, Joseph Smith reçut une révélation concernant « le choix et la rédaction de livres pour les écoles de l’Église » (D&A 55:4) et une autre le 27 décembre 1832, fixant les grandes missions d'éducation dans l'Église :

« Et je vous donne le commandement de vous enseigner les uns aux autres la doctrine du royaume. Enseignez diligemment, et ma grâce vous accompagnera, afin que vous soyez instruits plus parfaitement de la théorie, des principes, de la doctrine, de la loi de l'Évangile, de tout ce qui a trait au royaume de Dieu, qu'il est opportun que vous compreniez ; des choses qui se trouvent dans le ciel, sur la terre et sous la terre; des choses qui ont été, des choses qui sont, des choses qui doivent arriver sous peu; des choses qui se passent au pays, des choses qui se passent à l'étranger; des guerres et des perplexités des nations, et des jugements qui sont sur le pays; et aussi d'une connaissance des pays et des royaumes, afin que vous soyez préparés en tout »[D&A 88:77-80].
L'Église a été édifiée sur la conviction que la progression éternelle dépend d’une vie vertueuse et de la progression dans la connaissance religieuse et laïque. « En effet, la nécessité d’apprendre est probablement le thème le plus fréquemment répété des révélations modernes » (L. Arrington, «The Founding of the L.D.S. Institutes of Religion », Dialogue 2, été 1967, p. 137).
Joseph Smith et bon nombre des premiers pionniers mormons étaient issus du milieu puritain de la Nouvelle-Angleterre, avec sa vénération pour la connaissance et l'instruction (Salisbury, p. 258). La perspective mormone suppose la perfectibilité de l'homme et sa capacité d'évoluer vers des niveaux moraux, spirituels et intellectuels toujours plus élevés. En outre, dans cette philosophie, toutes les espèces de connaissance sont utiles dans la tentative de l'homme de se réaliser dans ce monde et dans l'au-delà. « C'est l'application de la connaissance pour le bien-être spirituel de l'homme qui constitue l'idéal mormon de l'éducation » (Bennion, p. 125). C’est pourquoi, les premiers dirigeants de l'Église ne voyaient guère de points de discorde entre l'instruction laïque et religieuse correcte. Vaste dans sa portée et spirituelle dans son l'intention, la philosophie de l’éducation chez les saints a tendance à fusionner le profane et le religieux, parce que, dans le contexte mormon, les deux font partie d'une trame unique sans raccord (Bennion, p. 120-123).
En 1833, Joseph Smith fonda la première entreprise éducative de l'Église, l'école des prophètes, à Kirtland (Ohio). Cette école se consacrait à l'étude de l'histoire, des sciences politiques, des langues (dont l'hébreu), de la littérature et de la théologie. Son but principal était de préparer les dirigeants de l’Église à magnifier leur appel missionnaire d’avertir tout le monde et de témoigner de l'Évangile (D&A 88:80 -81). Elle donna aussi l'exemple d'études pour adultes qui fut suivi « au Missouri, en Illinois et en Utah, où les parents rejoignirent leurs enfants dans la recherche de la connaissance » (Bennion, p. 10).
En 1840, Joseph Smith demanda l'incorporation de la ville de Nauvoo (Illinois) et avec elle l'autorité pour fonder une université. La Charte de Nauvoo contenait l'autorité pour « fonder et organiser un établissement d'enseignement dans les limites de la ville pour l'enseignement des arts, des sciences et des professions érudites, qui sera appelé ‘Université de la ville de Nauvoo’ » (cité dans Salisbury, p. 269).
La première année académique à Nauvoo fut celle de 1841-42. L'université fut probablement l’une des premières universités municipales des États-Unis (Rich, p. 10). C'était, en tous cas, une entreprise optimiste et ambitieuse. Le programme comprenait des langues (allemand, français, latin, grec et hébreu), des mathématiques, de la chimie et de la géologie, de la littérature et de l’histoire, mais « les éléments d’appréciation sont trop maigres pour qu’on puisse en dégager le niveau de l’enseignement dispensé. Il était probablement supérieur au niveau secondaire moyen de l’époque. Le personnel enseignant était d’un haut niveau et était en effet un groupe plutôt remarquable pour une ville de la frontière » (Bennion, p. 25).
Le meurtre de Joseph Smith en 1844 mit brutalement fin au rêve de l'université de la ville de Nauvoo et déclencha le difficile voyage vers le Grand Bassin. Malgré les difficultés, l'éducation ne fut pas oubliée. Brigham Young demanda aux saints d’emporter, dans leur émigration, « au moins un exemplaire de chaque traité précieux sur l'éducation – chaque livre, carte, schéma ou diagramme qui peut contenir une matière intéressante, utile et attrayante, pour attirer l'attention des enfants et les amener à aimer apprendre à lire ; et aussi toutes les variétés historiques, mathématiques, philosophiques, géographiques, géologiques, astronomiques, scientifiques, pratiques et tous les autres écrits, cartes, etc., utiles et intéressants, à présenter au greffier général de l’Église, lorsqu'ils arriveront à leur destination, où l’on peut glaner des sujets importants et intéressants pour compiler les ouvrages les plus précieux sur toutes les sciences et tous les sujets au profit de la génération montante » [MS 10, 1848, p. 85].
La charte de l'université de la ville de Nauvoo a servi de base pour l'université de Deseret (maintenant l'université d'Utah), créée en 1850 par Brigham Young à Salt Lake City. « L’éducation » a-t-il dit un jour au conseil d’administration de cette école, « est le pouvoir de penser clairement, le pouvoir d'agir correctement dans l’œuvre du monde et le pouvoir d'apprécier la vie » (Bennion, p. 115). Il disait : « Un bon enseignant est un des membres les plus essentiels de la société » (JD 10:225).
En 1851, la législature territoriale accorda une charte prévoyant « la création et la réglementation des écoles » (Bennion, p. 40), mais pendant quelques années, la lutte pour la survie éclipsa les efforts pour mettre en place un système officiel d'éducation. Les premières écoles d'Utah furent privées, payées par les parents ou par des étudiants adultes et les cours se faisaient pendant la journée ou le soir selon les besoins locaux, les intérêts et les ressources (Rich, p. 13, 17 et 18). La fréquentation augmentait et diminuait avec les saisons et les exigences d'une société agricole dans laquelle la main d’œuvre était rare et précieuse. Les programmes variaient également et dépendaient souvent des compétences ou des centres d’intérêt de l'enseignant ; certaines écoles proposaient les branches traditionnelles, d'autres des activités plus pratiques telles que la menuiserie ou la maçonnerie. L'existence de ces écoles de frontière était toujours précaire et leur fonctionnement intermittent (Rich, p. 18), mais elles témoignent de manière éloquente et souvent émouvante du désir d’éducation des pionniers mormons, parce qu’elles exigeaient le sacrifice considérable d’un temps et de ressources limités.
La philosophie de l'éducation de Brigham Young était pratique et pragmatique, mais il n'était pas opposé, comme on l'a parfois cru, à une éducation libérale ; il estimait tout simplement qu’on y tenait trop dans l'environnement éducatif de son époque (Bennion, p. 107). « L’éducation va-t-elle vous nourrir et vous vêtir, vous garder au chaud par une froide journée ou vous permettre de construire une maison ? Pas du tout. Faut-il pour autant discréditer l’éduction ? Non. À quoi sert-elle ? À nous cultiver, à nous instruire de tous les arts et sciences, de l'histoire du monde, des lois des nations, à nous permettre de comprendre les lois et les principes de la vie et la façon dont nous pouvons être utiles de notre vivant » (JD 14:83). Il croyait que « tous les arts et toutes les sciences connus et étudiés par les enfants des hommes sont inclus dans l'Évangile » (JD 12:257).
La philosophie du président Young en matière d’éducation fut renforcée par Karl G. Maeser, un pédagogue allemand qui devint membre de l'Église et émigra en 1860 à Salt Lake City. En 1876, Brigham Young nomma Maeser directeur de l'Académie Brigham Young à Provo (voir Académies). « C’est cet éducateur allemand qui fut en grande partie à l’origine du mouvement des académies et de la direction que prit la politique de l'Église en matière d'éducation » (Bennion, p. 117). Sa conception de l'éducation était marquée par la conviction que « la connaissance doit être soutenue par des qualités morales correspondantes. La formation de la personnalité dépend de la nature de la formation morale qui accompagne la progression intellectuelle » (Maeser, p. 43). Pour lui, la religion était « le principe fondamental de l'éducation » et en était « le moteur le plus efficace » (Maeser, p. 56). School and Fireside, (1898), son traité influent et largement diffusé, mettait clairement en évidence le fait que les fonctions essentielles de l'éducation étaient de préparer les gens pour la vie pratique dans la famille et dans le pays et de leur inculquer les principes fondamentaux du développement spirituel.
Dans les premiers temps des pionniers, la plupart des écoles du Territoire de l'Utah étaient des écoles de l'Église et la religion faisait partie intégrante du programme des cours. Avec la diversification croissante de la population de l'Utah et l'adoption de la Loi Edmunds-Tucker en 1887, qui eut pour effet d'interdire l'enseignement de la religion dans les écoles publiques, l'Église chercha d’autres moyens d'assurer un enseignement spirituel pour ses jeunes. Entre 1890 et 1929, l'Église parraina des cours spéciaux de religion organisés dans les églises de quartier pour les enfants du premier au neuvième degré dans un mouvement qui fut « le premier effort des mormons pour compléter (mais pas pour remplacer) l’éducation laïque » ; ce fut « la première expérience de l'Amérique pour assurer une formation religieuse distincte en semaine pour les enfants de l'école publique » (Quinn, p. 379).
Cette entreprise déboucha sur le département d’éducation de l'Église, qui se compose de plusieurs niveaux. Il y a tout d'abord le séminaire, un programme d'éducation religieuse quotidienne donné dans un bâtiment construit près de l'école pour le neuvième au douzième degré, qui prévoit l'étude du Livre de Mormon, de l’Ancien Testament, du Nouveau Testament et de Doctrine et Alliances/Histoire de l’Église. Deuxièmement, des instituts de religion avoisinant les campus desservent les étudiants inscrits dans les programmes postsecondaires en proposant des cours de religion, habituellement organisés deux fois par semaine pour convenir aux horaires de l’université. En troisième lieu, l'Église parraine quatre établissements d'enseignement supérieur : l’université Brigham Young à Provo, Utah, l’université Brigham Young-Hawaii à Laie, Hawaii, le Ricks College à Rexburg, Idaho, et le LDS business College à Salt Lake City. En outre, au Mexique et dans le Pacifique, l'Église gère sept écoles primaires, treize facultés universitaires et neuf écoles secondaires qui assurent une formation tant laïque que religieuse.
En 1988-1989, le département d’éducation de l'Église couvrait 90 pays ou territoires et desservait environ 250 000 étudiants de séminaire, 124 500 étudiants d’institut, 37 600 étudiants dans les universités et les collèges de l'Église et 9 300 étudiants dans d'autres écoles de l'Église. Le département emploie plus de 4 100 employés à temps plein et à temps partiel en plus des 15 000 membres qui sont appelés à enseigner dans les programmes de séminaire et d'institut.
En somme, l'attitude de l'Église vis-à-vis de l’éducation est spéciale à plusieurs égards. Tout d'abord, l'Église se distingue par le degré auquel ses membres, les adultes aussi bien que les enfants, participent aux nombreuses activités éducatives de l'Église : « Notre peuple croit en l'éducation : l’acquisition de connaissances et la culture de l'esprit. L'Église elle-même est en fait une institution éducative. Par tradition, nous sommes un peuple épris d'éducation » (Widtsoe, 1944, p. 666). Deuxièmement, elle considère l'éducation comme une composante essentielle de la vie religieuse : « Toute vie est centrée sur certaines idées fondamentales... Le fait que [Dieu] a promis d’autres révélations est pour moi une invitation à garder l’esprit ouvert et à être prêt à suivre partout où ma recherche de la vérité peut me conduire » (Brown, 1969, p. 11). En troisième lieu, elle entretient la conviction profonde que la connaissance a une dimension éternelle parce qu’elle fait avancer le libre arbitre et la progression de l'homme ici-bas et dans le monde à venir : « La science créatrice et la religion révélée trouvent leur expression la plus complète et la plus vraie dans un climat de liberté... N’ayez pas peur des idées nouvelles, car elles sont comme un tremplin vers le progrès. Vous devez, bien sûr, respecter les opinions des autres mais n’ayez pas peur de marquer votre désaccord – si vous êtes informé » (Brown, 1958, p. 2-3). Quatrièmement, elle insiste sur le fait que l’instruction laïque et l’instruction spirituelle ne s’opposent pas mais s’accordent entre elles : les saints des derniers jours ne mettent pas l'accent sur « l'éducation spirituelle de l'homme au détriment de son éducation intellectuelle et physique... Il ne s’agit pas d’estimer moins l'éducation intellectuelle et physique, mais d’estimer davantage l'éducation spirituelle » (Roberts, p. 122-123). « La connaissance profane doit être désirée » comme un outil entre les mains des justes, mais « la connaissance spirituelle est une nécessité » (S. Kimball, Faith Precedes the Miracle, p. 280).

Bibliographie
Bennion ; Milton Lynn. Mormonism and Education. Salt Lake City, 1939.
Brown, Hugh B. “An Eternal Quest – Freedom of the Mind”. BYU Speeches of the Year, 13 mai 1969.
Brown, Hugh B. “What Is Man and What He May Become”, BYU Speeches of the Year, 25 mars 1958.
Clark, J. Reuben, Jr. “The Charted Course of the Church in Education”. Provo, Utah, 1936.
Clark, Marden J. « On the Mormon Commitment to Education. Dialogue 7, hiver 1972, p. 11-19.
Gardner, David P. et Jeffrey R. Holland. « Education in Zion : Intellectual Inquiry and Revealed Truth ». Sunstone 6, janv. févr. 1981, p. 59-61.
Kimball, Spencer W. “Second Century Address”. BYU Studies, été 1976, p. 445-457.
Maeser, Karl G. School and Fireside. Utah, 1898.
Nibley, Hugh W. « Educating the Saints » et « Zeal Without Knowledge”. Dans Nibley on the Timely and the Timeless, dir. de publ. T. Madsen, p. 229-277. Provo, Utah, 1978.
Quinn, D. Michael. « Utah’s Educational Innovation : LDS Religious Classes, 1890-1929 ». Utah Historical Quarterly 43, 1975, p. 379-389.
Rich, Wendell O. Distinctive Teachings of the Restoration, p. 7-34, 161-188. Salt Lake City, 1962.
Roberts, B. H. « The Mormon Point of View in Education ». IE 2, déc. 1898, p. 119-126.
Salisbury, H. S. “History of Education in the Church of Jesus Christ of Latter Day Saints”. 15 juillet 1922, p. 257-281.
Widtsoe, John A. “The Returning Soldier”. IE 47, nov. 1944, p. 666, 701-702.
Young Brigham, Discourses of Brigham Young, comp. John A. Widtsoe, p. 245-263. Salt Lake City, 1968.
DAVID P. GARDNER

Éducation : Niveau atteint
Auteur : BELL, TERRELL H.

Les saints des derniers jours ont atteint un niveau d’éducation nettement plus élevé que la population des États-Unis dans son ensemble. Contrairement à la norme pour les autres confessions religieuses, les membres de l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours qui ont obtenu des diplômes universitaires avancés sont plus susceptibles d'être profondément impliqués dans les pratiques religieuses et l’activité dans l'Église, tant d'un point de vue personnel que dans les services rendus dans leur Église.
Ces phénomènes peuvent être le résultat de l'accent doctrinal mis sur la connaissance et l'éducation qui est si répandu dans l'Église. On enseigne aux saints des derniers jours dès l'enfance qu'ils doivent lire et méditer les Écritures (voir Étude des Écritures). La priorité élevée accordée à l'éducation dans la vie de la plupart des saints des derniers jours a ses racines dans des écritures bien déterminées de la Bible, du Livre de Mormon, des Doctrine et Alliances et de la Perle de Grand Prix, qui assurent aux saints que «être instruit est une bonne chose si on écoute les recommandations de Dieu » (2 Néphi 9:29).
On enseigne aux saints des derniers jours que ce qu'ils apprennent dans cette vie ira avec eux dans l'éternité (D&A 130:18 -19), que toute la vérité et toute la connaissance sont accessibles et que chacun peut les obtenir. Ce sont des dons de Dieu, mais chacun doit en être digne par ses efforts diligents pour apprendre. De la naissance à la mort, les membres de l'Église entendent du haut de la chaire, apprennent dans les réunions de l'Église et lisent dans les Écritures que chaque individu doit apprendre et progresser dans ses talents et ses aptitudes. Un jeune mormon qui se plaindrait de ne rien trouver d'intéressant ou de difficile à faire s’entendrait promptement répliquer qu’il n’a qu’à lire les Écritures, étudier de grands livres et suivre le commandement de s'améliorer. Il devrait le faire non seulement pour aujourd'hui et pour demain, mais aussi pour l'éternité, puisque ce que nous apprenons est une possession qui ne nous quitte jamais. On enseigne aux saints que, s'ils ne peuvent pas emporter leurs richesses ou leurs biens terrestres dans l'au-delà, par contre tout ce qu'ils apprennent sera une possession éternelle.
La création d'écoles et d’établissements d’enseignement supérieur est une priorité depuis la fondation de l'Église. Trois ans seulement après l'organisation de l'Église en 1830, Joseph Smith, le prophète, créait l'école des prophètes à Kirtland (Ohio). Sept mois seulement après l'arrivée des pionniers dans la vallée du grand lac Salé, une université était créée (voir Université de Deseret). Tout au long de l'histoire de l'Église, des écoles ont été créées dans l'Ohio, au Missouri, en Illinois et en Utah et dans pratiquement tous les autres endroits où les saints se sont installés.
En Utah, où une grande majorité de la population est membre de l'Église, les lycéens répondent aux préceptes scripturaires qui insistent sur l'importance des études en s'inscrivant en grand nombre à des « advanced placement courses » [cours de niveau universitaire] qui permettent d’obtenir des « crédits » une fois que l’on est à l’université. Selon le rapport annuel publié en 1989 par le Department of Education des États-Unis, l’Utah était classé premier des cinquante états pour le pourcentage des lycéens de terminale qui avaient suivi des « advanced placement courses » (U.S. Department of Education State Education Performance Chart, 1989), malgré le fait que l'Utah se classe parmi les états qui dépensent le moins en moyenne par élève.
Un autre facteur qui motive les jeunes saints des derniers jours pour être admissibles aux crédits universitaires tandis qu’ils sont toujours au lycée est la forte attente dans la plupart des familles qu'ils feront une mission pour l'Église. Du fait que les études universitaires vont être interrompues pour le service missionnaire, une partie du temps qui n’aura pas pu être consacré aux études universitaires peut être récupérée grâce à la participation intensive aux programmes de placement avancé proposés au lycée.
La motivation pour atteindre des niveaux plus élevés d'études s'étend au-delà de la famille et des Écritures. Les réalisations remarquables et les événements marquants dans le domaine des études sont signalés en chaire aux réunions de l'Église où les dirigeants locaux attirent l’attention sur les prouesses accomplies à l’université. Le Deseret News, le quotidien publié par l'Église, participe à ce mouvement en parrainant un programme annuel intitulé « Sterling Scholars » [érudits de haut niveau], qui publie les réalisations exceptionnelles des étudiants dans les écoles secondaires publiques. Ce programme mentionne les meilleurs élèves dans divers domaines d'études au niveau secondaire, avec, comme point culminant, des photos et des notices biographiques sur les demi-finalistes et les finalistes.
Du fait de l’importance qu’ils accordent aux études, les saints des derniers jours font plus d’études que la population des États-Unis dans son ensemble (Albrecht et Heaton, p. 49). Alors que 53,5 % des mormons de sexe masculin et 44,3 % des mormones ont au moins une scolarité au-delà de l'école secondaire, 36,5 % seulement des hommes et 27,7 % des femmes dans l’ensemble de la population américaine ont fait des études dans un quelconque établissement d’enseignement supérieur.
Albrecht et Heaton ont également constaté que ce niveau traditionnellement élevé de scolarité parmi les saints des derniers jours n'a pas provoqué de diminution dans leur engagement religieux. Les données du sondage national publiées par le centre de recherches religieuses de Princeton (1982) indiquent le résultat contraire concernant l'impact de l'enseignement supérieur pour la nation dans son ensemble : plus le niveau de scolarité atteint est élevé, plus le niveau de zèle religieux est bas. Les données obtenues par le Centre de Princeton montrent qu'il est généralement assez difficile pour les personnes qui ont une culture universitaire d’entretenir une vision du monde qui soit à la fois religieuse et érudite. Mais, selon les recherches d'Albrecht et Heaton (1984, p. 43-57), les intellectuels mormons ont été moins souvent pris dans ce dilemme. Dans ces études le sentiment religieux était mesuré en fonction des dons financiers, des services rendus et de l’assistance aux réunions de l’Église.

Bibliographie
Albrecht, Stan L., et Tim B. Heaton. "Secularization, Higher Education, and Religiosity". Review of Religious Research 26, sept. 1984, p. 43-58.
Princeton Religious Research Center. Religion in America. Princeton, N.J., 1982.
United States Department of Education. State Education Statistics: Student Performance Chart. Washington, D.C., 1989.
TERRELL H. BELL

Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours
Auteur: PORTER, BRUCE DOUGLAS

Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours est le nom officiel de l’Église fondée, le 6 avril 1830, à Fayette (New York), sous la direction du prophète Joseph Smith. On l’appelle communément Église mormone à cause de sa croyance au Livre de Mormon et les membres sont souvent appelés mormons ou saints des derniers jours. Créée officiellement, à l’origine, avec six membres, l’Église a grandi pour devenir une organisation internationale qui compte des millions de membres dans beaucoup de pays du monde.
De 1830 à 1838, les membres de l’Église l’appelaient «Église des saints des derniers jours» ou «Église du Christ». Le 26 avril 1838, le titre officiel de l’Église a été donné par révélation: «Car c’est là le nom que portera mon Église dans les derniers jours, c’est-à-dire l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours» (D&A 115:4).
Chaque partie de ce nom est importante. «Église de Jésus-Christ» indique que Jésus-Christ se tient à la tête de l’Église et que son Évangile, ses enseignements et son autorité divine constituent les fondements de l’Église. Le terme «saints» a le même sens que le mot utilisé dans le Nouveau Testament pour désigner un membre du groupe de l’alliance (Ac. 9:13, 32, 41; Ro. 1:7; Phil. 1:1; voir Saints des derniers jours). Il n’a rien à voir avec le sens que lui donnent les traditions catholique ou orthodoxe. Le terme «des derniers jours» indique que l’Église a été rétablie dans la dernière ère de l’histoire humaine précédant l’avènement du Christ et distingue également l’Église actuelle de l’organisation «des premiers jours» fondée par le Christ pendant son ministère terrestre en Palestine. L’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours est un rétablissement divin de l’Église originelle de Jésus-Christ et la gardienne désignée de sa doctrine, de son autorité et de sa mission divine (voir Organisation: Organisation contemporaine).
L’Église est le royaume de Dieu sur la terre, une institution divinement créée par laquelle Dieu accomplit ses buts concernant le salut de ses enfants. Pour le président Spencer W. Kimball, l’Église a trois objectifs principaux pour aider les gens à aller au Christ, des objectifs parfois appelés sa triple mission. La première est de proclamer l’Évangile à toute l’humanité. L’Église le fait grâce à une grande armée de missionnaires, ainsi que par les efforts de ses membres. La deuxième est de perfectionner les saints, ce qui veut dire leur enseigner l’Évangile du Christ, administrer les ordonnances essentielles du salut et les aider dans un processus de repentir, de service et de préparation pour la vie éternelle, qui durera toute une vie. La troisième mission de l’Église est de racheter les morts, permettant à des générations de défunts, qui n’ont eu aucune occasion d’accepter l’Évangile dans la condition mortelle, de recevoir les vérités et les ordonnances du salut. Cette œuvre se fait grâce à des ordonnances accomplies par procuration dans les temples de l’Église. Pour ce faire, l’Église invite ses membres à faire leur histoire familiale. Plus tard, les présidents de l’Église pourront modifier ces missions ou y ajouter selon les directives ou l’inspiration du Seigneur.
L’Église est également une société de croyants qui crée un cadre permettant un effort coopératif, un soutien mutuel et une aide temporelle quand c’est nécessaire. Les liens de l’amour entre les saints sont une condition essentielle à l’accomplissement des buts de l’Église et sont identifiés dans les Écritures comme étant un signe de la véritable Église de Dieu (Jn. 13:35; voir Signes de la véritable Église). Les saints des derniers jours se considèrent comme le «peuple de l’alliance» du Seigneur, héritiers de l’alliance antique entre Dieu et Abraham et, par naissance ou adoption, membres de la maison d’Israël. L’Église est l’instrument par lequel Dieu rassemble les tribus dispersées d’Israël dans les derniers jours selon ses promesses à Abraham et à d’autres prophètes bibliques.
L’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours se distingue de plusieurs manières fondamentales des autres églises chrétiennes. La plupart de ces différences proviennent de la croyance essentielle de l’Église en la révélation continue. Ainsi, les saints des derniers jours acceptent la sainte Bible comme étant la parole de Dieu et ils acceptent aussi le Livre de Mormon, les Doctrine et Alliances et la Perle de Grand Prix comme Écritures et comme ouvrages canoniques. Ils acceptent l’appel des prophètes et des apôtres modernes, en de Joseph Smith à nos jours. La doctrine des saints concernant la nature de la Divinité, le plan du salut, la réalité de l’autorité dans la prêtrise et l’interprétation des prophéties scripturaires diffère également à divers égards de celle des branches catholique, orthodoxe ou protestante du christianisme. Les saints des derniers jours mettent l’accent sur la liberté et la tolérance religieuses. L’Église ne participe pas aux activités œcuméniques officielles; elle tient cependant à coopérer avec d’autres organismes religieux, civils et éducatifs à l’avancement d’objectifs éthiques et sociaux communs (voir Relations interconfessionnelles).
L’Église est gouvernée par l’autorité de la prêtrise. Le terme «prêtrise», chez les saints des derniers jours, désigne non seulement l’ensemble des hommes qui détiennent des postes ecclésiastiques dans l’Église, mais également l’autorité ou le pouvoir proprement dit qui leur a été donné par ordination à la prêtrise. Il y a deux divisions dans la prêtrise, une Prêtrise d’Aaron, et une prêtrise supérieure ou Prêtrise de Melchisédek. Tous les membres masculins dignes de l’Église à partir de douze ans sont ordonnés à la prêtrise, détenant normalement, de douze à dix-huit ans, des offices dans la Prêtrise d’Aaron et ensuite des offices dans la Prêtrise de Melchisédek. Les offices de la Prêtrise d’Aaron sont: diacre, instructeur, prêtre et évêque. Les offices de la Prêtrise de Melchisédek sont ancien, grand prêtre, patriarche, soixante-dix et apôtre.
L’Église se considère comme organisée selon le modèle de base de l’Église du Christ du premier siècle et conformément à une série de révélations données à Joseph Smith (D&A 20 et 107; 6e A de F). Les présidents successifs de l’Église ont affiné l’organisation pour répondre aux besoins et aux exigences d’une organisation internationale en expansion mais n’ont pas changé la structure fondamentale de l’Église telle qu’organisée à l’origine. L’Église est sous la direction d’un président, qui a généralement deux conseillers; à eux trois, ils constituent la Première Présidence de l’Église.
Le deuxième groupe dirigeant, le Collège des douze apôtres, se compose de douze hommes appelés à être les «témoins spéciaux du nom du Christ dans le monde entier» (D&A 107:23). Le Collège des Douze détient collectivement, de manière latente, la même autorité de prêtrise que le président de l’Église et, en cas de décès de celui-ci, est le corps constitué qui gouverne l’Église et installe un nouveau président. Les membres de la Première Présidence et du Collège des douze apôtres sont considérés et soutenus par la voix des saints des derniers jours comme prophètes, voyants et révélateurs, recevant la révélation directe de Jésus-Christ. Ces frères sont aidés par les membres des collèges des soixante-dix et par l’épiscopat président.
Les collèges des soixante-dix, chacun composé d’un nombre d’hommes pouvant aller jusqu’à soixante-dix, ont la responsabilité spéciale de l’œuvre missionnaire et dirigent également les activités de l’Église dans des régions géographiques sous la direction des Douze. L’épiscopat président est responsable des affaires temporelles de l’Église, notamment les finances, les registres et les bâtiments et de la gestion du programme du service d’entraide de l’Église. Tous ces hommes sont considérés par les saints des derniers jours comme Autorités générales parce que leur autorité s’étend sur l’Église entière. Le siège social et les bureaux administratifs centraux de l’Église sont situés à Salt Lake City (Utah).
Le président de l’Église reçoit la révélation de Dieu qui a trait à toute l’Église, mais tous les dirigeants et membres ont droit à l’inspiration dans le domaine dont ils sont responsables et concernant leur vie personnelle. Ce principe de la révélation contribue à susciter l’unité et un but commun dans l’Église et en fait comme un organisme vivant, le «corps du Christ» (1 Co. 12:12-28; Col. 1:18).
Les Autorités générales président l’Église dans le monde entier, supervisant ceux qui administrent les unités géographiques appelées paroisses, pieux, régions et interrégions. Un pieu est un groupe de paroisses, une région est un groupe de pieux et une interrégion est un groupe de régions. Une paroisse est une assemblée de saints comptant habituellement de deux cents à six cents membres. Les paroisses sont habituellement organisées selon des frontières géographiques et tous les membres vivant dans ces limites appartiennent à la même paroisse. Une paroisse est dirigée par un évêque qui remplit habituellement cette fonction pendant cinq ans environ et est appelé d’entre les membres de l’assemblée; sous la direction de l’évêque, les offices dans la paroisse sont normalement confiés aux membres de celle-ci. Un ensemble de paroisses, habituellement pas plus de dix, constitue un pieu, dirigé par un président de pieu, également appelé d’entre les membres du pieu. Le terme «pieu» a été donné par révélation (D&A 101:21) et est lié à la terminologie de l’Ancien Testament désignant Sion comme une grande tente maintenue par des cordes et des pieux ou des piquets (És. 33:20; 54:2). Dans les régions où la population de l’Église est trop petite pour que des paroisses et des pieux soient organisés, elle est administrée par des missions, des districts et des branches. Bien que la fonction principale des missions soit de proclamer l’Évangile, dans certaines régions du monde, elles administrent également de plus petites unités de l’Église appelées districts, qui se composent de branches habituellement constituées de moins de deux cents membres. Il peut également y avoir des branches dans les pieux si les unités sont trop petites pour constituer une paroisse.
Dans les paroisses et les branches de l’Église, il y a des organisations auxiliaires spécialisées dont le but est de répondre aux besoins spécifiques des groupes au sein de l’Église. Elles fournissent un appui important aux collèges de la prêtrise. La plus grande d’entre elles est la Société de Secours, l’organisation des femmes créée en 1842 sous la direction du prophète Joseph Smith. Elle assure l’enrichissement culturel, social et spirituel des femmes de l’Église et rend également des services compatissants aux familles dans le besoin, d’où le nom Société de Secours.
Les autres auxiliaires de l’Église sont la Primaire, responsable de l’enseignement des enfants de moins de douze ans, l’organisation des Jeunes Gens, pour les garçons de douze à dix-huit ans, l’organisation des Jeunes Filles pour les filles du même groupe d’âge et l’organisation de l’École du Dimanche, qui gère l’enseignement dominical de la doctrine de l’Évangile aux jeunes et aux adultes.
Les officiers et les instructeurs locaux de l’Église ne reçoivent aucune rémunération. Aucune formation officielle n’est exigée pour détenir des postes dans l’Église et il n’y a aucune espèce de carrière sacerdotale (voir Participation et direction laïques). Une personne reçoit un appel, une invitation officielle, à remplir un poste déterminé par les autorités de l’Église responsables de l’unité de l’Église concernée; ces appels se font sous l’inspiration divine.
Des offices religieux réguliers ont lieu dans chaque paroisse. Les membres de la paroisse se réunissent chaque dimanche pour un service général de culte appelé réunion de Sainte-Cène. La Sainte-Cène est bénie et distribuée, les affaires de paroisse sont traitées, on chante des cantiques et des membres de l’assemblée font des discours inspirants sur des sujets d’Évangile. Les membres se réunissent aussi chaque dimanche en groupes plus restreints de prêtrise ou d’organisations auxiliaires. En tout, les réunions officielles du dimanche peuvent durer jusqu’à trois heures. Les communautés de saints des derniers jours participent à tout un mode de vie et une famille typique est susceptible de passer plusieurs heures chaque semaine à des activités, des réunions et du service en rapport avec l’Église (voir Réunions principales de l’Église). Les conférences régulières de paroisse, de pieu, de région, d’interrégion et générales assurent la continuité et l’intégration dans l’ensemble de la communauté de l’Église.
Les saints des derniers jours considèrent la famille comme l’unité de base de l’Église et de la société et mettent l’accent sur la sainteté du mariage et l’importance des liens familiaux. Les mormons croient que le mariage et les relations familiales peuvent continuer au-delà de cette vie dans les éternités, que les hommes et les femmes sont égaux aux yeux de Dieu et que les bénédictions de l’Évangile tournent autour de la famille.
Dans le passé, les observateurs ont pu considérer l’Église comme étant essentiellement un phénomène propre à l’Ouest des États-Unis ou du moins comme une église américaine. Cependant, en 1990, presque quarante pour cent des membres vivaient en dehors des États-Unis. La croissance internationale de l’Église a été rapide depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, particulièrement en Amérique latine, dans le Pacifique sud, en Australie et dans des régions de l’Asie et de l’Afrique. Cette croissance a sans doute été le plus grand défi que l’Église a dû relever ces dernières décennies. À la fin de 1990, presque 50.000 membres faisaient une mission d’un à trois ans, la majorité d’entre eux en dehors des États-Unis. Ce corps de missionnaires, devenu expert dans beaucoup de langues, donne une dimension cosmopolite à l’Église contemporaine.
Parlant au prophète Joseph Smith, le Seigneur a décrit l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours comme «la seule Église vraie et vivante sur toute la surface de la terre et en laquelle moi, le Seigneur, je me complais» (D&A 1:30).

BRUCE DOUGLAS PORTER

Église et État
Auteur : Durham, W. Cole

Les saints des derniers jours croient que la séparation de l'Église et de l'État est essentielle dans les sociétés modernes avant l’arrivée du millénium. Les Écritures modernes enseignent que les lois civiles ne doivent pas s’ingérer dans les pratiques religieuses et que les institutions religieuses ne doivent pas manipuler les gouvernements à leur profit. De nombreux enseignements chez les saints mettent l'accent sur le rôle des gouvernements dans la protection de la liberté de conscience individuelle. L'Église est active dans des pays ayant différents types de gouvernement et encourage ses membres à participer à la vie publique et à respecter les lois du pays (voir Devoirs civiques). Les pratiques des saints avaient tendance à être plus intégrationnistes et plus théocratiques dans les premiers temps d’isolation en Utah et sont devenues plus séparatistes au vingtième siècle.
Le discours au sein de l'Église sur les questions relatives à l'Église et l'État se situe au moins à deux niveaux : (1) dans les discussions sur les relations Église-État historiques et contemporaines et (2) dans les discussions sur les paramètres idéaux, tels qu'ils existeront au millénium, quand « le Christ régnera personnellement sur la terre » (10e art. de foi) ou dans le Royaume céleste.
Les principes du libre arbitre et de la liberté de conscience, qui sont fondamentaux dans la relation Église-État, s’appliquent aux deux plans du discours. Cependant, les implications institutionnelles de ces principes sont différentes dans les deux contextes. Dans le monde actuel, où les croyants sont soumis aux imperfections du gouvernement humain, la séparation de l'Église et de l'État est indispensable à la protection de la liberté religieuse. En revanche, sur le plan idéal, les saints des derniers jours s’attendent à des institutions théocratiques plus intégrées ou à ce que Joseph Smith a appelé des institutions « théodémocratiques » (T & S 5, 15 avril 1844, p. 510), tant à cause de la légitimité inhérente du règne divin que parce que ceux qui participeront aux sociétés millénaires ou célestes accepteront volontiers ce genre de gouvernement. Néanmoins, les prophètes mormons ont toujours enseigné que même dans la société millénaire la liberté de conscience sera respectée. Par exemple, Brigham Young a déclaré : « Au cours du Millénium les hommes auront droit à leur propre croyance » (JD 12:274; cf. DS 3:63-64). L'Église ne préconise pas la théocratie pour le monde prémillénaire. Elle dit à ses membres d’être « soumis aux pouvoirs qui existent jusqu'à ce que règne celui dont c’est le droit de régner" (D&A 58:22), c'est-à-dire, jusqu'à ce que le Christ vienne.
Entre-temps, plusieurs principes sont d'application. Comme nous le disions plus haut, l'idée fondamentale est que les êtres humains ont le libre arbitre et un certain nombre de droits humains inhérents, notamment « la liberté de conscience » (D&A 134:2). L'Église déclare : « Nous croyons que la religion est instituée par Dieu, et que les hommes sont responsables… devant lui seul, de l'exercice de leur religion, à moins que leurs opinions religieuses ne les portent à empiéter sur les droits et les libertés d'autrui … que les magistrats civils doivent réprimer le crime, mais ne doivent jamais contraindre la conscience ; punir les délits, mais ne jamais supprimer la liberté de l'âme » (D&A 134:4). Cette reconnaissance de la liberté de conscience inclut une volonté de tolérance, comme le souligne le onzième article de foi de l'Église : « Nous affirmons avoir le droit d'adorer le Dieu Tout-Puissant selon les inspirations de notre conscience et reconnaissons le même droit à tous les hommes: qu'ils adorent comme ils veulent, où ils veulent ou ce qu'ils veulent. »
Un corollaire de la liberté de conscience, c'est que les lois humaines n'ont pas le droit « de s'immiscer en prescrivant des règles de culte pour enchaîner la conscience des hommes, ni de dicter des formes de dévotion publique ou privée » (D&A 134:4). Ce principe de non-ingérence de l'État dans les affaires religieuses implique qu’il proscrit non seulement toute atteinte à la pratique individuelle, mais aussi toute atteinte à l'autonomie de l'Église en tant qu’institution poursuivant sa mission religieuse. La position de l'Église à cet égard a reçu l’aval de la Cour suprême des États-Unis dans Corporation de l'évêque président de l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours et al. c. Amos et al. (483 US 327, 1987) et est conforme à la conception internationale de la liberté religieuse (par exemple, le Principe 16 du Document de clôture de la réunion de Vienne de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe, 1989). Conformément à cette position, l'Église croit qu’elle doit conserver une indépendance stricte pour elle-même et pour les institutions qui lui sont affiliées, comme les écoles et les universités gérées par elle, et par conséquent n'accepte aucune aide ou subvention directe provenant de sources gouvernementales à cause de l'ingérence réelle ou potentielle dans la gestion que cela pourrait entraîner.
L'Église tient également à la séparation de l'Église et de l'État du point de vue religieux. «Nous ne croyons pas qu'il soit juste de mêler l'influence religieuse au gouvernement civil, de sorte qu'une organisation religieuse est favorisée et qu'une autre se voit entravée dans ses droits spirituels et que ses membres se voient dénier personnellement leurs droits de citoyens. » (D&A 134:9). Cela ne signifie pas que l'Église ne peut pas prendre position sur des questions morales ou autres lorsqu’elle est motivée religieusement à le faire ou que des valeurs religieuses risquent d’être mises à l’écart de la vie publique ; cela ne signifie pas non plus que l'Église ne peut pas avoir une influence indirecte sur l'État suite aux efforts qu’elle fait pour enseigner des principes religieux et pour apporter une contribution positive dans la vie de ses membres. Ce que cela veut dire, c’est qu'il ne convient pas qu’une organisation religieuse manipule les rouages du pouvoir civil pour s’assurer des avantages pour elle-même ou des inconvénients pour les autres.
L'Église ne se considère pas comme une organisation de ce monde. Elle utilise les structures juridiques, telles que les sociétés ou autres organisations qui sont à sa disposition dans divers pays pour régler ses affaires temporelles et elle se conforme à toutes les exigences légales que cela implique, mais son autorité spirituelle ne dépend d’aucune institution profane. Les saints des derniers jours croient que leur Église est établie et guidée par Dieu par l’intermédiaire d’un prophète et d’apôtres qui détiennent les clés et l'autorité de la prêtrise requises pour enseigner les vérités de l'Évangile et pour officier dans les ordonnances nécessaires au salut et à l'exaltation.
L'Église enseigne l'importance du gouvernement et encourage ses membres à respecter la loi du pays où ils vivent. Les lois et les gouvernements humains sont certes imparfaits, mais ils jouent un rôle important en ce qu’ils préservent l’ordre et qu’ils assurent un contexte stable au sein duquel les individus peuvent chercher la vérité et s'efforcer de vivre selon ce que leur dicte leur conscience. Les autorités gouvernementales sont responsables devant Dieu «de leurs actes… tant pour la promulgation de lois que pour leur application pour le bien et la sécurité de la société » (D&A 134:1; cf. 124:49-50).
L’application dans l'histoire des principes qui précèdent a connu plusieurs phases. Dans la phase la plus ancienne, l'Église était essentiellement un petit groupe religieux persécuté cherchant la liberté religieuse et un endroit pour s'installer, tout d'abord dans l'ouest de l’état de New York, puis en Ohio, au Missouri et en Illinois. Pendant une grande partie de cette période, l'Église s'est fortement appuyée sur sa propre organisation pour gérer sa structure sociale. La Charte de Nauvoo a permis certains chevauchements entre l’Église et l’État. Vers la fin de la période de Nauvoo, Joseph Smith organisa le Conseil des cinquante, qui devait fournir un cadre potentiel au sein duquel le règne millénaire de Christ pourrait être organisé.
Pendant l'exode de Nauvoo jusqu’au Grand Bassin, qui eut lieu au milieu du XIXe siècle, l’organisation sociale, politique et économique fut gérée par l'Église, puisqu’il n’existait aucune autre organisation efficace. Les dirigeants de l'Église travaillèrent à la création d’institutions gouvernementales distinctes, d'abord sous la forme d'un État de Deseret, puis dans le Territoire d'Utah et à la poursuite des efforts pour que l'Utah obtienne le statut d’État. Cependant, durant une grande partie du XIXe siècle, le gouvernement fédéral en particulier se révéla être une force hostile plutôt qu'une force neutre dans la collectivité. Cela renforça la tendance dans l'Église à gérer la société par ses propres moyens. Le rêve d’édifier Sion contribua aussi à la tendance à passer par l'Église.
Lorsque le manifeste mit officiellement fin au mariage plural en 1890 et que l’Utah fut devenu un État en 1896, les tensions entre l'Église et les institutions de l'État se tassèrent progressivement et la confiance réciproque grandit. C’est pourquoi, au cours du XXe siècle, l'Église a poursuivi plus systématiquement une politique de séparation et a été libre de mettre l’accent sur sa mission essentiellement spirituelle. Elle existe maintenant dans plus de cent pays et cette internationalisation a encore renforcé l'idée que la mission essentielle de l'Église peut s’accomplir dans un large éventail de systèmes juridiques et politiques tant qu'il y a une séparation suffisante de l'Église et de l'État pour protéger efficacement la liberté religieuse. Les enseignements de l'Église renforcent chez ses membres une constellation de valeurs que la plupart des gouvernements considèrent comme bienvenues : la stabilité familiale, l’honnêteté, le travail, le refus de la drogue, la loyauté envers le pays et l'obéissance à la loi. Il en résulte que, si l'Église contribue au pluralisme religieux partout où elle se trouve, elle contribue simultanément à la stabilité sociale et à l'amélioration de diverses sociétés. [Voir aussi Devoirs civiques ; Lois constitutionnelles ; Histoire juridique et judiciaire de l'Eglise ; Politique : histoire politique ; Politique : enseignements politiques.]

Bibliographie
Firmage, Edwin Brown et Richard Collin Mangrum. Zion in the Courts: A Legal History of the Church of Jesus Christ of Latter-day Saints, 1830 -1900. Urbana, Ill., 1988.
Jensen, Therald N. "Mormon Theory of Church and State." thèse de doctorat, Université de Chicago, 1938.
Mangrum, Richard Collin. "Mormonism, Philosophical Liberalism, and the Constitution." BYU Studies 27, été 1987, p. 119-137.
Melville, J. Keith. "Theory and Practice of Church and State During the Brigham Young Era." BYU Studies 3, automne 1960, p. 33-55.
Taylor, John. The Government of God. Liverpool, 1852.
W. COLE DURHAM, JR.

Élie

[À cause du rôle qu’il doit jouer selon la prophétie (Mal. 4:5-6), Élie est devenu un sujet de traditions et de légendes comme l’explique l’article Élie: Sources antiques. De plus, comme l’exprimé l’article Élie: Sources de l’Église, les enseignements modernes éclairent le rôle actuel d’Élie aussi bien que l’accomplissement de l’attente prophétique qui lui est associée.]

Élie: Sources de l’Église
Auteur: DAY, FRANKLIN D.

Lors d’une manifestation divine accordée le soir du 21 septembre 1823 au jeune Joseph Smith, l’ange Moroni cita Malachie 4:5-6, une prophétie qui concerne les activités d’Élie dans les derniers jours. La version de Moroni, qui diffère du texte biblique actuel, décrit et éclaircit le rôle prophétisé d’Élie:
«Voici, je vous révélerai la Prêtrise par la main d'Élie, le prophète, avant que le jour de l'Éternel arrive, ce jour grand et redoutable. Et il implantera dans le cœur des enfants les promesses faites aux pères, et le cœur des enfants se tournera vers leurs pères; s'il n'en était pas ainsi, la terre serait entièrement dévastée à sa venue» [JS–H 1:38-39; D&A 2].
La prophétie de Malachie prévoyait qu’Élie jouerait un rôle important «avant que le jour de l'Éternel arrive, ce jour grand et redoutable» (Mal. 4:5). Élie était doté du pouvoir de la prêtrise de Dieu. Avec ce pouvoir, il déclara au roi Achab qu’aucune pluie ne tomberait sur la terre (1 R. 17:1). En conséquence, les cieux furent scellés et l’Israël antique connut, pendant trois ans et demi, une période de sécheresse désastreuse. Quand Élie fut enlevé au ciel sur un char de feu, sa mission terrestre semblait terminée. Mais le pouvoir de scellement qu’il exerçait ne faisait que marquer le commencement de sa responsabilité concernant ce pouvoir éternel de la prêtrise.
À la fin de sa vie terrestre, Élie fut enlevé, c’est-à-dire qu’il connut une sorte de changement par rapport à la condition mortelle sans passer par la mort (voir Êtres enlevés). Les saints des derniers jours concluent qu’une raison importante de l’enlèvement d’Élie était de lui permettre de revenir sur terre pour conférer des clefs d’autorité aux trois principaux apôtres avant la crucifixion et la résurrection de Jésus (voir Montagne de la Transfiguration). Puisque les esprits ne peuvent pas imposer les mains aux mortels (D&A 129) et puisque Moïse et Élie ne pouvaient pas revenir comme êtres ressuscités parce que Jésus devait être le premier à ressusciter (Packer, p. 109; cf. EPJS, p. 153), la nécessité de l’enlèvement d’Élie et de Moïse est évidente. Sur la montagne de la Transfiguration (Mt. 17:1-9), Élie rétablit spécifiquement les clefs de prêtrise du scellement, le pouvoir qui lie et valide dans les cieux toutes les ordonnances accomplies sur la terre (cf. EPJS, p. 273).
Le 3 avril 1836, dans une vision donnée à Joseph Smith et à Oliver Cowdery dans le temple récemment terminé de Kirtland, Élie apparut et annonça que le moment était venu où la prophétie de Malachie devait s’accomplir. Il conféra les clefs de scellement de la prêtrise à Joseph Smith et à Oliver Cowdery (D&A 110:13-16). Ce rétablissement était nécessaire pour que les ordonnances de scellement et les alliances de Dieu puissent être administrées en justice sur la terre (DS 2:116). Joseph Smith expliqua:
«L’esprit, le pouvoir et l’appel d’Élie c’est que vous avez le pouvoir de détenir les clefs des révélations, des ordonnances, des oracles, des pouvoirs et des dotations de la plénitude de la Prêtrise de Melchisédek et du royaume de Dieu sur la terre et de recevoir, d’obtenir et d’accomplir toutes les ordonnances appartenant au royaume de Dieu… Ce que vous scellez sur la terre, par les clefs d’Élie, est scellé au ciel; et c’est là le pouvoir d’Élie» [EPJS, p. 273].
Par le pouvoir de scellement de la prêtrise, hommes et femmes peuvent être scellés l’un à l’autre dans le mariage pour toute l’éternité dans un des temples de Dieu. En outre, les enfants peuvent être scellés pour toujours à leurs parents. Ainsi l’organisation familiale continue éternellement (Sperry, p. 139).
Parce que beaucoup sont morts sans la connaissance des principes de l’Évangile ni l’occasion de recevoir les ordonnances de la prêtrise, la mission moderne d’Élie permet de faire accomplir ces ordonnances de scellement par procuration sur la terre pour ceux qui sont morts, donnant ainsi à tous la possibilité d’être sauvés (cf. DS 2:117-118). Le prophète Joseph Smith a proposé l’explication suivante:
«L’esprit d’Élie doit venir, l’Évangile doit être rétabli… et les saints monter comme sauveurs sur le mont de Sion. Mais comment vont-ils devenir sauveurs sur le mont de Sion ? En construisant leurs temples, en érigeant leurs fonts baptismaux et en s’avançant et en recevant toutes les ordonnances, les baptêmes, les confirmations, les ablutions, les onctions, les ordinations et les pouvoirs de scellement sur leur tête en faveur de tous leurs ancêtres qui sont morts, et en les rachetant… et c’est en cela que se trouve la chaîne qui lie le cœur des pères aux enfants et les enfants aux pères, ce qui accomplit la mission d’Élie» [EPJS, p. 267].
Quand ils parlent de l’esprit d’Élie (voir Élie, Esprit d’), les saints des derniers jours veulent dire au moins deux choses. D’abord, la promesse du salut faite aux pères a été renouvelée à l’Église moderne (JS–H 1:38-39; D&A 27:9-10). En second lieu, le cœur des hommes et des femmes s’est considérablement tourné vers leurs pères comme le prouve l’augmentation spectaculaire du nombre de sociétés et de bibliothèques généalogiques, ainsi que d’organisations de recherche généalogique ou d’histoire familiale diverses dans une grande partie du monde. L’esprit d’Élie a motivé des milliers de personnes à faire des investissements considérables en argent et en temps pour découvrir les documents des ancêtres de leur famille et pour réunir ces documents pour former une histoire familiale (DS 2:122-126; voir Généalogie, Histoire familiale). En plus des nombreux centres d’histoire familiale, l’Église a construit beaucoup de temples où les ordonnances salvatrices sacrées de la prêtrise peuvent être accomplies pour les vivants et les morts (voir Salut des morts).

Bibliographie
Packer, Boyd K. Le Temple sacré. Salt Lake City, 1980.
Smith, Joseph Fielding. DS 2:100-128. Salt Lake City, 1955.
Sperry, Sidney B. The Spirit of the Old Testament. Salt Lake City, 1970.
Widtsoe, John A. "Elijah, The Tishbite." Utah Genealogical and Historical Magazine 27, avril 1936, pp. 53-60.
FRANKLIN D. DAY

Élie: Sources antiques
Auteur: WERBLOWSKY, R.J. ZVI

Élie, dans la tradition juive, était un prophète israélite qui était actif dans le royaume du nord pendant les règnes du roi Achab (et sa femme Jézabel) et du roi Achazia (IXe s. av. J.-C.). Son nom est peut-être un surnom: Eli-yahu (YHWH, ou Jéhovah, est Dieu), exprimant sa mission première comme prophète: le culte exclusif et pur de YHWH et l’opposition intransigeante au culte cananéen païen de Baal. Ses activités sont décrites dans 1 Rois 17-2 Rois 2, et expliquent qu’il soit devenu dans la tradition juive le symbole du zèle religieux intransigeant. Ce dernier connut son point culminant dramatique dans son affrontement sur le mont Carmel avec les prêtres de Baal après une longue période de sécheresse dont Élie avait prophétisé qu’elle viendrait comme châtiment pour le culte idolâtre de Baal. (L’ordre monastique catholique des Carmélites, prenant pour modèle la vie ascétique d’Élie dans le désert, le considère comme son père spirituel.) Contrairement aux prophètes «littéraires» postérieurs, Élie est également décrit comme faiseur de miracles, mais il a en commun avec eux la forte insistance sur la justice sociale, comme le prouve son autre grand différend avec le roi et la reine à propos de la vigne de Naboth (1 R. 21) que le couple royal convoitait.
Selon le récit biblique, Élie ne connut pas une mort ordinaire mais fut enlevé au ciel dans un tourbillon par un char de feu tiré par des chevaux de feu. Par conséquent, à la différence des autres prophètes, un grand nombre de légendes et de croyances sont apparues à son sujet. On dit qu’il revient fréquemment sur terre, habituellement déguisé en paysan, en mendiant ou même en païen incognito pour aider ceux qui sont dans la détresse ou en danger, disparaissant aussi soudainement qu’il est apparu. On dispose une chaise et on verse une coupe de vin pour Élie à chaque célébration de la pâque. On croit aussi qu’il est présent à chaque cérémonie de circoncision et une chaise spéciale («la chaise d’Élie») pour sa présence invisible est placée à côté de celle du parrain qui tient le bébé masculin. Cette croyance particulière peut être due à deux facteurs: le statut angélique d’Élie (puisqu’il est monté au ciel) et le fait que le prophète Malachie l’appelle «le messager de l’alliance» (Mal. 3:1). Dans l’usage juif, le terme berith («alliance») signifie plus spécifiquement «l’alliance de la circoncision» (cf. Ge. 17:9-10). Élie joue également un rôle important dans le mysticisme juif où il apparaît comme messager céleste révélant des mystères divins.
Mais il y a quelque chose de plus important que tous les autres aspects, c’est le rôle eschatologique d’Élie dans la tradition juive. Comment et pourquoi ce rôle s’est développé, c’est quelque chose de difficile à reconstituer, mais dès le temps de Malachie, l’un des derniers prophètes de l’Ancien Testament, certaines de ces croyances semblent avoir déjà existé: «Voici, je vous enverrai Élie, le prophète, avant que le jour de l’Éternel arrive, ce jour grand et redoutable» (Mal. 4:5). Élie a graduellement assumé le rôle de précurseur du Messie et de messager annonçant sa venue. Certains des contemporains de Jésus (cf. Mt. 16:13-14) semblent avoir pensé qu’il pouvait être Élie (Mt. 11:14; 17:10-13) d’une manière qui suggère que Jean-Baptiste, comme précurseur et héraut du Messie, était Élie, c’est-à-dire qu’il s’acquittait de sa fonction eschatologique. Les écrits apocryphes postérieurs (par exemple, l’Apocalypse d’Élie) rattachent à Élie les «révélations» concernant les dernières choses qu’ils rapportent. Des éléments des traditions et des légendes juives sur Élie ont également été adoptés et développés de différentes manières par l’Islam.

Bibliographie
"Elijah." Encyclopaedia Judaica, vol. 6. Jérusalem, 1972.
Il y a un recueil pratique des sources juives post-bibliques dans Louis Ginzberg, Legends of the Jews, vol. 6, 3ème réimpression. Philadelphie, Pennsylvanie, 1967, pp. 133-135 (sous «Elijah»). On peut trouver un très bon résumé dans M.J. Stiassny, "Le Prophète Élie dans le Judaïsme", dans Élie le Prophète, Études Carmélitaines, vol. 2, 1956, pp. 199-255.
Pour les traditions islamiques, voir «Ilyas» et «Al-Khadir» dans Encyclopaedia of Islam.
R.J. ZVI WERBLOWSKY

Élie, Esprit d’
Auteur : FINLAYSON, MARY

Pour les membres de l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours, l'esprit d'Élie est l'esprit de la parenté et de l'unité de la famille. C'est l'esprit qui motive le souci de découvrir les membres de la famille ancestrale par l’histoire familiale et d’accomplir en leur faveur des baptêmes par procuration, des dotations au temple et des ordonnances de scellement (HC 6:252). Ceci est considéré comme l’accomplissement de la prophétie de Malachie que dans les derniers jours Élie «ramènera le cœur [en hébreu, la partie la plus intime, comme l’âme, les affections] des pères à leurs enfants, et le cœur des enfants à leurs pères» (Mal. 4:5-6).
L'apparition d'Élie en 1836 au prophète Joseph Smith et à Oliver Cowdery dans le temple de Kirtland a renouvelé cet esprit (D&A 110:13). L'esprit d'Élie est actif dans l'impulsion que l’on ressent à trouver et à chérir les membres de la famille et les liens familiaux passés et présents. Au sens global du terme, l'esprit d'Élie est l'esprit d'amour qui pourra finalement vaincre toutes les aliénations de la famille humaine. Alors le pouvoir de la prêtrise pourra lier les générations entre elles dans des relations familiales éternelles et «sceller les enfants aux pères et les pères aux enfants» dans l'Évangile de Jésus-Christ (WJS, P. 329).

Bibliographie
Smith, Joseph Fielding. "Elijah the Prophet and His Mission." Utah Genealogical and Historical Magazine 12, janvier 1921, pp. 1-20.
MARY FINLAYSON

Élohim
Auteur: MESERVY, KEITH H.

Élohim (Dieu; dieux; Père céleste) est la forme plurielle du nom ‘eloah (comparer avec l’arabe Allah) dans la bible hébraïque, où elle est employée 2.570 fois par rapport à 57 fois pour le singulier. Mais comme un commentateur l’a noté, la raison pour laquelle cette «forme plurielle pour désigner Dieu est employée n’a pas encore été expliquée d’une manière satisfaisante» (Botterweck, vol. 1, p. 272).
UTILISATION AU SINGULIER. Élohim apparaît dans la Bible hébraïque comme nom commun identifiant le Dieu d’Israël: «Au commencement, Dieu [elohim] créa [verbe singulier] les cieux et la terre» (Ge. 1:1). Il était également souvent employé parallèlement à Jéhovah, nom propre du Dieu d’Israël: «Jacob dit: Dieu [elohim] de mon père Abraham… Éternel [Jéhovah] qui m’as dit: Retourne dans ton pays» (Ge. 32:9; voir aussi Jéhovah, Jésus-Christ).
Les saints des derniers jours emploient le nom Élohim dans un sens plus restrictif comme nom propre et titre pour désigner le Père céleste (voir le Dieu le Père). La Première Présidence de l’Église a écrit: «Dieu, le Père éternel, que nous désignons sous le nom-titre exalté ‘Élohim’, est le Père littéral de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ et des esprits du genre humain» (MFP 5:26; voir aussi les Exposés doctrinaux de la Première Présidence, «Le Père et le Fils» dans les annexes du vol. 4).
UTILISATION AU PLURIEL. Les anciens Israélites utilisaient aussi élohim comme forme plurielle pour désigner les dieux de nations autres qu’Israël. En de telles occasions, les verbes et les adjectifs utilisés avec ce nom étaient également au pluriel. «Tu n’auras pas d’autres dieux devant ma face» (Ex. 20:3; ici «autres» est un adjectif au pluriel).
Il arrive que les saints des derniers jours emploient Élohim dans son sens pluriel comme nom commun désignant la pluralité des dieux que l’on sait exister (EPJS, pp. 300-303). Cependant, en dépit de leur croyance qu’il existe beaucoup de seigneurs et de dieux en plus d’Élohim, de Jéhovah et du Saint-Esprit (D&A 121:28-32), ils suivent l’exemple de Jésus et de Paul, qui adoraient leur Père céleste (Mt. 19:17; 1 Co. 8:4-6).

Bibliographie
Botterweck, G. Johannes, et Helmer Ringgren, dir. de publ. «Elohim». Dans Theological Dictionary of the Old Testament, éd. rév., vol. 1, pp. 267-284. Grand Rapids, Mich., 1977.
KEITH H. MESERVY

Éphraïm
Auteur: SMITH, BRIAN L.

Éphraïm était le fils de Joseph et d’Asenath et le frère cadet de Manassé (Ge. 41:50-52). Selon la Bible, quand Joseph amena ses deux fils à son père, Jacob, pour une bénédiction, Éphraïm reçut la bénédiction du droit d’aînesse au lieu de Manassé (Ge. 48:13-20), l’un des écarts que l’on trouve dans la Bible par rapport à la coutume d’accorder au fils aîné les droits spéciaux qui lui revenaient par droit de primogéniture. Le Seigneur continua à reconnaître la bénédiction d’Éphraïm des siècles plus tard quand il dit: «Je suis un père pour Israël, et Éphraïm est mon premier-né» (Jé. 31:9; cf. 1 Ch. 5:1-2). Les descendants d’Éphraïm continueront à exercer un rôle important. Le Livre de Mormon rapporte que le Joseph d’autrefois «a obtenu du Seigneur la promesse que, du fruit de ses reins, le Seigneur Dieu susciterait une branche juste à la maison d'Israël, non pas le Messie, mais une branche qui serait rompue pour être néanmoins gardée en mémoire dans les alliances du Seigneur» (2 Né 3:5). De plus, «un voyant de choix» sortirait des descendants de Joseph, voyant qui allait «accomplir, pour le fruit [des reins de Joseph], ses frères, une œuvre qui aura une grande valeur pour eux, à savoir, de les faire parvenir à la connaissance des alliances que [le Seigneur a] faites avec tes pères» (2 Né. 3:7). Beaucoup de saints des derniers jours croient qu’ils sont de la branche d’Éphraïm sur laquelle Joseph a prophétisé (2 Né. 3:5-16; D&A 133:30-34) et que le prophète Joseph Smith est le «voyant de choix» (3 Né. 3:6).
En raison de leur rébellion contre le Seigneur il y a de nombreux siècles, les descendants d’Éphraïm ont été dispersés parmi les nations des Gentils, avec des membres des autres tribus, à partir de la chute du royaume d’Israël v. 722 av. J.-C. (2 R. 17:5-6; voir aussi Israël: Dispersion d’Israël ; Israël: Tribus perdues d’Israël).
Dans les derniers jours, les descendants d’Éphraïm ont la bénédiction et la responsabilité de porter le message du rétablissement de l’Évangile au monde et de rassembler Israël dispersé (D&A 113:3-6). «Nous croyons au rassemblement littéral d'Israël et au rétablissement des dix tribus. Nous croyons que Sion (la nouvelle Jérusalem) sera bâtie sur le continent américain» (10e A de F; cf. De. 4:27-31; 28; 29; 30; 3 Né. 20-21). Le 3 avril 1836, Moïse a remis les clefs du rassemblement d’Israël au prophète Joseph Smith dans le temple de Kirtland (D&A 110:11). Beaucoup de descendants d’Éphraïm sont rassemblés d’abord, parce qu’ils ont la responsabilité de préparer la voie au rassemblement des autres tribus (D&A 113). «Et ils [d’autres des tribus d’Israël] apporteront leurs riches trésors aux enfants d'Éphraïm, mes serviteurs… Et là, ils tomberont et seront couronnés de gloire en Sion, par les mains des serviteurs du Seigneur, c'est-à-dire les enfants d'Éphraïm. Et ils seront remplis de cantiques de joie éternelle» (D&A 133:30-33; voir aussi Israël: Rassemblement d’Israël).
Un des instruments qui seront utilisés dans le rassemblement est le Livre de Mormon, également connu parmi des saints des derniers jours comme étant le bois de Joseph ou bois d’Éphraïm (Éz. 37:15-19; 2 Né. 3:12; D&A 27:5). Il doit jouer le rôle important de convaincre les Lamanites, les Juifs et les Gentils que Jésus est le Messie et que Dieu se souvient de son peuple de l’alliance (voir Livre de Mormon: Page de titre du Livre de Mormon).
Pour les saints des derniers jours, l’identification de la lignée d’une personne dans l’Israël de l’alliance moderne se fait sous les mains de patriarches inspirés lors de bénédictions patriarcales qui déclarent le lignage. John A. Widtsoe, un apôtre, a dit: «En donnant une bénédiction, le patriarche peut déclarer notre lignage, c’est-à-dire que nous sommes d’Israël, donc de la famille d’Abraham et d’une tribu spécifique de Jacob. Dans la grande majorité des cas, les saints des derniers jours sont de la tribu d’Éphraïm, la tribu à laquelle a été confiée la direction de l’œuvre des derniers jours. Peu importe que ce lignage soit par le sang ou par adoption» (p. 73; cf. Abr. 2:10).
Les bénédictions patriarcales de la plupart des saints des derniers jours disent qu’ils sont descendants littéraux par le sang d’Abraham et d’Israël. Ceux qui ne sont pas descendants littéraux sont adoptés dans la famille d’Abraham quand ils reçoivent le baptême et la confirmation (voir Loi de l’adoption). Ils ont alors tous les droits des héritiers (EPJS, pp. 117-119). Cette doctrine de l’adoption était comprise des prophètes et des apôtres d’autrefois (par exemple, Ro. 11; 1 Né. 10:14; Jcb. 5; cf. D&A 84:33-34).

Bibliographie
McConkie, Bruce R. A New Witness of the Articles of Faith, pp. 541-575. Salt Lake City, 1985.
Smith, Joseph Fielding. DS 3:219-235.
Widtsoe, John A. Evidences and Reconciliations, pp. 72-77. Salt Lake City, 1943.
BRIAN L. SMITH

Épiscopat président
Auteur: DYER, Wm. GIBB, Jr. et BURTON, H. DAVID

L’épiscopat président se compose de trois hommes, l’évêque président et ses deux conseillers, qui constituent l’un des conseils présidents de l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours. Ces Autorités générales, qui détiennent chacune le titre d’évêque, remplissent leurs fonctions sous la supervision directe de la Première Présidence. Depuis sa formation, l’épiscopat président a été responsable de beaucoup d’affaires temporelles de l’Église. Parmi celles-ci, la responsabilité de recevoir, distribuer et comptabiliser la dîme, les offrandes et les contributions des membres; la gestion des programmes pour aider les pauvres et les nécessiteux; la conception, la construction et l’entretien des lieux de culte et l’apurement et le transfert des certificats de membre (voir Évêque, Histoire de l’office; Contributions financières; Tenue des registres; Entraide). Les hommes choisis pour être évêques présidents ont été connus pour leur compétence en matière de gestion ainsi que pour leur engagement religieux. Historiquement, l’épiscopat président a présidé la Prêtrise d’Aaron. En tant qu’Autorités générales, les membres de l’épiscopat président parlent régulièrement aux conférences générales, s’adressant souvent expressément aux jeunes hommes de l’Église.
L’évêque président est choisi par la Première Présidence et puis approuvé par le Collège des douze apôtres. Il choisit comme conseillers deux hommes qui sont également approuvés par la Première Présidence et le Collège des Douze. Tous sont ensuite soutenus par les membres de l’Église. L’évêque président et ses conseillers sont mis à part et investis par la Première Présidence et reçoivent les clefs et l’autorité de prêtrise pour agir dans leurs fonctions respectives. Au début, les évêques présidents détenaient leur office à vie, mais au XXe siècle ils ont été relevés et remplacés selon que les circonstances et les besoins de l’Église l’ont dicté.
Le 4 février 1831, le prophète Joseph Smith a appelé Edward Partridge comme premier évêque de l’ Église. Celui-ci allait passer la majorité de son temps à gérer la réception, la vérification et l’affectation des biens consacrés et des dons reçus par l’Église (voir Consécration: Loi de consécration; Dons de jeûne; Dîme). Il devait prendre soin des pauvres et des nécessiteux et stocker les produits excédentaires pour les besoins futurs de l’Église. Après l’appel de l’évêque Partridge, il fut révélé à Joseph Smith que d’autres évêques seraient choisis. Le 4 décembre 1831, Newel K. Whitney fut également appelé, par révélation (D&A 72:8), pour remplir les fonctions d’évêque. Les deux évêques avaient une juridiction différente, Whitney en Ohio et Partridge au Missouri. À Nauvoo, ils avaient tous les deux une juridiction générale, mais ils supervisaient également les dons et le soin des pauvres dans une paroisse particulière de la ville. En 1847, Newel K. Whitney fut désigné comme premier évêque président.
Pendant toute l’histoire de l’Église, la Première Présidence a confié aux épiscopats présidents des responsabilités étendues mais variables auprès de la Prêtrise d’Aaron et des jeunes de l’Église. En 1873, le président Brigham Young chargea l’épiscopat président d’organiser dans la Prêtrise d’Aaron des collèges complets de prêtres, d’instructeurs et de diacres dans toute l’Église. En 1876, il expliqua que le poste d’évêque président était celui de président général de la Prêtrise d’Aaron. En 1937, l’épiscopat président se vit confier la responsabilité de la Société d’amélioration mutuelle des jeunes gens et en 1946, celle de la Société d’amélioration mutuelle des jeunes filles. Ces programmes étaient conçus de manière à assurer un équilibre entre l’étude religieuse, l’art de vivre en société, la conscience de la collectivité et l’épanouissement physique pour les jeunes saints des derniers jours (voir Jeunes Gens; Jeunes Filles). Depuis 1977, la Première Présidence administre directement les programmes de la Prêtrise d’Aaron par l’intermédiaire d’une présidence des Jeunes Gens appelée d’entre les collèges des soixante-dix.
Avant 1847, les évêques Partridge, Whitney et George Miller, le remplaçant de Partridge, étaient évêques généraux de l’Église. Après 1847, les évêques présidents et leurs mandats ont été Newel K. Whitney (1847-1851), Edward Hunter (1851-1883), William B. Preston (1884-1908), Charles W. Nibley (1907-1925), Sylvester Q. Cannon (1925-1938), LeGrand Richards (1938-1952), Joseph B. Wirthlin (1952-1961), Jean H. Vandenberg (1961-1972), Victor L. Brown (1972-1985), Robert D. Hales (1985-1994), Merrill J. Bateman (1994-1995) et H. David Burton (1995-).
Jusqu’aux années 1980, ces hommes rendaient visite aux paroisses et aux pieux, donnaient des sessions de formation pour les évêques aux conférences générales et publiaient des bulletins et de la documentation de formation pour les évêques et les collèges locaux de la prêtrise. À l’heure actuelle, l’épiscopat président ne supervise plus directement d’autres évêques ni ne préside des paroisses locales de l’Église.
Comme le stipulent les Écritures, l’épiscopat président, la Première Présidence et le Collège des douze apôtres constituent le Conseil pour l’affectation des dîmes (D&A 120). Ce conseil contrôle la réception des dîmes et vérifie les dépenses. Il se réunit périodiquement pour examiner les questions ayant une importance financière et pour autoriser les budgets pour les organisations et les départements de l’Église (voir Finances de l’Église). Les membres de l’épiscopat président, désignés par la Première Présidence, font partie, en outre, de divers autres comités et conseils administratifs, exécutifs et directeurs, tels que le Comité d’affectations, le Comité général des services d’entraide, le Conseil exécutif de la prêtrise, le Conseil exécutif du temple et de l’histoire familiale et le Conseil exécutif missionnaire (voir Organisation: Organisation contemporaine).
En 1977, une restructuration importante en matière d’organisation a eu lieu dans l’Église sous la direction de la Première Présidence. Avec la croissance importante du nombre des membres de l’Église, l’épiscopat président s’est vu confier des responsabilités beaucoup plus étendues dans le domaine de l’administration temporelle dans le monde entier. Sous la direction de l’épiscopat président, des directeurs pour les affaires temporelles ont été envoyés dans un certain nombre d’endroits internationaux pour diriger la gestion de la construction des églises et les temples, celle des certificats de membre et la préparation et la distribution des Écritures et d’autres documents pour le programme d’études. La direction des départements centraux responsables des opérations temporelles a également été confiée à l’épiscopat président. Depuis lors, celui-ci nomme les directeurs administratifs pour les divers départements qui soutiennent les activités des directeurs des affaires temporelles, comprenant les finances et les registres, la LDS Foundation, les services d’imprimerie, la distribution du matériel du programme d’études, les achats, la traduction des Écritures et des cours du programme d’études, la confection de vêtements du temple, le transport, les systèmes informatiques et la communication, la sécurité, les investissements, les temples et les chantiers spéciaux de construction et de transformation, les acquisitions et les ventes immobilières, la construction d’églises, la production et la manutention de l’entraide, les LDS Social Services et la gestion des propriétés.
En 1986, la Première Présidence a appelé des présidences d’interrégion pour superviser les activités ecclésiastiques dans des régions géographiques déterminées dans le monde. Ces présidences d’interrégion assurent actuellement la supervision directe des directeurs des affaires temporelles dans les secteurs internationaux, de l’entraide et des bâtiments aux États-Unis et au Canada. L’épiscopat président, ainsi que les départements centraux, assurent la formation, l’évaluation, la planification des effectifs, l’appui technique et la conception des programmes pour aider les présidences d’interrégion dans leur rôle.

Bibliographie
Cowan, Richard O. The Church in the Twentieth Century, pp. 140, 270, 297, 406-407, 420. Salt Lake City, 1985.
Palmer, Lee A. Aaronic Priesthood Through the Ages, pp. 321-331. Salt Lake City, 1964.
Widtsoe, John A. Priesthood and Church Government, éd. rév., pp. 277-279. Salt Lake City, 1954.
H. DAVID BURTON
WM. GIBB DYER, JR

Ésaïe

[L’accent que les Écritures modernes mettent sur les paroles d’Ésaïe rend nécessaire un traitement de ses écrits sous quatre titres:
Ésaïe: Paternité littéraire
Ésaïe: Textes dans le Livre de Mormon
Ésaïe: Interprétations dans les Écritures modernes
Ésaïe: Commentaires sur Ésaïe
L’article «Ésaïe: Paternité littéraire» traite de la thèse qu’à la lumière de l’existence d’un texte d’Ésaïe en la possession de peuples du Livre de Mormon dès 600 av. J.-C., le livre d’Ésaïe n’a qu’un seul auteur. L’article «Ésaïe: Textes dans le Livre de Mormon» traite de ce que l’on peut apprendre sur l’histoire du texte du livre d’Ésaïe grâce aux passages conservés dans le Livre de Mormon. Une grande partie du texte d’Ésaïe qui est conservée et commentée dans les Écritures modernes concerne les derniers jours, un sujet repris dans l’article «Ésaïe: Interprétations dans les Écritures modernes». L’intérêt pour Ésaïe qui en est résulté chez les saints a donné lieu à un certain nombre d’études qui sont traitées dans l’article «Ésaïe: Commentaires sur Ésaïe».]

Ésaïe: Paternité littéraire
Auteur: LUDLOW, VICTOR L.

De tous les écrits de l’Ancien Testament, c’est le message d’Ésaïe qui a la priorité chez les saints des derniers jours. Cette focalisation découle principalement de l’utilisation intensive d’Ésaïe dans le Livre de Mormon. Secondairement, le chapitre 11 d’Ésaïe a été cité à Joseph Smith au cours d’une vision tout au début de son expérience comme prophète (JS–H 1:40) et fait l’objet d’une section des Doctrine et Alliances (D&A 113). En outre, Jésus-Christ a donné des révélations sur les paroles d’Ésaïe en instruisant les saints, et les prophètes et les apôtres modernes les ont fréquemment citées et commentées.
Traditionnellement, le livre d’Ésaïe a été attribué à un prophète vivant dans le royaume de Juda entre 740 et 690 av. J.-C. En Allemagne, vers la fin du XVIIIe siècle, plusieurs savants ont contesté cette idée en affirmant que les chapitres 40-66 ont été écrits par une ou plusieurs autres personnes aussi tard que 400 av. J.-C., cela à cause de mentions expresses d’événements qui se sont produits après la mort d’Ésaïe. Ce point de vue imprègne maintenant beaucoup de commentaires de la Bible et a conduit à la thèse de l’existence d’un deuxième prophète-auteur que l’on appelle généralement dans les milieux érudits le «Deutéro-Ésaïe». Il existe, en effet, maintenant une grande variété de théories concernant la date et la paternité littéraire d’Ésaïe. Cependant, la croyance des saints en la révélation et au pouvoir de voyance des prophètes, avec, en outre, les citations d’Ésaïe dans le Livre de Mormon et l’exhortation de celui-ci d’étudier ses écrits, ont renforcé chez les saints des derniers jours le point de vue traditionnel au sujet de la date et de la paternité d’Ésaïe et ce, de la manière suivante.
D’abord, alors que certains savants estiment que les prophètes ne pouvaient pas voir le futur et que, par conséquent, les derniers chapitres d’Ésaïe doivent avoir été écrits après l’époque de celui-ci (par exemple, És. 45 au sujet de Cyrus), les saints des derniers jours reconnaissent que les prophètes peuvent voir le futur et prophétiser à son sujet. Aux chapitres 40-66, Ésaïe prophétise sur le futur, tout comme l’apôtre Jean dans Apocalypse 4-22 et le prophète Néphi 1 dans 2 Néphi 25-30.
En second lieu, le prophète Léhi du Livre de Mormon et sa famille ont quitté Jérusalem vers 600 av. J.-C. et ont emporté des écrits sacrés sur des plaques d’airain contenant une grande partie de l’Ancien Testament, notamment Ésaïe (1 Né. 5:13; 19:22-23). Les prophètes du Livre de Mormon enseignaient à l’aide des annales des plaques d’airain, non seulement les chapitres 1-39, que les savants attribuent habituellement au prophète Ésaïe du VIIIe siècle av. J.-C., mais également les chapitres postérieurs, ce que l’on appelle le Deutéro-Ésaïe. Par exemple, les chapitres 48-54 d’Ésaïe sont tous cités dans le Livre de Mormon, certains passages plusieurs fois (1 Né. 20-21; 2 Né. 6:16-8:25; Mos. 12:21-24; 14; 15:29-31; 3 Né. 16:18-20; 20:32-45; 22). Par conséquent, l’existence d’un texte pratiquement complet d’Ésaïe vers la fin du VIIe siècle av. J.-C., comme en témoigne le Livre de Mormon, annule les arguments en faveur de l’idée d’une pluralité d’auteurs postérieurs, que ces arguments soient historiques, théologiques ou littéraires.
Enfin, il existe d’autres témoins importants de l’existence d’un seul auteur pour Ésaïe, tout particulièrement Jésus-Christ (cf. Mt. 13:14-15; 15:7-9; Lu. 4:17-19; 3 Né. 16, 20-22). En effet, après avoir cité abondamment Ésaïe 52 (3 Né. 16:18-20; 20:32-45) et répété Ésaïe 54 dans sa totalité (3 Né. 22), Jésus-Christ ressuscité recommande à ses disciples du Livre de Mormon d’étudier les paroles d’Ésaïe et ajoute: «Je vous donne le commandement de sonder diligemment ces choses; car grandes sont les paroles d'Ésaïe. Car, assurément, il a parlé de tout ce qui concerne mon peuple qui est de la maison d'Israël» (3 Né. 23:1-2).
Depuis les temps les plus reculés, les traditions juive et chrétienne sont pour la paternité unique d’Ésaïe. La Septante, les manuscrits de la mer Morte et d’autres textes antiques ne fournissent aucune indication d’une multiplicité d’auteurs. Les saints des derniers jours acceptent ce que dit Jésus ressuscité, à savoir qu’Ésaïe était un voyant et un révélateur dont les prophéties, telles qu’on les trouve tout au long de son livre, finiront toutes par s’accomplir (3 Né. 23:1-3). C’est en particulier parce que Jésus attribue Ésaïe 52 et 54 au prophète d’autrefois que les saints des derniers jours ont conclu que le livre d’Ésaïe est l’ouvrage inspiré d’Ésaïe, fils d’Amots, le prophète du VIIIe siècle.

Bibliographie
Adams, Larry L., et Alvin C. Rencher. "A Computer Analysis of the Isaiah Authorship Problem". BYU Studies 15, automne 1974, pp. 95-102.
Anderson, Francis I. "Style and Authorship". The Tyndale Paper 21, juin 1976, p. 2.
Gileadi, Avraham. A Holistic Structure of the Book of Isaiah. Thèse de doctorat, université Brigham Young, 1981.
Kissane, E. J. The Book of Isaiah, 2 vols. Dublin, Irlande, 1941, 1943.
Ludlow, Victor L. Isaiah: Prophet, Seer, and Poet. Salt Lake City, 1981.
Tvedtnes, John A. "Isaiah Variants in the Book of Mormon". Dans Isaiah and the Prophets, dir. de publ. M. Nyman. Provo, Utah, 1984.
Young, Edward J. Introduction to the Old Testament. Grand Rapids, Mich., 1949.
VICTOR L. LUDLOW

Ésaïe: Textes dans le Livre de Mormon
Auteur: DAVIES, LEGRANDE

Les textes d’Ésaïe cités dans le Livre de Mormon sont uniques. Ils sont les seuls textes existants d’Ésaïe qui n’ont aucune source linguistique «originale» à laquelle la traduction puisse être textuellement comparée. Ces textes anglais datent de la traduction et de la publication initiale du Livre de Mormon (1829).
Ces textes d’Ésaïe ont été cités et paraphrasés par beaucoup de prophètes du Livre de Mormon qui avaient une copie d’Ésaïe sur les plaques d’airain. Les tentatives de déterminer l’authenticité de ces textes d’Ésaïe dans le Livre de Mormon en les comparant aux textes hébreu, grec et latin d’Ésaïe ne manquent pas d’intérêt, mais de tels efforts sont discutables parce que l’on ne dispose pas des textes antiques qui sont à la base de la traduction d’Ésaïe du Livre de Mormon pour pouvoir les étudier. On peut cependant apprendre beaucoup de choses en comparant les nombreuses versions et traductions anciennes d’Ésaïe aux textes d’Ésaïe dans le Livre de Mormon. Ce genre de comparaisons a pour résultat de faire d’Ésaïe dans le Livre de Mormon un véritable objet de recension.
Les passages d’Ésaïe dans le Livre de Mormon contiennent beaucoup de ressemblances avec ceux de la traduction de la Bible, ce qui semblerait indiquer que les deux partagent une origine massorétique hébraïque. Cependant, beaucoup d’autres particularités des textes du Livre de Mormon impliquent une origine liée à des textes semblables à ceux dont la Septante grecque et la Vulgate latine dérivent. Ces variantes particulières sont suffisamment importantes pour que l’on ne puisse reléguer les textes d’Ésaïe du Livre de Mormon au rang d’une simple copie de la King James Version. Les textes d’Ésaïe que l’on trouve dans la traduction anglaise du Livre de Mormon possèdent un caractère distinctif qui indique une origine textuelle propre. La question importante n’est pas: «Les textes d’Ésaïe dans le Livre de Mormon sont-ils authentiques?» La question est plutôt: «Trouve-t-on dans les textes d’Ésaïe du Livre de Mormon la preuve de la présence de variantes en plus des textes normalement reconnus?» Ne devraient-ils pas être considérés comme aussi valides que, par exemple, les textes d’Ésaïe de la mer Morte?
L’une des critiques principales à l’égard des textes d’Ésaïe du Livre de Mormon est qu’ils contiennent des parties de ce que les spécialistes de la Bible en sont venus à appeler le «Proto-Ésaïe» et le «Deutéro-Ésaïe». Il est évident que les textes d’Ésaïe du Livre de Mormon contiennent des données qui vont à l’encontre des théories modernes sur la paternité multiple du livre d’Ésaïe (voir Ésaïe: Paternité littéraire); car si l’on accepte les origines des passages d’Ésaïe dans le Livre de Mormon comme le disent ses auteurs, cela veut dire que, dès 600 av. J.-C., le livre d’Ésaïe était essentiellement ce qu’il est aujourd’hui. La valeur principale de la critique textuelle, dans ce cas-ci, est de permettre de dégager des thèmes et des structures de langage spéciaux, c’est-à-dire de permettre une meilleure compréhension du message, pas de déterminer qui est l’auteur. L’option la plus viable et certainement la plus productive pour déterminer l’origine des textes d’Ésaïe dans le Livre de Mormon est donc un examen interne.
Le Livre de Mormon dit que dans «la première année du règne de Sédécias, roi de Juda» (1 Né. 1:4) le prophète Néphi 1 et ses frères récupérèrent à Jérusalem des «annales» écrites par leurs ancêtres sur des plaques d’airain (1 Né. 3-4), qu’ils emportèrent en Amérique. Elles contenaient les prophéties d’Ésaïe (1 Né. 19:22-23; cf. 5:13). Tous les textes d’Ésaïe dans le Livre de Mormon sont des citations de ces annales, excepté peut-être les passages cités par Jésus ressuscité (cf. 1 Né. 16, 21-22). Que ce soit en citant directement ou en paraphrasant, les prophètes du Livre de Mormon essayaient de faire deux choses: «persuader [les gens] de croire au Seigneur, leur Rédempteur» (1 Né. 19:23) et révéler les plans de Dieu pour son peuple, comme le note le prophète Ésaïe (par exemple, 2 Né. 25:7; Hél. 8:18-20; 3 Né. 23:1-2). Ces éléments donnent une qualité singulière aux textes d’Ésaïe du Livre de Mormon, parce qu’ils préservent presque exclusivement les textes concernant le salut et les principes sauveurs et ignorent les passages historiques d’Ésaïe. Les préoccupations des prophètes du Livre de Mormon étaient doctrinales et les passages étaient utilisés pour exposer leur témoignage. De plus, les passages qui concernent le salut dans les derniers chapitres d’Ésaïe sont présentés pour prouver que Jésus était le Messie promis (cf. Mos. 13:33-15:31, qui cite És. 53; 52:7, 8-10). Alors que les spécialistes de la Bible au XIXe siècle affirmaient que la notion de «Messie sauveur» était apparue après l’exil babylonien (587-538 av. J.-C.) et que par conséquent les derniers chapitres d’Ésaïe doivent être datés de la fin du VIe siècle ou plus tard, les textes du Livre de Mormon sapent manifestement cette théorie.
Des changements mineurs ont été apportés aux textes d’Ésaïe du Livre de Mormon depuis la publication de l’ouvrage en 1830. Ces changements des éditions récentes ont essayé de corriger les fautes d’impression originelles et de rendre le texte d’Ésaïe de l’édition actuelle «conforme aux manuscrits anglais antérieurs à la publication et aux premières éditions anglaises publiées par Joseph Smith, le prophète» («Brève explication concernant le Livre de Mormon» édition anglaise de 1981 du Livre de Mormon). Aucun de ces changements n’a été conséquent.

Bibliographie
Eissfeldt, Otto. The Old Testament: An Introduction, pp. 303-346. New York, 1965.
Nibley, Hugh. Since Cumorah, pp. 111-134. Dans CWHN 7.
Sperry, Sidney B. Answers to Book of Mormon Questions. Salt Lake City, 1967.
Tvedtnes, John A. “The Isaiah Variants in the Book of Mormon". F.A.R.M.S. Paper. Provo, Utah, 1981.
LEGRANDE DAVIES

TABLEAU DES CITATIONS D’ÉSAÏE DANS LE LIVRE DE MORMON
Livre de Mormon                 Ésaïe
1 Né. 20-21                        48-49
1 Né. 22:6                          49:22
1 Né. 22:8                          49:22-23; 29:14
1 Né. 22:10-11                    52:10
2 Né. 6:6b-7                       49:22-23
2 Né. 6:15                          29:6
2 Né. 6:16-8:25                   49:24-52:2
2 Né. 9:50-51                      55:1-2
2 Né. 12-24                         2-14
2 Né. 25:17 (mélangé)         11:11 et 29:14
2 Né. 26:15-16, 18               29:3-5
2 Né. 26:25                         55:1
2 Né. 27:2-5                        29:6-10
2 Né. 27:6-9                        29:4, 11
2 Né. 27:15-19                     29:11-12
2 Né. 27:25-35                     29:13-24
2 Né. 28:9b                         29:15
2 Né. 28:14b                       29:13b
2 Né. 28:16a                       29:21
2 Né. 28:30a                       28:10, 13
2 Né. 28:3                           29:12-13
2 Né. 29:1                           29:14, 11:11
2 Né. 30:9, 12-15                 11:4-9
Mosiah 12:21-24                  52:7-10
Mosiah 14:1-12                    53
Mosiah 15:10                      53:10
Mosiah 15:14-18                  52:7
Mosiah 15:29-31                  52:8-10
3 Né. 16:18-20                     52:8-10
3 Né. 20:32-35                     52:8-10
3 Né. 20:36-46                     52:1-3, 6-7, 11-15
3 Né. 21:8b                          52:15b
3 Né. 21:29                          52:12
3 Né. 22:1b-17                     54
Mro. 10:31                           52:1-2; 54:2

Ésaïe: Interprétations dans les Écritures modernes
Auteur: NYMAN, MONTE S.

Ésaïe était l’un des prophètes-auteurs les plus importants de l’Ancien Testament. Le Livre de Mormon et les Doctrine et Alliances, Écritures modernes des saints, confirment cette évaluation et contiennent des commentaires abondants sur ses écrits. Le Livre de Mormon cite 425 versets du livre d’Ésaïe et en paraphrase beaucoup d’autres, tirés des plaques d’airain, annales apportées en Amérique par le prophète Léhi et sa famille (v. 600 av. J.-C.). Les citations d’Ésaïe dans le Livre de Mormon sont accompagnées des interprétations des prophètes néphites et de Jésus-Christ ressuscité. Les Doctrine et Alliances contiennent de même des citations et des paraphrases d’Ésaïe, dont beaucoup éclairent le cadre et la pertinence de l’accomplissement de ses prophéties.
LE LIVRE DE MORMON. Les prophètes du Livre de Mormon louent explicitement les écrits d’Ésaïe et les commentent dans le détail. Outre les trois premiers prophètes néphites, Néphi 1, Jacob et Abinadi, qui citent abondamment et expliquent les significations d’Ésaïe, Jésus-Christ ressuscité, quand il visite les Néphites (34 apr. J.-C.), commande à ses auditeurs «de sonder diligemment ces choses; car grandes sont les paroles d'Ésaïe» (3 Né. 23:1). La plupart des citations d’Ésaïe dans le Livre de Mormon concernent deux thèmes: (1) le témoignage que Jésus-Christ viendrait au monde pour le sauver (1 Né. 19:23; cf. 2 Né. 9:5-12) et (2) des déclarations selon lesquelles même si le Seigneur dispersait Israël, il le rassemblerait et le rétablirait, accomplissant les alliances qu’il avait faites avec Abraham et Israël (2 Né. 6:5; cf. 9:1-2).
Pour ce qui est de la maison d’Israël, la citation la plus ancienne d’Ésaïe par Néphi (chaps. 48-49) souligne deux types de dispersion: celle de grosses parties des tribus d’Israël et celle de petits groupes parmi les nations de la terre (1 Né. 22:3-5; cf. És. 49:1-13). Les deux sortes d’Israélites dispersés seraient nourris temporellement et spirituellement parmi les Gentils. L’aide temporelle aux Israélites conduirait ceux-ci à une dépendance vis-à-vis des Gentils pour la survie. Les soins spirituels se feraient grâce à «une œuvre merveilleuse» qui rassemblerait Israël hors de l’obscurité et des ténèbres et l’amènerait à connaître son Rédempteur (1 Né. 22:6-12).
Néphi présente sa plus longue citation d’Ésaïe 2-14 (2 Né. 12-24) comme étant un troisième témoin du Rédempteur d’Israël. Néphi, son frère Jacob et Ésaïe avaient chacun vu le Rédempteur (sous l’aspect du Jésus-Christ prémortel) face à face (2 Né. 11:2-3; cf. 2 Né. 16:1-7). La vision personnelle de Néphi (1 Né. 11:13-20) éclaircit les paroles d’Ésaïe annonçant l’avènement du Christ (cf. 2 Né. 17:14; 19:6-7 [c.-à-d., És. 7:14; 9:6-7]).
Le commentaire de Néphi sur Ésaïe 2-14 décrit ce qui devait arriver aux Juifs (2 Né. 25:9-21; cf. És. 3:1-15; 5:1-7), au peuple de Néphi (2 Né. 25:22-26:11; cf. És. 29:1-4) et parmi les Gentils (2 Né. 26:12-28:32; cf. És. 3:16-4:1). Néphi savait par révélation que quand le Livre de Mormon paraîtrait chez les Gentils, les églises seraient remplies d’orgueil et d’érudition, des combinaisons secrètes régneraient et les supercheries de prêtres seraient florissantes (2 Né. 26:14-33; cf. És. 3:16-4:1; 2 Né. 13:16-14:1). En revanche, il vit que de belles branches d’Israël seraient purifiées et grandiraient tant en Sion qu’à Jérusalem et qu’elles seraient protégées par le Seigneur (És. 4:2-6; 2 Né. 14:2-6). Amplifiant la prophétie d’Ésaïe, Néphi prophétisa que les Gentils qui se repentaient seraient comptés avec la maison d’Israël et deviendraient héritiers des bénédictions promises (2 Né. 30:1-3). Il affirma que son propre peuple recevrait de nouveau l’Évangile de Jésus-Christ et deviendrait un peuple pur et agréable (2 Né. 30:4-6). Il prédit le rassemblement des Juifs à Jérusalem quand ils commenceraient à croire au Christ et deviendraient aussi un peuple agréable (2 Né. 30:7).
Le prophète Abinadi (v. 150 av. J.-C.) dit que tous les prophètes avaient parlé de la venue du Christ (Mos. 13:33-35) et il cite Ésaïe 53 comme exemple (cf. Mosiah 14). Dans une des explications les plus lucides du ministère et de l’expiation du Christ, Abinadi explique que le chapitre 53 d’Ésaïe souligne que «Dieu lui-même descendra parmi les enfants des hommes et rachètera son peuple» et que, grâce à sa rédemption, il tiendrait «entre eux et la justice, ayant rompu les liens de la mort, prenant sur lui leur iniquité et leurs transgressions … et ayant satisfait aux exigences de la justice [de Dieu]» (Mos. 15:1-9).
Pendant sa première visite parmi les peuples du Livre de Mormon, Jésus ressuscité cite, parmi ses principaux textes, Ésaïe 52 et 54. Il déclare que quand les paroles d’Ésaïe s’accompliront, les alliances faites avec la maison d’Israël seront accomplies (3 Né. 20:11-12). L’Évangile sera enseigné aux Juifs dans les lieux où ils sont dispersés et, après qu’ils l’auront accepté, ils retourneront à Jérusalem et instruiront leur propre peuple (3 Né. 20:29-35; cf. És. 52:8-10). Jésus donne à ses auditeurs un signe que le retour des Juifs à Jérusalem indiquera que le rétablissement aura déjà commencé chez d’autres Israélites en Sion, en Amérique (3 Né. 21:1-7; És. 52:1-3, 6-7, 11-12). Dans une allusion au serviteur « défiguré » d’Ésaïe 52:13-15, il parle de «l’œuvre merveilleuse» du serviteur. Si le serviteur défiguré est clairement Jésus dans sa condition mortelle (Mos. 15:1-9), les paroles d’Ésaïe constituent une double prophétie parce que Jésus ressuscité dit qu’elle désigne également un serviteur dans les derniers jours. Les saints des derniers jours croient que ce serviteur est le prophète Joseph Smith et que l’œuvre merveilleuse mentionnée était la parution du Livre de Mormon et le rétablissement de l’Évangile (3 Né. 21:8-11).
Tout en amplifiant les paroles d’Ésaïe, Jésus prédit l’édification de la nouvelle Jérusalem sur le continent américain par un reste de la maison d’Israël avec l’aide de Gentils convertis (3 Né. 21:22-25; cf. 20:22). L’Évangile doit être prêché parmi les divers groupes de la maison d’Israël, notamment les Lamanites et les tribus perdues (3 Né. 21:26).
LES DOCTRINE ET ALLIANCES. Autre source riche pour interpréter et appliquer les prophéties d’Ésaïe, les Doctrine et Alliances comptent plus de soixante-dix citations ou paraphrases d’Ésaïe. Deux thèmes dominent: l’Évangile sera rétabli et Israël sera rassemblé». Par exemple, l’œuvre prodigieuse et miraculeuse mentionnée dans Ésaïe 29:14 est la parution du Livre de Mormon (D&A 6:1); L’œuvre «étrange» de Dieu (És. 28:21) est le rétablissement de l’Église et de ses ordonnances du temple (D&A 95:4); les «bonnes nouvelles» publiées «sur les montagnes» (És. 52:7) consistent en la prédication de l’Évangile à toutes les nations (D&A 19:29) et le retour des tribus de Jacob de parmi les nations (És. 49:6) signifie le retour d’Israël dispersé dans ses terres promises (D&A 133:26-33).
Les autres thèmes sont l’édification de la Sion des derniers jours et de ses pieux (És. 54:1-2; D&A 82:14) aussi bien que de la vieille Jérusalem (És. 52:1-2; D&A 113:7-10), la confirmation que Jésus est le seul Sauveur du monde (És. 43:11; D&A 76:1) et des détails de sa seconde venue (És. 63:3-6; 64:1-5; D&A 133:37-52). Enfin beaucoup d’événements attendus sont interprétés comme étant des événements millénaires (És. 65; D&A 101:30-31).

Bibliographie
Ludlow, Victor L. Isaiah: Prophet, Seer, and Poet. Salt Lake City, 1982.
Nyman, Monte S. Great Are the Words of Isaiah. Salt Lake City, 1980.
MONTE S. NYMAN

TABLEAU DES CITATIONS D’ÉSAÏE DANS LES DOCTRINE ET ALLIANCES
Les listes suivantes proposent un échantillonnage de passages d’Ésaïe qui sont cités, paraphrasés ou interprétés dans les Doctrine et Alliances.
Ésaïe                          Doctrine et Alliances

1:27                         6:1
1:18                         45:10; 50:10-12
1:19                         64:34
2:2-31                      33:12-13
4:5                           45:63-75; 84:5
4:6                           115:6
5:1-7                        101:43-62
8:16                          88:84; 133:72
11:1-5                       113:1-4
11:4                          19:15
11:10                        113:5-6
11:16                        133:26-29
13:1                          133:14
13:10                         29:14; 34:9; 45:42;
88:87;                        133:49
13:13                          21:6; 35:24
14:12                          76:26
24:5                           1:15
24:20                          49:23; 88:87
25:6                            58:8
28:10                          98:12; 128:21
28:15, 18                    45:31; 5:19; 97:23
28:21                          95:4; 101:95
29:14                          4:1; 6:1; 11:1; 12:1; 14:1; 18:44; 76:9
32:2                            21:13
34:5                            38:22
35:1-2                         49:24-25; 117:7
35:3                            81:5
35:7-10                       133:27-33
35:10                          45:71; 66:11
40:3                            33:10; 45:9; 65:1; 84:28
40:4                            88:66
40:5                            49:23; 133:22
40:6                            101:23 124:7-8
40:31                           89:20; 124:99
42:7                            128:22
43:11                          76:1
45:17                          35:25; 38:33
45:23                          76:110; 88:104
49:1                            1:1
49:2                            6:2; 11:2; 12:2; 14:2; 15:2; 16:2; 33:1; 86:9
49:6                            86:11
49:22                          45:9; 115:5
50:2-3                         35:8; 133:66-69
50:11                          133:70
51:9-11                       101:18
52:18                          2:14; 113:7-8
52:2                            113:9-10
52:7                            19:29; 31:3; 113:10
52:8                            39:13; 84:98-99; 133:10
52:10                          113:10; 133:3
52:1                            138:42; 133:5
52:12                          49:27; 58:56; 101:68, 72; 133:15
52:15                          101:94
54:2                            82:14; 133:9
54:17                          71:9; 109:25
55:6                            88:62-63
59:17                          27:15-18
60:1-4                         64:41-42
60:2                            112:23
60:22                          133:58
61:11                          28:22
62:4                            133:23-24
62:10                          45:9; 115:5
63:1-21                       33:46-48
63:3-6                         76:107; 88:106; 133:50-52
63:7-9                         133:52-53
64:1-2                         34:8; 133:40-42
64:3-5                         76:10; 133:43-45
65:17                          29:23
65:20                          63:51; 101:30
65:21-22                     101:101
66:1                            38:17
66:24                           76:44

Ésaïe: Commentaires sur Ésaïe
Auteur: MADSEN, ANN N.

Le livre d’Ésaïe est l’un des ouvrages prophétiques les plus souvent cités dans les Écritures des saints. Quand les peuples du Livre de Mormon quittèrent Jérusalem, ils emportèrent des annales sur des plaques d’airain qui contenaient beaucoup de livres de l’Ancien Testament antérieurs à 600 av. J.-C., notamment Ésaïe. Très vite dans leurs récits, Néphi 1 et son frère, Jacob, citent considérablement Ésaïe. Plus tard, Jésus ressuscité exhortera ses auditeurs d’Amérique à sonder diligemment les paroles d’Ésaïe, car «grandes sont les paroles d’Ésaïe» (3 Né. 23:1).
Les saints des derniers jours voient beaucoup de prophéties d’Ésaïe s’accomplir dans les événements contemporains. Quand il apparaît, les 21-22 septembre 1823, au prophète Joseph Smith, l’ange Moroni cite Ésaïe 11 et dit qu’il est «sur le point de s’accomplir» (JS–H 1:40). Ésaïe 29 est également considéré comme une prophétie annonçant la parution du Livre de Mormon. Les enseignements de Joseph Smith contiennent beaucoup d’allusions à Ésaïe, particulièrement en ce qui concerne les derniers jours précédant l’avènement du Christ. En plus, Ésaïe est souvent cité dans les Doctrine et Alliances (par exemple, 45:10; 50:10-12; 64:34-35; 133) et dans certains cas des interprétations sont ajoutées (par exemple, D&A 113).
Plusieurs livres écrits par des auteurs mormons depuis 1950 ont cherché à aider les membres de l’Église et d’autres à comprendre les paroles d’Ésaïe. Certains de ces commentaires s’adressaient à un auditoire érudit, d’autres ont été écrits pour les lecteurs ordinaires.
En 1952, Sidney B. Sperry a présenté ses observations sur Ésaïe dans les dix premiers chapitres de son livre The Voice of Israel's Prophets (Salt Lake City). Son but principal était de proposer des commentaires sous l’angle des saints des derniers jours, notamment les idées de Joseph Smith, et d’analyser le livre entier d’Ésaïe du point de vue historique et philologique. Il y a inclus l’interprétation de divers passages donnée par le Livre de Mormon et un traitement en faveur d’une paternité unique. Il a également utilisé la Septante et sa maîtrise de l’hébreu pour expliquer et parfois retraduire des passages. Bien que ce soit la plus ancienne étude du genre, elle reste un classique de son espèce.
En 1982, Avraham Gileadi a publié The Apocalyptic Book of Isaiah (Provo, Utah), une nouvelle traduction du texte hébreu avec des clefs interprétatives pour les lecteurs ordinaires. Le livre apporte sa traduction et sa perspective judéo-mormone. En 1988, il a publié un deuxième volume, The Book of Isaiah (Salt Lake City), qui contenait sa précédente traduction et une introduction augmentée contenant quatre clefs interprétatives qu’il a tirées du Livre de Mormon. Cet ouvrage note les lectures alternatives dans le texte d’Ésaïe des manuscrits de la mer Morte et la Septante.
Deux volumes ont servi de manuels. En 1980, Monte S. Nyman publiait Great Are the Words of Isaiah (Salt Lake City) à titre de commentaire et de guide d’étude. L’apport le plus distinctif du livre est un ensemble de mentions d’Ésaïe dans les écrits de Joseph Smith, le Nouveau Testament, le Livre de Mormon, les Doctrine et Alliances et les Autorités générales de l’Église. En 1982, Victor L. Ludlow a écrit Isaiah: Prophet, Seer, and Poet (Salt Lake City). Les éléments importants sont son commentaire chapitre par chapitre, ses propositions d’interprétations multiples de certains passages du texte, des cartes et des notes historiques utiles et des commentaires doctrinaux mormons utilisant diverses traductions du texte.
D’autres livres ont été écrits pour un auditoire mormon non spécialisé. The Living Message of Isaiah, de L. LaMar Adams (Salt Lake City, 1981), visant à aider ses lecteurs à apprécier les prophéties d’Ésaïe. Son apport distinctif est son annexe sur l’ouvrage apocryphe L’Ascension d’Ésaïe.
En 1984, W. Cleon Skousen a publié Isaiah Speaks to Modern Times (Salt Lake City) avec l’intention d’aider un auditoire de saints à comprendre Ésaïe comme quelqu’un qui a vu l’époque moderne et en a parlé.
Mark E. Petersen est la seule Autorité générale à avoir écrit un livre sur Ésaïe, Isaiah for Today (Salt Lake City, 1981). Son but était d’aider un auditoire non spécialisé à rattacher les prophéties d’Ésaïe aux événements actuels.

ANN N. MADSEN

Esprit
Auteur: JENSEN, JAY E.

L'existence d’êtres d'esprit bons et mauvais est un point de doctrine important dans la théologie des saints. L'esprit est une matière organisée intelligente, qui existe par lui-même et est régi par des lois éternelles. De plus, tous les êtres vivants ont eu une existence d'esprit pré-terrestre. Les conceptions des saints sur ce sujet découlent des écrits bibliques et modernes et des enseignements des prophètes modernes.
La révélation moderne déclare que «tout esprit est matière, mais il est plus raffiné ou plus pur» que les matériaux physiques de la vie terrestre (D&A 131:7-8). Le prophète Joseph Smith explique:
«Il y a une différence très sensible entre le corps et l’esprit; le corps est censé être de la matière organisée et beaucoup considèrent que l’esprit est immatériel, sans substance. Nous ne sommes pas d’accord avec cette dernière opi¬nion et disons que l’esprit est une substance, qu’il est matériel, mais que c’est une matière plus pure, plus souple et plus raffinée que le corps, qu’elle existait avant le corps, peut exister dans le corps et existera séparément du corps, lorsque le corps tombera en poussière, et lui sera de nouveau réunie dans la résurrection» [EPJS, p. 167].
Bien que le Seigneur ait révélé beaucoup de choses dans les Écritures anciennes et modernes sur la matière d'esprit et les êtres d'esprit, il reste beaucoup d’inconnues, particulièrement la pleine signification de termes tels que «intelligence», «lumière» et «vérité», qui sont utilisés dans les révélations en rapport avec le mot «esprit». La matière d'esprit est identifiée à l’intelligence ou la lumière de la vérité (D&A 93:29). Joseph Smith enseignait que les éléments n'ont pas été créés ni faits, mais peuvent être organisés pour donner un être d’esprit. Cet esprit, intelligence ou lumière a toujours existé, étant coéternel avec Dieu. Il peut se mouvoir et être mû; il peut être organisé, mais il ne peut pas être détruit. Les esprits existent d’eux-mêmes et «tous les esprits que Dieu a jamais envoyés dans le monde peuvent se développer» (EPJS, p. 287), voulant dire qu’ils sont capables de progresser et de mûrir intellectuellement et que «il n'y a jamais de moment où l'esprit est trop vieux pour s’approcher de Dieu» (EPJS, p. 154).
Il ressort de la doctrine que l'esprit humain est la postérité littérale de parents exaltés rendus parfaits, d’un Père et d’une Mère célestes (cf. No. 16:22; Hé. 12:9). Dieu a instauré un plan de salut par lequel ses enfants d'esprit peuvent avancer et devenir comme lui (voir Conseil dans les cieux). Paul dit que les hommes sont de la race de Dieu (Ac. 17:28). Hommes et femmes ont tous vécu avec Dieu en tant qu'enfants personnels et individuels d'esprit dans une vie prémortelle avant de naître dans un corps physique. De même, l'existence spirituelle personnelle et individuelle de chacun se prolonge au-delà de la mort du corps mortel.
Jésus-Christ était l'aîné de tous les enfants d'esprit de Dieu et est donc le frère aîné du reste de l'humanité (voir Jésus-Christ: Premier-né dans l'esprit). Grâce à sa foi, il fut permis au frère de Jared (vers 2200 av. J.-C.), de voir le corps d'esprit prémortel du Seigneur. Celui-ci lui expliqua: «Vois-tu que vous êtes créés à mon image? Oui, tous les hommes ont été créés au commencement à mon image. Voici, ce corps, que tu vois maintenant, est le corps de mon esprit… et j'apparaîtrai à mon peuple dans la chair comme je t'apparais dans l'esprit» (Éther 3:15-16). Puisque les esprits sont la progéniture de Parents célestes, ils sont à leur image et à leur ressemblance, hommes et femmes (Ge. 1:26-27; Moï. 3:4-7; Abr. 3:18-23).
Hénoc eut la vision des esprits de tous les hommes et femmes qui avaient vécu ou qui allaient encore vivre sur la terre et qui avaient d’abord été créés comme esprits dans les cieux (Moï. 6:28; 7:38-40, 57). Abraham vit également les esprits prémortels de l'humanité et remarqua qu'ils différaient en intelligence et en obéissance (Abr. 3:18-19). Il y avait parmi eux beaucoup de nobles et de grands dont Dieu dit qu’il ferait des gouverneurs et des dirigeants dans son royaume. Il fut dit à Abraham qu'il était l'un d’eux et qu’il avait été choisi avant sa naissance (Abr. 3:22-23). Beaucoup furent préordonnés pour accomplir certaines tâches quand ils seraient sur la terre (voir Préordination). Dans l'état prémortel, les esprits reçurent leurs premières leçons dans l'Évangile et dans l’œuvre de Dieu qu'ils allaient accomplir sur la terre (D&A 138:55-56; cf. Jé. 1:5; Ép. 1:3-4; Tit. 1:2). Beaucoup de ces êtres d’esprit furent appelés et préparés dès la fondation du monde à cause de leur foi et de leurs bonnes œuvres, pour détenir la prêtrise et enseigner l'Évangile et les commandements de Dieu dans la condition mortelle (Alma 13:1-6).
Le libre arbitre est Inhérent à leur nature intelligente et ils sont capables de faire des choix. Les Écritures enseignent que les esprits sont capables d’avoir toutes les émotions, toutes les passions et toutes les expériences intellectuelles qui existent chez les mortels, notamment l'amour, la colère, la haine, l'envie, la connaissance, l'obéissance, la rébellion, la jalousie, le repentir, la fidélité, l'activité, la pensée et la compréhension. Utilisant leur libre arbitre, certains des enfants de Dieu se rebellèrent dans la vie prémortelle et il s’ensuivit une guerre dans les cieux. Les esprits rebelles suivirent Lucifer et furent précipités avec lui sur la terre et devinrent des démons ou des esprits mauvais, qui n’allaient jamais recevoir de corps physique sur terre (Moï. 4:1-4; D&A 76:25-27; cf. Ap. 12:4, 7-9; D&A 29:36). Satan et ses disciples restent des êtres d'esprit faits à l'image de Dieu mais sont toujours rebelles et mauvais. Ils désirent avoir un corps mortel. Le prophète Joseph Smith explique: «Le grand principe du bonheur consiste à avoir un corps. Le diable n’a pas de corps, et c’est en cela que réside son châtiment. Il est heu¬reux quand il peut obtenir la tente de l’homme, et lorsqu’il fut chassé par le Sauveur, il demanda à entrer dans le troupeau de pourceaux, montrant qu’il préférait le corps d’un pourceau à ne pas en avoir du tout» (EPJS, p. 145; cf. p. 240).
La révélation moderne n'a pas identifié ni éclairci la nature des séraphins ou des chérubins mentionnés dans la Bible (Ge. 3:24; Es. 6:2) ni si ce sont des êtres d'esprit ou simplement des représentations symboliques. Certains esprits sont des messagers du Seigneur et servent les mortels (Hé. 1:14; D&A 129), mais les esprits qui les servent ne peuvent pas remplir toutes les fonctions des anges qui ont un corps ressuscité (EPJS, pp. 153, 262).
Un être d’esprit qui n'est jamais entré dans la condition mortelle est dans un état «non incarné». Un esprit qui se trouve dans un corps mortel est dans un état «incarné» et le corps et l'esprit constituent l'âme (D&A 88:15). La mort est la séparation du corps physique mortel d’avec l'esprit (Ja. 2:26), après quoi l'esprit vit dans un état «désincarné» dans le monde d'esprit postmortel, tandis que le corps physique mortel, privé de vie, se décompose dans la tombe. Dans le monde postmortel, l'esprit attend d’être «réincarné» dans la résurrection, qui est la réunion définitive de l'esprit et du corps (Al. 11:44-45). Toute personne qui se trouve dans la condition mortelle vient du monde d'esprit et tous finiront par mourir et ensuite ressusciter.
La révélation moderne enseigne que Dieu le Père et Jésus-Christ sont des êtres ressuscités et exaltés, ce qui veut dire qu’ils ont un corps glorifié de chair et d’os (D&A 130:22). L'homme existe «pour avoir la joie» (2 Né. 2:25) et les révélations enseignent qu'on ne peut connaître de plénitude de joie que dans l’état ressuscité lorsque l'esprit et le corps sont inséparablement unis (D&A 93:33-34). Par conséquent, l'existence en tant qu’esprit seulement, que ce soit dans le monde d’esprit prémortel ou dans le monde d'esprit postmortel, a ses limites. Les esprits des morts qui connaissent le plan de Dieu et la valeur du corps physique sont impatients de ressusciter (D&A 45:17; 138:50). Pour avoir rejeté le plan du salut de Dieu, Lucifer et ses disciples se sont vu refuser à jamais la possibilité d’avoir un corps physique et sont donc limités ou restreints dans leur progression. Le Seigneur a déclaré: «Là où je suis ils ne peuvent venir, car ils n'ont aucun pouvoir» (D&A 29:29).
La création d'esprit ne concerne pas le seul genre humain, mais tous les êtres vivants. Les Écritures modernes enseignent que l'esprit humain est à l’image de ce qui est physique, comme cela a été démontré dans le cas de l'esprit de Jésus-Christ, qui apparut au frère de Jared, comme mentionné plus haut. Ainsi, «l'esprit de l'homme [est] à l’image de sa personne, de même que l’esprit de la bête et de toute autre création de Dieu» (D&A 77:2; voir aussi Animaux). Moïse écrit que chaque plante des champs, chaque herbe, en fait chaque chose, a été créée «dans le ciel» avant d’être naturellement sur la face de la terre (Moï. 3:5-7). [Voir aussi Premier état; Enfer; Corps d'esprit; Prison d'esprit.]

Bibliographie
«Le Père et le Fils: Un exposé de doctrine par la Première Présidence et les Douze.» AF, pp. 60-68. Salt Lake City, 1963.
Millet, Robert L., et Joseph F. McConkie. The Life Beyond. Salt Lake City, 1986.
"The Origin of Man", An official declaration dans MFP 4:200-206.
Packer, Boyd K. "The Law and the Light." Dans The Book of Mormon: Jacob Through the Words of Mormon, To Learn with Joy, dir. de publ. M. Nyman et C. Tate, pp. 1-31. Provo, Utah, 1990.
Smith, Joseph. Enseignements du Prophète Joseph Smith, dir. de publ. Joseph Fielding Smith, pp. 163-173. Traduction française.
Top, Brent, L. The Life Before. Salt Lake City, 1988.
JAY E. JENSEN

Évangile de Jésus-Christ

[Cette rubrique présente deux sujets: Évangile de Jésus-Christ: L'Évangile dans l’enseignement de l'Église. Évangile de Jésus-Christ: Considérations étymologiques sur «Évangile». Le premier article décrit la conception que les saints des derniers jours ont de l'Évangile de Jésus-Christ, l'enseignement fondamental de l'Église tel qu’il est présenté dans les Écritures et dans les enseignements des prophètes modernes. Le deuxième explore l'histoire complexe de ce terme et ses significations possibles, en particulier à l’époque du Nouveau Testament en grec. ]

Évangile de Jésus-Christ: L'Évangile dans l'enseignement de l’Église

Jésus-Christ, ses apôtres et ses prophètes ont à diverses reprises annoncé «la bonne nouvelle» ou «Évangile» que l’on peut être sauvé en allant au Christ. Le Père est l'auteur de l'Évangile, mais celui-ci est appelé Évangile de Jésus-Christ parce que, en accord avec le plan du Père, c’est l'expiation du Christ qui rend l'Évangile actif dans la vie des hommes. L'Évangile du Christ est le seul véritable Évangile et «il n'y aura aucun autre nom donné, ni aucune autre voie ni moyen par lesquels le salut puisse parvenir aux enfants des hommes, si ce n'est dans et par le nom du Christ, le Seigneur Omnipotent» (Mos. 3:17; cf. Ac. 4:12).
Quoique les saints des derniers jours utilisent le terme «Évangile» de plusieurs manières, dont les utilisations chrétiennes traditionnelles, le Livre de Mormon et les autres Écritures modernes le définissent avec précision comme le moyen par lequel une personne peut aller au Christ. Dans tous ces passages scripturaires, l'Évangile ou doctrine du Christ enseigne que le salut est accessible, par l’intermédiaire de ses serviteurs autorisés, à tous ceux qui (1) croient au Christ, (2) se repentent de leurs péchés, (3) sont baptisés dans l'eau en témoignage de leur volonté de prendre son nom sur eux et de garder ses commandements, (4) reçoivent le Saint-Esprit par l’imposition des mains et (5) persévèrent jusqu'à la fin. Tous ceux qui obéissent à ces commandements, reçoivent le baptême de feu et du Saint-Esprit et persévèrent avec foi, espérance et charité seront trouvés innocents au dernier jour et entreront dans le royaume des cieux (Al. 7:14-16, 24-25; Hé. 6:1-2).
LE PLAN DE SALUT. Le président Brigham Young a enseigné que «l’Évangile du Fils de Dieu qui a été révélé est un plan ou un système de lois et d’ordonnances, grâce auquel les habitants de cette terre sont assurés de pouvoir retourner en la présence du Père et du Fils sous condition d’obéissance stricte» (JD, 13:233). L'Évangile de Jésus-Christ est une partie cruciale du plan de salut (ou plan de rédemption), qui donne à tous les hommes le moyen d'obtenir la vie éternelle. À cause de la chute d'Adam, dont les effets se sont étendus par héritage à toute l’humanité, tous sont sujets à la mort physique et à la mort spirituelle (2 Né. 9:4-12; D&A 29:39-45; 1 Co. 15:12-22) et ne peuvent pas se sauver eux-mêmes. Dieu, le Père aimant de tous les esprits, a déclaré que son œuvre et sa gloire sont de «réaliser l'immortalité et la vie éternelle de l'homme» (Moï. 1:39). Dans ce but, il a donné un Sauveur, Jésus-Christ, qui, à cause de son amour parfait, de sa pureté et du fait qu’il est le Fils unique du Père dans la chair, était à la fois disposé et capable de s’offrir en sacrifice pour les péchés du monde (Jn. 3:16). Par son expiation, le Christ a racheté inconditionnellement tous les hommes, femmes et enfants des deux morts occasionnées par la transgression d'Adam et Ève et les rachètera également de leurs propres péchés, s’ils acceptent son Évangile et y obéissent (Moï. 6:62; D&A 20:17-25; 76:40-53).
ÉLÉMENTS DE BASE. Les révélations modernes disent que le Livre de Mormon contient «la plénitude de l'Évangile» (D&A 20:9; 27:5; 42:12). De tous les ouvrages canoniques, c’est le Livre de Mormon qui contient l'exposé le plus détaillé de l'Évangile. Dans trois passages distincts, les éléments de base de l'Évangile sont expliqués par un prophète ou par Jésus lui-même (2 Né. 31:2-32:6; 3 Né. 11:31-41; 27:13-21). Chacun de ces passages est encadré par l'affirmation que «c'est ma doctrine» ou «c'est mon Évangile.» Les révélations données au prophète Joseph Smith confirment dans le moindre détail ces déclarations du Livre de Mormon sur l'Évangile (voir D&A 18:17-23; 19:29-31; 20:25-29).
Ces textes fondamentaux répètent plusieurs fois, avec de légères variantes, les éléments de base du message de l'Évangile. Joseph Smith les appelle en résumé «les premiers principes et ordonnances de l'Évangile» (4e A de F).
1.    La Foi. L'enseignement de l’Église fait de la foi en Jésus-Christ le premier principe de l'Évangile. La primauté de la foi est double. La personne qui accepte l'Évangile doit commencer par la foi en Jésus-Christ et croire qu’il a le pouvoir de sauver les hommes de leurs péchés. Sans la foi, personne ne serait fortement motivé à se repentir et à vivre le reste des principes de l'Évangile. La foi est également à la base des autres éléments de l'Évangile en ce sens que chacun d’eux dépend considérablement d’actes de foi. Dans ce sens, Néphi 1 compare la pratique de l'Évangile à l’entrée dans un chemin étroit et resserré qui conduit à la vie éternelle. La porte par laquelle on peut entrer dans ce chemin est le repentir et le baptême. Avec l'inspiration du Saint-Esprit, on peut suivre le chemin en faisant preuve de foi et en persévérant jusqu'à la fin. Ainsi, la foi en Jésus-Christ est un lien entre ce qu'on fait pour franchir la porte et ce qu’on doit faire ensuite. On ne peut franchir la porte en se repentant et en faisant les alliances du baptême «que par la parole du Christ, avec une foi ferme en lui, vous reposant entièrement sur les mérites de celui qui est puissant à sauver» (2 Né. 31:19). Après être entré sur ce chemin étroit et resserré, on ne peut atteindre le salut qu’en avançant «résolument, avec constance [foi] dans le Christ… vous faisant un festin de la parole du Christ» (2 Né. 31:20), ce qui inclut les choses que le Saint-Esprit nous dit de faire (2 Né. 32:3, 5).
2. Le Repentir. Le caractère essentiel de la foi est souligné par la façon dont l'Évangile est présenté dans le Livre de Mormon où la foi est habituellement mentionnée au centre et l'appel au repentir au début. Les individus doivent abandonner leurs péchés et offrir le «sacrifice [d’]un cœur brisé et [d’]un esprit contrit». Ceci exige du pécheur qu’il descende dans les profondeurs de l'humilité et devienne «comme un petit enfant» (3 Né. 9:20-22).
3. Le Baptême. L'Évangile souligne la nécessité absolue du baptême pour ceux qui sont responsables et capables de pécher. Comme le repentir, le baptême est aussi un commandement et les candidats au salut doivent être baptisés afin d'obéir au commandement (voir 2 Né. 31:6-7).
Cette ordonnance essentielle est un témoignage au Père que la personne repentante a fait alliance avec Dieu de garder ses commandements et a pris sur elle le nom du Christ. La foi en Jésus-Christ, le repentir et le baptême sont la porte par laquelle on entre dans le chemin qui conduit à la vie éternelle (2 Né. 31:13-15). Comme les enfants en bas âge sont incapables de pécher ou de contracter de telles alliances, il est commandé aux parents de les préparer pour le baptême avant qu'ils atteignent huit ans, l'âge de responsabilité fixé par la révélation (D&A 68:25-28; voir Baptême des petits enfants).
4. Le Saint-Esprit. Tandis que le baptême d'eau symbolise la purification et le passage de la mort à la vie, la purification ou rémission proprement dite des péchés découle de l’obéissance comme don de Dieu «par le feu et par le Saint-Esprit» (2 Né. 31:17; Mt. 3:11), par lequel la personne naît de Dieu, étant devenu une «nouvelle créature» (Mos. 27:24-26; 1 Pi. 1:23). Cette expérience spirituelle est un témoignage du Père et du Fils que le sacrifice du pénitent a été accepté. Après que Jésus eut instruit les Néphites et qu’ils eurent été baptisés, «le Saint-Esprit tomba sur eux et ils furent remplis du Saint-Esprit et de feu» (3 Né. 19:13; cf. Ac. 2:4).
Le don du Saint-Esprit, conféré par l'imposition des mains par quelqu’un ayant l'autorité, contient la promesse que «si vous voulez entrer par le chemin et recevoir le Saint-Esprit, il vous montrera tout ce que vous devez faire» (2 Né. 32:5). Ce don est un compagnon constant par lequel l'individu reçoit directement «les paroles du Christ» pour guider sa vie, en plus des enseignements inspirés des dirigeants de l’Église (2 Né. 32:3; voir aussi Jn. 14:26; 16:13).
5. Persévérer jusqu'à la fin. «Persévérer jusqu'à la fin» est l'expression scripturaire qui décrit le reste de la vie du membre de l'Église du Christ qui a adopté les premiers principes de l'Évangile et a franchi la porte qui conduit à la vie éternelle. Une fois sur ce chemin étroit et resserré, le membre doit avancer résolument avec foi et continuer dans l'obéissance à tous les commandements de Dieu. La foi est liée à l'espérance et à la charité. Le fait de recevoir la rémission des péchés produit l’espérance du salut. C'est plus qu'un désir et cela donne un sentiment d'assurance. Ce genre d’espérance devient sans cesse plus lumineux sous l’action du Saint-Esprit si l’on est constamment obéissant (Ét. 12:4). La charité, «l'amour pur du Christ», est une caractéristique de ceux qui obéissent aux commandements (Mro. 7:3-4, 47). Ce genre de personnes reproduit auprès des autres le même genre d'amour pur qu'il reçoit du Seigneur.
6. Le Salut. En plus de recevoir des bénédictions quotidiennes, Jésus-Christ promet que ceux qui se conforment à tous les principes et ordonnances recevront la vie éternelle. Comme révélé au prophète Joseph Smith, le salut nécessite qu’on devienne héritier de la plénitude du royaume céleste (D&A 76:50-70).
Tous les ouvrages canoniques de l’Église contiennent des énoncés clairs de l'Évangile de Jésus-Christ (voir D&A 10:63-70; 11:9-24; 19:29-32; 20:37; 33:10-13; 39:6; 68:25; Moï. 5:14-15, 58; 6:50-53). Les saints des derniers jours trouvent le même concept dans beaucoup de passages du Nouveau Testament (Mt. 3:11; 24:13-14; Ac. 2:38; 19:4-6; Ro. 1:16), bien que qu’il n’y ait souvent que quelques-uns des six éléments principaux qui soient spécifiquement mentionnés dans un passage donné. C'est également vrai du Livre de Mormon. Par exemple, la promesse que «ceux qui croient en lui seront sauvés» (2 Né. 2:9) peut être comprise comme un mérisme (abréviation d'une formule qui ne conserve que le premier et le dernier élément) qui appelle implicitement chacun des six composants même s’ils ne sont pas mentionnés explicitement. Un autre mérisme dit que la vie éternelle, c’est croire en Jésus et persévérer jusqu'à la fin (2 Né. 33:4; cf. v. 9).
AUTRES SIGNIFICATIONS. Bien que l'accent soit mis sur les vérités nécessaires au salut, l'utilisation du terme «Évangile» chez les saints des derniers jours ne se limite pas à la définition scripturaire. Les saints appellent habituellement «Évangile» l’ensemble de leurs croyances religieuses. Selon l’interprétation la plus large, toute vérité ayant Dieu pour origine peut être incluse dans l'Évangile. Le président Joseph F. Smith a dit: «Au sens théologique du terme, l'Évangile signifie plus que simplement la bonne nouvelle avec la joie qui l’accompagne dans l’âme des hommes, parce qu’il englobe tous les principes de la vérité éternelle. Il n'y a pas de principe fondamental ou de vérité, où que ce soit dans l'univers, qui ne soit englobé dans l'Évangile de Jésus-Christ et il ne se limite pas aux premiers principes simples, tels que la foi en Dieu, le repentir du péché, le baptême pour la rémission des péchés et l'imposition des mains pour le don du Saint-Esprit, bien que ceux-ci soient absolument essentiels au salut et à l'exaltation dans le royaume de Dieu» [pp. 85-86].
Malgré cet éventail de significations liées à l'Évangile, comme l’explique le président Smith, les vérités salvatrices englobées dans les premiers principes sont indispensables et doivent être respectées si l’on veut obtenir le salut. C’est sur elles que l'Église concentre ses enseignements et ses pratiques. Les saints des derniers jours sont strictement tenus de parler des principes fondamentaux, des premiers principes de l'Évangile, aux autres pour que tous aient une chance égale d'obtenir le salut. Les efforts missionnaires des membres et des missionnaires à plein temps ont pour but d’inviter les autres à aller au Christ par l'obéissance aux principes et aux ordonnances de l'Évangile.
Le président Ezra Taft Benson a de même expliqué que «l'Évangile peut être considéré sous deux perspectives. Au sens le plus large, l'Évangile englobe toute la vérité, toute la lumière, toute la connaissance révélées à l'humanité. Dans un sens plus restrictif, l'Évangile signifie la doctrine de la Chute… [et de] l'Expiation». Pour clarifier le sens restrictif, il explique: Quand le Sauveur parlait de son Évangile, il voulait dire… les lois, les alliances et les ordonnances auxquelles les hommes doivent satisfaire pour assurer leur salut. Il voulait dire la foi au Seigneur Jésus-Christ, le repentir de tous les péchés, le baptême par immersion par une personne autorisée pour la rémission de nos péchés et la réception du don du Saint-Esprit, et finalement être vaillant jusqu'à la fin de ses jours dans son témoignage de Jésus. C'est là l'Évangile que Jésus a prêché» [p. 30].
Ceux qui meurent sans entendre l'Évangile tandis qu’ils étaient dans la condition mortelle recevront cette occasion dans le monde d'esprit. Les ordonnances nécessaires du baptême et de l'imposition des mains pour le don du Saint-Esprit seront accomplies en faveur des morts dans les temples modernes par les membres vivants. Les défunts décideront par eux-mêmes d’accepter ou de rejeter les ordonnances accomplies en leur faveur (voir Salut des morts).
LA NATURE ÉTERNELLE DE L'ÉVANGILE. Les saints des derniers jours croient que l'Évangile a toujours existé et continuera à exister à toute éternité. Le prophète Joseph Smith a dit : «Le grand Jéhovah envisagea l’ensemble des événements liés à la terre, relatifs au plan de salut avant qu'elle ne prenne son départ dans l'existence ou même avant que ‘les étoiles du matin éclatent en chants de joie» (EPJS, p. 177). La nature éternelle de l'Évangile a également été soulignée par le président John Taylor, qui a déclaré que «l'Évangile est un principe vivant, permanent, éternel et immuable qui a existé à égalité avec Dieu et existera toujours, aussi longtemps que le temps et l'éternité dureront, partout où il est développé et rendu manifeste» (p. 88).
Les Écritures modernes expliquent qu'après que le Seigneur eut enseigné le plan du salut et l'Évangile à Adam et Ève (Moï. 5:4-11), Adam «fut enlevé par l'Esprit du Seigneur» dans l'eau où il fut baptisé. Après son baptême, «l’Esprit du Seigneur descendit sur lui, et c'est ainsi qu'il naquit de l'Esprit» (Moï. 6:48-68). En décrivant plus tard cette expérience, Hénoc explique que Dieu appela Adam de sa propre voix, lui enseignant le même Évangile que celui exposé dans les autres Écritures: «Si tu veux te tourner vers moi, écouter ma voix, croire, te repentir de toutes tes transgressions et être baptisé dans l'eau, au nom de mon Fils unique, qui est plein de grâce et de vérité, lequel est Jésus-Christ, le seul nom qui sera donné sous le ciel par lequel le salut sera donné aux enfants des hommes, tu recevras le don du Saint-Esprit» [Moï. 6:52].
L’Écriture moderne rapporte qu'Adam et Ève enseignèrent l’Évangile à leurs enfants, mais que Satan vint parmi eux et persuada certains de l'aimer plus que Dieu (Moï. 5:13; voir Démons). Ainsi en a-t-il été des descendants d'Adam et Ève et, dans cette situation, le Seigneur invita les hommes de partout à croire au Fils et à se repentir de leurs péchés afin d’être sauvés. Ce message d'Évangile était «un ferme décret» envoyé «dans le monde jusqu'à la fin de celui-ci» et fut prêché dès le commencement par des anges, par la voix de Dieu et par le Saint-Esprit (Moï. 5:12-15, 58-59).
Les saints des derniers jours comprennent l'histoire du monde en termes de périodes de fidélité et d'apostasie. Bien qu'il y ait eu beaucoup de périodes où l'Évangile de Jésus-Christ a été perdu sur la terre, il a été à plusieurs reprises rétabli par des prophètes envoyés pour annoncer de nouvelles dispensations de l'Évangile. L'Évangile a été donné à des générations successives et conservera éternellement son efficacité. Le rétablissement de la plénitude de l'Évangile avec Joseph Smith lance la «dernière dispensation» ou dispensation de la plénitude des temps et il a été promis que l'Évangile ne sera plus jamais enlevé de la terre. L'Évangile de Jésus-Christ continue à être le seul moyen donné sous le ciel par lequel les hommes et les femmes puissent aller vers leur Sauveur et être sauvés et est la norme selon laquelle tous les hommes seront jugés (voir Jugement dernier).

Évangile de Jésus-Christ: Considérations étymologiques sur «Évangile»
Auteur: REYNOLDS, NOEL B.

Le mot «Évangile» dérive du grec euaggelion (latin, evangelium) ou «bonne nouvelle». Le terme est utilisé dans le Nouveau Testament principalement pour désigner le message du salut par Jésus-Christ, souvent désigné par le nom «Évangile de Jésus-Christ» (Marc 1:1), «Évangile de Dieu» (Mc. 1:14) ou «bonne nouvelle du royaume de Dieu» (Lu. 8:1). L'Évangile, dans le Nouveau Testament, est la «bonne nouvelle» pour tous les hommes que s'ils vont au Christ et gardent ses commandements, ils seront sauvés (Mt. 7:21; Mc. 16:15-16). Paul utilise davantage euaggelion que les autres auteurs du Nouveau Testament, adoptant aussi bien la forme nominale que la forme verbale du terme grec. La pratique d’appeler «évangiles» les récits écrits de la vie et du ministère de Jésus, est apparue parmi les chrétiens au premier siècle et était d’usage courant dès le deuxième.
Bien que les Écritures modernes aient une notion plus définie de l'Évangile, leur enseignement est conforté par les réflexions des savants sur l’étymologie possible du terme tel qu’utilisé dans le Nouveau Testament. On y trouve des formes verbales et des noms dérivés dont le sens premier est la remise de messages, en particulier de bonnes nouvelles – la victoire au combat en étant un exemple courant. Ce sens est étendu dans Ésaïe par application au héraut qui annonce le retour des exilés à Jérusalem, proclamant la bonne nouvelle de la prospérité et de l'affranchissement ainsi que de la royauté de Jéhovah (És. 52:7; voir Friedrich, p. 708).
En grec, euaggelion comportait les idées de libération vis-à-vis des ennemis et d'affranchissement par rapport aux puissances démoniaques. Il pouvait désigner les oracles ou plus exactement leur accomplissement. Ce faisceau de significations a fait d’euaggelion un terme approprié pour les auteurs du Nouveau Testament qui voyaient dans l'Évangile le moyen par lequel les hommes peuvent échapper aux puissances mauvaises de ce monde et l’accomplissement des prophéties antiques concernant un Messie à venir.
L’utilisation religieuse d'euaggelion avant l’époque chrétienne était commune aux cultes impériaux populaires dans lesquels le culte des empereurs grecs et romains était censé apporter la richesse et le pouvoir sous diverses formes. Quand les chrétiens ont commencé à s’en servir, ils ont dû le faire avec ironie, forçant les auditeurs et les lecteurs à comparer César sur son trône au Christ sur la croix et à faire le choix correspondant entre la recherche universelle du pouvoir et de la richesse (les avantages matériels) de ce monde et la voie singulière de la foi, du repentir et de l'Esprit enseignée par Jésus. Cette comparaison implicite devient explicite quand trois évangiles du Nouveau Testament font dire à Jésus qu’il faut rendre «à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu» (Mc. 12:17; cf. Mt. 22:21 et Lu. 20:25). Paul utilise la même ironie quand il qualifie l'Évangile de mystère (voir Friedrich, pp. 712, 723-25; Ép. 6:19). Ce qui a déçu certains chez Jésus comme Messie c’était justement qu'il n'était pas le genre de sauveur que l’on adorait dans le culte des empereurs.
Le Livre de Mormon utilise les termes «Évangile» et «doctrine» l'un pour l'autre, d'une manière qui correspond à l'usage du Nouveau Testament, du moins dans la mesure où tous les deux impliquent des communications qui peuvent être ramenées à des déclarations verbales (voir Doctrine). Le terme «doctrine» (didaskalia) dans le Nouveau Testament signifie «enseignement» et désigne soit la doctrine du Christ, soit les enseignements vains du peuple ou des démons. De même, les auteurs du Livre de Mormon utilisent «Évangile» et «doctrine» pour désigner un enseignement qui peut être ramené à un ensemble de déclarations ou «points… de doctrine» (1 Né. 15:14; Hél. 11:22).

Bibliographie
Benson, Ezra Taft. Teachings of Ezra Taft Benson. Salt Lake City, 1988.
Collins, Raymond F. "Gospel." Encyclopedia of Religion, Vol. 6, pp. 79-82. New York, 1987.
Friedrich, Gerhard. "Euaggelizomai, Euaggelion,…" Dans Theological Dictionary of the New Testament, Gerhard Kittel, dir. de publ., Vol. 2, pp. 707-737. Grand Rapids, Mich., 1964.
Nibley, Hugh. "Prophets and Glad Tidings." dans CWHN 3:259-267.
Piper, O. A. "Gospel," Dans Interpreter's Dictionary of the Bible, Vol. 2, pp. 442-48. Nashville, Tenn., 1962.
Roberts, B. H. The Gospel: An Exposition of Its First Principles and Man's Relationship to Deity. Salt Lake City, 1966.
Smith, Joseph F. GD, pp. 85-86, 95-106.
Talmage, James E. AF, pp. 52-170.
Taylor, John. Gospel Kingdom, Salt Lake City, 1964.
Yarn, David H., Jr. The Gospel: God, Man, and Truth. Salt Lake City, 1965.
NOEL B. REYNOLDS

 

Évangile, Plénitude de
Auteur : Farnsworth, Dean B.


L'expression « plénitude de l'Évangile » désigne la totalité de la doctrine de la rédemption démontrée et enseignée dans le ministère et la vie de Jésus-Christ. Elle « se compose des lois, des ordonnances, de la doctrine, des pouvoirs et de l’autorité nécessaires pour permettre aux hommes d'acquérir la plénitude du salut » (MD, p. 333).
Plénitude est un terme parfois utilisé dans les Écritures pour décrire le Christ lui-même, tant en ce qui concerne sa situation comme Fils de Dieu qu’en ce qui concerne ce qu'il a offert à l'humanité. Jean, en témoignant du Sauveur, a dit : « … et nous avons tous reçu de sa plénitude, et grâce pour grâce » (Jean 1:16). Recevoir la plénitude de ce que le Sauveur a offert, c’est l'accepter comme étant celui qui a rendu le salut possible pour tous grâce à l’Expiation et suivre ses enseignements. Ainsi, pour connaître une plénitude de joie il faut observer les commandements de Dieu (D&A 93:27).
Le Christ lui-même a déclaré la plénitude de son Évangile : « Car je suis descendu du ciel pour faire, non ma volonté, mais la volonté de celui qui m’a envoyé… La volonté de mon Père, c’est que quiconque voit le Fils et croit en lui ait la vie éternelle ; et je le ressusciterai au dernier jour » (Jean 6:38-40).
Les saints des derniers jours croient que chaque prophète, de quelque dispensation que ce soit, a prophétisé sur le Christ. Mais l'expression plénitude de l'Évangile implique qu’il y a eu des périodes où l'Évangile n'était pas sur la terre dans sa plénitude, soit dans la doctrine, soit dans les ordonnances. En 1820, un messager céleste a décrit le Livre de Mormon à Joseph Smith comme « donnant l’histoire des anciens habitants de ce continent » et « contena[n]t la plénitude de l'Évangile éternel, telle qu’elle avait été donnée par le Sauveur » (JS — H 1:34).
Le président Ezra Taft Benson explique : « Le Livre de Mormon contient la plénitude de l'Évangile de Jésus-Christ (D&A 20:9). Cela ne signifie pas qu’il contient chaque enseignement, chaque point de doctrine jamais révélé. Ce que cela signifie, c’est que, dans le Livre de Mormon, nous trouverons la plénitude des points de doctrine qui sont nécessaires à notre salut. Et ils sont enseignés clairement et simplement pour que même les enfants puissent apprendre les voies du salut et de l'exaltation » (Benson, p. 18-19).
Néphi 1, un prophète du Livre de Mormon vivant des siècles avant la venue du Christ, a dit que la plénitude de l'Évangile ne serait pas toujours sur la terre. Dans une vision du ministère futur du Seigneur, il a vu que certaines parties de l'Évangile seraient modifiées et trafiquées. Néphi a écrit à propos de la Bible : « Lorsqu'il sortit de la bouche d'un Juif, il contenait la plénitude de l'Évangile du Seigneur dont les douze apôtres rendent témoignage. » Mais les hommes ont enlevé de la Bible « beaucoup de parties qui sont claires et extrêmement précieuses; et il y a aussi beaucoup d'alliances du Seigneur [qu’ils ont] ôtées », ce qui a entraîné la perte de l'Évangile (cf. 1 Néphi 13:24-29).
Les saints des derniers jours croient que cette apostasie et la corruption des Écritures ont nécessité un rétablissement ultérieur de la plénitude de l'Évangile par l’intermédiaire de prophètes appelés par Dieu. Ce rétablissement a commencé avec la première vision de Joseph Smith, le prophète, en 1820, et s'est poursuivi avec des révélations ultérieures, notamment les Écritures modernes et l'autorité de la prêtrise, qui restent aujourd'hui dans l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours. [Voir aussi Rétablissement de toutes choses ; Rétablissement de l'Évangile de Jésus-Christ.]


Bibliographie
Ezra Taft Benson. A Witness and a Warning. Salt Lake City, 1988.
DEAN B. FARNSWORTH

 

Évangile, Premiers principes de
Auteur : Hafen, Marie Kartchner

Les premiers principes et ordonnances de l'Évangile sont « premièrement la foi au Seigneur Jésus-Christ, deuxièmement le repentir, troisièmement le baptême par immersion pour la rémission des péchés, quatrièmement l'imposition des mains pour le don du Saint-Esprit » (4e A de F). Le Sauveur ressuscité a enseigné que ces principes constituent son « Évangile »: « Repentez-vous, toutes les extrémités de la terre, et venez à moi, et soyez baptisées en mon nom, afin d'être sanctifiées par la réception du Saint-Esprit, afin de vous tenir sans tache devant moi au dernier jour. En vérité, en vérité, je vous le dis, c'est là mon Évangile » (3 Néphi 27:20-21 ; cf. Actes 2:37-38). Ces quatre principes préparent les hommes à entrer dans le « sentier étroit et resserré qui conduit à la vie éternelle » (2 Néphi 31:17-18).
Tout d'abord, la foi en Jésus Christ commence souvent par le désir de croire (Alma 32:26-28), qui peut être suscité quand on entend ou lit des témoignages vrais du Christ et de son expiation rendus par d’autres personnes. On nourrit la foi par l’obéissance patiente aux commandements de Dieu. La foi grandit ensuite selon un processus qui comprend le repentir, le baptême pour la rémission des péchés, une confiance accrue dans le Christ et finalement une nature semblable à celle du Christ (Hafen, p. 141-200).
Le repentir implique (1) la prise de conscience de sa culpabilité ; (2) une tristesse et une souffrance selon Dieu ; (3) la confession pour être soulagé des effets nuisibles du péché ; (4) la réparation, dans la mesure du possible ; (5) le remplacement du péché par l’obéissance aux commandements de Dieu ; et (6) l’acceptation du sacrifice expiatoire du Christ. Grâce à l'Expiation, si on se repent, la miséricorde du Christ satisfait aux exigences de la justice.
Le baptême, troisième principe et première ordonnance essentielle, est le fruit du repentir et est requis de tous ceux qui veulent être sauvés dans le royaume de Dieu (Jean 3:3-5 ; cf. 2 Néphi 9:23). Le baptême a plusieurs objectifs. C'est un lavage, une purification symbolique des péchés et il est nécessaire pour pouvoir entrer dans l'Église. Lorsqu'il est suivi de la réception du Saint-Esprit, c'est la porte ouverte à la sanctification personnelle (Moroni 6:1-4). La méthode prescrite du baptême est par immersion dans l'eau par un prêtre de la Prêtrise d'Aaron ou par un détenteur de la Prêtrise de Melchisédek. « Le symbolisme du rite n’est conservé sous aucune autre forme » (AF, p. 137).
Quand on « naît de l'Esprit » ou que l’on reçoit le don du Saint-Esprit, on obtient le droit à l'aide, aux conseils et au réconfort constants du Saint-Esprit. « La tâche spéciale du Saint-Esprit est d'éclairer et d'ennoblir l'esprit, de purifier et de sanctifier l'âme, d'inciter aux bonnes œuvres et de révéler les choses de Dieu » (AF, p. 167). Quand on lui demanda en quoi l'Église différait des autres religions de l'époque, Joseph Smith répondit : « Nous différons par le mode de baptême et le don du Saint-Esprit... [et] que toutes les autres considérations [les différences avec les autres églises] étaient contenues dans le don du Saint-Esprit » (HC 4:42). Le don du Saint-Esprit est conféré par l’imposition des mains par un détenteur de la Prêtrise de Melchisédek.
Résumant le processus partant de la foi et du repentir pour aboutir à la sanctification, le prophète Mormon, du Livre de Mormon, a déclaré : « Les prémices du repentir, c'est le baptême; et le baptême vient par la foi pour accomplir les commandements; et l'accomplissement des commandements apporte le pardon des péchés; et le pardon des péchés apporte la douceur et l'humilité de cœur; et à cause de la douceur et de l'humilité de cœur vient la visitation du Saint-Esprit, lequel Consolateur remplit d'espérance et d'amour parfait, amour qui subsiste, par la diligence dans la prière, jusqu'à ce que vienne la fin, lorsque tous les saints demeureront avec Dieu » (Moroni 8:25-26).
Ces quatre principes et ordonnances de l'Évangile sont les « premiers » parce qu'ils lancent et activent le processus d’évolution depuis la nouvelle naissance spirituelle jusqu’à l’accession à une nature divine.


Bibliographie
Hafen, Bruce C. The Broken Heart : Applying the Atonement to Life’s Experiences. Salt Lake City, 1989.
Kimball, Spencer W. The Miracle of Forgiveness, Salt Lake City, 1969.
MARIE KARTCHNER HAFEN

Ève
Auteur : Campbell, Beverly

Les saints des derniers jours honorent Ève, première femme de la création terrestre, compagne d'Adam et mère et matriarche du genre humain, comme l'une des personnes les plus importantes, les plus vertueuses et les plus héroïques de toute la famille humaine. Le don suprême d'Ève à l'humanité, la possibilité de vivre sur cette terre, découle de la décision qu’elle a prise de devenir mortelle.
Ève, Adam, Abraham et d’autres étaient parmi les nobles et les grands impliqués dans la création de la terre (Abr 3:22-24; cf. McConkie, p. 59). Dieu la préordonna et l’appela Ève, « la mère de tous les vivants » ; dans le jardin d'Éden, Adam l’appela Ève, ce qui reflète cet appel (Moïse 4:26). Elle fut créée spirituellement et physiquement de la même manière qu’Adam (MD, p. 242). Dieu leur donna le nom d’Adam et « à l'image de son corps, il créa l’homme et la femme » (Moïse 6:9).
Ève et Adam rencontrèrent un dilemme dans leurs efforts pour obéir aux commandements de Dieu. Ils ne pouvaient pas garder le commandement principal d’avoir des enfants tant qu'ils restaient non mortels dans le jardin (2 Néphi 2:22-23). L'interdiction de manger de l'arbre de la connaissance du bien et du mal était toutefois nuancée par les mots « néanmoins, tu peux choisir par toi-même »(Moïse 3:16-17), et la conséquence expressément indiquée était qu’ils deviendraient mortels.
Satan était là pour tenter Adam et Ève, tout comme il allait essayer d”en faire échouer d'autres dans leur mission divine: « Et [il] essaya aussi de séduire Ève, car il ne connaissait pas la pensée de Dieu, c'est pourquoi il essaya de détruire le monde » (Moïse 4:6 ; cf. Mt 4:3-11 ; Moïse 1:12-22; JS–H 1:15-16). Ève avait le choix entre la facilité égoïste et affronter avec désintéressement les tribulations et la mort (Widtsoe, p. 193). Comme le réclamait son appel, elle comprit qu'il n’y avait aucun autre moyen et choisit délibérément la condition mortelle pour faire avancer le dessein de Dieu et faire venir des enfants au monde.
L'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours affirme qu’en prenant du fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, Ève, aussi bien qu’Adam, a agi d'une manière agréable à Dieu et en accord avec le plan prévu par lui (voir Chute d'Adam). Brigham Young explique : « Le Seigneur savait qu'ils agiraient ainsi et il avait prévu qu'ils le feraient » (JD 10:103). « Nous ne devrions en aucun cas en vouloir à Ève, en aucune façon » (JD 13:145). Adam et Ève « ont relevé un grand défi... Ils ont choisi judicieusement conformément à la loi céleste de l'amour pour les autres » (Widtsoe, p. 194). Par la suite, dans l’une des plus anciennes déclarations que l’on trouve dans les Écritures, Ève résumera le Plan du Salut en parlant de la joie réservée à l'humanité dans l'éternité: « Sans notre transgression, nous n’aurions jamais eu de postérité et nous n'aurions jamais connu le bien et mal, la joie de notre rédemption et la vie éternelle que Dieu donne à tous ceux qui obéissent » (Moïse 5:10-11).
Des parents célestes aimants ont préparé Ève et Adam à leur rôle dans la condition mortelle. Après la Chute, Dieu donna à Adam et Ève la loi du sacrifice afin qu'ils puissent obtenir le pardon des péchés commis dans la condition mortelle (Moïse 5:5). Il mit une inimitié (une horreur du mal) entre la postérité d'Ève et Satan et ses disciples (Moïse 4:21). Dieu accorda à Ève le pouvoir d’être mère et lui révéla le difficile travail de l'accouchement (Genèse 3:16-17)."
Adam et Ève étaient mari et femme. Tandis qu’ils étaient dans le jardin, Dieu les avait scellés en un mariage éternel (Genèse 2:22-24). Dieu dit à Ève : « Tes désirs se porteront vers ton mari, mais il dominera sur toi » (3:16). Le président Spencer W. Kimball a expliqué que le mot hébreu traduit par « dominera » pourrait être mieux compris comme voulant dire « ‘présidera’, parce que c'est ce qu'il fait » (Ensign, mars 1976, p. 72), et le mari ne préside que quand il le fait dans la justice (voir Famille : Enseignements sur la famille). Dans le même ordre d’idées, Dieu présenta Ève à Adam en des termes qui sont rendus en français par l'expression « une aide semblable à lui », indiquant l’égalité entre les deux.
Le Seigneur lui-même fit des vêtements de peaux et revêtit Adam et Ève (Moïse 4:27). Ève donna à Adam des fils et des filles. Elle travailla avec lui. Ils prièrent le Seigneur et entendirent sa voix (Moïse 5:4-5). Ils révélèrent tout à leurs enfants et leur apprirent à lire, à écrire et à tenir les annales des souvenirs de la famille (Moïse 5:12 ; 6:5-6).
Ève « participe avec Adam à tout son ministère, [et] héritera conjointement avec lui de toutes les bénédictions attachées à son état suprême d'exaltation" (MD, p. 242). Le président Joseph F. Smith la vit en vision en 1918 : parmi les grands et les puissants dans l’assemblée céleste des justes, il vit « notre glorieuse mère Ève avec beaucoup de ses filles fidèles qui avaient vécu au cours des siècles et adoré le Dieu vrai et vivant » (D&A 138:39).
La chute d'Ève et d’Adam est profondément significative : ils ont ouvert la voie de la condition mortelle à l'humanité tout entière et ils se sont assujettis à mort afin de permettre une progression continue vers la vie éternelle. Notre mère Ève a donné à ses filles et à ses fils un héritage d'honneur, car elle a agi avec sagesse, amour et un sacrifice désintéressé.

Bibliographie
McConkie, Bruce R. "Eve and the Fall." Dans Woman, p. 57-68. Salt Lake City, 1979.
Nibley, Hugh W. "Patriarchy and Matriarchy." CWHN 1:87-114.
Smith, Joseph Fielding. "Was the Fall of Adam Necessary?" Answers to Gospel Questions, Vol. 4, p. 79-83. Salt Lake City, 1963.
Widtsoe, John A. "Was the "Fall' Inevitable?" Evidences and Reconciliations, p. 192-195. Salt Lake City, 1987.
BEVERLY CAMPBELL

Ézéchiel, prophéties d’
Auteur: MESERVY, KEITH H.

Les prophéties d'Ézéchiel (593-v. 570 av. J.-C.) intéressent les saints des derniers jours parce qu'elles contiennent des informations uniques sur des aspects de l’œuvre salvatrice de Dieu pour ses enfants, telles que les responsabilités de la sentinelle ou dirigeant (chap. 3, 33), la nature du libre arbitre et de la responsabilité personnels (chap. 18), la miséricorde et le pardon (chap. 18) et les relations de l'alliance de Dieu avec Israël et Juda (chap. 34-39). Quand ils étudient le livre d’Ézéchiel, la plupart des saints des derniers jours se concentrent sur les chapitres 34-48 parce qu'ils jettent de la lumière sur l’œuvre de Dieu dans les derniers jours, notamment sur le retour d'Israël dans ses terres, le retour du pays à une pleine productivité, la reconstruction du temple pour servir de résidence à Dieu et la parution d’annales importantes qu'ils identifient à la Bible et au Livre de Mormon.
Au chapitre 34, Ézéchiel décrit la dispersion des Israélites parmi les nations de la terre comme une défaillance des dirigeants: les «bergers» d’Israël avaient exploité les «brebis» au lieu d’en prendre soin (voir Israël: Dispersion d'Israël). En conséquence, le Seigneur deviendra le Berger pour chercher les brebis perdues et pour les rassembler «des diverses contrées… dans leur pays» (34:11, 13). Enfin un David moderne deviendra leur dirigeant (34:24), l’aridité du pays sera surmontée (36:8-11), la mer Morte sera poissonneuse (47:1, 7-10) et Israël, comme les nations, saura que le Seigneur est avec lui et «[il saura] que je suis l’Éternel» (34:23-28, 30).
Les chapitres 35-36 décrivent les tensions qui apparaîtront quand les Israélites de retour trouveront leur pays habité par d'autres qui le réclameront comme le leur (35:10, 12, 15; 36:2-5). Le Seigneur a cependant promis qu'il diviserait la terre «par le sort» parmi les Israélites de retour pour leur héritage, assurant en même temps à tous les non-Israélites vivant parmi eux qu'eux aussi se verraient accorder un «héritage… parmi les enfants d'Israël» (47:22 [13-23]).
Le Seigneur insiste sur le caractère littéral de ce rassemblement (37:1-14). Comme dans la Résurrection, les Israélites dispersés, comme des ossements desséchés, pourraient quand même espérer être réunis une fois de plus dans leur propre pays en un seul corps, avec les muscles et la chair, le souffle et l'esprit. La Résurrection est donc une métaphore du rassemblement aussi bien que le moyen par lequel cela se fera, comme promis par le Seigneur: «J'ouvrirai vos sépulcres, je vous ferai sortir de vos sépulcres, ô mon peuple, et je vous ramènerai dans le pays d'Israël» (37:12).
Une fois que les Israélites se seront réunis et seront devenus prospères, ils vivront paisiblement dans «des habitations sans murailles», «tranquilles», «en sécurité», «n’ayant ni verrous ni portes» (38:11). C’est alors qu’ils seront attaqués par Gog, dont le but est de piller leur terre prospère. Dans les batailles qui s’ensuivront, le Seigneur raffinera Israël tout en faisant tomber le jugement les nations, aussi bien celles qui attaquent Israël que celles qui vivent dans des pays lointains (cf. És. 4:4; Za. 12:2-3; 14:2-3; So. 3:8; Éz. 39:2-4, 6, 11, 21-24). Jérusalem sera reconstruite comme centre divin, le temple de Dieu sera érigé au milieu d’eux (chap. 40-47), et il y résidera de sorte que Jérusalem sera appelée «sainte, parce que le Seigneur y sera» (TJS Éz. 48:35).
Dans ce contexte de rassemblement, Ézéchiel parle de la réunion des «bois» de Juda et d’Éphraïm (c.-à-d., Israël), une réunion qui signale non seulement le commencement du rassemblement d'Israël (Éz. 37:15-22; cf. 3 Né. 20:46; 21:1-3, 7-13) mais également le moyen par lequel le rassemblement ultime, celui qui ramène les peuples à Dieu, se fera (cf. 1 Né. 22:12; 2 Né. 6:11).
Les saints des derniers jours voient dans les annales de Juda la Bible et dans celles d’Éphraïm le Livre de Mormon (D&A 27:5). Ils considèrent que quand le Livre de Mormon a été traduit et publié, il est devenu possible d’unir les deux documents. Et puisque le but explicite du Livre de Mormon est de convaincre «Juif et Gentil que Jésus est le Christ, le Dieu éternel, qui se manifeste à toutes les nations» (page de titre du Livre de Mormon), ils voient dans cette union des témoignages le moyen principal par lequel Israël sera ramené à Dieu (voir Livre de Mormon, Prophéties bibliques concernant).

Bibliographie
Meservy, Keith H. "Ezekiel's Sticks and the Gathering of Israel." Ensign 17, févr. 1987, pp. 4-13.
Sperry, Sidney B. The Voice of Israel's Prophets, pp. 218-237. Salt Lake City, 1952.
KEITH H. MESERVY

Famille

[Cette rubrique se compose de deux articles: Famille: Enseignements au sujet de la famille. Famille: Vie de famille
Le premier article présente les enseignements principaux au sujet de la famille qui tendent à mettre les saints des derniers jours à part des autres et se concentre sur les Écritures modernes et sur les enseignements des dirigeants de l’Église. Le deuxième article donne une explication substantielle de la manière dont la famille fait ensemble son expérience de membre de l’Église, notamment du fait que les programmes de l’Église sont principalement axés sur la famille. Celle-ci est au centre de la théologie, de la religion, de la société et de la culture des saints. En plus des articles ci-dessous, voir Enfants, Paternité, Mariage, Maternité, et Mère en Israël. Concernant les règles et pratiques spécifiques de l’Église à propos de la famille, voir Maltraitance, Conjoint et Enfant; Adoption d’enfants; Contrôle des naissances; Divorce; Soirée familiale; et Prière en famille.]

Famille: Enseignements au sujet de la famille
Auteur: BRADFORD, REED H.

L'unité de base de l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours est la famille: «Le foyer est la base d'une vie juste et aucun autre instrument ne peut prendre sa place ni accomplir ses fonctions essentielles» (McKay, préface). C’est au sein de la famille que les gens connaissent la plupart des plus grandes joies et des plus grands chagrins de la vie. Les relations familiales de chaque personne sur terre sont d'importance cardinale, et de tous organismes sociaux créés pour les êtres humains, seule la famille est conçue pour continuer dans la vie suivante.
LES FAMILLES SUR TERRE SONT LE PROLONGEMENT DE LA FAMILLE DE DIEU. Selon le concept de la famille entretenu par les saints, toute personne est un enfant de parents célestes aussi bien que de parents mortels. Chacun individu a été créé spirituellement et physiquement à l'image de Dieu et du Christ (Moï. 2:27; 3:5). La Première Présidence a déclaré : «Tous les hommes, toutes les femmes sont à la ressemblance du Père et de la Mère universels, et sont littéralement les fils et les filles de la Divinité» (MFP 4:203). Tout le monde, avant de venir sur cette terre, a vécu avec notre Père et notre Mère célestes, et tout le monde a été aimé et instruit par eux en tant que membre de leur famille éternelle (voir Vie prémortelle). La naissance unit l'esprit à un corps physique de sorte qu'ensemble ils puissent recevoir «une plénitude de joie» (D&A 93:33; cf. 2 Né. 2:25).
LE MARIAGE EST ORDONNÉ DE DIEU. « Quiconque interdit de se marier n'est pas mandaté par Dieu, car le mariage est institué par Dieu pour l'homme» (D&A 49:15). Le mariage sanctionné par Dieu donne à l’homme et à la femme l'occasion d'accomplir leur potentiel divin. «Dans le Seigneur, la femme n’est point sans l’homme, ni l’homme sans la femme» (1 Co. 11:11). Maris et femmes sont uniques par certains côtés et libres de développer leurs dons éternels, et cependant étant égaux aux yeux de leurs parents célestes, ils sont un dans les buts divins qu'ils poursuivent, dans leur dévotion aux principes et aux ordonnances éternels, dans leur obéissance au Seigneur et dans leur amour divin l'un pour l'autre. Quand un homme et une femme qui ont été scellés l’un à l’autre dans un temple sont unis spirituellement, mentalement, émotionnellement et physiquement, assumant la pleine responsabilité de s'entretenir mutuellement, ils sont vraiment mariés. Ensemble ils s’efforcent d’imiter le prototype du foyer céleste dont ils viennent. L'Église leur enseigne à se compléter, à se soutenir et à s’enrichir l’un l’autre.
LA FAMILLE PEUT DEVENIR UNE CELLULE ÉTERNELLE. Les membres dignes peuvent être scellés par le pouvoir de la prêtrise pour le temps et l'éternité dans un saint temple soit quand ils se marient soit après le mariage. Au moment de leur scellement au temple, le mari et la femme entrent dans «un ordre de la prêtrise [appelé] la nouvelle alliance éternelle du mariage» (D&A 131:1-4). Sans dignité ni autorité, un mariage ne peut pas durer éternellement et est «sans efficacité, vertu ou force dans et après la résurrection des morts» (D&A 132:7). Si un mari et sa femme sont fidèles à leur mariage au temple, ils continueront comme co-créateurs dans le royaume céleste de Dieu à toute éternité. Ils administreront les affaires de leur famille dans l'unité avec les conseils du Saint-Esprit. Concernant les membres de l'Église non nés dans de tels foyers ou non mariés dans cette vie sans que cela ne soit de leur faute, le président Spencer W. Kimball a enseigné que ceux «qui auraient fait le nécessaire s’ils en avaient eu l’occasion appropriée recevront toutes ces bénédictions dans le monde à venir» (Kimball, p. 295).
LE POUVOIR DE CRÉER LA VIE EST UN DON DE DIEU. Parce que le pouvoir de procréation vient de Dieu, la pureté sexuelle est spirituelle et mentale, aussi bien que physique et émotionnelle (voir Sexualité). Jésus a dit : «Quiconque regarde une femme pour la convoiter a déjà commis l'adultère dans son cœur. Voici, je vous donne le commandement de ne permettre à aucune de ces choses d'entrer dans votre cœur» (3 Né. 12:28-29). La chasteté est sacrée (cf. Jcb. 2:28).
LA PROCRÉATION EST UN COMMANDEMENT DE DIEU. Par l'expérience sexuelle, le mari et la femme enrichissent leur mariage et créent des corps physiques pour que des esprits viennent sur terre réaliser les buts divins. Les saints des derniers jours s’efforcent de créer une vie au foyer consacrée à atteindre ces buts. C’est à la fois une joie et une responsabilité pour les parents de faire venir des esprits célestes dans ce monde. Adam et Ève reçurent le commandement : «Soyez féconds, multipliez» (Ge. 1:22). La révélation moderne a donné les mêmes instructions. On enseigne aux membres de l’Église à ne pas retarder et à ne pas refuser d'avoir des enfants pour des raisons égoïstes ou matérialistes. Pour ce qui est de la question de savoir combien d'enfants un couple aura, de l'espacement des enfants et de la régulation des naissances, les saints des derniers jours sont censés faire usage de leur libre arbitre et de choisir, comme mari et femme, une façon de faire qui soit conforme aux principes divins en recherchant la confirmation du Saint-Esprit.
LES PARENTS ONT LA RESPONSABILITÉ D'ENSEIGNER L'ÉVANGILE DE JÉSUS-CHRIST À LEURS ENFANTS. «S'il y a des parents qui ont des enfants… qui ne leur enseignent pas à comprendre la doctrine du repentir, de la foi au Christ, le Fils du Dieu vivant, du baptême et du don du Saint-Esprit… le péché sera sur la tête des parents… Et ils enseigneront aussi à leurs enfants à prier et à marcher en droiture devant le Seigneur» (D&A 68:25, 28). Les parents sont exhortés à être des exemples pour leurs enfants, conscients de ce que ceux-ci sont également leurs frères et sœurs d'esprit.
UN ENVIRONNEMENT D'AMOUR EST NÉCESSAIRE POUR ÉLEVER DES ENFANTS. L'esprit d'un foyer juste est l’amour. Le Seigneur a dit : «Vous vivrez ensemble dans l'amour» (D&A 42:45), l’amour des parents célestes, du Seigneur Jésus-Christ et du Saint-Esprit; du mari et de la femme et des parents pour les enfants, des enfants pour les parents et des enfants les uns pour les autres.
FAIRE DU FOYER UN LIEU DE PAIX ET DE JOIE DEMANDE DES EFFORTS. Les efforts consentis pour créer un foyer de paix exigent une planification, des prières et une collaboration constantes. L'Église encourage les familles à organiser des soirées familiales hebdomadaires, où tous les membres de la famille étudient les principes et les ordonnances éternels de l'Évangile et font ensemble des choses qui leur apportent de la joie. Deux présidents de l’Église ont dit : «L’œuvre du Seigneur la plus importante que vous ferez jamais sera celle que vous faites dans les murs de votre maison» (Lee, p. 7), et «Aucun autre succès ne peut compenser l'échec au foyer» (McKay, p. iii).
LES MEMBRES D’UNE FAMILLE QUI SONT DIGNES S’ATTENDENT AVEC FOI ET ESPÉRANCE À L’ÉTERNITÉ DE LEURS RELATIONS FAMILIALES. Les familles terrestres, avec leurs ancêtres et leurs descendants comptent bien vivre à nouveau en tant que familles au sens large avec les proches qui sont morts. Elles deviennent ceux «qui ont accepté le témoignage de Jésus, ont cru en son nom… et sont scellés par le Saint-Esprit de promesse que le Père répand sur tous ceux qui sont justes et fidèles» (D&A 76:51, 53).
LES JUSTES SONT BÉNIS. Toutes les personnes justes qui conservent leur dignité, leur amour et leur fidélité personnels, ont la promesse des richesses de l'éternité, dont la bénédiction finale d’être scellées à d'autres membres de la famille qui se qualifient également pour les bénédictions célestes.
Bibliographie
Benson, Ezra Taft. God, Family, Country : Our Three Great Loyalties, pp. 167-273. Salt Lake City, 1974.
Kimball, Spencer W. The Teachings of Spencer W. Kimball, dir. de publ. Edward L. Kimball, Salt Lake City, 1982.
Lee, Harold B. Strengthening the Home (brochure) Salt Lake City, 1973.
McConkie, Oscar W. Jr. “LDS Concept of the Family”, Journal of the Collegium Aesculapium 2, juillet 1984, pp. 46-51.
McKay, David O. Family Home Èvening Manual. Salt Lake City, 1965.
White, O. Kendall Jr. « Ideology of the Family in Nineteenth-Century Mormonism ». Sociological Spectrum 6, 1986, pp. 289-306.

REED H. BRADFORD

Famille: Vie de famille
Auteur: THOMAS, DARWIN L.

DÉMOGRAPHIE FAMILIALE. L'insistance inhérente sur la famille à la théologie des saints des derniers jours s’exprime dans des schémas démographiques qui sont différents chez les saints par comparaison avec l’ensemble de la population. D'abord, le taux de fertilité chez les saints a toujours été plus haut que la moyenne nationale. L'Utah a traditionnellement le taux de fertilité le plus élevé de tous les états de l'Union à cause du pourcentage élevé de saints des derniers jours dans l'état (approximativement 70%).
Les recherches prouvent que le fait que la famille est plus grande que la moyenne chez les saints des derniers jours n’est pas dû à leur répugnance à utiliser diverses méthodes de régulation des naissances. Les recherches de Heaton et Calkin (1983) prouvent que dans un échantillon national il y a autant de chances pour qu’ils utilisent des méthodes modernes de régulation des naissances que le reste du pays. Mais pour les saints des derniers jours, les contraceptifs ne sont souvent utilisés qu'après que les enfants aient été élevés et sont utilisés moins fréquemment afin de pouvoir obtenir la famille plus nombreuse désirée. Heaton conclut que le fait que les familles sont plus grandes chez les saints des derniers jours est lié au fait que les saints croient qu’il est important d’avoir des enfants, qu’ils font partie d’un groupe de référence de saints des derniers jours et qu’ils sont socialisés dans un contexte qui favorise la procréation d’enfants (1988, p. 112).
Dans la population en général, quand la taille de la famille augmente, la discipline coercitive augmente aussi. Les relations familiales affectueuses diminuent. Mais les recherches effectuées chez les saints des derniers jours révèlent une tendance inverse, les familles plus nombreuses signalant des relations d'affection accrues (Thomas, 1983, p. 274).
Les saints des derniers jours révèlent systématiquement un taux d’expériences sexuelles prénuptiales, de grossesses d'adolescentes et d'expériences sexuelles extra-conjugales inférieur à la moyenne nationale (Heaton, 1988). Cependant, les recherches faites par Smith (1976) prouvent que les saints non pratiquants évoluaient vers une attitude et un comportement sexuels plus libéraux pendant les années 1970, alors même que les saints des derniers jours pratiquants ne montraient aucune évolution vers une attitude ou un comportement plus libéraux. Les pourcentages ne signalant aucune activité sexuelle prénuptiale chez les saints des derniers jours pratiquants ont en fait augmenté entre 1950 et 1972, passant de 95% à 98% pour les hommes et de 96% à 98% pour les femmes (pp. 79-81).
Les données actuelles montrent qu'un pourcentage plus élevé de saints des derniers jours se marieront que dans l’ensemble de la population. Ils se marient aussi plus jeunes, ont un taux de divorce moindre et sont plus nombreux à se remarier après un divorce que l’ensemble de la population (Heaton, 1988, pp. 110-111).
En ce qui concerne le divorce, il est clair que les saints des derniers jours les plus religieusement engagés ont un taux de divorce considérablement inférieur à celui des membres de l’Église non pratiquants ou non engagés, en dépit du fait que l'Utah est l’un des états des montagnes de l’Ouest qui ont généralement un taux moyen de divorce plus élevé que la moyenne nationale (Thomas, 1983, p. 277). Les recherches de Heaton et de Goodman (1985) montrent que parmi les saints des derniers jours fréquentant régulièrement l’église, 10% des hommes et 15% des femmes passent par le divorce, pour 21% des hommes et 26% des femmes qui n’assistent pas régulièrement. En outre, parmi les hommes ayant contracté un mariage au temple, 5,4% divorcent par rapport aux 27,8% de ceux qui ne sont pas mariés au temple. Pour les femmes mariées au temple, 6,5 divorcent par rapport aux 32,7% des femmes non mariées au temple.
LE RÔLE DE LA FAMILLE ET L'ÉGLISE. Du fait que toutes les organisations de l’Église insistent sur la famille, depuis la Primaire jusqu’aux collèges de la prêtrise, le mari et la femme deviennent les points de contact principaux entre la famille et l'Église. La participation de l'épouse à la vie de l'Église se situera très probablement dans les activités de la Primaire et de la Société de Secours. Le contact du mari avec l'Église peut se situer dans presque n'importe quelle organisation excepté la Société de Secours, qui est limitée aux femmes.
L'Église étant organisée autour d'une prêtrise masculine laïque, les maris remplissent plus de postes de direction que les femmes. En outre, la réorganisation des procédures et des fonctions de l’Église entreprise sous la politique générale de «coordination de la prêtrise» a remis l’accent sur le rôle du père de présider les conseils de famille, considérés comme faisant partie du système des conseils qui doit gérer l'Église et qui s’étend jusqu’au conseil de la Première Présidence. La famille est considérée comme l’unité la plus fondamentale de l'Église et tous les programmes de l’Église sont conçus pour fortifier la famille.
Étant donné le rôle de la prêtrise dans le gouvernement de l’Église, aussi bien que les enseignements au sujet de la famille, les saints des derniers jours sont généralement considérés comme encourageant la répartition traditionnelle du travail en fonction des sexes dans la famille, tout en mettant l’accent sur l'autorité du père par la lignée de la prêtrise. Quand les chercheurs ont demandé qui devait remplir diverses fonctions dans la famille, les saints des derniers jours ont eu tendance à se situer haut sur l’échelle des croyances traditionnelles concernant qui doit faire quoi dans une famille (Brinkerhoff et Mackie, 1988). Cependant, dans les recherches dans lesquelles on demande aux maris et aux femmes ce qu'ils font réellement dans la prise de décision dans la famille ou comment ils s’acquittent de divers devoirs (que l’on considérait traditionnellement comme revenant au mari ou à la femme), les saints des derniers jours se situent systématiquement haut sur l’échelle égalitaire (Thomas, 1983; Brinkerhoff et Mackie, 1983, 1988). Il n’y a pas d’explication satisfaisante à ces schémas quelque peu paradoxaux. L’explication habituelle, à savoir que les pressions égalitaires de l’ensemble de la société changent le comportement des maris et des femmes de l’Église n'est pas convaincante à la lumière de ces résultats de recherches récentes. Wuthnow conseille à ceux qui étudient l'influence religieuse de conserver un scepticisme sain à l’égard de toute description de la religion «comme une force au service du conservatisme social» (1973, p. 128). Son conseil semble particulièrement d’application à cette question de l’attitude et des croyances des saints.
En outre, alors que le père chez les saints des derniers jours reçoit la responsabilité de diriger la famille, il est attendu de lui qu’il le fasse d’une manière qui aide chaque membre de la famille à se développer et à s’épanouir. Les croyances des saints soulignent également la nature égalitaire des rapports hommes-femmes. La doctrine de l’Église enseigne qu'il y a une Mère dans les cieux aussi bien qu'un Père, que le fait qu’Ève ait mangé du fruit défendu a fait avancer le Plan du salut de Dieu (voir Chute d'Adam), que les femmes doivent accomplir certaines ordonnances essentielles de la prêtrise dans le temple et que l’ordre le plus élevé de la prêtrise et les bénédictions complètes de l'exaltation ne sont accessibles qu’aux couples mariés; ni l'un ni l'autre ne peuvent entrer dans l'exaltation sans l’autre.
Ce rapport égalitaire entre les hommes et les femmes est symbolisé dans la façon dont les saints représentent les relations entre Adam et Ève après leur expulsion du jardin d'Éden. Les deux doivent gagner leur pain à la sueur de leur front et «Ève, sa femme, travaillait également avec lui» (Moï. 5:1). Il est commandé aux deux d’offrir des sacrifices et ils enseignent tout cela à leurs enfants (Moï. 5:5, 12). Ève se lamente avec Adam de la méchanceté de leurs enfants et ils prient le Seigneur ensemble (Moï. 5:13-16). Après avoir reçu des informations de Dieu, Ève instruit à son tour Adam de quelques points de base de l'Évangile (Moï. 5:11).
Un autre accent égalitaire apparaît dans les cérémonies et les ordonnances du temple. S’il n’y avait pas de femmes pour accomplir les ordonnances sacrées de la prêtrise dans le temple, les ordonnances salvatrices les plus élevées qui doivent se faire sur terre par les hommes et les femmes ne pourraient pas être accomplies. C'est symbolique des rapports hommes-femmes en général. Seuls ils restent incomplets tandis que l'homme et la femme unis réalisent leur potentiel divin le plus élevé.
CROYANCES DES PARENTS ET COMPORTEMENT EN FAMILLE. L'engagement vis-à-vis de la famille est considéré comme crucial aussi bien pour le mari que pour la femme, bien que celle-ci ait normalement la responsabilité principale de la gestion du foyer et de l’éducation des enfants. Thomas (1988) a étudié un échantillonnage de parents de l’Église et a démontré que la mesure dans laquelle maris et femmes partageaient leurs devoirs dans l’éducation des enfants était le deuxième élément de satisfaction dans le mariage. Une recherche plus récente (Thomas et Cornwall, 1990) a montré que c'est la satisfaction matrimoniale de la femme qui est en rapport étroit avec le partage de l’éducation des enfants, alors que la satisfaction matrimoniale du mari est indépendante du partage de l’éducation des enfants. Cette constatation corrobore un schéma général de longue date dans les recherches sur la famille qui prouve que ce qui se passe dans la vie de famille est plus essentiel à la définition que la femme donne de la satisfaction que celle que le mari en donne. Cela montre aussi que les maris dans l’Église doivent se rendre compte que leur participation accrue aux soins à donner aux enfants sera l'une des meilleures contributions qu'ils peuvent apporter à la satisfaction matrimoniale de leur femme. En outre, les familles qui se situent haut sur l’échelle de l'observance religieuse au foyer (prière en famille, lecture des Écritures et conseil de famille) signalent aussi le plus haut niveau d’éducation partagée des enfants.
Dans des résultats apparentés, le fait que le couple ait été marié dans le temple était le meilleur indicateur que la famille s’acquitterait de son observance religieuse au foyer. Ces données soutiennent la conclusion que le mariage au temple est lié aux comportements familiaux qui incluent plus d'activités religieuses au foyer, une participation accrue du mari à l’éducation partagée des enfants et par conséquent une satisfaction matrimoniale accrue.
L'accent mis sur la famille chez les saints des derniers jours peut souvent déboucher sur davantage de relations avec les membres de la famille au sens large. L'Église encourage les familles à s’organiser à travers les générations pour stimuler l’histoire familiale et l’œuvre généalogique considérées comme essentielles au bien-être de la famille dans l'éternité. On discute souvent de cette œuvre lors des réunions de famille. Il n’existe cependant pas de bonnes recherches comparatives pour savoir dans quelle mesure les familles de l’Église diffèrent des autres familles ou leur ressemblent en matière d'interaction avec la famille au sens large.
L'ÉGLISE ET LE FONCTIONNEMENT DE LA FAMILLE. Ces réalités démographiques signifient que généralement les familles de l’Église sont plus grandes, ont plus de chances d’éviter le divorce, se caractérisent par leur engagement religieux et des activités centrées sur l'éducation des enfants et ont besoin de grandes ressources financières. Outre qu’ils doivent pourvoir aux besoins financiers de la famille, gérer le ménage et élever les enfants, les adultes ont habituellement un ou plusieurs appels dans l'Église qui peuvent exiger beaucoup de temps au service d'autrui. Et, puisque le nombre de femmes de l’Église qui sont employées en dehors de la maison est pratiquement égal à la moyenne nationale aux États-Unis (voir Mason, p. 103; Heaton, 1986, pp. 184, 190), donner la priorité absolue au foyer est un défi véritable. Quand les enfants grandissent, les parents sont encouragés à les inclure dans les tâches ménagères, afin que les qualifications et le comportement qui en résulteront puissent contribuer à la qualité de la vie de famille, aussi bien que les préparer à avoir de l’assurance et de la compétence dans le monde extérieur à la famille. Les dirigeants de l’Église sont encouragés à réduire au minimum le temps qu’eux et les autres membres consacrent à leurs appels et à protéger le temps pour la famille des intrusions constantes de l’extérieur.
Parfois, l’accent mis par les activités de l’Église sur la famille à deux parents va    à l’encontre de la vérité que tous les membres ne sont pas à une étape de la vie où ils peuvent élever des enfants avec un conjoint dévoué. Ceux qui ne se sont jamais mariés, sont divorcés, sont veufs, sont des parents seuls ou sont mariés avec une personne qui n’est pas membre de l’Église sont toujours dans des paroisses de l’Église et, idéalement, ils sont inclus dans la communauté des saints. Les collèges de la prêtrise et la Société de Secours ont la responsabilité d’intégrer ces familles aux activités de la paroisse ainsi que de veiller aux besoins spéciaux. Et, quand les membres d’une famille quelconque se retrouvent dans des activités telles que la consommation de drogue, le divorce ou la violence dans la famille, l'Église prévoit que les dirigeants fournissent un réseau d'appui émotionnel, de prévention et de réadaptation.
Bibliographie

Bahr, Howard M.; S. J. Condie et K. L. Goodman. Life in Large Families. Washington, D.C., 1982.
Brinkerhoff, Merlin B. et Marlene MacKie. "Religious Sources of Gender Traditionalism". Dans The Religion and Family Connection: Sociol Science Perspectives, dir. de publ. D. Thomas, pp. 232-257. Provo, Utah, 1988.
Heaton, Tim B. "The Demography of Utah Mormons". Dans Utah in Demographic Perspective, dir. de publ. T. Martin; T. Heaton et S. Bahr, pp. 181-193. Salt Lake City, 1986.
Id. "Four C's of the Mormon Family: Chastity, Conjugality, Children, and Chauvinism." Dans The Religion and Family Connection: Social Science Perspectives, dir. de publ. D. Thomas, pp. 107-124. Provo, Utah, 1988.
Id. et S. Calkins. "Family Size and Contraceptive Use among Mormons: 1965-1975. " Review of Religious Research 25, no.2 (1983):103-114.
Id. et Kristen L. Goodman. "Religions and Family Formation." Review of Religious Research 26, no.4 (1985):343-59.
Lee, Harold B. Strengthening the Home. Salt Lake City, 1973 (brochure).
Mason, Jerry. "Family Economics." ln Utah in Demographic Perspective, dir. de publ. T. Martin; T. Heaton et S. Bahr, pp. 91-109. Salt Lake City, Utah, 1986.
Smith, W. E. "Mormon Sex Standards on College Campuses, or Deal Us Out of the Sexual Revolution." Dialogue 10, no.2 (1976):76-81.
Thomas, Darwin L. "Future Prospects for Religion and Family Studies: the Mormon Case". Dans The Religion and Family Connection: Social Science Perspectives, dir. de publ. D. Thomas, pp. 357-382. Provo, Utah, 1988.
Id. "Family in the Mormon Experience". Dans Families and Religions: Conflict and Change in Modem Society, dir. de publ. W. D'Antonio et J. Aldous, pp. 267-288. Beverly Hills, Calif. , 1983.
Id. et Marie Cornwall. "The Religion and Family Interface: Theoretical and Empirical Explorations". Paper presented at the XII World Congress of Sociology , International Sociological Assn., Madrid, Espagne, 13 juillet 1990.
Wuthnow, R. "Religious Commitment and Conservatism: ln Search of an Elusive Relationship. " Dabs Religion in Sociological Perspective, dir. de publ. C. Glock. Belmont, Calif. , 1973.
DARWIN L. THOMAS


Féminisme
Auteur : Richards, Mary Stovall

Le féminisme est la croyance philosophique qui prône l'égalité entre femmes et hommes et cherche à supprimer les inégalités et à réparer les injustices commises contre les femmes. Loin d'être une idéologie monolithique, la théorie féministe englobe une variété de vues sur la nature des femmes et plaide en faveur d'une vision plurielle du monde qui considère comme tout aussi importantes les expérience des femmes de toutes races et de toutes classes.
Aux États-Unis, le « féminisme » est un terme générique qui englobe une coalition des femmes et des hommes qui ont en commun leur dévouement à la cause des droits des femmes, mais qui diffèrent souvent dans les détails relatifs aux objectifs et à la tactique. Les valeurs personnelles, religieuses et politiques influent toutes sur les réformes et les mesures pour lesquelles le ou la féministe va opter.
La doctrine de l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours converge dans certains domaines avec les idéaux du féminisme et diffère dans d'autres. Elle insiste sur l'égalité spirituelle absolue des femmes et des hommes, proclamant que « tous sont pareils pour Dieu », « noirs et blancs, esclaves et libres, hommes et femmes?» (2 Néphi 26:33; Galates 3:28). Les dons de l'Esprit sont accordés de manière égale aux hommes et aux femmes?: «?Et maintenant, il communique sa parole par des anges aux hommes, oui, non seulement aux hommes, mais aussi aux femmes?» (Alma 32:23). Les principes des saints des derniers jours sont, sans équivoque aucune, en faveur du développement de tout le potentiel de chaque personne sans distinction de sexe.
L'égalité de tous les êtres humains devant le message du Christ est à ce point central que, durant son ministère terrestre, le Christ a rejeté ouvertement les interdits culturels qui reléguaient les femmes à un statut d'infériorité spirituelle et politique. Il reconnaissait l’intelligence des femmes?; il les instruisait directement (Luc 10:38-42) ; il s’est présenté à une femme comme étant le Messie, première affirmation de ce genre que l’on trouve dans le Nouveau Testament (Jean 4:26) ; il a guéri des femmes (Matthieu 15:22-28) et a ressuscité une femme d'entre les morts (Luc 8:49-56). Après sa résurrection, il est d’abord apparu à une femme à qui il a demandé d’informer ses apôtres de ce merveilleux événement (Jean 20:11-18), alors que, selon la loi juive, les femmes n’étaient pas considérées comme étant des témoins juridiquement compétents.
Cette égalité des femmes et des hommes est basée sur le modèle céleste de parents célestes, Père et Mère, qui ont en commun « tout pouvoir » et à qui «?tout… est soumis?» (D&A 132:20) et qui invitent leurs enfants à imiter leur exemple d'amour et d'unité parfaits et à devenir comme eux. On enseigne aux mormons que le pouvoir juste détenu par les parents célestes et partagé avec leurs enfants n'est jamais coercitif mais se caractérise « par la persuasion, par la longanimité, par la gentillesse et la douceur, et par l'amour sincère » (D&A 121:41). S’il est vrai que les implications de ces croyances globales sont toujours sujettes à la mise en application par chacun, hommes et femmes dans l’Église ont trouvé dans ces points de doctrine des sources de force spirituelle, et notamment le désir d'en savoir plus sur notre Mère céleste.
Néanmoins, la doctrine mormone est en désaccord avec plusieurs versions du féminisme, dont celles qui mettent l’accent sur une autonomie féminine excluant les hommes. Parce que la doctrine de l'Église souligne la nécessité de surmonter les différences et de créer une unité céleste entre mari et femme pour atteindre l'exaltation (cf. 1 Corinthiens 11:11), la critique féministe radicale à l’égard de la famille, qu’elle considère comme une institution répressive à l’égard de la femme et dont elle réclame le remplacement trouve peu d’écho chez les saints des derniers jours. Si certaines familles peuvent être répressives et dysfonctionnelles, la plupart des saints des derniers jours croient que le défaut n'est pas inhérent à la structure. En fait, la famille est considérée comme étant la source de la plus grande œuvre et de la plus grande joie tant pour les femmes que pour les hommes, pas seulement sur terre mais aussi dans l'éternité.

Bibliographie
Beecher, Maureen Ursenbach, et Lavina Fielding Anderson, dir. de publ. Sisters in Spirit: Mormon Women in Historical and Cultural Perspective. Urbana, Ill., 1987.
Dialogue 6, été 1971, et 14, hiver 1981. Les deux numéros présentent un certain nombre d’articles sur les femmes dans l’Église.
Donovan, Josephine. Feminist Theory: The Intellectual Traditions of American Feminism. New York, 1985.
MARY STOVALL RICHARDS

Femmes dans le Livre de Mormon
Auteurs: BOWEN, DONNA LEE et WILLIAMS, CAMILLE S.

On peut tirer certaines conclusions générales concernant les femmes du Livre de Mormon à partir des passages fragmentaires du livre sur le mariage, la famille et l'organisation religieuse. Six femmes sont mentionnées par leur nom: Sariah, Isabel, Abish, Ève, Sara et Marie. Puisque aucune femme n'est mentionnée comme dirigeante religieuse ou militaire et un petit nombre seulement comme dirigeantes politiques, il apparaît que les hommes détenaient quasiment tous les postes de direction dans cette société. En outre, comme il a été écrit principalement pour rappeler à de futurs lecteurs la bonté de Dieu et pour les persuader de croire au Christ, le Livre de Mormon ne contient aucun livre de loi et peu d’histoire intellectuelle ou sociale traitant de la combinaison des pratiques familiales et religieuses. Il est cependant raisonnable de supposer que ces peuples ont commencé avec beaucoup de coutumes semblables à celles de leurs cultures sémitiques héréditaires et que leurs pratiques ont changé quelque peu au cours des années.
Le mariage et l’enfantement, investis d’une importance et de responsabilités religieuses, étaient un fait de la société néphite (1 Né. 7:1; Mos. 4:14-15; 4 Né. 1:11). Le mariage était peut-être arrangé dans les groupes ethniques (1 Né. 16:7; Al. 17:24) et limités à l’extérieur de certains groupes (Al. 3:8). La polygamie et le concubinage étaient interdits et dédaignés; la monogamie était de règle sauf si le Seigneur voulait se «susciter une postérité» (Jcb. 2:27-30).
Il était attendu des maris et des femmes qu’ils soient fidèles l’un à l’autre (Jcb. 3:7). Il y a un cas qui prouve qu'une épouse avait de la valeur même si elle était incapable de concevoir. Le roi jarédite Coriantum, qui était un juste, reste avec son épouse stérile jusqu'à sa mort à l'âge de 102 ans. Il épouse alors une jeune servante et engendre des fils et des filles (Ét. 9:23-24). Il est de même considéré comme un signe de grande méchanceté que les prêtres du roi Noé abandonnent leurs familles. Tandis qu'ils se cachent, ils enlèvent vingt-quatre femmes lamanites pour les épouser. Mais quand les Lamanites de leur tribu découvrent et veulent tuer les prêtres plusieurs années après, ces femmes plaident fidèlement pour que leurs maris aient la vie sauve (Mos. 23:33).
Les hommes étaient censés entretenir leurs épouses et leurs enfants, de même que les veuves et les enfants des hommes tués à la guerre (Mos. 21:17). Les hommes devaient prier pour leur ménage (Al.34:21) et beaucoup prenaient les armes pour défendre leurs familles.
Les deux parents se préoccupaient de leur progéniture (1 Né. 5:1-7; 8:37). Léhi bénit ses petites-filles et petits-fils et leur fait des recommandations (2 Né. 4:3-9). On enseignait aux enfants à honorer leurs père et mère. Hélaman l’Ancien et ses 2.000 jeunes guerriers attribuent à leurs mères ammonites le mérite de leur avoir inculqué la foi que «s’ils ne doutaient pas, Dieu les délivrerait» (Al. 56:47).
Dans la vie religieuse, les femmes participaient aux assemblées au temple (Jcb. 2:7; Mos. 2:5-8), instruisaient leurs enfants concernant Dieu (Al. 56:46-47) et offraient des sacrifices (1 Né. 5:9). De toute évidence, elles n’étaient pas exclues du culte ni isolées au cours de celui-ci (2 Né. 26:28-33); il n’y a aucune indication non plus qu'elles aient été considérées comme rituellement impures pendant la menstruation. L’Évangile enseigné par les Néphites et par le Christ dans le Livre de Mormon s’adresse à tous, quels que soient le sexe, l'âge ou l’origine (2 Né. 26:33; Mos. 27:25; Al. 11:44; 32:23; 3 Né. 17:25). Le baptême était offert à tous les hommes et femmes qui croyaient (Mos. 18:16; Mro. 9:10). Les femmes faisaient preuve d’une foi profonde et étaient mises à l'épreuve par de grands sacrifices. À Ammonihah, des femmes sont brûlées vives avec leurs enfants pour avoir refusé de renoncer à leur foi au Christ (Al.14:7-11). Apparemment le liahona répondait à la foi et à la diligence collectives du groupe entier, hommes et femmes (1 Né. 16:28).
Pendant les années passées dans le désert, les femmes léhites travaillèrent dur et étaient fortes, mais on ne sait rien de leurs activités, à part la grossesse et l'accouchement. Le filage est le seul travail explicitement attribué aux femmes (Mos. 10:5; Hél. 6:13). La danse chez les femmes est associée aux loisirs et parfois à la méchanceté (1 Né. 18:9; Mos. 20:1; Ét. 8:10-11). Les prostituées échangeaient leurs faveurs contre leur entretien (Mos. 11:14).
Politiquement, les femmes avaient des droits de succession au trône chez les Lamanites, parce que quand Amalickiah assassine un roi lamanite, le règne passe à la reine, qu'Amalickiah épouse alors pour obtenir le trône (Al. 47:32-35). Dans des crises extrêmes les femmes prenaient les armes à la guerre aux côtés de leurs maris (Al. 54:12; 55:17; Ét. 15:15).
On ne constate pas d'attribution de tâches dans la famille ou dans l’ensemble de l’économie – le commerce, les semailles et les moissons et l’entretien des animaux. Il est certain que les cycles de colonisation, d'agriculture, d'urbanisation, de guerre, de destruction et de renouveau, aussi bien que les différents systèmes de croyances ont affecté la façon de vivre des familles et la manière de travailler.
Les femmes du Livre de Mormon Sariah, Abish et Isabel peuvent être considérées non seulement comme des figures historiques mais également comme des archétypes respectivement de la mère juste, de la servante pieuse et de l’étrangère attirante mais sexuellement impure.
Sariah est la mère fidèle des nations néphite et lamanite. Elle quitte une maison confortable près de Jérusalem avec Léhi et leur famille pour subir les rigueurs de la traversée du désert et de l'océan, donnant naissance à deux autres fils, Jacob et Joseph, à un âge avancé tandis qu’ils sont dans le désert (1 Né. 18:7, 17-19). Elle se plaint de Léhi quand elle pense que leurs fils sont morts, mais affirme son appel et la puissance de Dieu quand ils reviennent sains et saufs (1 Né. 5:2-8). Avec Léhi elle offre un sacrifice d’actions de grâces. Elle est mère de six fils et d’au moins deux filles (2 Né. 5:6).
Abish, convertie lamanite d’une foi exceptionnelle, servante de la reine du roi Lamoni, reconnaît que c’est la puissance de Dieu qui a accablé le roi, la reine et Ammon quand ils tombent à terre sans connaissance; elle rassemble le peuple pour qu’il soit témoin de l'événement, puis elle touche la reine pour la relever quand la confusion de la foule se transforme en querelle. Beaucoup vont croire au témoignage de la reine revenue à elle, qui relève alors le roi, lequel va également témoigner de Jésus (Al. 19:16-36).
Isabel, selon Alma le Jeune (Al. 39:3-4), est une prostituée qui en séduit beaucoup, dont Corianton, fils d'Alma, qui pendant un certain temps abandonne le ministère pour aller après elle (Al. 39:3).
Les trois autres femmes qui ont un nom sont des figures bibliques: Ève (par exemple, 2 Né. 2:15-20; cf. plusieurs mentions de «nos premiers parents», par exemple 2 Né. 9:9), Sara (2 Né. 8:2) et Marie, mère de Jésus (par exemple, Mos. 3:8). Ève est mentionnée dans le contexte d'une explication de la doctrine de la chute d'Adam, précurseur du salut de l'humanité. Sara est reconnue comme mère fidèle des nations. Marie est qualifiée de «vierge d'une très grande beauté et plus belle que toutes les autres vierges» (1 Né. 11:15).
Il y a, dans le Livre de Mormon, d'autres femmes qui ne sont connues que par les actes qu’elles posent: la femme de Néphi 1, une fille d'Ismaël, essaie d’adoucir des cœurs mauvais par ses larmes (1 Né. 7:19; 18:19); la femme d'Ismaël et trois de leurs filles soutiennent Néphi (1 Né. 7:6); une servante se sauve du camp de Morianton après avoir été violemment battue par lui, pour avertir Moroni 1 des plans de son maître rebelle (Al. 50:30-31); une fille de Jared ourdit un complot pour regagner le royaume pour son père par la séduction, la violence et la duperie (Ét. 8-9); deux reines lamanites sont converties par les fils de Mosiah 2 (Al. 19:29-30; 22:19-24). Peut-être que, comme dans certaines cultures sémitiques d’aujourd'hui, la manière officielle ou plus polie de désigner une femme était-elle non d’utiliser son nom, mais de décrire sa place dans la famille, comme «la fille de Jared». Les autres femmes désignées de cette façon sont la femme d'Ismaël, les filles d'Ismaël, la fille aînée d'Ismaël, femme de Zoram, les filles de Léhi et les sœurs de Néphi, la fille de Lamoni et les filles impénitentes de Coriantumr.
Le comportement et le traitement des femmes étaient considérés comme un indice de santé sociale et spirituelle. Beaucoup d’allusions aux femmes concernent leurs souffrances pendant la guerre, la captivité et les vicissitudes. Néphi et ses frères mesurent la difficulté de leurs voyages en termes de souffrances de leurs femmes, bien que Néphi souligne que les femmes sont rendues fortes comme les hommes, alors que ses frères décrivent les souffrances de leurs épouses comme pires que la mort (1 Né. 17:1, 20). Jacob établit un vif contraste entre l'infidélité masculine et la tendresse des femmes (Jcb. 2-3); il décrit l'immoralité comme étant la cause de l'effondrement de la famille et de la société. L'inhumanité et la dépravation des civilisations mourantes sont également décrites en termes de souffrances de la part des femmes: les Lamanites font manger aux femmes et aux enfants la chair de leurs maris et pères morts (Mro. 9:8); les femmes néphites sont sacrifiées aux idoles (Mrm. 4:15, 21); les Néphites violent les femmes lamanites capturées, les torturent à mort et ensuite mangent leur chair comme marque de leur courage (Mro. 9:9-10).
Une grande partie des images impliquant les femmes du Livre de Mormon correspond à celles de la Bible. Par exemple, le Christ compare ses efforts pour rassembler les repentis à une mère poule rassemblant ses poussins sous ses ailes. Comme dans Proverbes 3:13-20, la sagesse est féminine (Mos. 8:20), de même que la miséricorde (Al. 42:24). Il arrive que des images féminines soient appliquées au Seigneur, comme dans le cas de l’image de la mère allaitant son enfant utilisée pour dire que le Seigneur console et se rappelle les enfants de son alliance (1 Né. 21:15).
Dans un sens, la femme est l'image du peuple de Dieu. Le langage figuré biblique faisant de Dieu l’époux et de son peuple l’épouse se poursuit dans le Livre de Mormon, essentiellement dans les écrits d'Ésaïe. Israël décadent est décrit comme dépourvu d'hommes honorables, du fait qu’ils considèrent les femmes comme des objets sexuels décoratifs (2 Né. 13:16-26; És. 3:16-26). Quand le peuple de Dieu lui devient infidèle, il est qualifié de «prostituée de toute la terre» (2 Né. 10:16). Quand il appelle son peuple au repentir, le Seigneur pose la question rhétorique : «T'ai-je répudié… Où est la lettre de divorce par laquelle j'ai répudié votre mère?» (2 Né. 7:1; És. 50:1). Les images de la mère trop faible pour nourrir son enfant et de la femme enceinte si proche de l’accouchement qu’elle ne peut pas fuir la destruction servent à motiver les Néphites à se repentir (Hél. 15:1-2); la femme dont les enfants sont perdus est l'image de la désolation (1 Né. 21:20-21). Ceux qui acceptent le «mariage» avec le Seigneur éprouveront une joie aussi abondante que celle d'une femme stérile qui devient mère de beaucoup d’enfants et le Seigneur console son peuple en disant: «Car ton créateur est ton époux: le Seigneur des armées est son nom… Dans un instant de colère, je t'avais un moment dérobé ma face, mais avec un amour éternel j'aurai compassion de toi, dit ton Rédempteur, le Seigneur» (3 Né. 22:1, 5-8; Es. 54:1, 5-8).

Bibliographie
Spencer, Marjorie Meads. «My Book of Mormon Sisters». Ensign 7, sept. 1977, pp. 66-71.
DONNA LEE BOWEN et CAMILLE S. WILLIAMS

Femmes, rôle des: Évolution historique et sociologique
Auteur: BECK, MARTHA NIBLEY

Les croyances des saints créent une identité féminine très particulière qui encourage les femmes à développer leurs capacités d’individus potentiellement divins, tout en affirmant que les activités les plus importantes pour les hommes et les femmes sont centrées sur la création et l’entretien de relations familiales.
Le potentiel éternel des femmes a toujours été basé sur le canon doctrinal, qui est resté essentiellement inchangé depuis que l’Église a été organisée. Cependant, le rôle temporel des femmes a pris différentes formes selon les situations auxquelles l’Église a dû faire face à divers moments de son histoire. À travers toutes les périodes historiques, l’application aux circonstances pragmatiques de la perspective théologique à l’égard des femmes a signifié que les membres féminins de l’Église ont toujours joué un rôle central qui a assuré le succès du mormonisme comme religion et comme société.
RÔLE DES FEMMES DANS LA PÉRIODE FORMATRICE DE L’ÉGLISE (1830-1847). Comme le font typiquement la plupart des adhérents des religions nouvellement créées qui cherchent leur place, les premiers saints des derniers jours réagissaient aux tensions en donnant à la vie de tous les jours une orientation intensément spirituelle. Bien que l’autorité pour administrer la plupart des ordonnances et pour présider la plupart des assemblées ait été limitée à une prêtrise masculine, les dons de l’Esprit n’étaient pas considérés comme appartenant aux hommes uniquement. Les femmes recevaient la révélation personnelle, guérissaient les malades, prophétisaient les événements futurs et accomplissaient diverses autres actions qui nécessitaient des dons spirituels. La foi de ces femmes et leur capacité de développer des qualités spirituelles furent essentielles pour maintenir l’Église en vie pendant ses premières années difficiles. Elles votaient sur les affaires de l’Église, aidaient aux cérémonies du temple et contribuaient aux activités d’entraide. En tant que groupe, les femmes obtinrent une identité ecclésiastique par la création de la Société de Secours, que le prophète Joseph Smith considérait comme partie intégrante et essentielle de l’Église. De plus, les femmes fournissaient une grande partie du travail physique, soignaient les malades et les blessés, aidèrent à la création d’une succession de nouvelles communautés et s’occupaient des besoins des membres dont les familles avaient affronté des difficultés.
RÔLE DES FEMMES DANS LA PÉRIODE DE CONSOLIDATION (1847-1920). L’émigration à grande échelle des saints des derniers jours hors du Midwest des États-Unis vers la région peu peuplée du Grand Bassin de l’Ouest marqua le commencement de la consolidation de la religion mormone. Séparés de la civilisation anglo-américaine dominante par des centaines de kilomètres de territoire hostile et non colonisé, les saints des derniers jours pouvaient créer leur communauté selon les directives dictées par leur religion. Parmi les pratiques sociales qui devinrent importantes après la migration vers l’Ouest et qui eurent un impact important sur la vie des femmes, il y eut le mariage plural et l’affectation des hommes adultes à de longues tournées comme missionnaires de l’Église. Une femme dont le mari divisait son temps entre des épouses multiples et/ou le service missionnaire était souvent obligée de pourvoir toute seule au soutien matériel et émotionnel de ses enfants et d’elle-même.
La croissance de la population et sa socialisation dans l’Église furent des facteurs importants de la consolidation et du renforcement de l’organisation de l’Église et une grande partie de cette responsabilité incomba aux femmes. À cause de l’absence de leurs maris, les femmes étendirent leur rôle en tant que «mères en Sion» dans des domaines qui n’étaient généralement pas liés à la domesticité féminine du XIXe siècle. Le président Brigham Young encouragea l’éducation des filles et des garçons dans «les us et coutumes des royaumes et des nations éloignés, avec leurs lois, leur religion, leur localisation géographique… leur climat, leurs productions naturelles, l’ampleur de leur commerce et la nature de leur organisation politique» (JD 9:188-89; Widtsoe, p. 211). Il proposa également que les femmes «tiennent des registres et vendent des marchandises» (JD 12:374-75; Widtsoe, p. 218), et les exhorta «à voter… parce que les femmes sont les personnalités qui dominent l’urne électorale» (JD 1:218; Widtsoe, p. 367). Certaines femmes de l’Église participèrent à des actions politiques relatives à leur sexe, comme le montre le fait qu’elles furent la deuxième population féminine, après celle du Wyoming, à voter lors d’une élection nationale.
Les exhortations du président Young montrent une conception de la responsabilité féminine tirée aussi bien de la croyance que les femmes et les hommes sont éligibles pour la même «progression éternelle» que de la dépendance de l’Église d’Utah de l’époque vis-à-vis du maintien d’une population féminine capable et inventive. La réponse des femmes à la nécessité de développer de larges capacités pratiques et à un dévouement intense à la famille forgea une image des femmes mormones qui résultait de facteurs pratiques aussi bien que religieux au cours de cette période.
RÔLE DES FEMMES DANS LA PÉRIODE D’EXPANSION (1920 à nos jours). Pendant tout le début des années 1900, l’idéal des convertis s’assemblant en Utah de tous les coins du globe pour édifier une «Sion» isolée se transforma graduellement en la volonté d’établir l’Église dans beaucoup de différents pays et cultures. Ce changement, accompagné de l’intrusion de colons non membres en «pays mormon», obligea l’Église à affronter le problème social de l’intégration de ses membres à des sociétés non mormones. L’un de ces problèmes fut la délimitation et la formulation de la position des femmes de l’Église; cependant, le rôle des femmes n’était pas un sujet qui suscitait beaucoup de polémique.
La place centrale de la famille dans la culture et la doctrine des saints s’adaptait facilement à l’idéal victorien populaire du XIXe siècle du rôle hautement, pour ne pas dire exclusivement, domestique des femmes. La nécessité de consolider l’Église en tant que communauté et en tant qu’organisation fut remplacée par le désir de former une population stable qui pourrait s’adapter confortablement dans les cultures ambiantes, en particulier la culture des États-Unis.
Jusqu’à la dernière moitié du XXe siècle, le rôle traditionnel des femmes opposa peu d’obstacles à la réalisation de ce but. Comme l’industrialisation poussait progressivement la sphère des hommes américains hors de la maison, et celle des femmes de plus en plus dedans, la plupart des saints des derniers jours suivirent simplement le modèle de la société profane. Conformément à sa doctrine centrée sur la famille, l’Église soutint aisément l’idéal des femmes ménagères, épouses et mères. Le succès du féminisme dans les années 1970 présenta aux femmes de l’Église un ensemble complexe d’attentes et de priorités qui se faisaient concurrence. Les analyses profanes opposaient la réalisation des buts personnels ou l’avancement de la personne au dévouement à la famille; les croyances des saints définissent les deux comme inextricablement entrelacés.
Le décalage entre les croyances religieuses des saints et la base théorique de la société profane met les femmes de l’Église d’aujourd’hui devant un ensemble de dilemmes en ce qui concerne leur rôle. D’une part, la doctrine de l’Église et les exemples historiques d’autres femmes de l’Église leur ont inculqué la double croyance qu’elles doivent développer leurs capacités personnelles et qu’elles doivent centrer leur vie sur leur famille. D’autre part, comme toutes les femmes, elles agissent dans le contexte social général de systèmes juridiques, politiques et économiques dans lesquels ces deux idéaux sont parfois considérés comme s’excluant mutuellement.

Bibliographie
Arrington, Leonard J., et Davis Bitton. "Marriage and Family Patterns." Dans The Mormon Experience: A History of the Latter-day Saints, pp. 185-205. New York, 1979.
Beecher, Maureen et Lavinia F. Anderson, dir. de publ.. Sisters in Spirit: Mormon Women in Historical and Cultural Perspective. Chicago, 1987.
LeCheminant, Ileen Ann Waspe. "The Status of Women in the Philosophy of Mormonism, 1830-1845." Thèse de maîtrise, Brigham Young University, 1942.
Shipps, Jan. Mormonism: The Story of a New Religious Tradition. Chicago, 1985.
Young, Brigham. The Discourses of Brigham Young, dir. de publ. John A. Widtsoe, pp. 194-218. Salt Lake City, 1977.
MARTHA NIBLEY BECK

Femmes, rôle des: Les principes de l’Évangile et le rôle des femmes
Auteurs: SMITH, BARBARA B. et THOMAS, SHIRLEY W.

Le rôle actuel des femmes dans la société mormone est singulier dans la mesure où il est le reflet des enseignements et de la doctrine de l’Église. L’un des plus fondamentaux de ceux-ci est le libre arbitre individuel ou le droit de choisir. Conformément à ce point de doctrine, le rôle d’une femme varie selon sa situation et les choix qu’elle fait dans le contexte des croyances de l’Église; elle peut remplir plusieurs rôles simultanément.
L’une des fonctions des femmes est l’attention constante aux besoins des autres – non seulement la famille mais tous ceux qui sont à la portée de leur aide. La plupart soignent personnellement en période de maladie, de décès ou d’autres crises de la vie, mais souvent elles agissent dans un effort concerté avec d’autres membres de la Société de Secours. «Porter les fardeaux les uns des autres, afin qu'ils soient légers» (Mos. 18:8) est un principe et une attente liés à l’essence même de l’appartenance d’une femme à l’Église (voir Baptême; Fraternité).
Le fait de s’occuper de ceux qui sont dans le besoin amène souvent les femmes à élaborer de meilleures manières de gérer les problèmes et d’acquérir des qualifications spécialisées. Au début de l’histoire de l’Église, les femmes devinrent infirmières, sages-femmes et médecins; certaines fondèrent des hôpitaux et des services pédiatriques, tandis que d’autres créaient des écoles pour les jeunes (voir Deseret Hospital, Maternité et pédiatrie). Elles créèrent également des industries locales, entretinrent des cultures prospères de la soie et mirent sur pied un grand programme d’ensilage de blé (voir Entraide).
La communauté des saints des derniers jours dans les montagnes de l’Ouest, peut-être à cause de la polygamie, peut-être parce que les hommes étaient souvent partis en mission, accordait une indépendance peu commune aux femmes – et une interdépendance parmi les épouses polygames. Ces conditions fournirent à la fois l’impulsion et la possibilité aux femmes d’acquérir une éducation et une formation rares chez les femmes de leur temps. Aujourd’hui, et ce n’est pas moins typique, les femmes de l’Église continuent à aider «à promouvoir et à établir la cause de Sion» (D&A 6:6). Elles prennent soin des pauvres et des malades, font des missions de prosélytisme, d’entraide et humanitaires et instruisent les enfants et les jeunes, réalisant leur contribution au bien-être temporel et spirituel des saints.
Le rôle de compagne est celui qui est le plus souvent attribué aux femmes de l’Église. Adam «commença à cultiver la terre» et «Ève, sa femme travailla aussi avec lui» (Moï. 5:1). Le président Spencer W. Kimball a fait remarquer que les femmes sont «partenaires à part entière» avec les hommes (Kimball, p. 42). Cette compagnie ne se limite pas au partenariat du mari et de la femme mais comprend les femmes qui œuvrent en coopération avec les hommes (par exemple, la prêtrise et la Société de Secours) pour accomplir l’œuvre de l’Église. Depuis le début, «les femmes de l’Église votent côte à côte avec les hommes sur toutes les questions proposées au vote des membres de l’Église… une idée progressiste en 1830 quand aucune femme et peu d’hommes votaient dans les églises et où peu de femmes jouissaient des droits politiques» (History of the Relief Society p. 102).
À la base de ce rôle de compagne il y a l’égalité inhérente des hommes et des femmes suggérée par le récit de la Création: «À l'image de son corps, il créa l'homme et la femme, il les bénit» (Moï. 6:9). Les dons spirituels, les promesses et les bénédictions du Seigneur sont donnés à ceux qui se qualifient, quel que soit leur sexe. La réception des dons spirituels est fonction de l’obéissance, pas du sexe (D&A 46:9-25).
Bruce R. McConkie du Conseil des Douze a souligné l’égalité des hommes et des femmes dans les choses de l’esprit:
«Pour ce qui est des choses spirituelles, comme ce qui concerne tous les dons de l’Esprit, la réception de révélations, l’acquisition d’un témoignage et la réception de visions, pour tout ce qui touche au divin et à la sainteté et qui se réalise en conséquence de la justice personnelle – dans toutes ces choses hommes et femmes se trouvent en situation… d’égalité devant le Seigneur» [Ensign 9, juin 1979, p. 61].
Les ordonnances du temple sont une autre preuve que «dans le Seigneur, la femme n’est point sans l’homme, ni l’homme sans la femme» (1 Co. 11:11).
«Il faut remarquer que les bénédictions les plus élevées qui y sont accessibles [dans le temple] ne sont conférées que conjointement à un homme et à une femme. Ni l’un ni l’autre ne peut les recevoir seul. Dans l’Église du Christ, la femme n’est pas une adjonction à mais une partenaire égale à l’homme» [Widtsoe, p. 373].
Les femmes et les hommes, bien que jouissant d’un statut égal, remplissent certains rôles séparés et différents dans l’œuvre de l’Église. Aux hommes est donnée la responsabilité de détenir la prêtrise avec de nombreux devoirs prescrits. Le rôle des femmes est défini avec moins de précision, bien qu’étant non moins réel. Selon Neal A. Maxwell, du Collège des Douze:
«Nous savons tellement peu de choses sur les raisons de la répartition des devoirs entre femmes et hommes aussi bien qu’entre mères et prêtrise. Ils ont été définis par Dieu à une autre époque et à un autre endroit. Nous sommes habitués à nous concentrer sur les hommes de Dieu parce qu’ils ont la ligne de prêtrise et de leadership. Mais en parallèle avec cette ligne d’autorité, il y a un véritable courant d’influence constructive, reflet des femmes remarquables qui ont existé à toutes les époques et dans toutes les dispensations, y compris la nôtre» [Maxwell, p. 94].
Exerçant une influence bénéfique, les femmes remplissent une foule de tâches dans l’Église: elles président, dirigent et constituent le personnel des organisations pour les femmes (Société de Secours), les Jeunes Filles (jeunes filles) et les enfants (Primaire) aux niveaux paroisse, pieu et général; elles donnent les cours de doctrine de l’Évangile pour les adultes, les jeunes et les enfants; elles dirigent les chœurs et les œuvres théâtrales; elles officient dans les cérémonies de temple; elles sont membres des comités d’entraide à tous les niveaux de l’Église et elles organisent des manifestations culturelles et récréatives auxquelles tous les membres participent.
Les femmes de l’Église accomplissent également des rôles sociaux en tant que médecins, avocats, professeurs, spécialistes en économie domestique, administrateurs, enseignantes, auteurs, secrétaires, artistes et femmes d’affaires. En plus, beaucoup ont des fonctions dans la collectivité, la politique et le bénévolat. Conformément à la croyance des saints que l’endroit où les parents font le plus de bien est dans leur propre foyer et qu’aucune autre activité ne doit avoir la préséance sur leurs préoccupations pour la famille, les membres sont invités à prendre des décisions essentielles en ce qui concerne leur effet sur la famille. Cette priorité de la famille influence inévitablement les attentes en ce qui concerne le rôle des femmes, notamment celui de mère, d’épouse, de ménagère et d’enseignante. On leur apprend dès leur jeunesse à se préparer au mariage et au ménage aussi bien qu’à un métier. Camilla Kimball, épouse de Spencer W. Kimball, a conseillé à chaque fille et à chaque femme: «Qualifiez-vous dans deux métiers: celui de ménagère et celui de vous préparer un gagne-pain en dehors de la maison pour le cas où la situation l’exigerait. Une femme mariée peut devenir veuve sans avertissement…. Elle peut donc se trouver dans la nécessité de gagner elle-même sa vie et d’entretenir ses enfants dépendants» (Ensign 7, mars 1977, p. 59).
Depuis longtemps, les dirigeants de l’Église exhortent les femmes, aussi bien à titre individuel qu’en tant que groupe, à faire toutes les études qu’elles peuvent, à consacrer leur «temps à écrire et à apprendre beaucoup» (D&A 25:8). Les femmes ont été encouragées à faire des études non seulement pour leur propre épanouissement mais également parce que cela contribue à les aider à faire du foyer un lieu d’instruction et de raffinement et pour son importance dans la vie des enfants. Même si la formation et l’éducation peuvent ouvrir beaucoup de perspectives de carrière pour les femmes, le rôle de mère est dominant pour celles qui ont de jeunes enfants et elles sont invitées à utiliser leur formation au profit de leurs enfants.
L’Église n’a pas d’opposition de principe à ce que les femmes travaillent en dehors de la maison et reconnaît leurs apports dans la vie de la société. Marvin J. Ashton du Collège des Douze a expliqué que «la femme doit se sentir libre d’aller sur le marché du travail et au service de la collectivité que ce soit comme salariée ou comme bénévole si elle le souhaite, quand sa situation familiale lui permet de le faire sans que cela empiète sur elle» (Ashton, p. 93). Il est clair que certaines mères sont obligées de travailler pour entretenir leurs enfants, mais on espère qu’autant que possible, les mères avec des enfants dans la maison feront de la maison leur carrière prioritaire.
Toutes les femmes sont des filles de la «glorieuse mère Ève» (D&A 138:39) qui, en tant que «mère de tous les vivants» (Moï. 4:26), a laissé un legs qui est l’héritage de toute femme. Ce rôle dépasse le soin de la famille immédiate. Il décrit une nature et une attitude qui sont fondamentales pour toutes les femmes. Le président Harold B. Lee a exprimé ceci quand il s’est adressé aux femmes de l’Église assemblées au Tabernacle: «Vous, mères de l’Église….» (voir Mère en Israël). Toute femme, quel que soit son statut familial, appel ou métier joue le rôle de quelqu’un qui éduque, encourage, console; qui donne de l’amour et qui protège et préserve la famille.

Bibliographie
Ashton, Marvin J. "Woman's Role in the Community." Dans Woman. Salt Lake City, 1979.
History of the Relief Society, 1842-1966. Salt Lake City, 1966.
Kimball, Spencer W. "Privileges and Responsibilities of Sisters." New Era 9, janvier 1979, p. 42.
Maxwell, Neal A. "The Women of God." Dans Woman. Salt Lake City, 1979.
Widtsoe, John A. "The "Mormon' Women." Relief Society Magazine 30, juin-juillet 1943, pp. 372-375.
BARBARA B. SMITH
SHIRLEY W. THOMAS

Finances de l'Église
Auteurs : EDGLEY, RICHARD et EDLING, WILFORD G.

La force financière de l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours découle principalement de l'engagement de ses membres vis-à-vis du principe scripturaire de la dîme et d'autres formes de contributions et de service volontaires. La collecte et les dépenses de tous les fonds sont soigneusement gérées dans le monde entier selon des procédures standard et sous la supervision directe de la Première Présidence. L'Église a également des investissements et des réserves financières limités dans le cadre de sa stratégie générale pour alimenter des programmes ecclésiastiques de plus en plus étendus. La gestion de tous les fonds est régulièrement apurée conformément à des pratiques financières éprouvées.
Les saints des derniers jours prennent au sérieux le commandement de payer la dîme et les promesses faites par le Seigneur dans l'Ancien Testament :
«Un homme trompe–t–il Dieu ? Car vous me trompez, et vous dites : En quoi t'avons–nous trompé ? Dans les dîmes et les offrandes. Vous êtes frappés par la malédiction, et vous me trompez, la nation tout entière ! Apportez à la maison du trésor toutes les dîmes, afin qu'il y ait de la nourriture dans ma maison ; mettez–moi de la sorte à l'épreuve, dit l'Éternel des armées. Et vous verrez si je n'ouvre pas pour vous les écluses des cieux, si je ne répands pas sur vous la bénédiction en abondance» [Mal. 3:8-10].
Cette loi des finances pour l'Église de Dieu a été réitérée dans les Écritures modernes. En 1838, le Seigneur a souligné cette loi importante dans une révélation donnée au prophète Joseph Smith et a défini la dîme comme étant «annuellement un dixième de tous leurs revenus» (D&A 119:4).
Les années précédant le début du XXe siècle furent financièrement pénibles pour la jeune église en difficulté à cause de la dépression des années 1890 et de la confiscation des fonds de l'Église pendant la longue campagne du gouvernement fédéral contre la polygamie. En mai 1899, Lorenzo Snow, président de l'Église, se rendit, malgré son grand âge, de Salt Lake City à St-George (Utah) pour réconforter les membres dont les terres subissaient une sécheresse catastrophique. Les cours d’eau et les puits étaient asséchés et ils étaient menacés de famine. Pendant cette visite, le président Snow fut inspiré d’évoquer les paroles de Malachie et de promettre aux saints, dans leur situation de grand dénuement, que s'ils payaient une dîme honnête, les «écluses des cieux s’ouvriraient». Les saints l’écoutèrent, la pluie vint et la population fut bénie (Cowan, pp. 15-18).
À partir de cet événement, le principe de la dîme connut une importance renouvelée dans toute l'Église. Les membres réagirent avec un engagement et une foi accrus et, en quelques années, l'Église fut financièrement saine et l’est restée depuis. Par la foi et les sacrifices de ses membres, l'Église a pu faire face à une croissance mondiale régulière. Les saints des derniers jours considèrent le paiement de la dîme comme une bénédiction et parlent souvent des bénédictions spirituelles et financières qui ont découlé de l'obéissance à cette loi.
En plus de payer la dîme, les membres peuvent contribuer à plusieurs fonds spécialement conçus (voir Contributions financières). Le premier dimanche de chaque mois, les membres jeûnent deux repas et donnent, au minimum, l'équivalent en argent de deux repas au fonds d’offrandes de jeûne utilisé exclusivement pour aider les pauvres et les nécessiteux. Le soutien des missionnaires est avant tout une responsabilité familiale. Depuis le 1er janvier 1991, le coût mensuel pour les missionnaires et leurs familles a été normalisé dans le monde entier aux dépenses mensuelles moyennes des missionnaires. Cependant, les membres sont également invités à contribuer pour aider les missionnaires qui ont des finances insuffisantes.
GESTION FINANCIÈRE. La collecte et l’utilisation des fonds se pratiquent selon des procédés de gestion de trésorerie éprouvés. La dîme est donnée à la paroisse ou à la branche locale et est remise à l’administration de l'Église qui a reçu compétence en la matière. Les bureaux interrégionaux et régionaux de par le monde collectent et dépensent les fonds selon les directives des officiers présidents au siège de l’Église.
Les fonds du don de jeûne sont recueillis dans les paroisses où ils sont d'abord utilisés pour prendre soin des nécessiteux de la paroisse. L’excédent des dons de jeûne dont on n’a pas besoin localement est envoyé au siège de l’Église ou aux bureaux interrégionaux. Tous les déficits causés par le soin des pauvres dans l'unité locale sont comblés par les dons de jeûne excédentaires des fonds généraux. C’est ce qui permet à l’évêque local de répondre aux besoins de sa paroisse en matière d'entraide.
Le 8 juillet 1838, le prophète Joseph Smith reçut une révélation précisant la méthode à suivre pour l’utilisation de la dîme reçue par l'Église : «En vérité, ainsi dit le Seigneur, le temps est maintenant venu où leur affectation [des dîmes] sera décidée par un conseil composé de la Première Présidence de mon Église, de l'évêque et de son conseil, et de mon grand conseil» (D&A 120:1).
Plus tard fut créé le Conseil d’Affectation des dîmes, comprenant la Première Présidence de l'Église, le Collège des douze apôtres et l'Épiscopat président. Ce conseil se réunit régulièrement et supervise les dépenses de tous les fonds de l’Église dans le monde entier. Il approuve les budgets et la stratégie financière et définit la politique financière.
Deux sous-comités du Conseil d’Affectation des dîmes sont le Comité du Budget et le Comité d’Allocations. Les deux comités comprennent la Première Présidence, des membres choisis du Collège des douze apôtres et les membres de l'Épiscopat président.
Le Bureau du Budget de l’Église fournit un appui en personnel à la Première Présidence et donne l’orientation administrative générale à la préparation du budget annuel de l’Église. Au début de chaque cycle budgétaire annuel, des directives concernant le budget sont données aux chefs de service des départements administratifs de l’Église, aux bureaux internationaux, aux missions, aux temples et à d'autres unités. C’est en fonction de ces directives que les budgets sont élaborés aux niveaux de responsabilité les plus bas et scrupuleusement passés en revue par les divers niveaux de gestion et de conseils. Le Comité du Budget se réunit périodiquement pour faire un passage en revue approfondi du budget et pour formuler des recommandations en matière de budget au Conseil d’Affectation des dîmes.
Le Comité d’Allocations se réunit chaque semaine. Toutes les demandes de dépense dans le monde entier, à l’exception du petit nombre qui ont été déléguées à un niveau inférieur d'administration par le Conseil d’Affectation des dîmes, sont examinées, vérifiées pour s'assurer que la demande se situe dans le budget et reçoivent leur allocation. Les dépenses qui ont été déléguées font l’objet d’un rapport au comité.
CONTRÔLES FINANCIERS. Les contrôles financiers sont administrés par l'utilisation d’une politique financière, d'une mise au budget, d’une structure d'organisation et d’audits réguliers et complets. La politique financière principale vient du Conseil d’Affectation des dîmes. Des directives de politique et de procédure financières supplémentaires sont publiées par le Département des finances et des registres, lequel, sous la direction de la Première Présidence et de l'Épiscopat président, est responsable des aspects gestion/contrôle de la comptabilité de la trésorerie, de la taxation et de la gestion des risques.
L'Église a un Comité d'audit composé d'hommes d'affaires expérimentés qui ne sont pas associés à l'Église comme employés ou Autorités générales. Ce comité fait directement rapport à la Première Présidence de l'Église et travaille en collaboration étroite avec le Département des finances et des registres et avec le Département des apurements pour garantir le respect strict des principes moraux et des règles et des procédures financières rigides. Le Département d’apurement fait, lui aussi, directement rapport à la Première Présidence de l'Église et conserve ainsi son indépendance par rapport à tous les autres départements. Son personnel d’experts-comptables agréés exécute des audits continus des systèmes financiers, opérationnels et informatiques pour les départements de l’Église et les autres organisations gérées par l’Église. Des réactions à tous les audits sont exigées et un suivi est assuré.
PARTICIPATION ET INVESTISSEMENTS DANS LES ENTREPRISES. La Première Présidence a créé d’autres conseils et comités pour superviser la gestion des investissements et des réserves de l'Église (voir Entreprises: Participation de l’Église dans les entreprises). Chacun de ces comités essentiels est présidé par un membre de la Première Présidence ou par une autre Autorité générale désignée.
Le Comité de la politique d'investissement est présidé par la Première Présidence et inclut le président du Conseil des Douze, d'autres membres des Douze désignés et l'épiscopat président. Son but est de définir la politique et la stratégie d'investissement et de passer en revue les décisions principales d'investissement.
La Deseret Management Corporation (DMC) est une société avec son propre conseil d'administration. DMC fonctionne comme un holding pour la plupart des entreprises commerciales appartenant à l'Église. Ces compagnies payent tous les impôts dont doivent s’acquitter les sociétés commerciales. Certains biens sont également détenus pour des raisons autres que l'investissement. En plus de protéger les environs des propriétés sacrées, ces investissements peuvent être maintenus pour soutenir les efforts ecclésiastiques de l'Église.
L'Église détient toujours quelques propriétés créées à l’origine pour soutenir le commerce dans les communautés des saints (voir Histoire économique de l’Église). Cependant, suite à une évaluation de ces avoirs et de leurs contributions à sa mission, l'Église en a liquidé beaucoup.

Bibliographie
Cowan, Richard O. The Church in the Twentieth Century. Salt Lake City, 1985.
Doxey, Roy W. Tithing: The Lord's Law. Salt Lake City, 1976.
RICHARD EDGLEY et WILFORD G. EDLING

Foi en Jésus-Christ
Auteur : Brinley, Douglas E.

La foi en Jésus Christ est le premier principe de l'Évangile de Jésus-Christ (4e A de F). Celui qui a cette foi croit qu'il est le Fils vivant de Dieu, a confiance en sa bonté et en sa puissance, se repent de ses péchés et suit ses directives. La foi au Seigneur Jésus-Christ naît quand on entend son Évangile (Romains 10:17). Par la foi, on entre par la porte du repentir et du baptême et on reçoit le don du Saint-Esprit, qui mène au mode de vie voulu par le Christ (2 Néphi 31:9, 17-18). Ceux qui répondent sont « vivants dans le Christ à cause de [leur] foi » (2 Néphi 25:25). Parce que la voie de Dieu est la seule voie qui mène au salut, « il est impossible de lui être agréable" sans la foi (Hébreux 11:6). La foi doit précéder les miracles, les signes, les dons de l'Esprit et la justice, car « s’il n'y a pas de foi... Dieu ne peut faire aucun miracle » (Éther 12:12). Le prophète Moroni 2 dans le Livre de Mormon résume ces points :
« Le Seigneur Dieu prépare le chemin pour que le reste des hommes ait foi au Christ, pour que le Saint-Esprit ait place dans leur cœur, selon son pouvoir; et c'est de cette manière que le Père accomplit les alliances qu'il a faites avec les enfants des hommes. Et le Christ a dit: Si vous avez foi en moi, vous aurez le pouvoir de faire tout ce qui est utile en moi. Et il a dit: Repentez-vous, toutes les extrémités de la terre, et venez à moi, et soyez baptisées en mon nom, et ayez foi en moi, afin que vous soyez sauvées » [Moroni 7:32-34].
Bien que dans l’usage courant on parle d’avoir foi dans les gens, les principes ou les choses, dans son sens éternel, la foi existe en Jésus-Christ, et uniquement en lui. Il ne suffit pas d'avoir foi en n'importe quoi : elle soit être axée sur « le seul vrai Dieu et celui qu’il a envoyé, Jésus-Christ » (Jean 17:3). Avoir la foi signifie avoir pleinement confiance que Jésus-Christ seul peut sauver l'humanité du péché et de la finalité de la mort. Par sa grâce, « vous êtes sauvés, par le moyen de la foi » (Éphésiens 2:8). Si « Christ n’est pas ressuscité… votre foi… est vaine » et « vous êtes encore dans vos péchés » (1 Corinthiens 15:14, 17). Faire confiance aux pouvoirs de ce monde, c’est placer sa « confiance dans le bras de la chair » et, en fait, rejeter le Christ et son Évangile (2 Néphi 4:34).
Paul explique : « Or la foi est une ferme assurance des choses qu'on espère, une démonstration de celles qu’on ne voit pas » (Hébreux 11:1). Les mortels doivent vivre par la foi, étant donné que les réalités divines sont voilées à leurs sens physiques. Les vérités invisibles de l'Évangile sont rendues manifestes par l'Esprit Saint et sont visibles dans la vie des gens qui vivent par la foi, suivant les indications quotidiennes de cet Esprit. Bien que la plupart des mortels n'aient pas vu les réalités spirituelles au-delà de ce monde physique, ils peuvent accepter de telles idées dans la foi, sur la base de témoignages spirituels personnels et ce qui a été écrit par les témoins spéciaux des temps anciens et modernes que Dieu a appelés et qui ont vécu personnellement ces réalités.
La vraie foi est la croyance plus l'action. La foi implique non seulement l’assentiment mental ou le fait de savoir que l’on croit mais aussi sa mise en œuvre. La croyance en des choses spirituelles et profanes pousse les gens à agir. Ne pas mettre en application les enseignements et les commandements du Christ c’est faire preuve d'absence de foi en lui. La foi en Jésus-Christ oblige les gens à agir au nom du Christ, à suivre son exemple, à faire ses œuvres. Jésus a dit : « Ceux qui me disent : Seigneur, Seigneur ! n’entreront pas tous dans le royaume des cieux ; mais celui-là seul qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux » (Matthieu 7:21; italiques ajoutés). Jacques souligne en outre que « la foi : si elle n’a pas les œuvres, elle est morte en elle-même. Mais quelqu’un dira : Toi, tu as la foi ; et moi, j’ai les œuvres. Montre-moi ta foi sans les œuvres, et moi, je te montrerai la foi par mes œuvres » (Jacques 2:17-18; Voir aussi Grâce).
La justice conduit à une plus grande foi, tandis que le péché et la méchanceté diminuent la foi. « Le juste vivra par sa foi » (Habacuc 2:4). Quand on viole les commandements de Dieu, on subit une perte de l'Esprit du Seigneur et une perte de la foi, car la foi en Jésus-Christ est incompatible avec la désobéissance. Le prophète Alma 2 du Livre de Mormon caractérise les paroles du Christ comme une semence qui est testée quand on la sème dans son cœur et qu’on la nourrit. Si l’on désire voir la semence grandir, on doit lui laisser de la place et la nourrir avec sa foi. Si c'est une bonne semence, elle va gonfler et pousser, et on saura qu’elle est bonne. Par contre, si l’on néglige la semence, elle va dépérir. Mais si l’on « nourri[t] la parole... par [sa] foi, avec grande diligence », elle deviendra un arbre de vie et on goûtera son fruit, qui est la vie éternelle (Alma 32:26-43).
La foi peut être nourrie et renouvelée par l'étude des Écritures, la prière et des œuvres compatibles avec les commandements de l'Évangile. Parce que ceux qui agissent selon leur foi, se repentent et sont baptisés reçoivent la rémission des péchés, ils ont des raisons d'espérer en la vie éternelle (Moroni 7:41). Avec cet espoir, leur foi en Jésus-Christ inspire davantage les gens à se servir les uns les autres dans la charité, tout comme le Christ l’aurait fait (Moroni 7:44), car « le but du commandement, c’est la charité… d’une foi sincère » (1 Timothée 1:5). « La charité est l'amour pur du Christ, et elle subsiste à jamais » (Moroni 7:47). Ainsi, la foi, ou la « constance dans le Christ », permet aux hommes de persévérer jusqu'à la fin en continuant dans la foi et la charité (2 Néphi 31:20; 1 Timothée 2:15; D&A 20:29). La vraie foi est durable et conduit à l'assurance que les efforts que l’on fait ne sont pas passés inaperçus et que Dieu est satisfait de l’attitude que l’on a et de l’effort que l’on fait pour mettre en application les principes de l'Évangile de Jésus-Christ dans sa vie personnelle.
Si Alma a expliqué comment la foi mène à la connaissance, les commentaires faits dans l’Église moderne font aussi remarquer comment certains types de connaissance fortifient la foi (MD, p. 261-267). La connaissance que Dieu existe, la compréhension correcte de sa personnalité et l’assurance qu'il approuve notre conduite peuvent aider notre foi à « devenir parfaite et féconde, abondant en justice » (« Lectures on Faith », p. 65-66).
Le rétablissement de l'Évangile dans les temps modernes a été déclenché par un acte de foi de la part du jeune Joseph Smith. En lisant la Bible, il a été frappé par l'encouragement de Jacques à tous ceux qui manquent de sagesse à demander « avec foi, sans douter » (Jacques 1:6). Les visions qu’il a reçues en réponse à ses prières (voir Visions de Joseph Smith) sont la preuve que les prières sont « exaucées selon [sa] foi » (Mosiah 27:14). Si Dieu prend plaisir à bénir ses enfants, il lui faut « d’abord… éprouver leur foi... alors les choses qui sont plus grandes leur seront manifestées » (3 Néphi 26:9). Mais il n’y aura « de témoignage qu'après la mise à l'épreuve de votre foi » (Éther 12:6), ou : « sans la foi, tu ne peux rien faire » (D&A 8:10 ). « Les signes viennent par la foi, non par la volonté des hommes » (D&A 63:10).
Parce que la foi implique que le Saint-Esprit guide les gens, elle les mène par une main invisible à « l'unité de la foi » (Éphésiens 4:13). Par la force des autres et une confiance accrue dans la façon de faire du Seigneur, la foi constitue un bouclier contre l'adversaire (Éphésiens 6:16). De même, la foi a été décrite comme faisant partie de notre armure, agissant comme une « cuirasse de la foi et de la charité » (1 Thessaloniciens 5:8) pour protéger les fidèles contre le mal.


Bibliographie
Benson, Ezra Taft. The Teachings of Ezra Taft Benson, p. 65-69. Salt Lake City, 1988.
Kimball, Spencer W. Faith Precedes the Miracle. Salt Lake City, 1973.
“Lectures on Faith”. Dans The Lectures on Faith in Historical Perspective, dir. de publ. L. Dahl et C. Tate, p. 29-104. Provo, Utah, 1990.
DOUGLAS E. BRINLEY

Fondamentalistes


L’expression « fondamentalisme mormon » désigne les croyances et les pratiques de groupes schismatiques contemporains qui prétendent suivre tous les enseignements de Joseph Smith, le prophète. Ils se disent souvent croyants en la « plénitude de l’Évangile », ce qui, selon eux, doit inclure le mariage plural et parfois l’ordre uni.
Le mouvement fondamentaliste a commencé après la publication du Manifeste de 1890, qui déclarait publiquement la fin officielle du mariage plural dans l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours. Les années 1890 à 1904 furent, pour certains, une période de confusion concernant l’application et l’étendue de l’interdiction de nouveaux mariages pluraux dans l’Église. Par exemple, du fait que le Manifeste parlait de mariages allant « à l’encontre des lois du pays », certains estimaient que l’interdiction ne s’appliquait pas à l’extérieur des États-Unis. Pour cette raison, le Manifeste fut, en 1904, proclamé officiellement et publiquement d’application mondiale.
À la suite de cette deuxième proclamation, des fondamentalistes récalcitrants continuèrent d’affirmer que Dieu exige de tous les « vrais » croyants qu’ils respectent le principe de la polygamie sans tenir compte des décisions de l’Église. Cette insistance a séparé les fondamentalistes du mormonisme traditionnel. Dans les années 1820, Lorin C. Woolley, de Centerville (Utah), prétendit que Dieu l’avait autorisé à perpétuer le mariage plural, disant qu’il avait reçu cette connaissance en 1886, dans sa jeunesse, par le ministère de Jésus-Christ, de John Taylor et de Joseph Smith. Cette affirmation ne fit que renforcer l’opposition entre les fondamentalistes et l’Église.
Certains fondamentalistes des années 1920 rejetèrent les prétentions de Woolley à l’autorité et partirent de leur côté. Charles Kingston s’installa à Bountiful (Utah) et y fonda une communauté du type ordre uni qui existe encore sous la forme d’une société relativement fermée. Alma Dayer LeBaron alla s’installer à Mesa (Arizona) puis à Juarez (Mexique) et jeta les bases de l’Église du Premier-né de la Plénitude des Temps et de ramifications telles que l’Église de l’Agneau de Dieu. Au fil des années, d’autres fondamentalistes sont apparus avec des prétentions religieuses diverses.
En dépit de ces défections, la majorité des fondamentalistes sont restés un groupe organisé, obtenant un nombre d’adhérents réduit mais constant. Au milieu des années 1930, une colonie d’ordre uni fut fondée dans une localité isolée près de la frontière entre l’Utah et l’Arizona appelée Short Creek, aujourd’hui Colorado City (Arizona). Les propriétés étaient détenues par des administrateurs appelés l’Effort Uni. Cette colonie est devenue un havre pour beaucoup de fondamentalistes, bien que la majorité de leurs partisans résident toujours dans la région de Salt Lake City.
Au milieu des années 1940, les forces de police de l’Utah et de l’Arizona lancèrent un raid contre la communauté de Short Creek et brisèrent les familles polygames, mettant les maris en prison et les enfants dans des familles d’accueil. Les dirigeants fondamentalistes restèrent en prison jusqu’au 24 septembre 1945 (cinquante-cinquième anniversaire du Manifeste de Woodruff) quand ils publièrent une déclaration publique indiquant leur intention de cesser d’ignorer la loi du pays. Ils retournèrent auprès de leurs familles et s’abstinrent un certain temps de violer la loi.
Quelques années plus tard se produisit un schisme majeur dans le groupe de Colorado City au sujet de la question de l’autorité de la prêtrise et du droit de gouverner. Joseph Musser (le dirigeant ostensible du groupe), Rulon Allred, ses frères et quelques autres se détachèrent et fondèrent leur propre groupe qui atteint maintenant les deux mille membres par des conversions et des naissances et s’appelle aujourd’hui les Frères apostoliques Unis. En 1976, Rulon Allred, alors dirigeant du groupe, fut assassiné, manifestement par une épouse plurale d’Ervil LeBaron, de l’Église de l’Agneau de Dieu. Owen Allred remplaça son frère à la tête du groupe. Le groupe de Colorado City se réorganisa avec Leroy Johnson comme chef et était, en 1990, un des plus grands groupes fondamentalistes, avec des milliers de membres. À la mort de Johnson (25 novembre 1986 à Hilldale, Utah), il y eut une lutte pour le pouvoir ; les schismes continuent au sein du groupe de Colorado City pour des questions d’autorité et de droits de propriété.
Les fondamentalistes affirment croire aux quatre ouvrages canoniques, à l’histoire des débuts de l’Église et aux prophètes du Rétablissement jusque et y compris John Taylor. La doctrine fondamentaliste, en ce qui concerne la présidence de la prêtrise, découle d’une interprétation particulière de la section 84 des Doctrine et Alliances, laquelle, prétendent-ils, parle d’un conseil de prêtrise ou hiérarchie de sept hommes désignés comme apôtres « grands prêtres ». Diverses prétentions à la succession ont conduit aux schismes actuels dans ces groupes. Beaucoup de fondamentalistes indépendants croient que les prétentions à l’autorité des deux groupes principaux sont infondées ; par conséquent ils croient et vivent séparément de ces groupes.
Le lien qui unit tous les fondamentalistes est leur croyance que l’Église a changé, alors qu’elle n’en avait pas le droit, des points de doctrine et des pratiques. Un fondamentaliste indépendant a publié un livre où il fait la liste de quatre-vingt-quinze soi-disant changements, imitant ainsi les quatre-vingt-quinze thèses de Martin Luther. Parmi ces critiques, il y a notamment l’abrogation du mariage plural, l’abandon de l’ordre uni, la prétendue perte de la révélation à l’Église depuis 1890, la soi-disant perte des clefs de la prêtrise due à l’abandon de la pratique du mariage plural, la répudiation supposée de la « vraie » connaissance de la Divinité, des changements de méthode dans l’œuvre missionnaire (le fait de ne pas prêcher sans bourse ni sac), la corruption des vêtements et des ordonnances du temple, l’arrêt du rassemblement d’Israël en Utah, le changement de la façon de conférer la prêtrise et le fait que l’on permet à tous les hommes dignes de détenir la prêtrise quelle que soit la race.

Bibliographie
Anderson, J. Max. The Polygamy Story : Fiction and Fact. Salt Lake City, 1977.
Kraut, Ogden. Ninety-Five Theses. Dugway, Utah, n. d.
Truth Magazine, Salt Lake City, 1935-1956.
J. MAX. ANDERSON


Franc-maçonnerie à Nauvoo
Auteur: GODFREY, KENNETH W.

L'introduction de la franc-maçonnerie à Nauvoo eut des implications politiques et religieuses. Quand il se rendit à Nauvoo le 15 mars 1842 pour y installer la loge maçonnique, Abraham Jonas, Grand Maître de l’Illinois inaugura une période de difficultés avec les autres francs-maçons de l'Illinois et présenta à Nauvoo un rituel antique ayant une certaine ressemblance avec les ordonnances du temple (voir Franc-maçonnerie, la, et le temple).
La procédure maçonnique habituelle exige qu’une loge existante patronne chaque nouvelle loge proposée. Au début de l’été de 1841, plusieurs saints des derniers jours qui étaient francs-maçons, notamment Lucius N. Scovil, personnage-clef dans la franc-maçonnerie de Nauvoo, demandèrent à la loge Bodley n° 1, à Quincy (Illinois), de proposer que la Grande Loge d'Illinois nomme certaines personnes comme officiers d'une loge à Nauvoo. Faisant remarquer que les personnes mentionnées étaient inconnues à Quincy comme francs-maçons, la loge renvoya la lettre avec des instructions sur ce qu’il convenait de faire.
Moins qu'un an plus tard, Nauvoo avait une loge sans le patronage normal. Apparemment le Grand Maître Jonas avait écarté la règle et accordé à Nauvoo «une dispense spéciale» pour s’organiser. Il fit aussi Joseph Smith et son conseiller, Sidney Rigdon, «francs-maçons à vue». Certains croient que Jonas était disposé à agir ainsi parce qu'il voyait le vote mormon croissant soutenir ses propres ambitions politiques (voir Politique à Nauvoo). Si ce geste lui valut la faveur de certains saints des derniers jours, il lui mit à dos d'autres francs-maçons. Joseph Smith avait des raisons d’espérer que les saints pourraient tirer bénéfice du réseau d'amitié et de soutien qui est normalement le fait de cette organisation fraternelle, mais au lieu de cela, la loge de Nauvoo ne fit que causer des frictions.
Jonas publia dans son journal, Columbia Advocate, le récit de l'installation, le 15 mars, de la loge de Nauvoo. «Jamais de ma vie je n’ai vu une assemblée mieux habillée ou plus ordonnée et plus polie», écrivit-il (HC 4:565-66). Pendant la cérémonie d'installation, tenue dans le bosquet près de l'emplacement du temple, Joseph Smith officia comme Grand Aumônier. Ce soir-là, les francs-maçons étant rassemblés dans son bureau, le prophète reçut le premier degré de la franc-maçonnerie. Les francs-maçons de Nauvoo commencèrent alors les réunions matinales hebdomadaires.
En août 1842, la loge Bodley n° 1 protesta contre l'octroi d'une dispense à la loge de Nauvoo, ce qui eut pour résultat la suspension provisoire des activités. Une enquête fit apparaître que quelque trois cents saints des derniers jours étaient devenus francs-maçons pendant la brève existence de la loge, mais ne découvrit aucune irrégularité justifiant sa dissolution. La Grande Loge non seulement autorisa le rétablissement de la loge de Nauvoo mais accorda plus tard des dispenses pour d'autres loges voisines composées principalement de saints des derniers jours. Finalement près de 1.500 saints devinrent associés à la franc-maçonnerie d'Illinois, notamment beaucoup de membres des conseils dirigeants de la prêtrise de l'Église – et cela à une époque où le nombre total de francs-maçons non mormons des loges d'Illinois atteignait à peine 150.
Rivaux de longue date de Nauvoo pour l'ascendant politique et économique, les francs-maçons voisins craignaient la domination mormone de la franc-maçonnerie et y résistèrent. Accusant la Loge de Nauvoo de voter pour plus d'un candidat à la fois, de recevoir les candidats dans la fraternité sur la base qu'ils se corrigeraient à l'avenir et de faire Joseph Smith Maître Maçon à vue, les ennemis imposèrent une enquête en octobre 1843. La Grande Loge convoqua les officiels de Nauvoo à Jacksonville (Illinois). Armés des livres et des papiers pertinents, Lucius Scovil et Henry G. Sherwood répondirent aux allégations. Tout en faisant rapport que tout semblait être en règle, le comité examinateur exprima la crainte qu'il pourrait y avoir quelque chose de pas correct et recommanda une suspension d'un an. À ce moment-là, le Grand Maître Jonas, dans un discours passionné, déclara que les livres de la Loge de Nauvoo étaient les mieux tenus qu’il eût jamais vus et exprima sa conviction que s’il n’y avait pas le fait que la Loge de Nauvoo était composée de mormons, elle serait la plus haute loge de l'état. Un comité fut nommé pour faire une enquête approfondie à Nauvoo. Le comité ne signala aucun méfait; néanmoins la Loge de Nauvoo fut de nouveau suspendue. L'injonction fut retirée plus tard, mais la Loge de Nauvoo continua à être privée du soutien des autres francs-maçons.
En avril 1844, la Loge de Nauvoo dédia une nouvelle salle maçonnique. Entre-temps, la loge avait été scindée de la Grande Loge et un franc-maçon d'Illinois avait été expulsé de sa loge pour avoir assisté à la dédicace. La Loge de Nauvoo continua ses activités dans le bâtiment nouvellement construit jusqu'au 10 avril 1845, quand Brigham Young recommanda à Lucius Scovil de suspendre le travail des francs-maçons à Nauvoo. Il n’y eut que quelques réunions supplémentaires avant le départ des saints des derniers jours en 1846 pour le Grand Bassin.
Joseph Smith n’eut qu’une participation minime à la franc-maçonnerie et, autant que l’on sache, n’assista que trois fois aux réunions de la loge maçonnique de Nauvoo. Néanmoins, les francs-maçons mormons affirmèrent qu’il maîtrisait ses ordres, sa doctrine et ses principes et qu’il comprenait le symbolisme allégorique de ses instructions.
La plupart des spécialistes qui ont examiné soigneusement la loge maçonnique de Nauvoo conviennent qu’elle fut plutôt victime que coupable. Tous conviennent que ce furent les sentiments anti-mormons généralisés et la haine intense des saints des derniers jours que leur vouaient leurs rivaux locaux, et non les irrégularités ou la mauvaise conduite qui causèrent la polémique concernent la loge maçonnique de Nauvoo.

Bibliographie
Hogan, Mervin B. "Mormonism and Freemasonry: The Illinois Episode". Dans Little Masonic Library, dir. de publ. Silas H. Shepherd, Lionel Vibert et Roscoe Pound, Vol. 2, pp. 267-326. Richmond, Va., 1977.
Ivins, Anthony W. The Relationship of "Mormonism" and Freemasonry. Salt Lake City, 1934.
McGavin, E. Cecil. Mormonism and Masonry. Salt Lake City, 1954.
KENNETH W. GODFREY

Franc-maçonnerie, et le temple
Auteur : GODFREY, KENNETH W.

Ceux qui étudient et le mormonisme et la franc-maçonnerie ont réfléchi aux rapports possibles entre le rite maçonnique et la cérémonie du temple. Bien que certains prétendent que Joseph Smith a emprunté des éléments à la franc-maçonnerie quand il a élaboré la cérémonie du temple, la Dotation est plus proche des Écritures modernes (particulièrement du livre d'Abraham et du livre de Moïse) et des rituels antiques que de la franc-maçonnerie. Les saints des derniers jours considèrent les ordonnances comme le rétablissement révélé de cérémonies antiques du temple et qu’elles sont seulement accessoirement apparentées à la franc-maçonnerie. Les deux ne sont cependant pas antithétiques ni ne se menacent réciproquement et aucune des deux institutions ne s’oppose aux recherches concernant les origines antiques de leurs deux cérémonies.
Il y avait beaucoup de cérémonies sacrées dans le monde antique. Modifiés au cours des siècles, ces rituels ont existé sous une certaine forme chez les anciens Égyptiens, les chrétiens coptes, les Israélites et les francs-maçons et dans les liturgies catholique et protestante. Ils ont comme éléments communs le port de vêtements spéciaux, des termes ritualistes, la présentation théâtralisée de thèmes archétypaux, des instructions et l'utilisation de gestes symboliques. Un thème commun à beaucoup – que l’on trouve dans le Livre des Morts égyptien, les Textes égyptiens des Pyramides et les cercles de prière coptes, par exemple – est le voyage de l'homme à travers la vie et ses efforts, après la mort, pour passer avec succès devant les sentinelles gardant l'accès au bonheur éternel avec les dieux. Bien que ces cérémonies varient considérablement, les points importants qu’elles ont en commun soulèvent la possibilité d'une source commune lointaine.
Les textes égyptiens des pyramides, par exemple, comportent six thèmes principaux : (1) l’insistance sur l’existence d’un document écrit originel derrière les rites ; (2) la purification (notamment l’onction, la lustration et l’habillement) ; (3) la création (textes de résurrection et de réveil) ; (4) le jardin (comprenant les motifs de l’arbre et du repas rituel) ; (5) le voyage (protection, passeur et textes osiriens) ; et (6) l’ascension (notamment victoire, couronnement, admission dans la compagnie céleste et textes de Horus). Comme ces anciennes cérémonies, la dotation du temple chez les saints des derniers jours présente des aspects de ces thèmes en termes figuratifs. Elle aussi présente, non pas une image de la réalité immédiate, mais un modèle montrant le schéma de la vie humaine sur terre et le plan divin dont elle fait partie.
Les cérémonies maçonniques sont également allégoriques, représentant les étapes de la vie : la jeunesse, l’âge adulte et la vieillesse – chacune avec les fardeaux et les difficultés qui l’accompagnent, suivies de la mort et de l'immortalité espérée. Il n'y a pas d’accord universel sur le point de savoir quand la franc-maçonnerie a commencé. Certains historiens font remonter l'origine de l'ordre à Salomon, à Hénoc ou même à Adam. D'autres affirment que même si une partie du symbolisme maçonnique peut être ancien, la franc-maçonnerie en tant qu’institution a commencé au Moyen-Âge ou plus tard.
Bien que dans notre dispensation la Dotation chez les saints date de Kirtland et de Nauvoo (voir Temple de Kirtland ; Temple de Nauvoo), les saints des derniers jours croient que les ordonnances du temple sont aussi anciennes que l'homme et que l’essentiel de l'Évangile de Jésus-Christ, notamment son rituel et ses enseignements nécessaires, a été révélé pour la première fois à Adam. Ces principes et ordonnances salvateurs ont été plus tard révélés à Seth, à Noé, à Melchisédek, à Abraham et à chaque prophète à qui la prêtrise a été donnée, notamment à Pierre. Les saints des derniers jours croient que les ordonnances accomplies dans les temples modernes reproduisent aujourd'hui des rituels qui faisaient partie des enseignements de Dieu dès le commencement.
Pour le prophète Joseph Smith, la Dotation chez les saints et la franc-maçonnerie découlent en partie de la même source antique. Ainsi, certains francs-maçons de Nauvoo pensaient que la Dotation était le rétablissement d'un rituel qui n’était conservé qu’imparfaitement dans la franc-maçonnerie et considéraient Joseph Smith comme maître des principes et du symbolisme allégorique sous-jacents (Heber C. Kimball à Parley P. Pratt, 17 juin 1842, archives de l'Église). La philosophie et les enseignements principaux de la franc-maçonnerie ne sont pas fondamentalement incompatibles avec l'enseignement, la théologie et la doctrine des saints des derniers jours. Les uns et les autres mettent l’accent sur la moralité, le sacrifice, la consécration et le service, et condamnent l'égoïsme, le péché et la cupidité. En outre, le but du rituel maçonnique est d’enseigner – de rendre la vérité accessible pour que l'homme puisse la suivre.
Les ressemblances entre les deux rituels sont limitées à une petite proportion d'actions et de mots ; en fait, certains trouvent que la Dotation des saints des derniers jours a plus de similitudes avec les Textes des Pyramides et les documents coptes qu'avec la franc-maçonnerie. Même là où les deux rituels partagent le symbolisme, le contenu des significations est différent. En plus des thèmes de la création et de la vie, une ressemblance est que l’un et l’autre demandent que les participants fassent des alliances. Cependant, seule la Dotation rattache les alliances à des bénédictions éternelles et à Jésus-Christ. La cérémonie maçonnique ne met pas l’accent sur la prêtrise ni sur la nécessité d'être mandaté par Dieu pour le représenter. La participation active de Dieu dans le monde et dans la vie des hommes est distinctement un motif du temple. Tandis que les francs-maçons croient en un Dieu non défini et impersonnel, tout dans la Dotation chez les saints émane de Dieu ou est dirigé vers Dieu qui est un personnage et le Père éternel de l'homme. La Dotation vise les éternités et les vies éternelles, mais la franc-maçonnerie est terre à terre, imprégnée de légendes humaines et de l’espérance de quelque chose de mieux.
La franc-maçonnerie est une société fraternelle et dans son rituel toutes les promesses, tous les serments et conventions se font entre les membres. Dans la Dotation du temple toutes les alliances sont entre l'individu et Dieu. Dans la franc-maçonnerie, la mise à l’épreuve, l’évaluation, la pénalisation ou la condamnation sont en accord avec les règles de la fraternité ou les votes des membres. Dans la Dotation, Dieu seul est le juge. Dans la franc-maçonnerie, le rang et les promotions ont une grande importance, alors que dans les rites du temple il n'y a aucune distinction : tous les participants sont égaux devant Dieu. Le conflit entre le bien et le mal, notamment le rôle de Satan, est essentiel et est représenté de manière frappante dans la Dotation, mais est essentiellement absent dans les rites maçonniques. Les cérémonies du temple mettent l’accent sur le salut pour les morts par les ordonnances par procuration, comme le baptême pour les morts ; rien dans le rituel maçonnique ne prévoit que des représentants agissent au nom des morts. Les femmes participent à tous les aspects des rites du temple; bien que la franc-maçonnerie ait des auxiliaires pour les femmes, le rituel maçonnique les exclut. L'inclusion des femmes dans la Dotation met l’accent sur ce qui est sans doute la différence la plus fondamentale entre les deux rites : Les rites du temple chez les saints unissent maris et femmes et leurs enfants en des familles éternelles (voir Vies éternelles, Accroissement éternel ; Mariage). Les scellements chez les saints des derniers jours seraient complètement déplacés dans le contexte des cérémonies maçonniques.
Ainsi, les saints des derniers jours considèrent leurs ordonnances du temple comme fondamentalement différentes des rituels maçonniques et autres et voient dans les ressemblances des restes d'un original antique.

Bibliographie
Ivins, Anthony W. The Relationship of "Mormonism" and Freemasonry. Salt Lake City, 1934.
Madsen, Truman G., dir. de publ. The Temple in Antiquity. Provo, Utah, 1984.
Nibley, Hugh W. The Message of the Joseph Smith Papyri: An Egyptian Endowment. Salt Lake City, 1975.
Packer, Boyd K. Le Temple sacré. Salt Lake City, 1980.
Shepherd, Silas H., Lionel Vibert et Roscoe Pound, dir. de publ. Little Masonic Library, 5 vols. Richmond, Va., 1977, sp. Mervin B. Hogan, "Mormonism and Freemasonry: The Illinois Episode," Vol. 2, pp. 267-326.
KENNETH W. GODFREY

Grâce
Auteur: HAFEN, BRUCE C.

L’un des sujets les plus controversés de la théologie chrétienne est le point de savoir si le salut est le don gratuit d’une grâce imméritée ou si on le gagne par de bonnes œuvres. La déclaration de Paul que «l’homme est justifié par la foi, sans les œuvres de la loi» (Ro. 3:28) est fréquemment citée à l’appui du premier point de vue, tandis que l’on cite souvent la déclaration de Jacques que la «foi sans les œuvres est morte» (Ja. 2:20) en faveur de l’autre. La révélation moderne, selon laquelle le salut nécessite et la grâce et les œuvres, est une réconciliation de bon sens de ces prises de position contradictoires.
C.S. Lewis a écrit à propos de ce conflit: «Pour moi, c’est comme si l’on demandait quelle est la branche d’une paire de ciseaux qui est la plus nécessaire» (p. 129). Et d'une manière ou d'une autre presque toutes les confessions chrétiennes acceptent finalement le besoin de grâce et d'œuvres, mais les divergences en matière de signification et d'importance parmi les diverses traditions doctrinales demeurent substantielles.
Pour ce qui est de l’interaction entre la grâce et les œuvres, la doctrine de l’Église a une conception qui lui est propre non seulement en ce qui concerne ces notions mais aussi en ce qui concerne la nature de l'homme, la chute d'Adam, l'Expiation et le processus du salut. En même temps, le point de vue des saints contient des idées qui sont semblables aux éléments de base de certaines autres traditions. Par exemple, le précepte de l’Église qui veut que des oeuvres telles que les ordonnances soient accomplies par l'autorité appropriée de la prêtrise ressemble à l'enseignement catholique que la grâce passe obligatoirement par ses sacrements. D’autre part, l’accent mis par les saints sur le caractère indispensable de la foi personnelle et du repentir dans une relation directe avec Dieu fait écho aux enseignements protestants traditionnels. La position de l’Église «n'est pas un éclectisme commode, mais le retour [par le Rétablissement] à une compréhension du Nouveau Testament qui réconcilie Paul et Jacques» (Madsen, p. 175).
On pourrait penser que l'accent que l'Église met sur la responsabilité personnelle et la nécessité d'une obéissance obtenue par de la discipline de soi diminue le rôle de la grâce du Christ; cependant, pour des saints des derniers jours, l'obéissance n’est qu’une branche de la paire de ciseaux. L’ensemble de la théologie de l’Église reproduit également la thèse principale du Livre de Mormon que sans la grâce il n’y a pas de salut: «Car nous savons que c'est par grâce que nous sommes sauvés, après tout ce que nous pouvons faire» (2 Né. 25:23). La source de cette grâce est le sacrifice expiatoire de Jésus-Christ: «La miséricorde est accordée à cause de l'expiation» (Alma 42:23).
Les enseignements de la théologie chrétienne depuis le Moyen-Age sont enracinés dans la croyance que, principalement à cause des effets de la Chute et du péché originel, la nature humaine est intrinsèquement mauvaise. Dans les traditions catholique et protestante, seule la grâce de Dieu peut vaincre ce mal naturel. Divers auteurs chrétiens ont débattu de la mesure dans laquelle l'octroi de la grâce surmonte complètement la nature perverse de l'homme. Au cinquième siècle, reflet de sa lutte personnelle contre ce qu'il considérait être sa nature intrinsèquement mauvaise, Augustin voyait dans la grâce le seul moyen d’échapper au mal que constituaient les plaisirs terrestres et à l'influence de la «cité [profane] de l'homme». Au treizième siècle, Thomas d’Aquin était plus optimiste, reconnaissant la blessure grave provoquée par le péché originel, mais défendant aussi le potentiel naturel de l'homme de faire le bien.
Au début du seizième siècle, Martin Luther, suite à sa lecture de Paul et en réaction à la vente des indulgences, conclut que la foi, don unilatéral de Dieu à des individus choisis, était la vraie source de la grâce et, en conséquence, de la justification devant Dieu. Luther mit ainsi (peut-être involontairement) fin au contrôle de l'Église médiévale sur la grâce, libérant de ce fait la force politique de la réforme protestante. Pour Luther, l’effort individuel de l’homme ne peut en aucune façon «gagner» ou faire autrement partie de la justice infusée par la grâce. Même les bonnes oeuvres démontrées par une vie d'obéissance à Dieu ne sont que les effets visibles de la grâce. Cette idée a plus tard influencé le développement de l'éthique puritaine. Jean Calvin, le contemporain de Luther, élabora une doctrine complète de la prédestination basée sur l'idée de Luther que Dieu choisit unilatéralement ceux à qui il accorde les dons de la foi et de la grâce.
La réponse catholique au défi de Luther rejeta la prédestination et réaffirma que la grâce passe par les sacrements de l’Église et que la grâce ne peut pas écarter totalement le libre arbitre humain. En même temps, la pensée catholique soulignait la préséance de l'initiative de Dieu. La «grâce prévenante» agit sur la volonté humaine avant qu'on se tourne vers Dieu; cependant, une fois touché par la grâce, on est toujours libre de coopérer ou pas. L'interaction entre la grâce divine et la liberté humaine n'est pas totalement claire; cependant, la grâce augmente quand on obéit aux commandements de Dieu et la grâce élève les bonnes oeuvres naturelles de l’homme à des actes de la valeur surnaturelle dans un processus de régénération spirituelle.
Ces dernières années, certains théologiens protestants se sont attaqués à l’idée que l’accent mis exclusivement sur la grâce en dehors de tout mérite détruit le sens de la responsabilité personnelle. Dietrich Bonhoeffer, par exemple, a condamné l'idée «de la grâce bon marché» qui suppose à tort que parce que «la facture a été payée à l'avance… on peut tout avoir pour rien» (The Cost of Discipleship, 1963, p. 45). John MacArthur s’inquiétait de ce que l'évangélisme contemporain promet aux pécheurs qu'ils «peuvent avoir la vie éternelle tout en continuant à vivre dans la rébellion contre Dieu» (The Gospel According to Jesus, 1988, pp. 15-16). Et Paul Holmer a écrit que mettre l’accent sur les dangers des œuvres «n’est pas indiqué si les auditeurs n’essaient même pas! La plupart des auditeurs à l’église ne risquent pas beaucoup d’arriver au ciel par leur travail» («Law and Gospel Re-examined» Theology Today 10, 1953-1954, p. 474).
Certains saints des derniers jours se sont également préoccupés des limites que l’on s’impose quand on se range d’un côté seulement dans la controverse concernant la grâce et les œuvres, tout comme ils partagent les préoccupations catholiques concernant une doctrine de la grâce qui sape la nature fondamentale du libre arbitre. Pour les saints des derniers jours, les écrits de Paul sur l'insuffisance des œuvres et «des œuvres de la loi» (Ro. 3:27-28) concernent principalement l'insuffisance des œuvres rituelles de la loi de Moïse, «qui avait été remplacées par les exigences supérieures de l'Évangile [de Jésus-Christ]»; ainsi, Paul considérait à juste titre que «les formes et les cérémonies extérieures» de la loi de Moïse étaient «des oeuvres non essentielles» (AF, p. 146). Comme le prophète Abinadi le dit dans le Livre de Mormon (v. 150 av. J.-C.), «le salut ne vient pas par la loi seule; et s'il n'y avait pas l'expiation, que Dieu lui-même fera pour les péchés et les iniquités de son peuple, il devrait périr, malgré la loi de Moïse» (Mos. 13:28).
Dans un sens plus large, l’attachement des saints au rôle primordial de la grâce, tout en soulignant parallèlement l'autonomie, provient d'une vision doctrinale particulière de la nature et du destin de l'homme. Comme le fait remarquer John Dillenberger, spécialiste de la Réforme, «en mettant l’accent sur les possibilités humaines, le mormonisme a mis les choses au point, non pas en renonçant à la place centrale de la grâce mais en insistant sur le fait que [les vrais] pouvoirs de l'humanité… reflètent l'état réel de l'humanité en tant que telle… Le mormonisme a rendu compréhensible ce qui était devenu un problème insoluble au sein de l'évangélisme: comment réconcilier le nouveau pouvoir de l'humanité avec les idées négatives héritées concernant l'humanité, sans abandonner la nécessité de la grâce.» De cette façon, conclut Dillenberger, «c’est peut-être le mormonisme… qui est la théologie américaine authentique, parce que l'autonomie des groupes revivalistes fondamentalistes faisait un contraste marqué avec la notion de misère de l'humanité dont ils avaient hérité» (p. 179).
Dans les enseignements de l’Église, la chute d'Adam rend la rédemption du Christ nécessaire, mais pas parce que la Chute en elle-même a rendu l'homme mauvais. À cause de la transgression, Adam et Ève ont été expulsés d'Éden vers un monde sujet à la mort et aux influences mauvaises. Cependant, le Seigneur a révélé à Adam, à son entrée dans la condition mortelle, que «le Fils de Dieu a expié la faute originelle»; les enfants d'Adam n'étaient donc pas mauvais, mais étaient «purs dès la fondation du monde» (Moï. 6:54). Ainsi, «L'esprit de tout homme était innocent au commencement; et Dieu ayant racheté l'homme de la chute, les hommes redevinrent, dans leur prime enfance, innocents devant Dieu.» (D&A 93:38).
Lorsque les descendants d'Adam et Ève deviennent ensuite responsables de leurs propres péchés à l’âge de huit ans, tous goûtent au péché suite à leur propre libre choix. «Tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu» (Ro. 3:23). Quelqu’un que ses expériences successives conduisent à aimer «Satan plus que Dieu» (Moï. 5:28) finit par devenir «charnel, sensuel et diabolique» (Moï. 5:13; 6:49) de nature. Par contre, celui qui accepte consciemment la grâce du Christ via l'Expiation par la foi, le repentir et le baptême, cède aux «persuasions de l'Esprit-Saint, et… se dépouille de l'homme naturel, et [devient] un saint par l'expiation du Christ, le Seigneur» (Mos. 3:19). De cette façon, c’est l'individu qui prend l'initiative d’accepter la grâce mise à sa disposition par l'Expiation, faisant preuve de foi en étant disposé à croire (voir Alma 32:27). Ce désir est souvent allumé quand on entend d'autres personnes rendre témoignage du Christ. Quand cette parole du Christ est semée et puis nourrie par l’interaction de l'obéissance avec la grâce, comme résumé ci-dessous, l'individu peut «devenir un saint» de nature, jouissant de ce fait de la vie éternelle (c’est-à-dire une vie semblable à celle de Dieu).
La grâce est ainsi la source de trois catégories de bénédictions liées au salut de l'humanité. D'abord, beaucoup de bénédictions de la grâce sont inconditionnelles, des dons gratuits et immérités n'exigeant aucune action individuelle. La grâce de Dieu, dans ce sens, est un facteur de la Création, de la Chute, de l'Expiation et du plan de salut. En particulier en ce qui concerne la Chute, et en dépit de la mort et des autres conditions résultant de la transgression d'Adam, la grâce du Christ a expié le péché originel et assure la résurrection de toute l'humanité: «Nous croyons que les hommes seront punis pour leurs propres péchés et non pour la transgression d'Adam» (2e A de F).
En second lieu, le Sauveur a également expié de manière conditionnelle les péchés personnels. L'application de la grâce aux péchés personnels est conditionnelle parce qu'elle n’est accessible que quand un individu se repent, ce qui peut être une forme exigeante d'œuvres. De ce fait, la miséricorde peut satisfaire aux exigences de la justice sans que la miséricorde ni la justice ne se dépouillent mutuellement. Le repentir personnel est donc une condition nécessaire au salut, mais il n'est pas suffisant par lui-même pour assurer le salut (voir Justice et miséricorde). En outre, on doit accepter les ordonnances du baptême et de l’imposition des mains pour recevoir le don du Saint-Esprit, par lequel on naît de nouveau en tant qu'enfant d'esprit du Christ et peut être un jour sanctifié (cf. D&A 76:51-52; voir aussi Évangile de Jésus-Christ).
Troisièmement, après avoir reçu l'Évangile de foi, de repentir et de baptême pour la rémission des péchés, se reposant «entièrement sur les mérites de celui qui est puissant à sauver», tout ce qu’on a fait, c’est entrer «par la porte» sur «le chemin étroit et resserré qui mène à la vie éternelle» (2 Né. 31:17-20). Dans cette étape du développement spirituel, qui se situe après le baptême, on doit faire de son mieux, d’autres efforts, pour «persévérer jusqu'à la fin» (2 Né. 31:20). Ces efforts consistent à obéir aux commandements du Seigneur et à recevoir les ordonnances supérieures accomplies dans les temples et poursuivre le processus du repentir «pour conserver le pardon de vos péchés» (Mosiah 4:12).
Dans les enseignements de Martin Luther, ces œuvres de justice ne sont pas le résultat d’une l'initiative personnelle mais sont les effets spontanés de la grâce interne que l’on a reçue, intégralement les fruits de l'arbre généreux. En revanche, dans la doctrine de l’Église, «les hommes doivent œuvrer avec zèle à une bonne cause, faire beaucoup de choses de leur plein gré et produire beaucoup de justice. Car ils ont en eux le pouvoir d'agir par eux-mêmes.» (D&A 58:27-28). En même temps, les hommes n’ont pas la capacité d’acquérir une nature chrétienne par leurs propres efforts. Les attributs qui permettent l’accès à la perfection, tels que l'espérance et la charité sont finalement accordés «à tous ceux qui sont de vrais disciples de… Jésus-Christ» (Mro. 7:48) par la grâce via son expiation. Cette relation interactive entre les pouvoirs humains et divins dans la théologie des saints des derniers jours dérive à la fois de l'importance qu’elle attache au libre arbitre et de son optimisme à l’égard des «fruits de l'Esprit» (Ga. 5:22-25) parmi ceux qui sont vraiment convertis, «ceux qui m'aiment et gardent tous mes commandements, et… celui qui cherche à faire ainsi» (D&A 46:9).
Dieu accorde de manière conditionnelle ces expressions supplémentaires de la grâce qui donnent accès à la perfection, comme il confère la grâce qui permet le pardon du péché. Elles sont données «après tout ce que nous pouvons faire» (2 Né. 25:23) c'est-à-dire en plus de nos meilleurs efforts. D’une manière générale, cette condition est moins liée à l’obéissance à des commandements particuliers qu'à notre personnalité spirituelle fondamentale, comme «la douceur et l’humilité de cœur» (Mro. 8:26) et la possession d’ «un cœur brisé et un esprit contrit» (Ps. 51:17; 3 Né. 9:20; Hafen, chap. 9). Ou, comme Moroni l’écrit à la fin du Livre de Mormon: «Si vous vous refusez toute impiété et aimez Dieu de tout votre pouvoir, de toute votre pensée et de toute votre force, alors sa grâce vous suffit, afin que par sa grâce vous soyez parfaits dans le Christ… alors vous êtes sanctifiés dans le Christ, par la grâce de Dieu, grâce à l'effusion du sang du Christ» (Mro. 10:32-33).

Bibliographie
Dillenberger, John. "Grace and Works in Martin Luther and Joseph Smith." Dans Reflections on Mormonism: Judaeo-Christian Parallels, dir. de publ. Truman G. Madsen. Provo, Utah, 1978.
Hafen, Bruce C. The Broken Heart: Applying the Atonement to Life's Experiences. Salt Lake City, 1989.
Holmer, Paul L. "Law and Gospel Re-examined." Theology Today 10, 1953-1954, p. 474.
Keller, Roger R. Reformed Christians and Mormon Christians: Let's Talk! Urbana, Ill., 1986.
Lewis, C. S. Mere Christianity. New York, 1943.
Madsen, Truman G. Reflections on Mormonism, p. 175. Provo, Utah, 1978.
McDonald, William, dir. de publ. "Grace." Dans New Catholic Encyclopedia, Vol. 6. New York, 1967.
Millet, Robert L. By Grace Are We Saved. Salt Lake City, 1989.
Rahner, Karl, dir. de publ. The Teaching of the Catholic Church. Regensburg, Allemagne, 1965.
BRUCE C. HAFEN

Grande et abominable Église
Auteur : WRIGHT, DENNIS A.

L’expression «grande et abominable église», qui apparaît dans une vision apocalyptique reçue au sixième siècle av. J.-C. par le prophète Néphi 1 dans le Livre de Mormon (1 Né. 13:6), désigne l'église du diable et les saints des derniers jours y voient l’équivalent de «la grande prostituée qui est assise sur les grandes eaux» décrite dans Apocalypse 17:1. Jacob, frère de Néphi, voit dans cette «grande prostituée de toute la terre» tous ceux qui sont contre Dieu et qui luttent contre Sion à toutes les époques (2 Né. 10:16). Néphi ne fait pas de récit détaillé de tout qu'il a vu dans la vision, car cette responsabilité était réservée à Jean, l'apôtre, qui devait recevoir la même vision; néanmoins, Néphi mentionne plusieurs fois son contenu et ses enseignements en utilisant diverses images et expressions (1 Né. 13:4-9, 26-27, 34; 14:1-4, 9-17).
Comme Jean, Néphi et Jacob décrivent les persécutions que les méchants infligeront au peuple de Dieu, en particulier dans les derniers jours. L'ange qui explique la vision à Néphi souligne que cette grande et abominable église ôtera de la Bible et «de l'Évangile de l'Agneau beaucoup de parties qui sont claires et extrêmement précieuses; et il y a aussi beaucoup d'alliances du Seigneur qu'elle [ôtera]» (1 Né. 13:26), faisant «trébucher» les hommes et donnant à Satan un «grand pouvoir» sur eux (1 Né. 13:29; D&A 86:3; Robinson, «Early Christianity», p. 188). Bien que beaucoup de protestants, suivant l'exemple de Martin Luther, aient rattaché cette force mauvaise décrite dans Apocalypse 17 à l'Église catholique, ces Écritures modernes et néotestamentaires mettent plutôt l’accent sur des agents d'apostasie plus anciens dans les traditions juives et chrétiennes (voir A. Clarke, Clarke’s Commentary, vol. 6, pp. 1036-1038, Nashville, Tenn., 1977).

Quand il parle symboliquement plutôt qu'historiquement, Néphi identifie tous les ennemis des saints à l'église du diable (1 Né. 14:9-10; 2 Né. 10:16). Ce sont ceux qui, dans tous les pays et à toutes les époques, désirent «obtenir du gain, et… du pouvoir sur la chair, et… devenir populaires aux yeux du monde… qui recherchent les convoitises de la chair et les choses du monde et à commettre toutes sortes d'iniquités» (1 Né. 22:23). Parmi les autres termes scripturaires liés à la grande et abominable église, il y a «Babylone» et la «grande prostituée» (Ap. 17:5; 1 Né. 22:13; D&A 1:16). Des images d'orgueil, de cupidité et d'abandon d'alliances sont associées à ces termes, tout au contraire de l'Église de Dieu. Les Écritures avertissent régulièrement les hommes de fuir l'église du mal et de se réfugier dans l'Église de Dieu (Jé. 51:6; Ap. 18:4; 1 Né. 20:20; D&A 133:14; voir aussi P. Minear, «Babylon» dans Interpreter's Dictionary of the Bible, 1:338, Nashville, Tenn., 1962). L'image donnée par le Livre de Mormon d'une grande et abominable église complète les images bibliques de Babylone et de la prostituée.
Le destin de la grande et abominable église est décrit dans les Écritures anciennes et modernes (Jé. 51:37; Ap. 18:21; 1 Né. 14:15-16; 22:14; D&A 1:16): Même si les nations de la terre se rassemblent contre lui, la rédemption est promise au «peuple de l'alliance du Seigneur, qui a été dispersé sur toute la face de la terre» même s’il faut qu’un pouvoir descende des cieux, comme si c’était par le feu (1 Né. 14:14; 22:17). Quand Jésus-Christ reviendra, il réclamera les siens et rejettera ceux qui se sont opposés à lui (Ma. 4:1-3; 2 Th. 2:6-10; 1 Né. 22:23-26; voir Jésus-Christ : Seconde venue de Jésus-Christ). Lorsque le Sauveur instaurera son règne millénaire, grande sera la chute de Babylone, la prostituée, et de la grande et abominable église (Ap. 18; 2 Né. 28:18), parce que tout genou fléchira et toute langue confessera, avec reconnaissance, que Jésus est le Christ (És. 45:23; Mos. 27:31).

Bibliographie
Nibley, Hugh W. "The Passing of the Primitive Church: Forty Variations on an Unpopular Theme". Dans CWHN 4:168-208.
Nibley, Hugh W. "Prophecy in the Book of Mormon: The Three Periods". Dans CWHN 7:410-435.
Robinson, Stephen E. "Warring Against the Saints of God". Ensign 18, janv. 1988, pp. 34-39.
Robinson, Stephen E. "Early Christianity and 1 Nephi 13-14". Dans The Book of Mormon: First Nephi, The Doctrinal Foundation, dir. de publ. M. Nyman et C. Tate, pp. 177-191. Provo, Utah, 1988.
DENNIS A. WRIGHT

Hébreux, épître aux
Auteur: DRAPER, RICHARD D.

Beaucoup de passages de cette lettre du Nouveau Testament ont une importance particulière pour les saints des derniers jours. Lors des conférences générales de l'Église, les passages les plus souvent cités dans l’épître aux Hébreux sont ceux qui concernent la Divinité (Hé. 1:1-3; 12:9; 13:8), la souffrance obéissante de Jésus (Hé. 2:14-18; 4:15-16; 5:8-9; voir aussi Jésus-Christ, Expiation de), la prêtrise éternelle de Jésus-Christ (Hé. 7-8), la nécessité d’être appelé de Dieu pour détenir la prêtrise (Hé. 5:1-4), la nature de la vraie foi, qui motive les hommes à agir selon la justice (Hé. 11), tendre «à ce qui est parfait» (Hé. 6:1) et persévérer jusqu'à la fin (Hé. 12:4-11). Ces thèmes sont les piliers essentiels de l'Évangile de Jésus-Christ.
Le point principal au cœur de l'épître est que Jésus-Christ est le «souverain sacrificateur [éternel], qui s’est assis à la droite du trône de la majesté divine dans les cieux, comme ministre du sanctuaire et du véritable tabernacle» de Dieu (Hé. 8:1-2). Ce thème est développé dans toute l'épître, montrant comment le salut éternel nous est apporté grâce à la grandeur, à la validité et à la suprématie de Jésus-Christ. L’épître s’adresse aux Juifs convertis à l'Église chrétienne primitive, qui ont déjà compris les premiers principes de l'Évangile et ont reçu ses ordonnances de base (Hé. 6:1-4). Étape par étape, elle s’efforce systématiquement de les persuader «de se raccrocher à leur foi» (Buchanan, p. 266), de garder l'alliance et de réaliser l'espérance incomparable et les promesses irrévocables que Dieu leur a données grâce au sacrifice de Jésus-Christ. Avec son explication de l'Expiation en termes de prêtrise, de serments, d’alliances et d’images du temple, cette épître tout entière vibre au diapason des concepts et des pratiques des saints modernes.
Le chapitre 1 commence en déclarant hardiment que Jésus est le seul médiateur entre Dieu et tous les êtres humains; il est supérieur aux prophètes et aux anges et les remplace. Personnalité séparée et distincte dans la Divinité, il est le Dieu de la Création et la révélation parfaite de la Divinité pour toujours. Il est, spirituellement et physiquement, l’empreinte de la personne de son Père; lui seul a payé pour les péchés de l'humanité et est assis à la droite de Dieu le Père (Hé. 1:1-3). Le Père a introduit le Sauveur (qui était son «premier-né» dans l'existence prémortelle) «dans le monde» (Hé. 1:6; cf. D&A 93:21; 1 Né. 11:18). En tant que premier-né, Jésus est l'héritier de toutes choses (Hé. 1:2) et ceux qui sont fidèles deviennent cohéritiers avec lui (voir Héritiers).
Le chapitre 2 invite fortement à écouter la parole de Dieu donnée par Jésus-Christ (Hé. 2:1-4). L’autre monde est entièrement assujetti au Christ (Hé. 2:5-10). Dieu l’a rendu de peu inférieur «à Dieu». Parce que Dieu est le Père de tous, même le Christ lui est soumis. Le Christ ne le cède qu’au Père, et pourtant il est le frère d'esprit de l'humanité (Hé. 2:17). Comme ses frères et ses sœurs dans la condition mortelle, il a connu la tentation, mais contrairement à eux, il n’a jamais péché (Hé. 2:18; 4:15-16). Par ce qu’il a souffert, il a appris l'obéissance et a acquis de la compassion pour tous les enfants de Dieu.
Le chapitre 3 recommande aux hommes de contempler la grandeur du Seigneur et de s'engager vis-à-vis de lui. L'obéissance absolue montrée par le Sauveur à son Père montre le chemin. C’est aujourd’hui qu’il faut s’engager. L'Évangile n'est pas toujours accessible à l'humanité, il est donc nécessaire de faire alliance «aujourd’hui» de peur de connaître le sort des Israélites rebelles et de mourir dans le désert de leur propre vie (Hé. 3:7-17; cf. Jos. 24:14-25; Jcb. 6:5-7; D&A 64:23-25).
Le chapitre 4, empruntant partiellement au symbolisme du temple israélite, invite les saints à entrer dans le repos du Seigneur (Hé. 4:1, 11). On y parvient en croyant, en ne s’endurcissant pas le cœur, en travaillant, en étant à découvert devant Dieu, en se reposant sur la compassion de Jésus, le souverain sacrificateur, et en s’approchant avec assurance du trône de la grâce de Dieu afin d’obtenir miséricorde en temps de besoin (Hé. 4:7, 11, 13, 15, 16).
Le chapitre 5 explique comment Jésus a obtenu son autorité d’agir comme souverain sacrificateur d'Israël. Il ne s’est pas attribué cette dignité. Comme dans le cas d’Aaron, Dieu l'a choisi et lui a conféré l'autorité comme «sacrificateur pour toujours, selon l'ordre de Melchisédek» (Hé. 5:6; Ps. 110:4).
Le chapitre 6 invite tous les membres de l'Église à «saisir l’espérance» de la perfection et de la vie éternelle, qui leur a été offerte par un serment et une alliance immuables (Hé. 6:1, 13-20; voir aussi Prêtrise, Serment et alliance de la). La diligence à servir le Christ apporte la pleine assurance de promesses extraordinaires, comme Dieu a fait alliance avec Abraham et lui a promis un accroissement éternel (Hé. 6:13-14; cf. D&A 132:30). Cette espérance, rendue possible dans le Christ, est une ancre pour l'âme, puisque Dieu ne peut pas mentir. Toutefois, ceux qui ont une fois goûté la bonne parole de Dieu et ont eu part au Saint-Esprit et qui tombent et «crucifient pour leur part le Fils de Dieu», commettent un péché si grave qu'ils ne peuvent être renouvelés et amenés à la repentance (Hé. 6:6-10).
Les promesses que Dieu a faites à Abraham sont offertes à tous ceux qui vont au Christ: Jésus était prêtre selon l'ordre de Melchisédek, qui était le prêtre qui a béni Abraham, dans les reins duquel était Lévi. La supériorité de la Prêtrise de Melchisédek du Christ par rapport à la prêtrise lévitique et à la loi de Moïse est détaillée au chapitre 7. Melchisédek était un symbole du Christ. Sa prêtrise était plus permanente que la prêtrise lévitique, qui était limitée aux lignées par le sang et n'était pas donnée avec un serment et dont les prêtres ne continuaient pas à cause de la mort et qui avaient besoin d’un renouvellement quotidien (Hé. 7:3, 21, 23, 27). Par contre, l'ordre de Melchisédek de la prêtrise était dirigé par Jésus-Christ, qui, à la différence du souverain sacrificateur dans la loi de Moïse le jour annuel des expiations (Lé. 16:4), n'avait pas besoin «d'offrir de sacrifice pour ses propres péchés, parce qu’il n'avait pas de péché» (TJS Hé. 7:26). Sa prêtrise était « aparabatos », ce qui veut dire «permanente, immuable et incomparable» (Hé. 7:24). Aucune autre prêtrise ne lui succédera. Ce sera pour toujours le pouvoir permanent du salut et des vies éternelles dans l'Église du Christ (EPJS, pp. 132, 260).
En tant que souverain sacrificateur, Jésus s'est offert comme sacrifice expiatoire éternel et est devenu le médiateur de cette nouvelle alliance plus excellente (Hé. 8:6), mettant la loi de Dieu dans le cœur de son peuple (Hé. 8:10; 10:16). La vieille loi (de Moïse), avec ses observances et ses sacrifices, était accomplie. Par la nouvelle alliance, Dieu promettait de ne plus se rappeler les péchés de ceux qui se repentaient (Hé. 10:17) et chaque saint était invité à s’engager sur «une route nouvelle et vivante» par le sang du Christ (Hé. 10:15-20). Ceux qui étaient disposés à le faire avec patience et foi seraient justifiés et recevraient la promesse (Hé. 10:35-38).
Le chapitre 11 se concentre sur la foi et ses effets extérieurs sur la vie des héros spirituels d'Israël. La foi est la substance ou la justification ou l'assurance réelle (hypostase) et la preuve ou démonstration (elenchos) de choses qu’on ne voit pas, qui sont vraies (Hé. 11:1; Al. 32:21). La vraie foi se manifeste nécessairement dans des œuvres de justice. Le chapitre 12 exhorte donc les fidèles à supporter les réprimandes et les corrections de Dieu, qui est le Père de leur esprit. En héritant des bénédictions de l'éternité comme fils du Dieu vivant, ses saints sont en mesure d’aller à la nouvelle montagne de Sion, la Jérusalem céleste, étant rendus parfaits, une assemblée de «premiers-nés» (prototokon), ayant hérité de tout avec le Premier-né.
Le chapitre 13 conclut en recommandant que «le mariage soit honoré» et en conseillant à tous: «persévérez dans l'amour fraternel», «ne vous livrez pas à l’amour de l’argent» et soyez fidèles à Jésus seul «en portant son opprobre, car nous n’avons point ici-bas de cité permanente, mais nous cherchons celle qui est à venir» (Hé. 13:1, 4-5, 13-14). Ceux qui entrent dans ce saint ordre et en gardent les alliances se préparent pour la vie éternelle et l'accomplissement de la prière «que le Dieu de paix, qui a ramené d’entre les morts le grand pasteur des brebis, par le sang d’une alliance éternelle, notre Seigneur Jésus, vous rende capables de toute bonne œuvre pour l'accomplissement de sa volonté» (Hé. 13:20-21).

Bibliographie
Anderson, Richard L. Understanding Paul. Salt Lake City, 1983.
Buchanan, George W. To the Hebrews. Garden City, N.Y., 1972.
Gentry, Leland H. "Let Us Go On unto Perfection: Paul's Message in the Book of Hebrews". Dans Sidney B. Sperry Symposium, pp. 135-144. Provo, Utah, 1983.
RICHARD D. DRAPER

Hélaman 1
Auteur: Thorne, Melvin J.

Le premier Hélaman mentionné dans le Livre de Mormon (v. 130 av. J.-C.) est l'un des trois fils de Benjamin, roi des Néphites et du peuple de Zarahemla. Il n’est mentionné qu’une fois à propos des efforts de son père pour l'instruire, lui et ses frères, Mosiah 2 et Hélorum. Benjamin leur enseigna la langue de leurs pères et les prophéties prononcées par eux, «afin qu'ils devinssent ainsi des hommes pleins de jugement» (Mosiah 1:2).

MELVIN J. THORNE

Hélaman 2
Auteur: Cheesman, Paul R.

Hélaman 2 (v. 100-57 av. J.-C.) est un commandant et un prophète militaire remarquable du Livre de Mormon. Fils aîné d'Alma le Jeune, il est le frère de Shiblon et de Corianton (Al. 31:7) et père d’Hélaman 3. Il devient grand prêtre (Al. 46:38) et est connu pour son enseignement du repentir à son peuple.
Pendant sa jeunesse, il reste en arrière pendant la mission de son père et de ses frères chez les Zoramites (Al. 31:7), apparemment pour gérer les affaires domestiques et ecclésiastiques en l'absence d'Alma. Plus tard, son père lui donne une bénédiction spéciale, qui est souvent citée parmi les saints des derniers jours, l'exhortant à garder les commandements de Dieu et lui promettant que, s'il le fait, il prospérera dans le pays (Al. 36:30; 37:13). Son père lui commande aussi de continuer les annales de son peuple et lui confie la garde sacrée des annales néphites, des plaques d’airain, des vingt-quatre plaques des Jarédites, des interprètes et du liahona, c'est-à-dire le compas divin qui a conduit la famille de Léhi à la nouvelle terre promise en Amérique (Al. 37:1-47). Avant la mort de son père, Hélaman mettra par écrit la prophétie de celui-ci concernant la destruction finale du peuple néphite (45:9-14).
Bien que simplement connu pour avoir été l'un des «grands prêtres de l'Église» (Al. 46:6), il est manifestement le prêtre en chef parce que «Hélaman et ses frères» (45:22-23; 46:1, 6; 62:45) ou «Hélaman et les grands prêtres» (46:38) accomplissent toujours les fonctions ecclésiastiques; aucun autre grand prêtre président n'est cité. Quand Hélaman et ses frères tentent «d'établir de nouveau l'Église dans tout le pays» (45:22) après une guerre prolongée avec les Lamanites (43-44), leur action déclenche une agitation populaire menée par Amalickiah, ce qui va précipiter les Néphites dans une de leurs guerres les plus dévastatrices.
Pendant la jeunesse d’Hélaman, un grand nombre de convertis lamanites, appelés Ammonites (voir Livre de Mormon, Peuples du), vont s’installer dans le territoire néphite de Jershon (Al. 27). Ils s’engagent par serment à ne plus jamais ôter la vie à qui que ce soit (Al. 24:17-18). Plus tard, quand d'autres Lamanites attaquent leurs protecteurs néphites, les Ammonites proposent de rompre leur serment afin d'aider l'armée néphite à défendre leurs familles et leurs terres. Ce sont «Hélaman et ses frères» qui vont les persuader de ne pas rompre leur alliance. Ils accueillent cependant 2.060 jeunes Ammonites, qui ne sont pas tenus par le serment de leurs parents, qui se proposent pour combattre pour la cause néphite et choisissent Hélaman pour les diriger (53:10-22). En acceptant leur proposition, il devient à la fois chef militaire et père spirituel, une observation que l’on trouve dans la longue lettre d’Hélaman à son commandant Moroni 1 (Al. 56-58). Hélaman conduit ses «jeunes soldats» (53:22) dans de nombreuses batailles, mais aucun d’eux n’est tué, bien que tous aient reçu des blessures (56:56; 57:25; 58:39). Ces jeunes hommes attribuent à Dieu leur protection et rendent hommage à leurs mères qui les ont formés dans la foi (56:47). Pendant sa campagne militaire comme chef de ces jeunes hommes, Hélaman remporte victoire sur victoire, capturant souvent des ennemis sans effusion de sang. Manifestant une ingéniosité et une personnalité extraordinaires, il reconnaît toujours les bénédictions de Dieu dans ses succès (56:19; 57:35; 58:33).
Après la guerre, Hélaman retournera chez lui et passera les années qui lui restent à régler les affaires de l'Église, convainquant «beaucoup de gens de leur méchanceté, ce qui les amena à se repentir de leurs péchés et à être baptisés pour le Seigneur, leur Dieu» (Al. 62:45). Une ère de paix résulte de ses efforts finaux. Il meurt en 57 av. J.-C.

PAUL R. CHEESMAN

Hélaman 3
Auteur: BAKER, CHRISTINE PURVES

Hélaman 3, fils de Hélaman 2, est le gardien des annales et le grand juge du pays de Zarahemla pendant les quatorze années qui précèdent sa mort en 39 av. J.-C. On ne sait pas grand-chose de ses affaires personnelles. Son oncle, Shiblon, lui confie la charge des documents historiques en 53 av. J.-C. (Al. 63:11-13), et le livre d’Hélaman dans le Livre de Mormon porte son nom.
Après l'assassinat du grand juge Pacumeni en 50 av. J.-C., Hélaman est élu par le peuple à cette fonction, qui est la plus haute du pays. Un complot contre lui est découvert plus tard et Kishkumen, l'assassin potentiel, est mortellement blessé. La bande d’assassins, menée par Gadianton, s'enfuit dans le désert. Mormon écrit à propos de Gadianton : «À la fin de ce livre [le Livre de Mormon], vous verrez que ce Gadianton se révéla être la chute… du peuple de Néphi» (Hél. 2:13; voir aussi Combinaisons secrètes).
Pendant la période de trois ans de 48 à 46 av. J.-C., un nombre substantiel de personnes quitte Zarahemla à cause de dissensions non spécifiées, et va «dans le pays situé du côté du nord» (Hél. 3:3). Cette émigration est si importante qu’une fraction seulement de son impact pourra être mentionnée dans les annales de Mormon (Hél. 3:14). En dépit des dissensions, de l'émigration et de la guerre, «Hélaman occupa le siège du jugement avec justice et équité; oui, il s'appliqua à garder les lois, et les ordonnances, et les commandements de Dieu; et il fit continuellement ce qui était droit aux yeux de Dieu; et il marcha dans les voies de son père, de sorte qu'il prospéra dans le pays» (3:20). Pendant son mandat, des dizaines de milliers de personnes sont baptisées dans l'Église au grand étonnement des grands prêtres et des instructeurs (3:24-25). Par la force de sa personnalité, Hélaman maintiendra la paix pendant deux-tiers de sa carrière politique.
Quand il meurt, Hélaman laisse les responsabilités spirituelles et les annales sacrées entre les mains de son fils, Néphi 2 (Hél. 3:37; 5:5-14; 16:25).

Hénoc

[Cette rubrique traite en trois parties d’Hénoc, de ses visions, de sa manière de diriger comme prophète et de son importance.]

Hénoc: Sources de l’Église
Auteur: EAMES, RULON D.

Hénoc a une place importante dans les Écritures et la tradition des saints des derniers jours comme prophète, voyant et bâtisseur de Sion. La Bible dit que «Hénoc marcha avec Dieu; puis il ne fut plus, parce que Dieu le prit» (Ge. 5:21-24). Dans les révélations données à Joseph Smith il y a beaucoup d’informations supplémentaires sur Hénoc, sur sa connaissance de l’expiation sanctifiante du Christ, les visions il a eues du futur du monde, les messages qu’il a proclamés, la méchanceté à laquelle il s’est opposé, les miracles qu’il a accomplis, les ordonnances de la prêtrise qu’il a accomplies et les promesses qu’il a reçues du Seigneur Jésus-Christ prémortel (voir Livre de Moïse). Hénoc et sa ville de Sion sont des symboles puissants parmi les saints des derniers jours, affirmant qu’il est possible de parvenir à une justice suprême sur terre comme au ciel.
MOÏSE 6-7 DANS LA PERLE DE GRAND PRIX. Hénoc était le septième dans une chaîne de patriarches remontant jusqu’à Adam (Moï. 6:10-22). Énosch, petit-fils d’Adam, s’était enfui avec «le reste du peuple de Dieu» d’un pays méchant appelé Schulon dans «une terre de promission» qu’Énosch baptisa du nom de son fils, Kénan (6:17). Le texte implique que Hénoc naquit dans ce «pays de justice» (6:41). Suivant l’exemple d’Adam et Ève, le père d’Hénoc lui enseigna «toutes les voies de Dieu» (6:21, 41; cf. 5:12).
Alors qu’il n’était «qu’un jeune garçon» (bien qu’il eût probablement plus de 65 ans, Moï. 6:25, 31), Hénoc fut appelé à prêcher le repentir aux méchants: «L'Esprit de Dieu descendit du ciel et demeura sur lui» (6:26-30). Comme d’autres prophètes, il ne se sentait absolument pas à la hauteur de la tâche: «Tout le peuple me hait, car je suis lent à m'exprimer» (6:31-34; cf. 1:25-26; Ex. 4:10-12; Jé. 1:4-10; És. 6:1-10). Le Seigneur dit à Hénoc de se mettre de l’argile sur les yeux et de les laver, sur quoi il eut une vision des «esprits que Dieu avait créés; et… des choses qui n'étaient pas visibles à l'œil naturel» (Moï. 6:35-36). Le mot «voyant» s’applique donc à lui.
Il alla alors prêcher dans les collines et sur les hauts lieux, mais le peuple s’en offensa et le considéra comme «un homme sauvage» (6:37-38). Un homme du nom de Mahijah eut la hardiesse de demander à Hénoc qui il était et d’où il venait. Hénoc expliqua alors sa vision du ciel et sa compréhension de la chute d’Adam; il enseigna qu’après la chute, les humains étaient devenus charnels et diaboliques en adorant Satan, mais montra comment, selon le Plan de Salut, ils pouvaient se repentir et devenir des «fils de Dieu» par le sang de Jésus-Christ, le Fils unique de l’Homme de Sainteté (6:42-7:1).
Poursuivant son ministère, Hénoc parla d’une autre vision qu’il avait reçue dans laquelle il se tenait sur une montagne et voyait le Seigneur face à face. Le Seigneur lui montra les jugements sous forme de guerres et la stérilité qui s’abattraient sur les méchants et lui commanda de nouveau de prêcher le repentir et le baptême au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit (7:2-11).
Hénoc amena un grand nombre de convertis à l’Évangile de Jésus-Christ, mais son succès n’alla pas sans rencontrer une opposition féroce (7:12-13). Les ennemis des justes se mobilisèrent contre eux. Le récit scripturaire décrit des miracles d’une puissance extraordinaire. Selon les termes d’Hénoc: «la terre trembla, et les montagnes s'enfuirent… et les rivières d'eau furent détournées de leurs cours» (7:13). Frappés de crainte, les ennemis d’Hénoc et les géants de la terre se tinrent au loin et «le Seigneur vint demeurer avec son peuple, et ils demeurèrent dans la justice» (7:16).
Sous la direction inspirée d’Hénoc, les fidèles parvinrent à une unité de cœur et d’esprit extraordinaire. L’obéissance aimante aux lois du Christ fut maintenue; un état d’égalité économique fut atteint et «il n’y avait pas de pauvres» parmi eux (7:18). L’unité spirituelle du peuple d’Hénoc prit des dimensions physiques par la construction d’une ville «qui fut appelée la Ville de la Sainteté, SION» (7:19). Leur vie était basée sur «l'ordre de celui qui était sans commencement de jours ni fin d'années [Jésus-Christ]» (6:67) et «selon l’ordre de l’alliance que Dieu avait faite avec Hénoc» (TJS, Ge. 14:27). Cette communauté unique mûrit pendant 365 ans, après quoi elle fut reçue au ciel. Accomplissant son alliance de préserver la lignée d’Hénoc sur la terre, le Seigneur y laissa Metuschélah et Lémec, le fils et le petit-fils d’Hénoc (Moï. 8:2, 5). Noé, fils de Lémec naquit quatre ans après que la ville d’Hénoc eut été enlevée au ciel.
Dans une troisième vision, Hénoc vit «tous les habitants de la terre» (7:21). Dans cette révélation panoramique, il fut témoin de la méchanceté et de la violence de l’époque de Noé; il vit Satan rire, une grande chaîne à la main, et le Seigneur pleurer sur ses créations parce que l’humanité avait rejeté Dieu et était devenue «sans affection» (7:33). Il vit le sacrifice expiatoire de Jésus-Christ (7:47-48) et reçut la promesse «qu'il se trouverait toujours un reste de sa postérité parmi toutes les nations» (7:52). Finalement, il vit la joyeuse réunion de sa ville avec une Sion moderne bâtie en prévision de l’avènement de Jésus (7:63-67).
Selon le récit biblique, Hénoc vécut 365 ans (Ge. 5:23); selon le livre de Moïse, 430 ans (8:1; c.-à-d., 365 plus 65, qui était l’âge d’Hénoc quand il engendra Metuschélah et fut ordonné).
DOCTRINE ET ALLIANCES 76, 84, 107. L’accession rapide d’Hénoc à la maturité spirituelle ressort du fait qu’il reçut la prêtrise avant son père et son grand-père. La prêtrise détenue par Hénoc est décrite dans plusieurs passages des Doctrine et Alliances. Il fut ordonné à l’âge vingt-cinq ans de la main d’Adam. Sa prêtrise était «selon le plus saint ordre de Dieu», détenant «la clef des mystères du royaume, oui, la clef de la connaissance de Dieu» (D&A 84:15-19). Les Écritures confirment que Hénoc «vit le Seigneur, marcha avec lui et fut continuellement devant sa face» (D&A 107:48-49). Quelque chose qui montre bien la place éternelle d’Hénoc dans la prêtrise, c’est que les héritiers du royaume céleste sont décrits comme «prêtres du Très-Haut, selon l'ordre de Melchisédek, qui était selon l'ordre d'Hénoc, qui était selon l'ordre du Fils unique» (D&A 76:57).
Hénoc reçut deux bénédictions d’Adam: une quand il fut ordonné à la prêtrise, l’autre 240 ans plus tard lors du conseil d’Adam-ondi-Ahman, qui semble être davantage une bénédiction publique (D&A 107:48, 53). Tous les patriarches dans le lignage héréditaire d’Hénoc étaient présents à cette réunion finale de la postérité juste d’Adam, et Adam prophétisa l’avenir de ses descendants «jusqu’à la dernière génération» (107:56). Ces prophéties furent écrites dans le livre d’Hénoc.
HÉNOC ET LES SAINTS DES DERNIERS JOURS. Les saints des derniers jours croient que la justice d’Hénoc était basée sur les mêmes principes de l’Évangile qui s’appliquent dans toutes les dispensations et éternellement. Pour cette raison, les saints des derniers jours se sentent une parenté spirituelle avec Hénoc et avec son peuple: La Sion d’Hénoc représente tous les idéaux spirituels auxquels les saints des derniers jours travaillent. Appelé à édifier une Sion moderne, le prophète et voyant Joseph Smith utilisa le nom Hénoc comme l’un des noms de code pour se désigner lui-même dans les premières éditions des Doctrine et Alliances. Un système économique conçu pour favoriser l’égalité matérielle et spirituelle dans l’Église, l’Ordre d’Hénoc (voir Ordres unis), fut mis en application à diverses reprises dans l’histoire de l’Église. Les membres de l’Église aspirent au jour où les justes édifieront la contre-partie de la Ville de la Sainteté d’Hénoc, la nouvelle Jérusalem, au comté de Jackson, dans le Missouri. Les missionnaires prêchent le repentir dans le monde entier, parce que la terre doit être purifiée par le feu, comme elle l’a été par le déluge qui a suivi le ministère d’Hénoc. Les membres de l’Église s’attendent au retour de la ville d’Hénoc d’en haut pour se réunir avec la Sion d’en bas (Moï. 7:58), quand la terre se reposera sous le règne millénaire de Jésus-Christ.

Bibliographie
Maxwell, Neal A. Of One Heart: The Glory of the City of Énoch. Salt Lake City, 1975.
Millet, Robert L. "Énoch and His City (Moses 6, 7)". Dans Studies in Scripture, Vol. 2, pp. 131-44. Salt Lake City, 1985.
Nibley, Hugh W. Énoch the Prophet. Dans CWHN 2.
Ricks, Stephen D. "The Narrative Call Pattern in the Prophetic Commission of Énoch (Moses 6)". BYU Studies 26, automne 1986, pp. 97-105.
RULON D. EAMES

Hénoc: Sources antiques
Auteur: CHARLESWORTH, JAMES H.

Selon Ge. 5:22-25, «Hénoc, après la naissance de Metuschélah, marcha avec Dieu trois cents ans; et il engendra des fils et des filles. Tous les jours d'Hénoc furent de trois cent soixante–cinq ans. Hénoc marcha avec Dieu; puis il ne fut plus, parce que Dieu le prit.» (Segond).
Hénoc, père de Metuschélah et arrière-grand-père de Noé, était honoré par Juifs et chrétiens pour les raisons suivantes: (1) Genèse 5 dit qu’il vécut 365 ans, un nombre attrayant pour les Juifs qui plaidaient pour que le culte soit aligné sur le calendrier solaire (1 Énoch). (2) Il «marcha avec Dieu» et fut donc agréable à Dieu et était parfait (Sagesse de Salomon 4:13). (3) il ne mourut pas – «Dieu le prit» – et par conséquent il reviendrait du ciel (1 Énoch 14:21-24) pour concrétiser les promesses de Dieu à son peuple. (4) Il était le «septième» (sept est un chiffre parfait) après Adam (Ge. 5; 1 Énoch 93:3; Jude 14). «Un ange» dit de lui qu’il est «le fils de l’homme» (1 Énoch 71:14). Lui seul a tout vu (1 Énoch 19). Il réprimandera les anges déchus (1 Énoch 14), révélera tout (1 Énoch 91), intercédera pour les humains (1 Énoch 15:2) et introduira la paix éternelle dans le monde à venir, comme indiqué à la création, puisque la justice ne l’abandonne jamais (1 Énoch 71:14-17).
LIVRES D’ÉNOCH. Il est clair que les premiers Juifs et chrétiens honoraient les livres d’Énoch. Les extraits les plus anciens de ces derniers se trouvent dans ce qui s’appelle maintenant 1 Énoch (éthiopien). Selon les estimations de la plupart des experts d’aujourd’hui, tous les documents préservés dans 1 Énoch sont juifs et antidatent la destruction de Jérusalem en 70 apr. J.-C. Dans l’ordre chronologique probable, ces livres d’Énoch sont les suivants: Le Livre de l’Astronomie (1 Énoch 72-82) décrit le mouvement du soleil, la réception de sa lumière par la lune (73:7, 78:10) et le calendrier solaire divinement ordonné. Le Livre des Veilleurs (1 Énoch 1-36) est un ouvrage composite comprenant les Paraboles d’Énoch (1-5), les Veilleurs (6-16) et les Voyages d’Énoch (17-19 et 20-36); le but principal de cette compilation est d’expliquer que le mal est entré dans ce monde à cause de la chute des anges (cf. Ge. 6). Le Livre des Songes visionnaires (1 Énoch 83-90) contient une vision du déluge (83-84) et une Apocalypse animale (85-90), qui décrit l’histoire du monde depuis avant le déluge jusqu’à l’apparition d’une «grande corne», qui est probablement Juda Maccabée. L’Épître d’Énoch (1 Énoch 91-105; 106-107 provient probablement du livre de Noé, un livre perdu, et 108 est une addition postérieure) vise les pécheurs riches (94:8-9; 95:3; 96:4-8; 97:8-10), contient un examen plus ancien de l’histoire (l’Apocalypse des Semaines, 1 Énoch 93:1-10, et 91:11-17, qui est mal placée) et exhorte les justes à persévérer dans leur espérance (104), à marcher dans la voie de la justice et à éviter la voie de la méchanceté. Les Similitudes d’Énoch (1 Énoch 36-71) sont l’un des documents théologiques les plus brillants du judaïsme d’avant la destruction de Jérusalem en 70 apr. J.-C.; elles décrivent l’apparition future du Messie, le Juste, l’Élu et Fils de l’homme et ont tendance à les fusionner en une seule personne qui s’avère finalement être Énoch. Apparenté aux livres d’Énoch il y a le Livre des Géants, qui est conservé dans des fragments qumraniques qui datent du premier siècle av. J.-C.
2 Énoch est l’un des écrits juifs les plus difficiles à dater et à comprendre parce qu’il n’est parvenu jusqu’à nous que dans des manuscrits slaves médiévaux. Il était cher aux Bogomils, qui étaient formés par des sources juives antiques mais qui créèrent ou refaçonnèrent aussi des documents antiques. Beaucoup de savants font remonter 2 Énoch à un Juif qui vivait avant 100 apr. J.-C. Après une introduction dans laquelle il informe ses fils de son assomption imminente, Énoch décrit son ascension à travers les sept cieux (3-21). Ensuite le Seigneur révèle des secrets à Énoch (22-38), qui exhorte ses fils (39-66) et est enlevé au ciel le plus élevé (67; le chap. 68 n’existe que dans la révision longue). L’apocalypse termine sur une description de la naissance miraculeuse de Melchisédek de Sophanima, qui est morte. Il est alors emporté au paradis par l’archange Michel et reviendra à la fin des temps pour être le chef des prêtres (69-73).
3 Énoch sous sa forme actuelle est un ouvrage juif médiéval; mais il se peut qu’il remonte à un document plus ancien et il est certain qu’il conserve des traditions très anciennes. Les quarante-huit chapitres de 3 Énoch contiennent des informations cosmologiques, particulièrement concernant le monde céleste du trône et du char de Dieu. L’archange Metatron informe le voyant Ismaël qu’il est Énoch, qui a été transformé en ange.
LA FIN D’ÉNOCH. Malgré le fait que l’auteur de Jude (verset 9) cite 1 Énoch comme prophétie et que l’église éthiopienne a canonisé le livre et célébré de nombreux autres ouvrages qui l’interprètent, les livres d’Énoch ont fini par perdre la faveur du judaïsme et du christianisme traditionnels. Avec la compilation de la Michna par Rabbi Juda vers 200 apr. J.-C. et la tendance à dénigrer l’apocalypticisme, Énoch tomba en disgrâce. Ce furent Hillel et son école qui furent la norme du rabbinisme. Avec la clôture du canon chrétien, à cause de l’apparition du Saint Empire Romain au quatrième siècle, les livres d’Énoch furent stigmatisés comme extracanoniques et la vénération jadis accordée au sage scribe Énoch fut transférée ou réservée à Jésus-Christ.

Bibliographie
Black, M., avec J. C. VanderKam. The Book of Énoch or I Énoch: A New English Edition. Leiden, 1985.
Charles, R. H. The Book of Énoch or 1 Énoch. Oxford, 1912.
Charlesworth, J. H. The Old Testament Pseudepigrapha, 2 vols. Garden City, N.Y., 1983, 1985. (Contient des introductions, des traductions et des notes sur 1 Énoch, 2 Énoch et 3 Énoch).
Knibb, M., avec E. Ullendorff. The Ethiopic Book of Énoch: A New Edition in the Light of the Aramaic Dead Sea Fragments, 2 vols. Oxford, 1978.
Milik, J. T., avec M. Black. The Books of Énoch: Aramaic Fragments of Qumr-n Cave 4. Oxford, 1976.
VanderKam, J. C. Énoch and the Growth of an Apocalyptic Tradition. Washington, D.C., 1984.
JAMES H. CHARLESWORTH

Hénoc: Livre d’Hénoc
Auteur: CHURCH, LEWIS R.
Le livre d’Hénoc est l’un des écrits antiques que les saints des derniers jours s’attendent à recevoir un jour (voir Écritures: Écritures à venir). Ce livre ne doit pas être confondu avec les livres pseudépigraphiques d’Énoch, qui néanmoins ont suscité l’intérêt de certains saints des derniers jours depuis au moins 1840 (Pratt, p. 61). Dans Doctrine et Alliances 107:53-57, il est fait mention d’une réunion de la postérité juste d’Adam tenue à Adam-ondi-Ahman trois ans avant la mort d’Adam. L’influence du Saint-Esprit se manifesta avec puissance en prophétie pendant qu’Adam bénissait sa postérité. Ces versets donnent un précis de ce qui s’est produit, mais bien d’autres choses «furent écrites dans le livre d'Hénoc, et il en sera témoigné en temps voulu» (D&A 107:57). Parlant de ce livre en décembre 1877, Orson Pratt dit: «Je pense que quand nous recevrons cela, nous connaîtrons beaucoup de choses sur les antédiluviens dont nous savons actuellement si peu de choses» (JD 19:218). Un extrait de la prophétie d’Hénoc fut révélé et publié dans le livre de Moïse (chap. 6-7), le dernier chapitre étant publié dans The Evening and The Morning Star d’août 1832 (HC 1:130-131).

Bibliographie
Pratt, Parley P. "The Apocryphal Book of Énoch." MS 1, juillet 1840, p. 61.
LEWIS R. CHURCH

Histoire de l’Église

Cette rubrique traite de l’histoire de l’Église au cours des six périodes suivantes: Histoire de l’Église: 1820-1831, Antécédents, fondation, période de New York. Histoire de l’Église: 1831-1844, Périodes d’Ohio, du Missouri et de Nauvoo. Histoire de l’Église: 1844-1877, Périodes de l’exode et du début de l’Utah. Histoire de l’Église: 1878-1898, Fin de la Période pionnière d’Utah. Histoire de l’Église: 1898-1945, Transitions: Période du début du XXe siècle. Histoire de l’Église: 1945-1990, Période de l’ère internationale suivant la Deuxième Guerre mondiale. En outre, plusieurs autres articles traitent de l’Histoire de l’Église à la lumière de disciplines ou d’approches historiques spécifiques: voir Doctrine: Signification, source et histoire de la doctrine; Histoire économique de l’Église; Histoire intellectuelle; Histoire juridique et judiciaire de l’Église; Politique: Histoire politique; Histoire sociale et culturelle; et Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours.
Les sources bibliographiques relatives à toutes ces périodes sont: B. Allen et Glen M. Leonard, The Story of the Latter-day Saints, Salt Lake City, 1976; Leonard J. Arrington et Davis Bitton, The Mormon Experience, New York, 1979; Département d’Éducation de l’Église, Histoire de l’Église dans la Plénitude des Temps, Salt Lake City, 1989; et Joseph Fielding Smith, L’Essentiel de l’Histoire de l’Église, Salt Lake City, 1950.

Histoire de l’Église: 1820-1831, Antécédents, fondation, période de New York
Auteurs: BUSHMAN, RICHARD L. et PORTER, LARRY C.

[On trouvera d’autres articles sur les événements principaux de la première période de l’histoire de l’Église dans Première Vision; Moroni, Visitations de; diverses rubriques reprises sous Livre de Mormon; les articles sur le rétablissement de la Prêtrise d’Aaron et de la Prêtrise de Melchisédek et sur l’organisation de l’Église, 1830. On peut trouver les premières données biographiques dans les articles sur les Ancêtres de la famille Smith, Smith, Joseph, Smith, Emma Hale et plusieurs autres membres de la famille Smith, en plus de Harris, Martin, de Cowdery, Oliver, de Whitmer, David et de Rigdon, Sidney. La liste des emplacements et des communautés des saints de cette période se trouve sous New York, premières localisations de saints des derniers jours.]
La création de l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours commence dans les années 1820 par des événements qui se produisent principalement dans l’état de New York. Le prophète Joseph Smith reçoit sa première vision en 1820, obtient les plaques d’or du Livre de Mormon sur la colline Cumorah en 1827, reçoit l’autorité de la prêtrise en 1829 et organise officiellement l’Église le 6 avril 1830. Avant que celle-ci ne quitte New York pour l’Ohio au début de 1831, elle aura été organisée et sa direction de base aura été clairement établie.
Dans ses années formatrices, l’Église naissante va surtout apprendre à compter sur la révélation pour la diriger. Joseph Smith, qui est jeune et peu instruit, ne prétend pas élaborer la doctrine de la nouvelle Église tout seul. Des révélations directes de Dieu le conduisent pas à pas. L’idée sans doute la plus révolutionnaire dans l’Église est sa croyance en une révélation chrétienne au-delà de la Bible. Les saints des derniers jours n’ont jamais douté de l’inspiration de la Bible; elle a été un principe essentiel dès le commencement (voir Bible: Croyance des saints des derniers jours en la Bible). Leur expérience va cependant les amener à se rendre compte que Dieu a aussi parlé à des prophètes qui n’étaient pas repris dans ce canon conventionnel d’Écriture: c’est le Livre de Mormon qui va le leur montrer (2 Né. 29:10-14) et ils vont entendre Joseph Smith parler avec la même autorité que les apôtres et les prophètes bibliques. En conséquence, les saints des derniers jours vont commencer à concevoir autrement la révélation et le principe de la révélation continue va considérablement déranger les autres chrétiens, mais, dès le commencement, rien ne sera plus fondamental pour l’Église.
L’histoire de l’Église commence par la famille de Joseph Smith, père, et de Lucy Mack Smith, parents du prophète (voir Famille Smith), qui, avec des milliers d’autres habitants de la Nouvelle-Angleterre se répandent dans l’état de New York au début du dix-neuvième siècle à la recherche de meilleures terres. Ils apportent leur intensité religieuse calviniste, mais avec une ardeur modifiée par les nouvelles conditions de vie de l’Amérique républicaine et pluraliste. Ils ont longtemps recherché sans succès une religion sur laquelle ils pouvaient compter. Le nombre croissant de confessions chrétiennes et une foule de nouvelles influences intellectuelles provenant des Lumières font qu’il est plus difficile d’adopter une foi religieuse que quand le congrégationalisme prédominait en Nouvelle-Angleterre. Joseph Smith commence sa recherche du salut par la question de savoir quelle église est la vraie. Cette question s’impose probablement à lui à cause de l’incertitude de ses parents et de la multiplicité des églises – presbytérienne, baptiste, méthodiste, quaker – dans son propre village.
Au début du printemps de 1820, poussé par des réveils religieux évangéliques, Joseph Smith demande à Dieu de lui indiquer la vraie religion. Bien que n’ayant que quatorze ans, il a confiance en la promesse biblique qu’il pourra obtenir une réponse (Ja. 1:5). Il va dans les bois près de chez lui, se met à genoux et prie. Dans ses récits de l’événement, il témoigne que la réponse qu’il reçoit l’étonne. Dieu le Père et Jésus-Christ apparaissent et lui disent de ne se joindre à aucune des églises existantes. Il reçoit l’assurance que Dieu l’agrée, s’entend dire beaucoup de choses qu’il ne peut pas mettre par écrit, après quoi la vision prend fin, le laissant accablé. Les saints des derniers jours considèrent cette révélation du Père et du Fils comme l’événement qui inaugure le rétablissement de l’Évangile.
Pendant trois ans et demi, Joseph ne reçoit aucune autre communication des cieux. Se demandant s’il ne s’est pas disqualifié pour cause d’indignité, Joseph se livre à la prière le soir du 21 septembre 1823, quand, à son grand étonnement, un ange lui apparaît dans la chambre et annonce qu’il est Moroni et qu’il vient avec des instructions de Dieu. Il lui parle d’annales écrites sur des plaques d’or donnant l’histoire des anciens habitants de l’Amérique. Le Sauveur ressuscité, Jésus-Christ, était apparu à ces gens et leur avait donné la plénitude de l’Évangile. L’ange ajoute que les plaques ont été enterrées dans une colline près de chez Joseph. Au cours de la nuit, il revient à trois reprises, remettant le même message de base et ajoutant chaque fois d’autres informations. Bien qu’épuisé, Joseph se rend le lendemain à la colline et trouvé les plaques déposées dans une boîte en pierre juste au-dessous de la surface du sol, mais il ne lui est pas permis de les retirer. L’ange apparaît de nouveau et lui dit qu’il doit revenir le même jour, le 22 septembre, l’année suivante. Pendant les quatre années qui suivent, Joseph va scrupuleusement retourner à cet endroit. Le 22 septembre 1827, il est finalement autorisé à prendre possession des plaques (voir Moroni, Visitations de).
Les événements de l’intervalle de quatre ans entre 1823 et 1827 vont sans aucun doute aider Joseph Smith à mûrir en vue des responsabilités et des difficultés qu’il va rencontrer plus tard. Certains indices font penser que son père se livrait à la chasse aux trésors, une activité courante parmi les fermiers pauvres de la Nouvelle-Angleterre qui espéraient découvrir, grâce à la magie, de l’argent enterré, et Joseph devra se dégager des idées erronées de cette superstition. L’ange dit à Joseph qu’une des raisons pour lesquelles il a dû attendre pour recevoir les plaques d’or est que son esprit s’est attardé sur leur valeur monétaire (PWJS, p. 7). En novembre 1825, Joseph et son père travaillent brièvement avec un homme appelé Josiah Stowell de South Bainbridge (New York) qui croit qu’un trésor espagnol se trouve à Harmony (Pennsylvanie), près du fleuve Susquehannah. L’entreprise ne donne rien et les Smith prennent graduellement leurs distances par rapport aux fouilles de leurs voisins à la recherche d’argent, pour se concentrer sur la mission religieuse décrite par l’ange. Conséquence heureuse des travaux entrepris à Harmony, Joseph y rencontre Emma Hale (voir Smith, Emma Hale) et l’épouse le 18 janvier 1827. Entre-temps, Alvin, son frère aîné, décède; Joseph se fait arrêter en 1826 comme «glass looker» en vertu d’une loi new-yorkaise qui rend illégal «le fait de dire la bonne aventure ou l’endroit où l’on peut trouver des objets perdus ou volés» (voir la définition légale de «Disorderly Persons» The Justice’s Manual, Albany, New York, 1829, p. 144; voir aussi Smith, Joseph: Procès de Joseph Smith); et ses parents perdent leur ferme parce qu’ils n’arrivent pas à effectuer le dernier paiement sur leur hypothèque. Ces malheurs, ainsi que d’autres expériences, vont approfondir et fortifier le jeune homme qui apprend à discerner le bien du mal et à supporter l’opposition.
Une fois que Joseph a obtenu les plaques en 1827, les voisins curieux et parfois malveillants de Manchester et de Palmyra le mettent dans l’impossibilité de commencer le travail de traduction. Ils fouillent de fond en comble la maison et la grange des Smith et ce n’est qu’en déplaçant et en cachant constamment les plaques qu’il réussit à assurer leur sécurité. Il lui a été strictement défendu de les montrer à qui que ce soit, mais cela ne satisfait pas les chercheurs de curiosités. Alva, le frère d’Emma, propose son aide; il transporte le couple avec ses affaires et les plaques – cachées dans un tonneau – à Harmony, en Pennsylvanie, à deux cents kilomètres de là, où le père d’Emma habite. Joseph obtient de son beau-père, Isaac Hale, un terrain et une petite maison. C’est là que la traduction va commencer (voir Livre de Mormon – Traduction par Joseph Smith).
Martin Harris, un voisin de Palmyra bien disposé, va s’intéresser suffisamment aux plaques pour rendre visite à Joseph à Harmony. Avec les plaques, Joseph a reçu un instrument appelé interprètes, ou urim et thummim, qui va lui permettre de traduire les caractères gravés sur les plaques métalliques. Joseph copie quelques caractères que Martin va porter à des linguistes à Albany et à New York pour vérifier le travail de Joseph. Il y a une certaine confusion au sujet de ce qui s’est passé lors de ces entretiens, mais il ne fait pas de doute que Martin Harris a été satisfait (voir Transcription Anthon). Quand il revient à Harmony, il se propose pour écrire sous la dictée pendant que Joseph traduit. Entre le 12 avril et le 14 juin 1828, ils vont à eux deux remplir 116 pages de manuscrit. C’est à ce moment-là que Harris, qui subit les doutes de sa femme au sujet de l’existence des plaques, demande la permission de lui montrer le manuscrit ainsi qu’à quatre autres membres de la famille. Joseph Smith cède à contre-cœur. Plusieurs semaines se passent sans aucune nouvelle de Martin. Joseph décide alors de se rendre chez ses parents à Manchester (New York) pour lui demander des comptes. Martin, désespéré, lui avoue qu’il ne retrouve pas le manuscrit. Cédant aux instances de son entourage, il a montré le manuscrit aux voisins contrairement à ce qui avait été convenu et quelqu’un l’a volé (voir Manuscrit, 116 pages perdues).
À l’occasion de cette crise, Joseph reçoit, par l’urim et le thummim, une révélation dans laquelle le Seigneur le réprimande vertement. Il le tient plus que Martin pour responsable de la perte du manuscrit. «Tu n’aurais pas dû craindre l’homme plus que Dieu», lui dit-il (D&A 3:7). Martin ne transcrira plus pour Joseph, et à partir de ce moment-là jusqu’au printemps de 1829, Joseph avance peu dans la traduction. En avril, Oliver Cowdery, un jeune instituteur qui a pris pension chez les Smith à Manchester, entend parler du Livre de Mormon. Ayant lui-même reçu une vision du Seigneur et des plaques, il est persuadé que l’œuvre est divine et se propose pour remplir les fonctions de secrétaire (PWJS, p. 8). À partir du 7 avril 1829, Joseph et Oliver, vont travailler ensemble presque constamment jusqu’à ce que la traduction soit finie en juin, un peu plus de deux mois plus tard.
Au cours de la traduction d’une partie de 3 Néphi, qui décrit la façon de baptiser, Joseph et Oliver se demandent s’ils n’ont pas besoin, eux aussi, de baptême. Comme il en a pris l’habitude, Joseph demande des instructions à Dieu. Le 15 mai 1829, alors que Oliver et lui sont occupés à prier, un messager céleste leur apparaît. Il se présente comme étant Jean-Baptiste et leur confère la Prêtrise d’Aaron, qui leur donne l’autorité de baptiser (voir Prêtrise d’Aaron: Rétablissement). Avec cette nouvelle autorité et sous la direction de l’ange, les deux hommes se baptisent mutuellement dans la Susquehannah. Cette révélation crée un principe important dans l’Église, à savoir que des ordonnances divines telles que le baptême ne peuvent être accomplies que par les personnes qui ont reçu l’autorité dans la prêtrise par ordination. Jean-Baptiste dit à Joseph et à Oliver qu’ils recevront plus tard une seconde prêtrise, une prêtrise supérieure appelée Prêtrise de Melchisédek. Plus tard, Pierre, Jacques et Jean leur apparaissent au bord de la Susquehannah, quelque part entre Harmony et Colesville (New York) et les ordonnent apôtres (voir Prêtrise de Melchisédek: Rétablissement de la Prêtrise de Melchisédek).
Arrivée la fin mai 1829, l’opposition religieuse contre Joseph s’est développée à Harmony et Oliver et lui vont avoir besoin d’un endroit plus calme pour travailler. Oliver écrit à un ami, David Whitmer, qui accepte de les installer dans la ferme familiale à Fayette (New York). Emma les y rejoint peu après. Le copyright du Livre de Mormon est obtenu le 11 juin 1829 et la traduction est bientôt terminée. Au moment où ils finissent le livre, Joseph Smith apprend par la révélation que d’autres seront autorisés à voir les plaques d’or. Le Livre de Mormon lui-même promet des témoins et les associés de Joseph sont avides de savoir qui va avoir ce privilège. Martin Harris, David Whitmer et Oliver Cowdery sont choisis; l’ange Moroni leur montre les plaques et ils entendent la voix de Dieu leur déclarer que l’ouvrage a été traduit par le pouvoir de Dieu. Quelques jours plus tard, à Manchester, Joseph Smith reçoit l’autorisation de montrer les plaques à huit autres hommes. Ils vont les examiner de manière approfondie et les soupeser. Les déclarations de ces deux groupes de témoins seront imprimées sur les dernières pages de l’édition de 1830 du Livre de Mormon et apparaissent sur les premières pages de toutes les éditions récentes (voir Témoins du Livre de Mormon).
La recherche d’un imprimeur disposé à publier le Livre de Mormon s’avère laborieuse. Les gens de Palmyra, qui se méfient de Joseph Smith, se coalisent pour intimider l’imprimeur local, Egbert B. Grandin, en menaçant de ne pas en acheter d’exemplaires. D’autres, comme Lucy Harris, l’épouse de Martin, contestent les mobiles financiers de Joseph. Après être allé jusqu’à Rochester pour entrer en contact avec des imprimeurs, Joseph persuade Grandin d’accepter le travail. La garantie de Martin Harris a raison des hésitations de Grandin. Le 25 août 1829, Harris hypothèque sa ferme, s’engageant à payer $3.000 pour 5.000 exemplaires. Joseph et Martin espèrent vendre assez d’exemplaires pour lever au moins $3.000, mais Martin finira par devoir vendre 60 hectares pour tenir son engagement. La composition commence en août 1829 et les exemplaires terminés sont disponibles le 26 mars 1830.
La publication du Livre de Mormon est l’aboutissement du travail qui occupe Joseph Smith depuis qu’il a reçu les plaques en 1827. Entre-temps, les révélations qu’il reçoit l’informent que la traduction du Livre de Mormon n’est pas la fin de sa mission divine. Il doit aussi organiser une église. Samuel Smith avait été baptisé à Harmony fin mai 1829; Hyrum Smith, David et Peter Whitmer, fils, et d’autres avaient été baptisés en juin dans le lac Seneca. Ils avaient commencé à se réunir et ils avaient enseigné et avaient essayé de persuader tous ceux qui demandaient des renseignements. Le 6 avril 1830, chez Peter Whitmer, père, à Fayette (New York), Joseph Smith organise l’Église de Jésus-Christ (voir Organisation de l’Église, 1830; Nom de l’Église). Six hommes s’inscrivent comme membres en la présence de plus de cinquante personnes. Le groupe soutient deux officiers comme dirigeants de l’Église, Joseph Smith comme premier ancien et Oliver Cowdery comme deuxième ancien. Joseph reçoit aussi les titres de voyant, de traducteur et de prophète. En outre, une révélation prévoit l’ordination d’anciens, de prêtres, d’instructeurs et de diacres comme prêtrise laïque (voir Doctrine et Alliances: Sections 20-22). Certaines des personnes laïques présentes lors de l’organisation sont ordonnées ce jour-là et, dès le départ, l’Église ne prend aucune disposition pour créer un clergé spécial (voir Participation des laïcs et direction).
Trois groupes de croyants sont organisés en branches de l’Église débutante peu après son organisation: un à Fayette, un autre à Manchester dans la vieille maison des Smith et un troisième à Colesville, dans le sud de l’état de New York, près de la ferme de Josiah Stowell (dans la circonscription de South Bainbridge, comté de Chenango), ancien employeur et partisan loyal de Joseph. Les membres de la famille de Joseph Knight, qui ont fourni à Joseph et à ses collaborateurs de la nourriture et des vêtements pendant la traduction, habitent à Colesville et constituent le noyau de la branche. Joseph et Emma retournent dans leur maison de Harmony, mais se réunissent avec les trois branches lors de conférences trimestrielles prescrites tenues à la ferme de Peter Whitmer en juin et en septembre 1830.
Pendant l’été de 1830, les ennuis commencent. À deux reprises, Joseph est convoqué devant les tribunaux pour trouble de l’ordre public. Les deux fois il est acquitté. Mais ce qui perturbe davantage Joseph, c’est que certains de ses propres disciples mettent en cause son autorité et prétendent à leurs propres révélations et à leurs propres prérogatives. Hiram Page, mari de Catherine Whitmer et ordonné instructeur en juin 1830, écrit une série de révélations qu’il prétend venir de Dieu. Bien qu’encore jeune et inexpérimenté, Joseph se rend compte de la confusion et du danger que présente un grand nombre de voix essayant de parler avec autorité. À la conférence de septembre à Fayette, Joseph reçoit une révélation qui détermine qu’une seule personne, approuvée par le consentement commun, doit recevoir des commandements et des révélations pour l’Église entière (D&A 20:65; 28:1-3, 11-13). Hiram Page n’a pas cette autorisation. Après avoir entendu Joseph, la conférence le confirme comme révélateur unique pour l’Église (D&A 28:2; D. Cannon et L. Cook, dir. de publ., Far West Record, Salt Lake City, 1983, p. 3). Ce principe qui veut que la révélation pour toute l’Église vienne de l’homme soutenu comme prophète est, aujourd’hui encore, la pratique de l’Église.
Dans les six mois qui suivent l’organisation de l’Église, des convertis s’ajoutent en petit nombre. Samuel, frère de Joseph Smith, s’en va avec des exemplaires du Livre de Mormon à donner à ceux que cela intéresse. Joseph Smith, père, rend visite à ses frères, sœurs et parents dans le comté de St Lawrence (New York), où la plupart d’entre eux habitent, pour leur dire ce qui est arrivé. Ces expéditions donneront plus tard des conversions, mais très peu au moment même. Parley P. Pratt, un fermier de l’Ohio, croit que Dieu l’a conduit à la maison de Hyrum Smith, frère de Joseph, pour qu’il puisse s’informer sur le Livre de Mormon.
L’entreprise missionnaire la plus réussie de l’époque est lancée en septembre et octobre 1830, quand Oliver Cowdery, Peter Whitmer, fils, Parley Pratt et Ziba Peterson sont appelés à instruire les Indiens (voir Mission lamanite de 1830-1831). Le Livre de Mormon présente un intérêt particulier pour les Indiens américains parce que c’est un document religieux de l’Amérique antique, et les quatre sont chargés de porter ce message aux Indiens qui sont occupés à s’assembler dans le territoire à l’ouest du Missouri. La mission va cependant être notable autant pour ce qui se passe en cours de route que pour la prédication aux Indiens. Après avoir quitté New York, les missionnaires s’arrêtent dans la région de Mentor-Kirtland dans le nord-est de l’Ohio près de l’ancienne ferme de Pratt. Avant de devenir membre de l’Église, Pratt avait fait partie du mouvement campbellite, qui était en train de devenir l’Église des Disciples du Christ. Ce groupe croit qu’il faut adhérer rigoureusement aux enseignements et aux pratiques de l’Église du Nouveau Testament, éliminant tous les ajouts postérieurs. Les enseignements de Joseph Smith séduisent beaucoup d’entre eux parce que sa doctrine contient pour eux le rétablissement pur du vrai christianisme. Quelque 130 personnes vont se convertir, dont le prédicateur campbellite principal de la région, Sidney Rigdon. En quelques semaines, les quatre missionnaires vont presque doubler le nombre des membres de l’Église. Ils poursuivent leur chemin cet hiver-là vers le territoire indien, endurant de grandes souffrances au cours de leur long voyage à pied de St Louis à travers le Missouri. Dans l’ouest du Missouri, ils vont trouver une région dans laquelle l’Église commencera bientôt à s’installer. Ils enseignent aussi chez les Delaware et les Shawnee jusqu’à ce que les autorités gouvernementales leur ordonnent de cesser à cause d’une interdiction de faire du prosélytisme auprès des tribus.
Peu après le départ des missionnaires de l’Ohio pour l’Ouest en décembre 1830, Sidney Rigdon part pour New York, accompagné d’Edward Partridge. Ils apportent la nouvelle des conversions en Ohio et insistent auprès de Joseph Smith et des membres pour qu’ils aillent s’installer là-bas. Joseph est disposé à prendre la suggestion au sérieux à cause des révélations qu’il a reçues au sujet du rassemblement de l’Église (D&A 37:1-4; 38:31-33). En effet, pendant le reste du siècle, les convertis à l’Église vont se réunir dans un lieu de rassemblement central, d’abord en Ohio, puis au Missouri, en Illinois et finalement en Utah. Une autre révélation traite de l’avènement de Jésus-Christ et des destructions qui vont s’abattre sur le monde avant que cet événement ne se produise. Elle dit qu’avant ces tribulations, le peuple de Dieu sera «rassemblé en un seul endroit à la surface de ce pays» (D&A 29:8). Une autre révélation parle d’une ville de Sion qui doit être construite quelque part dans l’Ouest (D&A 28:9). Ces allusions amènent les membres de l’Église à se rendre compte qu’ils ne vont pas demeurer longtemps à New York.
Quand une révélation arrive en décembre 1830 (D&A 37) leur disant de partir pour l’Ohio, la plupart l’acceptent. À une conférence tenue le 2 janvier 1831, des directives et une révélation supplémentaire (D&A 38) sont données pour le déménagement. Le prophète, Emma et quelques autres partent les premiers et arrivent à Kirtland le 1er février 1831 pour préparer l’arrivée des autres. La branche de Colesville, sous Newel Knight, la branche de Fayette, sous la mère du prophète et Thomas Marsh et la branche de Manchester, sous Martin Harris, se rendent en Ohio en des convois distinct pendant avril et mai 1831. À la mi-mai, pratiquement tous les mormons de New York des branches citées sont à Kirtland.

Bibliographie
Backman, Milton V., Jr., Eyewitness Accounts of the Restoration, éd. rév. Salt Lake City 1986.
Bushman, Richard L., Joseph Smith and the Beginnings of Mormonism, Urbana, Ill., 1984.
Madsen, Truman G., éd. invité, BYU Studies 9, printemps 1969, pp. 235-404 (numéro entièrement consacré aux origines des saints des derniers jours à New York).
Porter, Larry C., «A Study of the Origins of The Church of Jesus Christ of Latter-day Saints in the States of New York and Pennsylvania, 1816-1831», thèse de doctorat université Brigham Young, 1971.
Smith, Lucy Mack, History of Joseph Smith, dir. de publ. Preston Nibley, Salt Lake City, 1958.
Whittaker, David J., “Sources on Mormon Origins in New York and Pennsylvania”, Mormon History Association Newsletter n° 43, mars 1980, pp. 8-12.

Histoire de l’Église: 1831-1844, Périodes de l’Ohio, du Missouri et de Nauvoo
Auteurs: BACKMAN, MILTON V., Jr. et ESPLIN, RONALD K.

[Cet article se concentre d’abord sur l’Église dans le nord-est de l’Ohio, où Kirtland est le siège de l’Église, et dans l’ouest du Missouri. À partir de 1839, l’attention se porte sur l’ouest de l’Illinois où Nauvoo devient le nouveau siège. On trouvera dans Conflit au Missouri un traitement sur les difficultés qui ont été à l’origine des violences et finalement de l’expulsion hors du Missouri.
Cet article décrit l’évolution de l’organisation et de la doctrine et examine les tensions et les conflits entre les saints et leurs voisins, et au sein de l’Église elle-même. Beaucoup d’entre eux sont le résultat de la tentative de créer une communauté sacrale étroitement unifiée répondant à la révélation continue au sein d’une société souvent hostile à ces buts. Le prophète Joseph Smith, dont le martyre met fin à cette période, en est une figure dominante; voir les rubriques sous Smith, Joseph, et Visions de Joseph Smith. Le Rassemblement et les Temples sont les préoccupations principales; voir Temple de Kirtland et Temple de Nauvoo.]
En octobre 1830, quatre missionnaires en route pour prêcher aux Indiens à l’ouest du Missouri (voir Mission lamanite de 1830-1831) présentent l’Évangile rétabli aux communautés du nord-est de l’Ohio. Avant de reprendre leur voyage, ils baptisent quelque 130 convertis, organisent les nouveaux membres en petites «branches» et nomment des dirigeants pour chaque groupe. Trente-cinq de ces membres habitent à Kirtland (Ohio), localité située directement à l’est de ce qui est aujourd’hui le Cleveland métropolitain.
Sidney Rigdon, prédicateur restaurationiste de cet endroit devient membre de l’Église en novembre 1830 et informe Joseph Smith du succès des missionnaires. À la suite de cela, le prophète consulte le Seigneur et reçoit des révélations (D&A 37:3; 38:32) appelant les convertis de l’Église récemment organisée à New York à se rassembler en Ohio. Sa famille et lui sont à Kirtland dès le début de février 1831 et quelque deux cents saints de New York l’auront suivi quand arrive l’été, faisant du nord-est de l’Ohio le premier lieu de rassemblement des saints.
La plupart des saints de New York et beaucoup des premiers convertis de l’Ohio ne vont pas rester en Ohio. Pendant l’été de 1831, Joseph Smith se rend à la frontière du Missouri et désigne Independence (comté de Jackson, Missouri) comme deuxième lieu de rassemblement. Les saints des derniers jours s’attendent à ce qu’une ville sainte, une nouvelle Jérusalem, soit fondée dans une nouvelle Sion nord-américaine, une ville de refuge contre les tribulations qui vont affliger les méchants dans les derniers jours (D&A 29:7-9; 45:65-71; 57:1-3). Sidney Rigdon consacre le pays pour le rassemblement et Joseph Smith précise l’emplacement exact où un temple sera construit, et, après en avoir nommé divers autres pour superviser le rassemblement en Sion, retourne en Ohio.
À Hiram (Ohio), un village d’agriculteurs situé à une cinquantaine de kilomètres au sud de Kirtland, Joseph Smith travaille à sa traduction inspirée de la Bible (voir Traduction de la Bible par Joseph Smith (TJS)]), une entreprise qui va assurer son écolage. La nécessité dans laquelle il se trouve de demander, dans l’esprit de la prière, des éclaircissements sur certains passages et certains points de doctrine va fréquemment susciter de nouvelles révélations et apporter une nouvelle compréhension. Après avoir été battus et enduits de goudron et de plumes par des émeutiers en mars 1832, le prophète et Sidney Rigdon, qui lui sert de secrétaire, vont s’installer avec leurs familles à Kirtland.
Les deux lieux de rassemblement du début des années 1830 auront chacun eu un but différent. Bien que les saints des derniers jours émigrent vers la frontière du Missouri pour poser les fondements d’une nouvelle Sion, le siège administratif de l’Église, responsable de la direction du programme missionnaire et de la construction du premier temple, reste en Ohio. Il y a une certaine concurrence entre les deux centres, les deux ayant besoin de ressources et de membres et les deux voulant la présence du prophète Joseph Smith. Mais, comme l’explique la révélation, les buts des deux sont complémentaires: la «dotation d’en haut» promise associée au temple de Kirtland est un préalable au succès en Sion (D&A 105:9-13, 33). Joseph Smith résidera à Kirtland jusqu’en 1838, restant en contact avec les membres du Missouri par courrier et messager, et s’y rendant cinq fois pour instruire les membres de l’Église en ce qui concerne la politique, les programmes et la croyance.
Au comté de Jackson, les saints des derniers jours publient deux périodiques, The Evening and The Morning Star et The Upper Missouri Advertiser, et essayent de mettre sur pied un ordre économique unique basé sur la consécration et l’affectation d’intendances sur des propriétés et d’autres actifs, suivant les directives données par révélation à Joseph Smith (voir Missouri: Les Communautés de saints des derniers jours dans les comtés de Jackson et de Clay). Les désaccords au sujet des exigences juridiques et l’égoïsme individuel vont entraver la mise en œuvre du système, mais l’obstacle de base est que les saints ont trop peu de capital et très peu à consacrer. Malgré tout, certains participants sont inspirés par les idées fondatrices et les idéaux qui sous-tendent l’effort vont laisser un legs important (voir Ordres unis).
Bien qu’émigrant dans l’ouest du Missouri pour construire une ville de paix et de refuge, les saints des derniers jours rencontrent une forte hostilité. Les colons déjà installés considèrent ces nouveaux venus comme une menace à leur propre manière de vivre. Les Missouriens se plaignent que les mormons cherchent à influencer les esclaves, que leur mode de vie «de l’Est» est incompatible avec la frontière du Missouri, qu’ils sont une menace économique et politique, que leur amitié pour les Indiens menace la sécurité de la région et qu’ils ont des croyances religieuses peu orthodoxes. Ces accusations révèlent un conflit culturel important entre les saints immigrés et les «vieux» colons. L’immigration rapide des saints des derniers jours dans le comté de Jackson intensifie les tensions, ce qui va donner lieu à des affrontements.
Des violences s’étant produites pendant l’été de 1833, le gouverneur Daniel Dunklin envoie une milice locale dans la région pour rétablir la paix. Pensant que la milice va protéger tous les colons, les saints des derniers jours rendent leurs armes à cette force militaire. Mais les autres Missouriens ne seront pas désarmés, laissant les membres de l’Église sans défense. Au début de novembre 1833, les émeutiers chassent plus de mille saints des derniers jours du comté de Jackson, les forçant à abandonner leurs maisons et leurs fermes. La plupart d’entre eux traversent le fleuve Missouri pour se réfugier au comté de Clay.
Entre novembre 1833 et l’été de 1836, le comté de Clay va être le lieu de rassemblement principal des saints des derniers jours au Missouri. Pendant ces années, les membres de l’Église vont essayer sans succès d’obtenir réparation pour la perte de leurs propriétés du comté de Jackson. Ils vont aussi demander la protection du gouvernement pour une tentative de retour à leurs terres. En 1834, croyant que le gouverneur Dunklin a accepté d’accorder l’aide de la milice de l’état pour seconder leurs propres efforts, les membres de l’Église réunissent une petite force paramilitaire venant d’Ohio et d’ailleurs pour accompagner les réfugiés du Missouri lors de leur retour au comté de Jackson. Le camp de Sion, nom donné à l’expédition, n’obtiendra pas l’appui du gouverneur et se dissoudra en juin plutôt que de provoquer un conflit armé.
Bien qu’ayant échoué dans son but premier, le camp de Sion aura un effet profond sur beaucoup de ses participants et aura son importance sur le long terme. Pour la plupart, la marche forcée d’Ohio au Missouri, plus de 1300 kilomètres par une chaleur humide, aura été le défi physique le plus difficile de leur vie. Cela fera encore plus mal à certains de se rendre compte que, malgré cette épreuve, ils n’auront pas aidé les saints du Missouri à retourner dans leurs terres. Ils vont critiquer le leadership de Joseph Smith et l’expérience contribuera plus tard à leur dissidence. Mais pour beaucoup de participants, le camp de Sion aura été une occasion sans pareille de vivre jour et nuit avec le prophète du Seigneur – réminiscence de l’Israël antique sous Moïse. L’expérience va les unir à Joseph et les uns aux autres et c’est du creuset du camp de Sion que vont sortir beaucoup de dirigeants futurs de l’Église. Les deux réactions représentent des conceptions divergentes de la façon dont un prophète doit diriger et de la façon dont une société basée sur la révélation et la prêtrise doit être organisée – des divergences qui vont s’exacerber plus tard à Kirtland.
La révélation qui dissout le camp de Sion réoriente l’attention sur l’Ohio et sur la nécessité de terminer sans retard le temple de Kirtland (D&A 105). Avant de retourner en Ohio, Joseph Smith organise un pieu au Missouri et nomme une présidence et un grand conseil, l’équivalent de ce qu’il a fait à Kirtland le mois de février précédent. Bientôt, plusieurs dirigeants de l’Église du Missouri vont partir pour Kirtland pour aider à la construction du temple.
Tous les intéressés savent que le séjour des saints au comté de Clay est provisoire. Le retour au comté de Jackson étant maintenant peu probable, la pression monte pour qu’ils trouvent un autre endroit. Exhortés par les dirigeants de la communauté à partir avant que les violences n’éclatent, la plupart des saints des derniers jours vont émigrer vers le nord et créer à Far West un nouveau siège de l’Église dans l’Ouest. Répondant à ce mouvement de milliers de saints des derniers jours vers le nord-ouest inhabité du Missouri, le gouvernement du Missouri va créer, vers la fin de 1836, deux nouveaux comtés, Caldwell et Daviess (voir Missouri: Communautés de saints des derniers jours dans les comtés de Caldwell et de Daviess). Comme la plupart des saints des derniers jours s’installent à Caldwell, on va l’appeler le comté mormon.
Joseph Smith enseignera plus tard qu’un des premiers buts du rassemblement des fidèles à n’importe quelle époque est de construire une maison du Seigneur où pourront être révélées les ordonnances de son temple. Pendant que la construction du temple progresse, la population des saints à Kirtland va passer d’une centaine d’âmes en 1832 à plus de 1.500 en 1836. Les saints des derniers jours arrivent de la Nouvelle Angleterre, de New York et d’ailleurs pour aider à la construction de la maison du Seigneur, dans laquelle, leur a-t-il été promis dès janvier 1831, ils seront dotés du pouvoir d’en haut (D&A 38:32).
En mars 1836, le temple de Kirtland est achevé et consacré et, pendant les mois qui précèdent et suivent la consécration, les saints vont jouir d’une période de Pentecôte peu commune. Dans le temple, une semaine après sa consécration, les clefs de la prêtrise vont être conférées à Joseph Smith et à Oliver Cowdery lors de visitations de Moïse, Élias et Élie. Les bénédictions et les instructions reçues dans le temple sont particulièrement importantes pour les missionnaires (voir Missions), dont les voyages de prosélytisme au départ de Kirtland pendant les années 1830 s’étendent du Canada au sud américain et, en 1837, aux îles Britanniques, outre une œuvre missionnaire intensive en Ohio.
Tandis que son siège reste à Kirtland, l’Église va connaître un développement doctrinal et administratif majeur. Un certain nombre parmi les révélations les plus importantes des Doctrine et Alliances vont été données dans les régions de Kirtland et de Hiram, notamment la vision de la résurrection et des trois degrés de gloire (D&A 76), la loi de consécration et d’intendance (D&A 42), la Parole de Sagesse, parfois appelée la loi de santé du Seigneur (D&A 89), des révélations sur la prêtrise et sur son organisation (D&A 84, 107) et la venue du millénium (D&A 1, 29, 88, 133). Beaucoup de ces révélations constituent la réponse aux questions soulevées par la traduction de la Bible faite par Joseph Smith. Joseph Smith reçoit aussi une révélation concernant le mariage plural (D&A 132), mais elle ne sera mise par écrit qu’en 1843. Le livre d’Abraham, qui ne sera publié qu’en 1842, résulte de l’acquisition par le prophète en 1835 d’une collection de momies et de papyrus venus d’Égypte.
Comme la croissance nécessite un développement de l’organisation, une série de révélations commande la création de dirigeants locaux et généraux de l’Église. Il s’agit de l’office d’évêque en 1831, de la Première Présidence de l’Église en 1832 et d’un grand conseil permanent en 1834. En février 1835, le Collège des douze apôtres et le collège des soixante-dix sont organisés, choisis principalement parmi les vétérans du camp de Sion. Les deux collèges ont la responsabilité du prosélytisme. Bien qu’il soit dit que les Douze viennent en second par rapport à la Présidence, leurs tâches immédiates sont de diriger l’œuvre des soixante-dix et de superviser l’Église à l’extérieur de ses pieux organisés.
La révélation commande aussi aux dirigeants de l’Église d’étudier abondamment dans beaucoup de domaines de la connaissance en vue de leur ministère et ordonne qu’une école des prophètes soit organisée dans ce but (D&A 88:77-80, 118-141). L’attitude et les impératifs exprimés dans la révélation vont exercer une grande influence non seulement dans la création de cette première école patronnée par l’Église mais aussi dans l’attitude de l’Église vis-à-vis des études et de l’éducation pendant toute son histoire.
La publication de The Evening and The Morning Star, interrompue au Missouri par l’expulsion hors du comté de Jackson, va reprendre pendant près d’un an à Kirtland. Le Latter Day Saints’ Messenger and Advocate, successeur du Star, sera le premier périodique de l’Église à publier certaines des lettres d’Oliver Cowdery traitant de l’histoire de Joseph Smith. Les Doctrine et Alliances, contenant beaucoup de révélations données à Joseph Smith, sont publiées en 1835 à Kirtland.
La promulgation de nouveaux points de doctrine et la création d’une hiérarchie dans l’Église vont offenser certains saints des derniers jours qui préfèrent la foi moins compliquée qu’ils avaient embrassée dans la petite enfance de l’Église. Ceux qui ne partagent pas la vision du prophète Joseph Smith d’une nouvelle société organisée sous la prêtrise vont aussi être perturbés par le nombre accru de directives que les dirigeants de l’Église donnent aux membres dans les questions temporelles et par la participation importante du prophète aux affaires économiques. L’effondrement d’une Société de Sécurité de Kirtland non dotée d’une charte patronnée par les dirigeants de l’Église va contribuer à pousser le mécontentement à son maximum (voir Économie à Kirtland). Des procès vont être intentés à Joseph Smith, des menaces vont être proférées contre sa vie et contre celle de ses partisans les plus vigoureux et un certain nombre de membres en vue dans l’Église vont apostasier. Au milieu de cette agitation, le prophète va envoyer certains de ses partisans les plus fidèles en mission dans les îles Britanniques. Là, en moins d’un an, ils feront plus de 1.500 convertis et jetteront les bases pour que des milliers d’autres les suivent (voir Missions des Douze dans les îles Britanniques).
En 1837, les saints des derniers jours dépassent en nombre les autres résidants de la circonscription de Kirtland. Cette année-là, des candidats mormons sont élus à tous les principaux offices de la ville sauf celui d’agent de police. Beaucoup de membres de l’Église de Kirtland sont relativement pauvres et vivent dans des groupes de petites maisons provisoires. Certains non-mormons s’irritent de cet afflux de pauvres et d’une direction de l’Église qui leur semble antidémocratique et donc anti-américaine. Des rivalités économiques et politiques apparaissent, accompagnées de menaces et d’actes de violence. La pression monte à l’extérieur pour que les mormons quittent Kirtland au moment même où de violentes dissensions internes assaillent l’Église. En janvier 1838, Joseph Smith, Sidney Rigdon et d’autres dirigeants de l’Église dont la vie est menacée fuient vers l’ouest du Missouri, suivis graduellement par la plupart des résidants de Kirtland et du voisinages qui sont membres de l’Église.
En 1837-1838, l’émigration des saints vers l’ouest du Missouri augmente rapidement. Cette croissance déclenche une agitation accrue parmi les voisins qui craignent une domination économique et politique de la part des mormons et qui voient dans l’afflux une menace contre leur mode de vie. Les griefs qui ont été exprimés en 1833 par les citoyens du comté de Jackson vont se répéter et s’amplifier. Les rumeurs et les accusations deviennent la base d’actes d’intolérance. Certains insistent sur le fait que puisque le comté de Caldwell a été créé pour les mormons, les saints des derniers jours ne doivent pas s’installer en dehors des frontières de ce comté.
L’affrontement décisif est déclenché par une bataille qui éclate quand des voyous essaient d’empêcher les saints de voter à Gallatin (comté de Daviess). Des rapports exagérés sur cette mêlée provoquent une agitation qui ne cesse de grandir et mènent à la formation de groupes d’émeutiers décidés à chasser tous les mormons du comté de Daviess. Les émeutiers menacent aussi les saints des derniers jours habitant à DeWitt (comté de Carroll) jusqu’à ce que, le 11 octobre 1838, ils soient forcés d’abandonner leurs maisons et leurs fermes. Pendant qu’ils sont en route vers le bastion mormon de Far West, les réfugiés sont continuellement harcelés et plusieurs meurent.
Le gouverneur Lilburn Boggs ayant rejeté les demandes de protéger les saints de DeWitt, les dirigeants de l’Église mobilisent la milice du comté de Caldwell et se préparent à se protéger. Certains membres des Danites, organisés à l’origine pour aider au développement de la communauté mormone, se livrent à des activités paramilitaires, brûlant notamment le siège des émeutiers à Gallatin et à Millport qui les avaient menacés de destruction. Entre-temps, une milice locale force les saints des derniers jours à abandonner leurs fermes dans le comté de Ray et menacent de tuer des membres de l’Église accusés d’être des espions. Pour essayer d’empêcher que la menace ne soit exécutée, une unité de la milice du comté mormon de Caldwell affronte, le 25 octobre, celle de Ray à la Crooked River. Des hommes sont tués de part et d’autre et de folles rumeurs parlant de raids mormons jettent de l’huile sur le feu dans la contrée. Le 27 octobre, sans aucun examen des accusations et des contre-accusations, le gouverneur Boggs accuse les membres de l’Église d’être à l’origine des hostilités et commande à la milice de l’état d’exterminer les Mormons ou de les chasser de l’état (voir Ordre d’extermination). Trois jours plus tard, le massacre de Haun’s Mill, au cours duquel plus de deux cents miliciens attaquent une colonie minuscule de saints des derniers jours et en tuent froidement dix-sept, rend évidente la probabilité que l’ordre de Boggs sera exécuté littéralement.
Face à des forces de milice écrasantes, les saints des derniers jours se rendent à Far West et acceptent de quitter l’état. Quelque 10.000 membres de l’Église sont forcés de quitter le Missouri, la plupart en hiver et au milieu d’une hostilité intense. Prenant la direction de l’est, ils vont traverser le fleuve Mississippi vers l’Illinois. Après avoir subi d’immenses pertes de propriété et certaines pertes en vies humaines, la plupart atteignent, au début de 1839, Quincy et d’autres localités de l’ouest de l’Illinois dont les résidants offrent aide et abri.
Entre-temps, les dirigeants de l’Église au Missouri sont arrêtés et accusés de trahison. La plupart seront rapidement libérés, mais dix seront emprisonnés sans procès pendant l’hiver de 1838-1839, certains à la prison de Richmond et d’autres à la prison de Liberty. Pendant la demie année de son séjour à la prison de Liberty, le prophète Joseph va mettre sur papier certains des écrits inspirés les plus pénétrants et les plus éloquents de sa carrière (D&A 121-23), et il en sortira en avril 1839 avec une compréhension claire de ce qu’il doit faire pour terminer sa mission d’une manière satisfaisante et bien décidé à faire ce qu’il faut pour cela.
Les saints prennent des dispositions pour acheter des terres pour un nouveau lieu de rassemblement des deux côtés d’une courbe du fleuve Mississippi au nord de Quincy. Nauvoo va remplacer le hameau de Commerce et devenir le siège de l’Église. Beaucoup de membres s’installent aussi de l’autre côté du fleuve dans le comté de Lee, en Iowa.
Tourmentés par la malaria, les saints de la région de Nauvoo vont chercher à faire face à de plus grands problèmes en même temps qu’ils en sont encore à se démener pour créer une communauté viable après le désastre du Missouri. Essayant d’obtenir réparation pour les pertes du Missouri, le président Joseph Smith va rendre visite aux dirigeants politiques nationaux à Washington, D.C, mais l’accent mis sur les droits des états exclut l’aide fédérale. En dépit de la maladie et de la pauvreté, neuf membres du Collège des douze apôtres remplissent un appel à faire du prosélytisme dans les îles Britanniques. Ils arrivent en Angleterre au début de 1840 et pendant les quinze mois qui vont suivre ils vont voir près de 5.000 convertis se joindre aux quelque 1.500 qu’ils ont trouvés à leur arrivée. L’année suivante, Orson Hyde, un apôtre, visite Jérusalem et consacre la Palestine au rassemblement des Juifs (voir Israël: Rassemblement d’Israël).
En Angleterre, les Douze créent le Latter Day Saints’ Millennial Star et publient un livre de cantiques et une deuxième édition du Livre de Mormon, fondant par la même occasion ce qui va devenir un centre important de publications mormones pendant le demi-siècle qui va suivre. Les Douze lancent en 1840 l’émigration des convertis britanniques vers l’Amérique et pendant les six années suivantes, près de 5.000 personnes émigrent vers Nauvoo (voir Immigration et émigration). Sous la direction de Brigham Young, le Collège des Douze devient une force administrative efficace pendant cette mission. Quand ils retournent à Nauvoo, ils reçoivent de nouvelles responsabilités. En août 1841, Joseph Smith annonce que les Douze se tiennent maintenant «à côté de la Première Présidence» et leur juridiction est étendue de manière à comprendre la supervision des pieux de l’Église aussi bien que des régions de mission.
Drainant les marécages et accueillant un nombre de plus en plus important de colons, les saints de Nauvoo créent une communauté prospère qui finira par compter presque 12.000 âmes, rivalisant avec Chicago pour être la plus grande ville de l’Illinois. La construction et la croissance alimentent l’économie, la vie culturelle prospère et les saints mettent sur pied la communauté religieuse la plus importante de leur brève histoire. Ayant appris par expérience qu’ils ne peuvent pas compter sur la bonne volonté des autres pour les protéger, ils recherchent des garanties institutionnelles. Dans les chartes de Nauvoo, le gouvernement de l’état d’Illinois assure les protections que constituent l’autonomie locale, un système judiciaire municipal et une milice urbaine. Décidés à ne plus jamais être sans défense comme ils l’ont été au Missouri, ils font de leur Légion agréée de Nauvoo la plus grande milice de l’Illinois.
Joseph Smith va se trouver, comme cela n’arrive quasiment jamais, dans une situation de pouvoir politique aussi bien qu’ecclésiastique, remplissant à divers moments les fonctions de conseiller municipal, de maire, de général commandant de la Légion de Nauvoo et de rédacteur du principal journal local, le Times and Seasons. Ces postes lui laissent toute latitude pour fonder une société sacrale et pour accomplir les choses qu’il considère comme les plus essentielles à sa mission.
Après avoir reçu, en 1836, des clefs supplémentaires de la prêtrise dans le temple de Kirtland, Joseph Smith désire vivement voir arriver le jour où il pourra remplir ses responsabilités en ce qui concerne le temple et donner des enseignements et des ordonnances supplémentaires aux saints. Quand il sort de la prison de Liberty, il est convaincu que le temps qui lui reste pour le faire est court et que Nauvoo sera sa dernière occasion. Dès que les saints se sont regroupés et sont en sécurité dans leur nouvelle demeure, il commence à exposer un ensemble d’enseignements, d’ordonnances et de schémas d’organisation supplémentaires – dont beaucoup ont trait au temple – qui vont éloigner les saints encore plus de leurs propres idées précédentes et des croyances de leurs voisins. Ce processus commence par une révélation importante en janvier 1841 (D&A 124) qui, entre autres, lance la construction du temple de Nauvoo et va continuer pendant plus de trois ans. En avril 1844, juste trois mois avant sa mort, le processus est complet.
À Nauvoo, Joseph Smith fait des exposés sur la nature de la Divinité et sur l’origine et la destinée du genre humain, mettant l’accent sur la notion de progression éternelle dans le contexte du plan du salut (voir Discours sur King Follett). Enseignant que le salut est accessible à tous, il introduit les ordonnances par procuration pour les personnes décédées, notamment le baptême pour les morts. Malgré le fait qu’il rencontre une certaine résistance à la nouveauté en matière de doctrine et de pratique, poussé qu’il est par le pressentiment qu’il doit éviter tout retard, le Prophète commence en 1841-1842 à introduire le mariage plural et les ordonnances sacrées du temple (voir Dotation) en privé à un petit nombre d’associés de confiance, dont les membres du Collège des Douze, qui devront plus tard les enseigner aux membres de l’Église dignes une fois le temple achevé.
Parmi les nouveautés les plus importantes dans le domaine de l’organisation à Nauvoo, il y a la fondation, en mars 1842, de la Société de Secours, une organisation de bienfaisance sociale et religieuse pour les femmes (voir Société de Secours à Nauvoo). La Société de Secours donne aux femmes une structure qui va faciliter les œuvres caritatives et la fraternité entre femmes. Chose plus importante encore, elle va mettre les femmes en relation étroite avec l’organisation de la prêtrise et contribuer à les préparer aux futures expériences du temple. Les premières paroisses de l’Église sont fondées à Nauvoo et des responsabilités supplémentaires sont définies pour les évêques. Le conseil des cinquante sera le dernier élément d’organisation créé par Joseph Smith. Bien qu’il ait joué un rôle pratique utile pendant plusieurs années après son organisation en mars 1844, sa plus grande importance est qu’il fournit un modèle de gouvernement pour le futur royaume de Dieu sur terre.
Depuis le temple jusqu’au conseil des cinquante, les membres du Collège des douze apôtres vont se tenir aux côtés du Prophète comme ses conseillers et ses assistants les plus proches. Prévoyant le jour où les saints pourraient avoir besoin d’un asile plus sûr dans l’isolement de l’Ouest, Joseph Smith, en février 1844, charge les Douze de mener une expédition pour trouver un tel endroit (voir Émigration vers l’Ouest: Planification et prophétie), mais met, peu après, le projet en attente. Il veut d’abord qu’ils aillent dans l’Est pour une mission plus politique. Quand les démarches auprès des candidats à la présidence lors des élections nationales présidentielles proches ne révèlent personne qui soit disposé à défendre les droits des mormons, le prophète Joseph Smith lance sa propre campagne présidentielle, élaborant un programme électoral pour faire connaître ses idées et s’exprimer au nom de son peuple. Pendant leur prosélytisme d’été habituel, les Douze et d’autres partisans vont se rendre dans l’Est, combinant prédication et campagne électorale. Avant leur départ, vers le 26 mars 1844, Joseph Smith leur donne ses dernières instructions. Il déclare qu’il leur a maintenant donné toutes les clefs de la prêtrise qu’il possède et qu’il est de leur responsabilité d’assumer la charge du royaume tandis que lui se reposera. Il sera assassiné avant leur retour de l’Est.
Bien que Nauvoo grandisse rapidement, les travaux sur ses projets de construction les plus ambitieux, le temple de Nauvoo et l’hôtel de la Maison de Nauvoo, traînent, en partie à cause du manque de capitaux. L’espoir de faire de Nauvoo un centre industriel ne se réalisera pas pour la même raison (voir Nauvoo, Économie). Mais le succès continu du prosélytisme et l’afflux d’immigrés combinés avec la solidarité et le courage au travail des saints des derniers jours vont transformer Nauvoo en un concurrent redoutable sur les plans économique et politique par rapport aux autres villes du comté de Hancock.
Les voisins de Nauvoo qui lui étaient hostiles ont aussi d’autres sujets de se plaindre. L’organisation théocratique de la communauté des saints, avec son unité de but manifeste et son autonomie locale, suscite le ressentiment. La tendance des saints des derniers jours à voter en bloc pour les candidats locaux et de l’état qui sont le plus susceptibles de les favoriser va leur aliéner aussi bien les whigs que les démocrates (voir Nauvoo, Politique). La puissante milice de Nauvoo provoque l’envie et la méfiance. Le fait que le système juridique de la ville protège Joseph Smith des poursuites judiciaires le fait accuser de se mettre hors de portée de la loi.
Comme cet état de choses augmente l’hostilité des adversaires de l’Église, Thomas Sharp, rédacteur d’un journal de la localité voisine de Warsaw, fait de son Warsaw Signal la voix de ces préoccupations et entreprend une croisade sputenue contre Joseph Smith et Nauvoo. Au printemps de 1844, plusieurs anciens compagnons mécontents prennent fait et cause pour les antimormons pour monter une offensive contre le prophète dans Nauvoo même. Ils publient un journal, le Nauvoo Expositor, qui attaque l’Église et lance des accusations incendiaires contre Joseph Smith. Le conseil municipal de Nauvoo décrète le journal danger public et commande au shérif de le détruire, une mesure qui cause la fureur des ennemis du prophète et sert de base à son arrestation. Le 27 juin 1844, Joseph et son frère Hyrum sont assassinés à la prison de Carthage, chef-lieu du comté, pendant qu’ils attendent d’être jugés (voir Prison de Carthage; Martyre de Joseph et de Hyrum Smith).
Le prophète Joseph Smith a jeté les fondements doctrinaux et les bases de l’organisation de l’Église moderne et a préparé Brigham Young et le Collège des douze apôtres à construire sur la base qu’il a créée (voir Succession à la présidence). Son ministère et sa mission sont terminés.

Bibliographie
Allen, James B. et Glen M. Leonard, The Story of the Latter-day Saints. Salt Lake City, 1976.
Backman, Milton V., Jr., The Heavens Resound; Salt Lake City, 1983.
Flanders, Robert Bruce, Nauvoo Kingdom on the Mississippi. Urbana, Ill., 1965.
Gentry, Leland H., “A History of the Latter-day Saints in Northern Missouri, from 1836 to 1839”, thèse de doctorat, université Brigham Young, 1965.
Hill, Marvin S., Quest for Refuge. Salt Lake City, 1989.
LeSueur, Stephen C., The 1838 Mormon War in Missouri Columbia, Mo., 1987.
Pratt, Parley P., Autobiography of Parley P. Pratt. Salt Lake City, 1985.
Underwood, Grant, “Millenarianism and the Early Mormon Mind”. Journal of Mormon History 9, 1982, pp. 41-51.

Histoire de l’Église: 1844-1877, périodes de l’exode et du début de l’Utah
Auteurs: ARRINGTON, LEONARD J. et MAY, DEAN L.

[Après une esquisse des événements qui se sont produits à Nauvoo, après le martyre de Joseph Smith, cet article suit l’exode de Nauvoo vers l’Ouest. Il se concentre ensuite principalement sur les faits politiques et économiques liés à la création d’une nouvelle communauté dans le Grand Bassin sous la direction de Brigham Young. Il examine aussi l’organisation de l’Église, le mariage plural et la construction de temples.
Pour comprendre la vie quotidienne et ce que cela signifiait être saint des derniers jours pendant cette période, voir Vie pionnière et Culte et Histoire sociale et culturelle. On trouvera de plus amples détails sur la direction et l’organisation de l’Église dans Organisation: Histoire de l’organisation et de l’administration, Organisations auxiliaires, École du Dimanche, Association de retranchement, Jeunes Gens. Pour l’exode: Émigration vers l’Ouest: Planification et prophétie; Piste pionnière mormone; Sites historiques; Council Bluffs (Kanesville), Iowa; Iowa, Communautés de saints en; Monument «Voici le lieu». Pour l’évolution de la communauté mormone, consulter: Agriculture; Histoire économique de l’Église; Économie pionnière; Immigration et émigration; Convois de charrettes à bras; Planification de ville; Alphabet de Deseret; Université de Deseret; Indiens américains; et les articles sur les colonies pionnières dans Arizona, Colonies pionnières en; Californie, Colonies pionnières en; Colorado, Colonies pionnières au; Idaho, Colonies pionnières en; Nevada, Colonies pionnières au; Nouveau-Mexique, Colonies pionnières au; Wyoming, Colonies pionnières au; voir aussi Politique: Histoire politique et Suffrage des femmes.]
Le martyre de Joseph et de Hyrum Smith, le 27 juin 1844, provoque une crise majeure. Conséquence immédiate de la perte de leur prophète fondateur, beaucoup de saints des derniers jours, choqués, connaissent une crise de la foi: Quelqu’un peut-il prendre sa place? Le Seigneur va-t-il continuer à être avec l’Église ? Tout le monde ne voit pas non plus directement qui doit diriger: Sera-ce Sidney Rigdon, conseiller de Joseph Smith dans la Première Présidence ? Le Collège des douze apôtres, dirigé par Brigham Young ? Quelqu’un d’autre ? Celui qui héritera de la direction de l’Église devra affronter la tâche de résoudre les tensions existant dans l’Église et les adversaires puissants de l’extérieur.
Au moment de l’assassinat, la plupart des membres du Collège des Douze sont en mission dans l’Est des États-Unis. Sidney Rigdon, qui a quitté Nauvoo pour Pittsburgh juste avant le martyre, revient le 3 août et prétend prendre la direction en tant que «Tuteur». Trois jours plus tard plusieurs des Douze, dont Brigham Young, arrivent juste à temps pour une réunion tenue le 8 août déjà convoquée pour décider de la tutelle. Rigdon parle le premier, avançant ses prétentions. Il est suivi de Brigham Young, qui affirme que c’est la responsabilité des Douze de diriger l’Église en l’absence de Joseph et d’édifier sur les fondements qu’il a posés. La grande majorité votera pour soutenir les Douze. Beaucoup affirmeront que Brigham Young a été transfiguré devant eux, parlant avec la voix du prophète décédé et ayant son apparence et sa façon d’être.
Le vote du 8 août règle définitivement la question de la succession: personne d’autre n’a pu prétendre de manière convaincante avoir l’autorité ou la pleine confiance du Prophète. Le vote soutient le Collège des Douze, avec Brigham Young à sa tête, en tant que dirigeants de l’Église, mais cela ne va pas déboucher immédiatement sur une nouvelle Première Présidence; cela viendra plus tard, après que les Douze auront terminé le temple de Nauvoo et trouvé une nouvelle patrie pour l’Église dans l’Ouest, responsabilités dont ils estiment qu’ils doivent s’acquitter en tant que collège. Le vote ne satisfera pas non plus ceux qui aspirent à une façon d’être des saints des derniers jours mais sans les innovations de Nauvoo qu’ils considèrent comme douteuses et que les Douze vont conserver – des choses telles que l’accent mis sur le temple, les nouveaux points de doctrine dont le mariage plural et l’unité des affaires temporelles et ecclésiastiques sous la prêtrise. Certaines de ces personnes vont brièvement en suivre d’autres qui se proclament dirigeants, mais beaucoup vont simplement s’éloigner. Des années plus tard, certains se grouperont pour former l’Église réorganisée de Jésus-Christ des saints des derniers jours avec une orientation tout à fait différente de celle de Joseph Smith à Nauvoo ou des Douze dans le Grand Bassin (voir Groupes schismatiques).
Les priorités des Douze sont de terminer le temple de Nauvoo tout en se préparant en privé à l’exode vers l’Ouest (voir Émigration vers l’Ouest: Planification et prophétie) qu’ils se sont engagés à retarder jusqu’à ce que les saints aient reçu les ordonnances du temple. Les saints vont tellement se rallier derrière le temple que la pierre angulaire sera mise en place en mai 1845 et l’édifice sera prêt pour les ordonnances en décembre. En fin de compte, près de 6.000 hommes et femmes recevront les ordonnances du temple avant de partir pour l’Ouest. Au printemps de 1845, l’achèvement du temple étant proche, les dirigeants de l’Église commencent les préparatifs pour partir dans l’Ouest. En septembre, peu de temps après que des violences d’émeutiers éclatent contre les colonies périphériques autour de Nauvoo, les Douze annoncent publiquement que les saints vont tous partir.
Brigham Young est soutenu dans ces efforts par huit des Douze, ceux-là mêmes qui ont œuvré à l’étranger sous sa direction en 1840-1841, et par les membres du Conseil des cinquante. Organisé en mars 1844 par Joseph Smith, le Conseil de cinquante a participé à deux activités majeures avant sa mort: des négociations secrètes avec la République du Texas pour y créer éventuellement des colonies et une campagne publique pour soutenir la candidature de Joseph Smith à la présidence des États-Unis. Plus de soixante-quinze pour cent des membres survivants du Conseil original des cinquante soutiendront Brigham Young, mais William Smith, John E. Page, Lyman Wight, tous apôtres, et William Marks, le président de pieu de Nauvoo, feront dissidence et n’accepteront jamais le temple ni l’exode vers le Grand Bassin et ses implications. Le Conseil des cinquante, quant à lui, aidera à organiser l’exode hors de Nauvoo et, au début de l’Utah, contribuera à fonder une théocratie économique et politique.
L’exode commence en février 1846, avant que de nouvelles hostilités n’éclatent. Pendant tout le printemps et l’été, un flot de chariots traverse les prairies de l’Iowa. Les saints des derniers jours ne sont pas encore installés en Iowa quand un officier militaire des États-Unis arrive le 26 juin avec une demande pour que 500 volontaires participent à la campagne contre le Mexique. Bien que parfois considéré comme une oppression imposée aux mormons réfugiés par le gouvernement des États-Unis, l’appel est en réalité le résultat de négociations secrètes avec James Polk, président des États-Unis (voir Bataillon mormon). S’il est vrai que le bataillon leur enlève 500 hommes valides, il va apporter $70.000 bien nécessaires qui seront utilisés pour aider les familles des hommes et pour financer le programme général de l’exode.
Comme l’évacuation de Nauvoo et la traversée de l’Iowa ont occupé la plus grande partie de la saison pendant laquelle on peut voyager, les saints se préparent à passer l’hiver sur les bords du fleuve Missouri. Ils créent des colonies provisoires à Winter Quarters, sur la rive occidentale du fleuve, aujourd’hui Florence, dans le Nebraska, banlieue d’Omaha, et sur la rive est à Kanesville, renommée plus tard Council Bluffs, en Iowa. Les préparatifs de la grande migration vers les bassins intérieurs de l’Amérique du Nord vont s’y poursuivre. Le 14 janvier 1847, Brigham Young annonce une révélation selon laquelle les saints doivent s’organiser «en compagnies [de cent, de cinquante et de dix], avec l’alliance et la promesse de garder tous les commandements… du Seigneur, notre Dieu» (D&A 136:2-3). Le 5 avril 1847, il emmène le premier convoi de pionniers au départ de Winter Quarters.
Après un voyage de trois mois, les éclaireurs entrent dans la vallée du Grand Lac Salé. Trois jours plus tard, le 24 juillet 1847 (voir Fête des pionniers), Brigham Young entre dans la vallée. Le 28 juillet, il indique un emplacement pour un temple et annonce aux 157 pionniers que «c’est le bon endroit», voulant dire que lui et les saints ont prévu un long séjour à proximité du Grand Lac Salé.
Après son retour d’Utah à Winter Quarters en octobre 1847, Brigham Young pose aux apôtres la question de la réorganisation de la Première Présidence. Bien qu’aucune révélation écrite n’autorise explicitement les Douze à réorganiser la présidence, beaucoup considèrent que ce droit est implicite dans la révélation de 1835 concernant l’autorité de ce collège par rapport à la Première Présidence (D&A 107:21-24). Les Douze soutiennent Brigham Young comme président de l’Église, avec Heber C. Kimball et Willard Richards comme conseillers, mesure ratifiée plus tard ce mois-là par les membres de l’Église lors d’une conférence spéciale à Kanesville et l’année suivante à Salt Lake City.
En Utah, Brigham Young se met en devoir de réaliser le rêve de Joseph Smith de créer un refuge permanent pour les saints. Cela comprend la création d’un état politique dans lequel l’Église jouera un rôle dominant. La nature théocratique de ce gouvernement ressort du fait qu’un grand conseil de l’Église, présidé par John Smith, oncle de Joseph Smith, gérera à la fois les affaires religieuses et civiles dans la vallée du lac Salé depuis l’automne de 1847 jusqu’au retour de Brigham Young dans la vallée en septembre 1848, quand les Douze et le Conseil des cinquante assumeront la direction.
Au cours des derniers mois de 1848, le Conseil des cinquante commence les discussions en vue de la mise sur pied d’un gouvernement plus permanent. Prévoyant que le Grand Bassin deviendra un territoire des États-Unis, le Conseil examine les mérites respectifs d’une demande au Congrès pour obtenir le statut de territoire ou celui d’état. Il opte d’abord pour le territoire mais peu après, en juillet 1849, se basant sur les précédents au Texas et en Californie, il demande à devenir un état et commence à organiser l’état provisoire de Deseret (voir Deseret, état de). Brigham Young est élu gouverneur et d’autres autorités de l’Église constituent l’exécutif et le judiciaire et une grande partie du législatif. Le gouvernement se réunit en décembre 1849, et l’état de Deseret va fonctionner comme état autonome au sein du domaine national jusqu’au 28 mars 1851, date à laquelle il va être officiellement dissous et remplacé par le Territoire d’Utah, qui avait déjà été créé dans le cadre du Compromis national de 1850 (voir aussi État d’Utah).
Les frontières de l’état de Deseret sont vastes, englobant tout l’Utah actuel, la majeure partie du Nevada et de l’Arizona, plus d’un tiers de la Californie et des parties de l’Oregon, de l’Idaho, du Wyoming, du Colorado, et du Nouveau-Mexique. Pour assurer le contrôle de ce territoire, Brigham Young va entreprendre un programme vigoureux de colonisation, qui, avant sa mort en 1877, aura créé près de 400 colonies, et un système énergique de prosélytisme, en particulier dans les îles Britanniques et en Scandinavie, avec des milliers de convertis, dont presque 90.000 vont émigrer en Utah avant la fin du siècle. L’Église favorise, organise et gère cette immigration. Pour le profit de ceux qui sinon n’auraient pas le moyen de se payer le voyage, l’Église crée le Fonds perpétuel d’Émigration. Créée en 1850 par l’État de Deseret, pendant les trente-sept années qui vont suivre, la Compagnie du Fonds perpétuel d’Émigration va lever des fonds et utiliser les ressources de l’Église pour aider quelque 26.000 émigrants d’Europe à atteindre les montagnes de l’Ouest.
C’est avec l’État de Deseret que l’Église se sera rapprochée le plus de son but de réaliser le modèle théocratique précédemment conçu par Joseph Smith. Les autorités de l’Église remplissent des postes civils importants. Quand les juges désignés par le gouvernement fédéral auront quitté le territoire en 1851, les tribunaux des successions, avec des évêques comme juges, auront juridiction dans le civil et le pénal. La volonté derrière tout cela est que l’influence des saints sur la vie politique du territoire élimine les persécutions qui se sont maintes fois produites. Bien plus tard, le succès même de cette société théocratique va créer des conflits moins violents mais finalement plus dangereux avec la société américaine (voir Politique: Histoire politique).
Une pratique inséparable du sempiternel conflit avec le gouvernement fédéral sera celle du mariage plural. Bien que la polygamie ait été pratiquée en privé avant l’exode, les dirigeants de l’Église en auront retardé l’aveu public jusqu’en 1852. En août de cette année-là, à une conférence spéciale de l’Église à Salt Lake City, Orson Pratt, un apôtre, annoncera officiellement le mariage plural comme point de doctrine et de pratique de l’Église. Une longue révélation sur le mariage pour l’éternité et sur la pluralité des épouses, dictée par Joseph Smith le 12 juillet 1843, sera publiée après cette annonce (D&A 132). Considérant que c’est une obligation religieuse que les frères fidèles épousent plus d’une femme, les saints des derniers jours croient que la polygamie est protégée par la garantie constitutionnelle de la liberté religieuse. Il n’y a, à l’époque, aucune loi fédérale contre la polygamie, et l’incorporation territoriale de l’Église lui permet de «célébrer des mariages compatibles avec les révélations de Jésus-Christ» (Arrington et Quinn, p. 261). Dans certaines localités, jusqu’à vingt à vingt-cinq pour cent de la population des saints finiront par vivre dans des ménages polygames, la plupart des hommes qui ont pratiqué la polygamie ayant une à quatre épouses plurales.
Pendant les quelques premières années, la vie dans leur nouveau refuge dans l’Ouest semble précaire. Un hiver doux en 1847-1848 est suivi de gelées printanières et d’un été décourageant. Ensuite la sécheresse endommage et une invasion de sauterelles dévore une bonne partie des cultures. Beaucoup croient qu’ils n’auront sauvé un reste de leurs cultures que grâce à l’intervention miraculeuse d’un grand nombre de mouettes qui descendent sur les champs et dévorent les sauterelles (voir Mouettes, miracle des). Cependant, après l’hiver difficile de 1848-1849, les pionniers pourront faire, la plupart des années, des récoltes suffisantes pour tenir l’hiver suivant. Une aubaine inattendue se présente en 1849 quand des centaines de voyageurs en route pour les gisements d’or de la Californie passent par l’Utah et s’empressent d’échanger des produits manufacturés rares, des animaux épuisés et même de la farine contre les produits locaux. Entre-temps, les premières colonies sont suffisamment bien installées pour que puisse commencer la colonisation dans toute la région des montagnes Rocheuses.
Les saints vont fonder des dizaines de colonies, au début surtout dans ce qui est maintenant l’Utah. La première zone colonisée est une région centrale s’étendant au nord et au sud du siège de l’Église à Salt Lake City le long du bord occidental des montagnes. Les colonies suivantes vont se trouver dans les vallées plus hautes de montagne de la région, telles que les vallées de Cache et de Heber. Presque en même temps, d’autres colonies vont être fondées dans des régions plus éloignées en réponse à des besoins particuliers comme la fondation d’une industrie métallurgique (Parowan, janvier 1851, Cedar City, novembre 1851), la création de stations le long des itinéraires d’immigration (San Bernardino, 1851, achat de Fort Bridger, 1855), les missions auprès des Indiens (fort Lemhi dans l’Idaho actuel, Las Vegas, Nevada, Fort Supply en 1853, dans le Wyoming actuel et la mission d’Elk Mountain dans le centre-est de l’Utah, le tout en 1855), la culture de plantes de climat chaud, comme le coton et le sucre (St-George, 1861) ou, plus tard, la recherche d’un refuge pour les familles polygames.
Le motif le plus commun pour la colonisation est la nécessité de trouver des terres pour une population croissante de fermiers, un besoin qui sera à l’origine de la colonisation de la plupart des emplacements favorables en Utah dès 1880 aussi bien que d’autres dans le nord de l’Arizona, le sud-ouest du Colorado, le nord-ouest du Nouveau-Mexique, l’ouest du Wyoming et le sud-est de l’Idaho. On ouvre souvent de nouvelles régions par un «appel en mission» (voir Appels), ce qui signifie que des colons installés sont invités à entreprendre une mission patronnée par l’Église pour fonder une colonie. Une fois la colonie mère établie, les régions voisines sont colonisées spontanément par les jeunes devenus adultes à la recherche de terres à cultiver.
La fondation d’un empire dans l’Ouest ne va pas se faire sans conflits ni difficultés. Une période de sécheresse prolongée en 1855 va être suivie d’une invasion catastrophique de sauterelles. L’insécurité ainsi créée va sans doute alimenter les flammes de la réforme de 1856-1857, une période de remise en question intense et d’engagement renouvelé. Les sermons enflammés et parfois immodérés de la Réforme intensifieront les inquiétudes des pionniers quand, au début de 1857, sur la foi de rapports exagérés selon lesquels les mormons sont en rébellion, James Buchanan, président des États-Unis commande secrètement l’envoi d’une armée de 2.500 soldats fédéraux en Utah. Agissant sans avoir fait d’enquête, Buchanan relève Brigham Young de ses fonctions de gouverneur, poste auquel Young avait été redésigné, même après l’annonce, en 1852, de la polygamie. Malheureusement, Buchanan fait tout en secret, interrompant même le courrier à destination de l’Utah pour donner aux troupes l’avantage de la surprise.
Quand il reçoit la confirmation confidentielle de la décision du gouvernement, Brigham Young commande à tous les missionnaires de retourner en Utah, fait fermer les missions et abandonner les colonies les plus isolées. Habitués aux persécutions de la part des milices d’état, les saints des derniers jours voient dans l’avance des forces armées vers l’Utah le prélude au pillage, au viol et au massacre. Pendant qu’ils se préparaient à la résistance armée, une hystérie de guerre balaie le territoire.
Lorsque qu’elle approche de Fort Bridger, l’avant-garde de l’expédition d’Utah se heurte aux saints qui lui opposent la politique de la «terre brûlée». Les raids mormons saisissent et brûlent les convois fédéraux d’approvisionnement et détruisent le fourrage devant les troupes en marche. L’arrivée opportune de fortes chutes de neige embourbe l’armée pour l’hiver, donnant aux médiateurs, et particulièrement à Thomas L. Kane, du temps pour une conciliation. Pendant ce temps, le président Young ordonne l’abandon des colonies du nord de l’Utah et organise «l’Exode vers le Sud». S’ils doivent quitter leur refuge, les saints des derniers jours laisseront le Grand Bassin aussi désertique qu’ils l’ont trouvé. Les négociations réussissent avant le printemps, juste au moment où l’armée se remet en mouvement. Alfred Cumming est installé comme gouverneur et, le 12 juin 1858, Brigham Young accepte le pardon pour sa soi-disant rébellion. Quinze jours plus tard, le général Albert Sidney Johnston fait traverser à ses troupes une Salt Lake City abandonnée et dresse un Camp Floyd isolé à soixante-cinq kilomètres au sud-ouest. La guerre d’Utah va être qualifiée, à juste titre, de gaffe de Buchanan.
L’hystérie de guerre aura pour conséquence désastreuse le massacre de Mountain Meadows de septembre 1857, pour lequel les dirigeants locaux du sud de l’Utah s’unissent aux Indiens pour massacrer un convoi de colons en route pour la Californie. Il est prouvé que l’ordre de Brigham Young était de laisser les voyageurs passer en paix, mais sa recommandation va arriver trop tard pour empêcher le massacre et les autorités locales vont faire croire à une attaque par les Indiens. Répondant aux accusations que des blancs sont impliqués, le président Young invite le nouveau gouverneur à enquêter, mais celui-ci considère que si des blancs sont impliqués, ils bénéficieront du pardon en vertu de l’amnistie générale accordée en 1858. Par la suite, quand de plus amples renseignements se feront jour, certains des principaux protagonistes seront excommuniés de l’Église et l’un d’eux, John D. Lee, sera condamné par un tribunal fédéral et exécuté.
Bien que préoccupé par la guerre de Sécession, le gouvernement fédéral s’intéresse néanmoins au Territoire d’Utah. En 1862, Fort Douglas est créé à l’extrémité est de Salt Lake City, sous la direction de Patrick Edward Connor, un anti-mormon virulent. Connor et ses troupes sont chargés de garder les itinéraires de transport, mais ils publient aussi le Union Vedette, une publication agressivement anti-mormone, encouragent les exploitations minières et favorisent l’immigration de non-mormons dans le Territoire. En 1863, les troupes de Connor attaquent un groupe d’Indiens Shoshones du nord sur la Bear River, dans le nord de la Cache Valley, tuant quelque 250 hommes, femmes et enfants.
La décennie suivant la guerre d’Utah est une ère d’expansion générale pour l’Église. En 1862, le Congrès décrète une loi interdisant la polygamie dans les territoires et dissolvant l’Église, mais elle ne sera pas appliquée avant Reynolds contre les États-Unis en 1879. Les immigrants de l’Église continuent d’arriver par milliers et Brigham Young continue d’implanter des colonies pour les recevoir. Mais l’afflux régulier de non-mormons en Utah et la construction d’un chemin de fer transcontinental annoncent de futurs défis à la domination par les mormons de leur empire du Grand Bassin.
L’achèvement du chemin de fer transcontinental s’accompagne à la fois de possibilités nouvelles et de problèmes. Brigham Young s’attend depuis longtemps à la fin de l’isolement physique et, par certains côtés, l’encourage. En 1852 et en 1854, les saints demandent au Congrès qu’un chemin de fer transcontinental passe par l’Utah. Il simplifierait l’immigration et permettrait aux dirigeants de l’Église d’établir des liaisons ferroviaires reliant beaucoup de colonies éloignées à Salt Lake City. Le 1er juillet 1862, quand le Pacific Railroad Act est promulgué, le président Young souscrit pour $10.000 d’actions auprès de la Union Pacific Railroad Company nouvellement organisée, dont il devient l’un des directeurs en 1865.
Si le chemin de fer permet aux immigrants de l’Église d’atteindre plus facilement l’Utah, il encourage aussi l’immigration de non-mormons. La fin de l’isolement menace également l’indépendance économique et politique de l’Utah. Pour renforcer l’économie locale et retarder la création d’un milieu d’affaires non-mormon puissant, les autorités de l’Église ont longtemps lutté pour décourager l’importation de produits manufacturés venus de l’Est des États-Unis. Elles vont maintenant lancer une campagne énergique pour décourager l’achat de produits de luxe importés, notamment le thé, le café, l’alcool et le tabac et réinsister sur la révélation de 1833 donnée à Joseph Smith déconseillant l’utilisation de ces produits (voir Parole de Sagesse).
En dépit de l’opposition opiniâtre de Brigham Young au développement de l’extraction de métaux précieux en Utah, l’approche du chemin de fer relance l’enthousiasme pour l’exploitation des richesses minières de l’Utah. Sous la direction de plusieurs hommes d’affaires et intellectuels en vue de l’Église tels que William Godbe, Edward W. Tullidge et Eli B. Kelsey, un «Nouveau Mouvement» se développe dans l’Église contre ce qu’ils appellent «l’autocratie de la prêtrise». Ces hommes écrivent des articles persuasifs dans le Utah Magazine, recommandant l’exploitation des ressources minières de l’Utah afin de maintenir l’industrie sous le contrôle local (et donc mormon). Brigham Young, qui prévoit un résultat différent, dénonce les «Godbeites», les accusant d’inciter à la domination «gentile» de l’Utah. Par la suite, Godbe, dont le manque d’orthodoxie doctrinale pose un problème supplémentaire, est excommunié. Bien qu’ayant rejeté la solution godbeite, Brigham Young reconnaît les réalités de la nouvelle situation économique et lance une série de programmes pour renforcer la solidarité spirituelle et l’indépendance économique.
Une partie du programme de Brigham Young comprend l’organisation de l’École des Prophètes en 1867. L’École des Prophètes originelle avait été fondée en 1833 par Joseph Smith pour donner un enseignement aux adultes et pour se préparer pour le temple. Dans l’organisation d’Utah, les discussions sur la théologie s’accompagnent de l’adoption d’un programme économique. Les Écoles des Prophètes enseignant aux propriétaires fonciers les méthodes pour s’assurer des titres de propriété, sollicitent des contributions en main d’œuvre et en fonds pour financer des chemins de fer secondaires, créent des coopératives de vente et de fabrication locales, poussent à la diminution des salaires pour permettre une plus grande exportation des marchandises d’Utah, organisent le boycott des établissements des gentils hostiles et exigent des membres qu’ils s’engagent à observer la Parole de Sagesse. Les Écoles passent aussi des contrats avec les chemins de fer de l’Union Pacific et du Central Pacific pour créer l’infrastructure de la ligne transcontinentale en Utah, limitant ainsi l’afflux de travailleurs non-mormons et apportant des revenus en argent liquide aux saints des derniers jours. Au bout de quelques années, avec le changement de la situation économique, ces organisations vont graduellement disparaître.
Ce qui va être plus permanent que les Écoles des Prophètes, ce sont les organisations que Brigham Young crée pour les femmes et les jeunes de l’Église. Entre la renaissance de la Société de Secours en 1867 et la mort de Brigham Young une décennie plus tard, la présidente générale, Eliza R. Snow, aidant les évêques à constituer les organisations locales, la société se répand dans toutes les colonies de l’Église du Grand Bassin. En plus de ses buts charitables, la Société de Secours travaille avec les Écoles des Prophètes pour encourager l’industrie locale et déconseiller l’achat des importations. Parmi les réalisations principales de la Société de Secours, il y a le commencement d’un programme de stockage du blé, le lancement de la culture de la soie, la fondation du Woman’s Exponent, la construction de salles pour la Société de Secours dans la plupart des colonies, la mise sur pied d’un magasin de distribution pour les industries locales et l’appui impressionnant de la formation médicale des femmes (voir Maternité et soins de santé des enfants). Les dirigeantes de la Société de Secours participent aussi activement à la campagne pour le suffrage des femmes et en Utah les femmes vont être les secondes après les femmes du Wyoming à recevoir le droit de vote.
En 1869, Brigham Young crée, pour les jeunes filles, une organisation portant le nom peu maniable de «Département des jeunes demoiselles de l’Association coopérative de retranchement». Il exhorte les jeunes filles à éviter toute extravagance et à «cesser d’accorder [leur] clientèle au négociant qui envoie [leur] argent hors du Territoire pour de beaux vêtements faits dans l’Est» (Susa Young Gates, History of the Young Ladies Mutual Improvement Association of the Church, p. 9 [Salt Lake City, 1911]). La Société d’amélioration mutuelle des Jeunes Filles, comme on l’appellera plus tard, va devenir une organisation s’occupant principalement d’activités culturelles, sociales et religieuses (voir Jeunes Filles; Association de retranchement).
Après l’achèvement du chemin de fer transcontinental en 1869, l’Union Pacific et le Central Pacific ne respectent pas leurs engagements contractuels concernant l’infrastructure. Les pertes pour l’économie mormone sont massives: $500.000 en liquide et des pertes cumulées encore plus grandes pour les sous-traitants, les commerçants et les ouvriers. Pour essayer de compenser ces pertes, les dirigeants de l’Église financent des chemins de fer dans le territoire en utilisant le fer, le matériel de construction et le matériel roulant pour une valeur d’un demi million de dollars dont la Union Pacific en faillite s’était servi pour payer ses obligations. Ces chemins de fer apporteront du profit en Utah, mais leur succès ne soulagera pas complètement l’amertume que les saints auront ressentie à l’égard des revers causés par le chemin de fer transcontinental.
En plus d’intensifier son appel à pratiquer l’industrie locale et à boycotter les marchands non-mormons au moment où le chemin de fer se rapproche de l’Utah, Brigham Young met sur pied un système coopératif de vente. En octobre 1868, il organise la Zion’s Cooperative Mercantile Institution (ZCMI) pour «apporter des marchandises ici et les vendre aussi bon marché qu’il est possible de le faire et que les bénéfices soient répartis parmi l’ensemble du peuple» (Arden Olsen, History of the Mormon Mercantile Cooperation in Utah, p. 80 [thèse de doctorat, université de Californie, Berkeley, 1935]). Largement soutenu, le nouveau grand magasin va devenir une entreprise profitable qui reste le plus grand détaillant de Salt Lake City. Des succursales sont créées dans beaucoup de localités, de même que d’autres coopératives: tanneries, meuneries, laiteries, boucheries, banques, usines sidérurgiques, scieries, fabriques de laine et usines de coton. Tout cela va aider les saints à retarder d’une décennie la mainmise «extérieure» que l’arrivée du chemin de fer présage.
Le succès remarquable du Mouvement Coopératif va inspirer à Brigham Young l’idée qu’une renaissance de «l’Ordre uni d’Hénoc», longtemps son but, pourrait maintenant être réalisable. Inauguré par Brigham Young pendant l’hiver de 1873-1874, le Mouvement de l’Ordre est inspiré par le désir d’imiter les tentatives de vivre la loi de consécration dans les années 1830 et par le succès de la coopérative de Brigham City. Sous la direction de Lorenzo Snow, Brigham City était devenue autonome à quatre-vingt-cinq pour cent, effectuant pratiquement toute l’agriculture, la construction, la fabrication et le commerce dans la région environnante. Presque toute la population était employée dans les divers départements de la coopérative et était rémunérée par des produits plutôt que par de l’argent liquide. La Coopérative de Brigham City avait eu tant de succès qu’elle n’avait quasiment pas été affectée été par la panique financière de 1873.
Brigham Young lance donc le mouvement de l’Ordre Uni et plus de 200 ordres sont créés dans tout l’Utah, le sud de l’Idaho, le nord de l’Arizona et le Nevada. Du fait qu’il laisse le fonctionnement de ces ordres entre des mains locales, plusieurs types différents apparaissent. Certains, comme Orderville, dans le sud de l’Utah, sont presque totalement communaux. Dans les villes plus grandes, où les ordres communaux fortement structurés sont impossibles, les diverses paroisses financent différentes entreprises coopératives, telles que des fermes ou des usines et échangent ensuite les produits. Les manifestations de l’Ordre Uni d’Hénoc varient, mais elles représentent un effort véritable du peuple pour devenir «un» comme le commandaient les premières révélations. Comme dans le cas de presque toutes les entreprises volontaires de cette nature, ces ordres vont finir par se dissoudre en raison de tensions internes et de pressions externes. Le mouvement lui-même prend fin en 1877, bien que quelques ordres, comme celui d’Orderville, continuent pendant une décennie encore.
Avant sa mort en 1877, Brigham Young aura vu la réalisation d’une de ses aspirations les plus sacrées: l’achèvement d’un temple en Utah. Toute l’importance des temples et de leurs ordonnances remonte à la période de Nauvoo, quand Joseph Smith a introduit le baptême pour les morts, le mariage pour l’éternité et un ensemble d’instructions religieuses et d’alliances appelé dotation. Depuis l’abandon du temple de Nauvoo en 1846, Brigham Young rêve d’un temple dans l’Ouest. En arrivant dans la vallée, il consacre, à Salt Lake City, un terrain pour un temple, mais il faudra quarante ans pour terminer cet imposant édifice. En attendant, une Maison des dotations provisoire, construite en 1855, fournira un endroit pour les ordonnances sacrées. Après avoir décidé de construire un édifice moins imposant dans le sud, Brigham Young consacrera le temple de St-George, achevé le 6 avril 1877. Pendant la décennie qui suivra sa mort, deux temples supplémentaires seront construits en Utah (Logan et Manti) avant que le temple de Salt Lake City ne soit finalement consacré en 1893.
Après la consécration du temple de St-George, Brigham Young lance une réorganisation massive de l’Église, principalement au niveau local, clarifiant et redéfinissant, par la même occasion, les responsabilités de la prêtrise. Toutes les paroisses et tous les pieux sont touchés et la plupart reçoivent de nouveaux dirigeants.
Quand il meurt, le 29 août 1877, Brigham Young a amené les saints des derniers jours à un point culminant de croissance dans leur retraite et leur royaume de montagne. Ses dernières paroles, «Joseph ! Joseph ! Joseph !» sont appropriées pour quelqu’un qui a vécu sa vie, comme il le disait souvent, en tant qu’apôtre de Jésus-Christ et de Joseph Smith. À sa façon parfois inflexible, Brigham Young aura travaillé pendant plus de quarante ans pour atteindre les buts de Joseph Smith. Les saints sont parvenus à un pouvoir économique et politique unifié, même s’ils vont bientôt être forcés de se plier face à une pression fédérale persistante. Chose plus importante encore, en affrontant courageusement leurs difficultés et en poursuivant leurs rêves dans le désert, ils sont devenus un peuple fort, solidaire et plein de foi. Attaché à l’idéal évangélique quel qu’en soit le coût, il laissera un héritage qui continue à inspirer les saints des derniers jours du monde entier.

Bibliographie
Ouvrages généraux sur cette période: Leonard J. Arrington, Brigham Young, American Moses, New York, 1985 et Great Basin Kingdom, Cambridge, Mass., 1958; Eugene E. Campbell, Establishing Zion: The Mormon Church in the American West, 1847-1869, Salt Lake City, 1988; Dean L. May, Utah: A People’s History, Salt Lake City, 1987 et un bref compte rendu dans Leonard J. Arrington et D. Michael Quinn, “The Latter-day Saints in the Far West, 1847-1900”, dans F. Mark McKiernan, Alma R. Blair et Paul M. Edwards, dir. de publ., The Restoration Movement: Essays in Mormon History, Lawrence, Kans., 1973, pp. 257-270.
En plus de nombreux articles sur le sujet dans le Journal of Mormon History, BYU Studies, Dialogue, Sunstone et le Utah Historical Quarterly, voir: Richard E. Bennett, Mormons at the Missouri 1846-1852, Norman, Okla., 1987, pour la période débouchant sur la colonisation de l’Utah; Wallace Stegner, The Gathering of Zion, New York, 1964, récit classique de migration vers l’Utah; Leonard J. Arrington, Feramorz Y. Fox et Dean L. May, Building the City of God: Community and Cooperation Among the Mormons, Salt Lake City, 1976, qui se concentre sur le communautarisme; et Norman F. Furniss, The Mormon Conflict, 1850-1859, New Haven, Conn., 1960, la meilleure étude sur la Guerre d’Utah.

Histoire de l’Église: 1878-1898, Fin de la période pionnière d’Utah
Auteurs: SESSIONS, GENE A. et HARTLEY, WILLIAM G.

[Cet article traite de la période de tension et d’adaptation qui suit la mort de Brigham Young, période au cours de laquelle l’Église doit affronter une forte pression visant à l’obliger à se conformer aux mœurs américaines contemporaines. Après présentation d’une vue d’ensemble de la période, l’article traite des changements d’organisation, des programmes économiques, de la création de nouvelles colonies de saints des derniers jours et de l’œuvre missionnaire, puis se concentre sur le conflit au sujet de la polygamie, aboutissant au Manifeste de 1890 qui annonce la fin officielle du mariage plural. Le Manifeste est suivi de la question de l’autonomie de l’Utah (voir Utah l’État d’), de l’extension du prosélytisme, des tentatives de consolider l’éducation religieuse (voir Académies) et d’une participation plus limitée de l’Église à la vie économique (voir Économie pionnière).
Pour comprendre la vie quotidienne et ce que signifie être saint des derniers jours pendant cette période, voir Vie pionnière et Histoire sociale et culturelle et cultuelle. Pour des renseignements supplémentaires sur la colonisation de nouvelles régions par l’Église, voir les rubriques sur les colonies pionnières dans Mexique et Amérique Centrale, l’Église au, Canada, l’Église au, et Arizona, colonies pionnières en, Colorado, colonies pionnières au, Idaho, colonies pionnières au, Nevada, colonies pionnières au, Nouveau-Mexique, colonies pionnières au, et Wyoming, colonies pionnières au. Sur les événements relatifs au mariage plural, voir: Histoire juridique et judiciaire de l’Église; Législation contre la polygamie; Reynolds contre les États-Unis; et Manifeste de 1890.]
Pendant la période de croissance, de problèmes graves et de changements marquants de 1878-1898, l’Église affronte de nombreuses difficultés sous les présidents de l’Église John Taylor et Wilford Woodruff. La décision de la Cour suprême en 1879, confirmant la législation contre la polygamie introduit une décennie d’une application de plus en plus féroce de lois de plus en plus dures. Face à la persécution par le gouvernement et dans une tentative d’obtenir l’autonomie en accédant au rang d’état, l’Église prend des mesures pour mettre fin à la pratique du mariage plural et pour abandonner son contrôle jadis ferme de la politique et de l’économie du Territoire d’Utah. Dans les années 1890, le Territoire d’Utah et ses résidants mormons prennent le chemin de «l’américanisation».
Bien que cette période soit caractérisée par son affrontement prolongé avec le gouvernement fédéral, elle l’est aussi de manière frappante par la croissance. La population de l’Église double (de 115.065 à 229.428), de même que le nombre de pieux (20 à 40) et de paroisses (252 à 516). Les colonies de saints vont jusqu’au Mexique et au Canada. Les efforts missionnaires augmentent et le nombre de missions s’accroît (de 8 à 20). L’activité des collèges de la prêtrise devient plus ordonnée et plus normalisée. Les Autorités générales assistent régulièrement aux conférences trimestrielles de pieu et aux conférences de paroisse. Les organisations auxiliaires se généralisent dans les pieux et les paroisses, et des présidences et des bureaux généraux d’auxiliaires sont désignés. L’Église termine aussi trois temples, portant le total en Utah à quatre.
Après la mort du président Young en août 1877, le Collège des douze apôtres n’organise pas immédiatement une nouvelle Première Présidence. John Taylor préside l’Église comme président des Douze jusqu’en octobre 1880. Sous sa direction, les Douze achèvent la réorganisation des paroisses et des pieux commencée par le président Young.
Ils étendent aussi les organisations auxiliaires. En 1880, ils choisissent trois des leurs (Wilford Woodruff, Joseph F. Smith et Moses Thatcher) pour former une surintendance générale de la Société d’amélioration mutuelle des Jeunes Gens (SAMJG; voir Jeunes Gens) et pour superviser de nouveaux bureaux ou comités centraux de la SAMJG créés d’abord pour les comtés et plus tard pour les pieux. L’Association de Retranchement des Demoiselles devient en 1878 la Société d’amélioration mutuelle des Jeunes Filles (SAMJF) avec la création de bureaux dans les pieux à partir de cette année et le début, en 1880, d’une organisation dans toute l’Église avec Elmina S. Taylor comme présidente (voir Jeunes Filles). La Primaire, une nouvelle organisation pour le profit des enfants, est lancée en 1878 à Farmington (Utah). Après que d’autres paroisses ont copié le programme, une Primaire est créée en 1880 au niveau de l’Église, dirigée par Louie B. Felt. Eliza R. Snow, présidente de la Société de Secours, continue à diriger l’œuvre de toutes les femmes dans l’Église, qui comprend maintenant la SAMJF et la Primaire. George Q. Cannon, de la Première Présidence, reste, tout au long de cette période, surintendant général des Écoles du Dimanche. Les Écoles du Dimanche, la Société de Secours, et la SAM sont organisées dans les îles Britanniques et en Scandinavie à partir de la fin des années 1870 et du début des années 188.
Les complications juridiques entourant la succession du domaine de Brigham Young deviennent un gros problème pour les Douze. Lorsque la législation fédérale avait sévèrement limité les avoirs fonciers de l’Église, le président Young avait été à la tête d’un mélange compliqué de biens personnels et de propriétés de l’Église. En 1879, ses héritiers et l’Église finiront par régler la question par compromis en dehors des tribunaux.
En 1880, son cinquantième anniversaire, l’Église proclame une année de jubilé, modelée sur une coutume hébraïque antique, pour soulager les pauvres. Elle efface des livres pour $802.000 de dettes auprès du Fonds perpétuel d’Émigration, la moitié du total encore dû. En plus de distribuer du bétail et des moutons aux nécessiteux, les autorités remettent aux pauvres dignes la moitié de leur dîme impayée. La Société de Secours prête aussi près de 1250 tonnes de blé provenant de ses réserves pour aider les fermiers touchés par la sécheresse.
Après avoir dirigé l’Église pendant trois ans, John Taylor et les Douze réorganisent, en octobre 1880, une Première Présidence: John Taylor, président de l’Église, avec George Q. Cannon et Joseph F. Smith, qui avaient précédemment fait partie de la Première Présidence sous Brigham Young, comme conseillers.
Les révélations données au président Taylor en 1882 et 1883 conduisent à une réorganisation des soixante-dix. Pour la première fois, les soixante-seize collèges locaux sont organisés sur une base géographique, inscrivant tous les soixante-dix dans leurs limites respectives. En outre, entre 1884 et 1888, vingt-cinq nouveaux collèges sont créés. Cette réorganisation redonne une vitalité aux soixante-dix, et le nombre de soixante-dix qui remplissent une mission à plein temps augmente directement après la mise en application du changement.
Cette période voit aussi une augmentation des publications liées à l’Église. Deux nouveaux magazines desservent les jeunes: The Contributor (1879-1896) pour les jeunes gens et The Young Woman’s Journal (1889-1929) pour les jeunes filles. Le Morgenstjernen (1882-1885), une publication historique en danois, continue en anglais sous le titre The Historical Record (1886-1890). L’École du Dimanche publie son premier cahier de musique (1884) et le Livre de Mormon paraît pour la première fois dans une traduction suédoise (1878). En 1880, l’Église accepte par vote la Perle de Grand Prix comme Écriture, ce qui lui donne le quatrième de ses ouvrages canoniques. Elle publie aussi, en 1879, des éditions du Livre de Mormon et des Doctrine et Alliances, avec les divisions en chapitres et versets, les correspondances et les notes d’Orson Pratt.
Le président Taylor met aussi en application un nouveau programme économique. Moins rigidement structuré que les ordres unis précédents, il assure l’équilibre entre l’entreprise privée et la planification économique de groupe. La Chambre centrale de Commerce de Sion stimule l’activité économique coopérative en favorisant le commerce, en cherchant de nouveaux marchés, en fournissant des informations aux fermiers et aux fabricants, en empêchant une concurrence nuisible à l’industrie locale et parfois en réglementant les salaires et les prix. Les chambres de commerce de pieu travaillent en coordination avec l’agence centrale. Malheureusement, en 1885, les croisades antimormones vont forcer ces chambres de commerce à se dissoudre. Edward Hunter, pionnier et évêque président, qui est en fonction depuis les années 1850, décède en 1883 et est remplacé en 1884 par William B. Preston.
Pendant les années 1880, la Société de Secours continue à élaborer des programmes qui ont commencé dans les années 1870: entreposage de blé, entretien des salles de Société de Secours et des magasins de distribution de paroisse, gère des programmes de formation d’infirmières et d’obstétrique, supervise les organisations pour les enfants et les jeunes filles, veille au bien-être spirituel des femmes de l’Église et améliore le soin permanent des pauvres. Les nouveautés sont l’ouverture, en 1882, de l’hôpital de Deseret, deuxième hôpital d’Utah, le premier géré par l’Église. La mort de d’Eliza R. Snow en 1887 marque la fin d’une ère pour la Société de Secours; en 1888, Zina Diantha H. Young la remplace comme présidente.
Malgré des problèmes graves, les dirigeants de l’Église tiennent toujours à apporter les bénédictions des temples à un plus grand nombre de saints. Pour ajouter à l’unique temple en fonctionnement à St-George, John Taylor consacre, le 17 mai 1884, le temple de Logan, deuxième en Utah. Construit principalement à l’aide de dons en argent, en matériaux et en main d’œuvre, il va coûter $800.000 environ. Un troisième temple, à Manti (Utah), construit pour un coût de près de $1 million, est consacré en 1888 par Lorenzo Snow, membre du Collège des Douze. Les travaux continuent aussi sur le grand temple de Salt Lake City, commencé en 1853, mais achevé seulement en 1893.
La colonisation se poursuit. Entre 1876 et 1879, pas moins de cent nouvelles colonies sont créées en dehors de l’Utah et plus de vingt à l’intérieur du Territoire. Les colonies de saints en Arizona augmentent rapidement. Les pieux créés en 1878 et 1879 à proximité de la Little Colorado River sont absorbés, en 1887, par les pieux nouvellement créés de St-Johns et de Snowflake. Entre-temps, le long des Gila et Salt Rivers, les pieux de St-Joseph et de Maricopa sont créés 1883. De nouvelles colonies de saints apparaissent au Nevada, dans l’est de l’Utah, où le pieu d’Emery est créé en 1882 et dans le sud-est de l’Utah et les régions voisines du Colorado et du Nouveau-Mexique, où le pieu de San Juan est créé en 1883. Beaucoup de convertis venus des états du sud s’installent dans la San Luis Valley, dans le centre-sud du Colorado et, en 1883, leurs colonies deviennent le pieu de San Luis.
Les poursuites judiciaires en matière de polygamie amènent les dirigeants de l’Église à fonder des colonies au Mexique et au Canada, hors de portée des lois des États-Unis. Après la visite du président Taylor en 1885 au Mexique, des centaines de saints vont affluer au Chihuahua et créer des villages dans une région que l’on appelle encore aujourd’hui «les colonies mormones» du Mexique (voir Mexique, colonies pionnières au). Ces colonies font d’abord partie de la mission mexicaine. En une décennie, plus de 3.000 saints vont s’y installer, d’autres colonies vont être fondées et en décembre 1895, le pieu de Juarez est créé pour diriger les saints dans les colonies mexicaines.
Sur instructions du président Taylor, Charles Ora Card, président du pieu de Cache, découvre en 1886 un lieu de refuge dans le sud de l’Alberta pour les colons de l’Église (voir Canada, colonies pionnières des saints au). Le printemps suivant, des colons venus d’Utah fondent Cardston, à vingt-deux kilomètres au nord de la frontière des États-Unis. Des colonies apparaissent tout près à Aetna (1888) et à Mountain View (1893). En juin 1895, le pieu d’Alberta devient le premier pieu organisé en dehors des États-Unis (à l’exception du pieu de Salt Lake City, alors situé en territoire mexicain).
L’œuvre missionnaire connaît un succès impressionnant et apporte des problèmes frustrants. Entre 1879 et 1889, l’Église gère, au Mexique, une petite mission qui connaît quelque 242 convertis. En Nouvelle-Zélande, une branche est organisée en 1883 chez les Maoris. En 1884, Jacob Spori ouvre la mission turque, qui comprend la Palestine. Le nombre des missionnaires à destination de l’Europe augmente. Le rassemblement de convertis européens en Utah continue en dépit de la publicité anti-mormone qui incité les autorités américaines à demander aux gouvernements européens d’empêcher les mormons d’émigrer. Aucune suite ne sera donnée à cette demande.
Après l’organisation d’une mission des États du Sud en 1875, les conversions donnent de temps en temps lieu à des violences. Les missionnaires sont chassés de certaines localités et, en 1879, des émeutiers de Géorgie tuent Joseph Standing. En 1884, à Cane Creek, au Tennessee, des émeutiers assassinent deux missionnaires et deux résidants qui manifestent de l’intérêt pour l’Église.
Voulant voir leur histoire racontée équitablement, les dirigeants de l’Église fournissent des renseignements considérables à l’historien californien Hubert Howe Bancroft. La History of Utah de Bancroft (1889) est l’une des premières histoires écrites par un véritable historien non mormon à traiter l’Église avec impartialité.
En 1879, la Cour suprême confirme le caractère constitutionnel de la loi contre la Bigamie de 1862, affirmant l’illégalité du mariage plural (voir Reynolds contre les États-Unis). De nouvelles lois sont passées, les poursuites deviennent plus acharnées et les maris et pères polygames se retrouvent devant quatre choix: abandonner leurs familles, entrer dans la clandestinité, affronter les poursuites judiciaires ou quitter les États-Unis. En dépit de cette crise, le président Taylor, déclarant que quand les lois de l’homme et celles de Dieu sont en conflit, il obéit à Dieu, refuse d’abandonner ses propres familles plurales ou de dire aux autres frères d’abandonner les leurs. Les attaques contre la polygamie, souvent menées par des organisations religieuses, viennent de toutes parts. Quand les groupes nationaux de femmes insistent auprès du président Rutherford B. Hayes pour qu’il poursuive les polygames de l’Utah, 2.000 femmes de l’Église signent une résolution affirmant que le mariage plural est une pratique religieuse protégée en vertu de la Constitution.
L’hostilité entre les saints et les gentils couve au niveau national et en Utah. La pression publique amène le Congrès à passer en 1882 la loi Edmunds, qui impose jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et $500 d’amende pour polygamie et jusqu’à six mois et $300 d’amende pour cohabitation illégale (voir Lois contre la polygamie). Les personnes pratiquant la polygamie ou la cohabitation illégale perdent leurs droits civiques, ne pouvant faire partie d’un jury, détenir une fonction publique et voter. La loi crée un conseil de cinq commissaires pour gérer l’enregistrement des électeurs et les élections. Elle déclare légitimes les enfants nés des polygames avant le 1er janvier 1883 et donne au président le pouvoir d’accorder des amnisties à sa discrétion.
La Commission d’Utah commence son travail en 1882 en déclarant que quiconque a jamais pratiqué le mariage plural, même avant la loi de 1862 contre la bigamie, ne peut pas voter. Comme la commission exige des électeurs de faire un «serment-test» jurant qu’ils ne violent pas la loi, dans l’année la loi va priver de leurs droits plus de 12.000 saints des derniers jours. Mais en 1885, la Cour suprême des États-Unis décidera que ce serment-test est anticonstitutionnel.
La croisade judiciaire contre des polygames va gravement perturber la société de l’Église en Utah, en Idaho et en Arizona. Les polygames et leurs familles vont beaucoup en souffrir, de même que l’Église comme organisation. Des maris et des pères sinon respectueux des lois – et certaines épouses et certains enfants – se réfugient dans une «clandestinité» mormone, se déplaçant fréquemment d’un endroit à l’autre pour échapper aux federal marshalls pourchassant les «cohabs». Les saints créent des cachettes secrètes dans les maisons, les granges et les champs, des codes pour s’avertir mutuellement et des guetteurs à l’affût des marshalls. Les «deps» (deputy marshalls, officiers de police adjoints) fédéraux se déguisent en marchands ambulants ou en recenseurs et engagent leurs propres guetteurs pour interroger les enfants et les voisins et pour violer la vie privée des foyers. Des récompenses sont offertes pour chaque cohab capturé. Les familles souffrent, en particulier les épouses livrées à elles-mêmes pour entretenir les cultures tandis que leurs maris se cachent. Les épouses qui refusent de témoigner contre leurs maris sont incarcérées. Hommes, femmes et enfants connaissent de longues périodes de privation et de peur.
En Utah, entre 1884 et 1893, 939 saints iront en prison sur des accusations relatives à la polygamie. En Idaho et en Arizona les saints sont poursuivis avec la même férocité. Quand les prisons de l’Arizona sont pleines, les cohabs sont envoyés dans un pénitencier de Detroit. Un Utahan, Edward M. Dalton, est tué par un adjoint lancé à sa poursuite, ce qui aigrit les saints contre le gouvernement. Ce sera aussi le cas suite à une décision de la Cour suprême des États-Unis qu’un homme qui a cessé de vivre avec son épouse mais qui lui a fourni nourriture et abri est coupable de cohabitation.
La croisade perturbe considérablement les activités normales de l’Église. Le président Taylor évite de se faire arrêter en voyageant. Dans son dernier sermon public, il condamne ce qu’il qualifie d’outrage judiciaire, après quoi il entre dans la clandestinité. Plusieurs apôtres vont en exil, faisant des missions spéciales dans des régions isolées de l’Ouest, au Mexique, au Canada et à Hawaï. Plusieurs autres font une mission en Europe et auprès des Amérindiens. Beaucoup de présidents de pieu et d’évêques essaient de même d’éviter l’arrestation.
Entre 1884 et 1887, des conférences générales sont tenues à Provo, à Logan et à Coalville plutôt qu’à Salt Lake City, pour aider les participants à éviter l’arrestation. Peu d’Autorités générales sont présentes. Franklin D. Richards, un apôtre qui ne risque pas l’arrestation parce que son épouse plurale est morte, préside certaines des conférences. Les épîtres générales du président Taylor et du président Cannon donnent des directives aux conférences.
Le président Taylor dirige l’Église par lettre. Pendant plus de deux ans, il va rester dans la clandestinité, séparé de la plus grande partie de sa famille et de ses amis. Il meurt caché à Kaysville (Utah), le 25 juillet 1887, après avoir été Autorité générale pendant près de quarante-neuf ans. À sa mort, les marshalls fédéraux auront fait des descentes dans presque toutes les colonies d’Utah, des centaines de saints se seront réfugiés au Mexique ou au Canada et presque tous les dirigeants auront dû se cacher. À son enterrement à Salt Lake City, on l’honorera comme double martyre dont le sang a été versé à la prison de Carthage avec Joseph et Hyrum Smith et qui est ensuite mort en exil à cause de la persécution du gouvernement.
Une fois de plus, le Conseil des Douze, dirigé par Wilford Woodruff, le doyen des apôtres, va prendre le gouvernail de l’Église et en orienter le cours, en grande partie depuis la clandestinité jusqu’à ce qu’il organise une nouvelle Première Présidence à la conférence générale d’avril 1889. Wilford Woodruff devient président de l’Église et George Q. Cannon et Joseph F. Smith sont ses conseillers. Ce sera la dernière fois que les Douze auront postposé la réorganisation de la Première Présidence à la mort du président. En décembre 1892, le président Woodruff, déclarant qu’un retard prolongé n’est pas agréable au Seigneur, invite Lorenzo Snow, le doyen des apôtres, à réorganiser immédiatement à sa mort.
Les dirigeants politiques nationaux, voyant que l’Église ne se plie pas à la loi, le Congrès décrète en 1887 une mesure plus radicale, la loi Edmunds-Tucker, qui vise à détruire l’Église en tant qu’entité politique et économique afin de forcer les saints à abandonner le mariage plural. La loi dissout l’Église en tant qu’entité juridique, exige la confiscation de toute propriété dépassant $50.000, dissout la Compagnie du Fonds perpétuel d’Émigration et en réclame la propriété, et met fin à la Légion de Nauvoo (milice territoriale). Pour faciliter les poursuites, la loi exige la présence obligatoire des témoins aux procès et confirme qu’il est légal de forcer les épouses à témoigner contre leurs maris. Les juges de validation du comté, qui procèdent à la constitution des jurys, doivent être nommés par le président des États-Unis. Des fonctionnaires désignés par le fédéral prennent la direction des écoles. Des tribunaux de validation certifient tous les mariages. Le décret déshérite tous les enfants nés des mariages pluraux un an ou plus après le passage de la loi. Le suffrage des femmes est aboli et un nouveau serment-test est élaboré. Personne ne pourra voter, faire partie d’un jury ou exercer un mandat public sans signer un serment de soutien des lois contre la polygamie.
Les représentants fédéraux de la loi s’efforcent avec zèle d’arrêter et emprisonner les dirigeants de l’Église. Le président Woodruff reste dans la clandestinité près de St-George (Utah), dirigeant l’Église par courrier et par réunions privées. George Q. Cannon, premier conseiller du président Woodruff, est arrêté en février 1886, obtient sa libération sous caution, puis disparaît dans la clandestinité jusqu’en 1888 quand il se rend à un juge plus clément. Il passe 175 jours en prison et paie une amende de $450. Les visites étant permises en prison, il peut gérer beaucoup d’affaires de l’Église et d’affaires personnelles. Il supervise les Écoles du Dimanche et finit d’écrire une biographie de Joseph Smith. Sa présence donne du courage aux autres cohabs de la prison. Les saints des derniers jours considèrent ces prisonniers comme des martyrs et leur offrent une réception de gala quand ils sont libérés.
Les arrestations sont un problème, mais ce qui fait le plus de tort à l’Église, c’est son incapacité d’acquérir et d’utiliser des fonds pour promouvoir son œuvre et la perte des droits politiques. Pour protéger de la confiscation des biens personnels fonciers pour une valeur de $3 millions, l’Église demande à des membres éminents de prendre en charge la propriété de certains biens à titre d’administrateurs. Des associations sans but lucratif se créent pour détenir les propriétés, notamment les trois temples de l’Utah. Des associations de paroisse et de pieu reprennent les églises, les maisons de dîme et le bétail locaux de l’Église. Beaucoup de pieux créent des académies avec la dîme que l’Église leur confie.
Les receveurs fédéraux confisquent pour environ $800.000 de propriétés non confiées à des privés ou à des associations et ensuite rendent à l’Église certaines propriétés à titre locatif, comme le Temple Block à Salt Lake City. Les dirigeants de l’Église mettront à l’épreuve le caractère constitutionnel des confiscations, mais en 1890 la Cour suprême confirmera la nouvelle loi par un vote de 5 contre 4. La destruction économique de l’Église paraît certaine.
Cette croisade économique va de pair avec un assaut politique. Toutes les femmes, des milliers de saints masculins et tous les immigrants convertis ayant perdu leurs droits civiques, les politiciens anti-mormons prennent le contrôle des gouvernements d’Ogden et de Salt Lake City. En Idaho, pratiquement tous les membres de l’Église ont perdu leurs droits civiques par un serment-test exigeant d’eux qu’ils disent sous serment qu’ils ne croient pas ou n’appartiennent pas à une église qui croit au mariage plural. Quand la Cour suprême confirme en 1890 le serment-test de l’Idaho, les anti-mormons présentent au Congrès le projet de loi Cullom-Struble qui veut ôter leurs droits civiques à tous les saints des derniers jours de partout (voir Histoire juridique et judiciaire de l’Église).
Économiquement paralysée, ses membres privés de leurs droits politiques, l’Église se trouve devant des perspectives d’avenir catastrophiques si elle ne met pas fin à sa pratique du mariage plural. Le président Woodruff consulte les dirigeants et prie avec ferveur pour savoir quoi faire. Après réception d’une révélation divine, il publie, le 24 septembre 1890, le Manifeste qui annonce la fin officielle du mariage plural. «Le Seigneur, par la vision et la révélation, m’a montré très exactement ce qui se produirait si nous n’arrêtions pas cette pratique, dira plus tard le président Woodruff. Il m’a dit exactement quoi faire, et ce que serait le résultat si nous ne le faisions pas» (Deseret Evening News, 14 nov. 1891). Le Manifeste affirme que l’Église a mis fin à l’enseignement du mariage plural et ne permet pas de nouveaux mariages pluraux. Le président Woodruff déclare qu’il se soumet aux lois du pays et invite les membres de l’Église à faire de même. À la conférence générale du 6 octobre 1890, l’Église accepte le Manifeste. Celui-ci sera intégré aux Doctrine et Alliances en 1908.
Parlant pour la Première Présidence, George Q. Cannon explique qu’une révélation de 1841 est d’application en 1890; elle donnait pour instructions aux membres de l’Église que quand des «ennemis tombent sur eux et les empêchent d’accomplir cette œuvre, voici, il me convient de ne plus la requérir de la part de ces… hommes, mais d’accepter leurs offrandes» (D&A 124:49). La plupart des saints accepteront la nouvelle directive, mais pas facilement et pas tous. En effet, un nombre limité de nouveaux mariages pluraux vont se faire au cours de la décennie suivante jusqu’à ce que les dirigeants de l’Église déclarent que quiconque persiste dans cette pratique risque l’excommunication.
Avec la publication du Manifeste, les hostilités s’apaisent et l’Église écrit une nouvelle ère de coopération. Il sera généralement admis que les maris ne seront pas tenus de répudier leurs épouses plurales et leurs enfants, et les procureurs locaux deviendront très cléments quand il s’agira de punir ceux qui sont accusés de polygamie. Benjamin Harrison, président des Etats-Unis, qui, en 1891, visite l’Utah et serre la main au président Woodruff, accorde, en 1893, une amnistie limitée aux saints suivie d’une amnistie générale accordée, en 1894, par Grover Cleveland. Après le Manifeste et les amnisties, les Autorités générales vont reprendre leurs fonctions administratives normales.
Voulant obtenir le statut d’état pour l’Utah, les dirigeants de l’Église invitent les saints d’Utah à se joindre aux partis politiques nationaux et à devenir démocrates ou républicains. Un Congrès républicain passe, en 1894, une loi d’habilitation que le président démocrate Grover Cleveland signe. L’Utah écrit une nouvelle constitution qui interdit le mariage plural et assure la séparation de l’Église et de l’État. Le 4 janvier 1896, l’Utah devient un état, presque cinquante ans après que Brigham Young a réclamé ce statut (voir Utah en tant qu’état).
En 1896, les Autorités générales acceptent un «Manifeste politique» stipulant qu’aucune d’elles ne se présentera pour un poste élu sans l’approbation préalable des autorités présidentes de l’Église. Quand Moses Thatcher, un apôtre, refuse de signer le document, il est relevé du Collège des Douze.
Pendant les années 1890, le nombre de missionnaires de l’Église va presque tripler. Dans le Pacifique, l’œuvre missionnaire pénètre à Samoa en 1888 et au Tonga en 1891. En 1898, la mission australasienne est divisée en mission australienne et mission de Nouvelle-Zélande. Certains saints hawaïens émigrent en Utah et créent une colonie à Iosepa, dans l’ouest de l’Utah. L’œuvre missionnaire reprend en Californie en 1892 et dans l’Est des États-Unis en 1893. Le prosélytisme continue en Europe, bien que l’émigration en provenance de là diminue de 50% dans les années 1890 par rapport aux années 1880. Dans les années 1890, l’Église, bien ancrée en Amérique et occupant la plupart des bonnes terres dans l’Ouest, demande que l’émigration prenne fin et que les convertis d’outre-mer édifient des pieux dans leur patrie plutôt que de se rassembler en Sion.
La loi Edmunds-Tucker renforce les écoles d’État, qui excluent l’enseignement de la religion. En réaction, l’Église commence à donner des cours de religion après école dans les églises et fonde des académies ou des lycées dans les colonies plus importantes. Entre 1888 et 1891 on ouvre trente et une académies de l’Église en Utah, en Idaho, en Arizona, au Canada et au Mexique.
Les années 1890 voient les femmes de l’Église étendre leur action et démontrer leurs droits politiques. Continuant leur affiliation aux mouvements des femmes dans l’Est, elles deviennent membres du Conseil national des femmes et trouvent auprès de leurs collègues de l’Est des alliées importantes dans leur combat contre la privation des droits civiques. Les efforts soutenus par la Société de Secours pour obtenir le droit de vote ont pour résultat que le suffrage des femmes est garanti dans la Constitution de l’État d’Utah de 1895.
Après quarante ans, la construction du temple de Salt Lake City est terminée et le temple est consacré en avril 1893. Après de brèves portes ouvertes le 5 avril, première occasion donnée aux non-membres de visiter un temple, l’édifice sacré est consacré le 6 avril, quarante ans après la pose de la pierre angulaire. Le service de consécration sera répété entre le 6 avril et le 18 mai et comprend cinq sessions réservées aux enfants en dessous de l’âge du baptême; quelque 75.000 saints des derniers jours seront présents. Ensuite les membres de l’Église n’entreront dans le temple que pour accomplir des ordonnances pour les vivants et les morts. L’année suivante, le président Woodruff annonce par révélation que les groupes de familles n’ont plus besoin d’être scellés par adoption à des dirigeants éminents de la prêtrise (voir Loi de l’adoption), mais qu’ils doivent être scellés par lignage en remontant aussi loin que possible dans le temps. En conséquence, les membres vont commencer à faire leur généalogie et à accomplir des ordonnances de scellement pour leurs ancêtres sur plusieurs générations. L’Église crée la Société généalogique d’Utah pour aider des chercheurs.
En 1893, le Chœur du Tabernacle de Salt Lake City, pendant qu’il fait une grande tournée, chante à l’Exposition universelle de Chicago et remporte le deuxième prix dans un concours important. La Première Présidence entière accompagne le chœur, ce qui est la première fois qu’un président de l’Église se rend dans l’Est depuis l’émigration vers l’Ouest presque cinquante ans plus tôt. Cette représentation inaugure une nouvelle image publique de l’Église, bien que cette même année l’Église se voie refuser une représentation au Parlement mondial des Religions, également réuni à Chicago.
Il y aura d’autres événements importants sous la direction de Wilford Woodruff: en novembre 1896, le jour de jeûne mensuel de l’Église passe du premier jeudi au premier dimanche du mois, une pratique qui existe encore aujourd’hui; en 1897, la coutume du rebaptême prend fin. La même année, Wilford Woodruff, lui-même pionnier de 1847, préside la commémoration par toute l’Église de l’entrée dans la vallée du lac Salé cinquante ans auparavant. Salt Lake City organise des célébrations avec des défilés, des programmes, et l’inauguration d’un monument à Brigham Young.
Pendant les années 1890, l’Église et l’Utah entrent, économiquement aussi bien que politiquement, dans la société américaine. Beaucoup d’entreprises coopératives deviennent privées et la plupart des commerces patronnés par l’Église sont vendus ou se lancent dans la concurrence en tant qu’entreprises productrices de revenus. Mais l’intégration dans l’économie nationale ne se fait pas sans douleur. La précédente confiscation des propriétés et la diminution du paiement de la dîme provoquées par la croisade contre la polygamie ont fait beaucoup de mal à l’Église, de même que la dépression nationale de 1893. Les dirigeants sont forcés d’emprunter massivement aux financiers de l’Est pour payer les dettes et satisfaire aux obligations et en 1898 les dettes de l’Église dépassent $1.250.000. Cependant, en dépit de la dette et d’une dépression nationale, l’Église favorise et investit dans des industries de base telles que la fabrication de sucre de betteraves, l’énergie hydroélectrique et un choix d’entreprises minières et de transport pour étendre la base économique du Grand Bassin et profiter aux collectivités des saints des derniers jours (Voir Histoire économique de l’Église).
Avec la fin des mariages pluraux et le fait que l’Utah devient un état et entre dans le système général américain en matière de politique et de finances, les saints des derniers jours entrent de plein pied dans une nouvelle ère. Quelque chose qui donne une idée du changement est la réponse de l’Église à la guerre hispano-américaine de 1898: la Première Présidence invite les jeunes gens de l’Église à soutenir l’effort national, démontrant ainsi le patriotisme et la loyauté des saints.
Wilford Woodruff décède le 2 septembre 1898, à San Francisco, à l’âge de quatre-vingt-onze ans. Selon ses instructions, une nouvelle Première Présidence est immédiatement désignée, Lorenzo Snow devenant le cinquième président de l’Église.

Bibliographie
Alexander, Thomas G. Mormonism in Transition: A History of the Latter-day Saints, 1890-1930. Urbana et Chicago, 1985.
Arrington, Leonard J. Great Basin Kingdom: An Economic History of the Latter-day Saints, 1830-1900. Lincoln, Neb., 1966.
Larson, Gustive O. The “Americanization” of Utah for Statehood. San Marino, Calif, 1971.
Lyman, Edward Leo. Political Deliverance: The Mormon Quest for Utah Statehood. Urbana et Chicago, 1986.
Roberts, B. H. A Comprehensive History of the Church of Jesus Christ of Latter-day Saints, Century 1. Vol 6. Provo, Utah, 1965 (réimpression).

Histoire de l’Église: 1898-1945, Transitions: Période du début du vingtième siècle
Auteurs: SADLER, RICHARD W. et WALKER, RONALD W.

[Au moment où s’ouvre le nouveau siècle, les finances de l’Église souffrent des séquelles de la croisade fédérale contre la polygamie et le public doute que sa proclamation récente de la cessation du mariage plural soit vraiment entrée en vigueur. Après avoir traité de l’évolution dans ces deux domaines, cet article examine l’intégration des saints des derniers jours dans la société américaine, notamment la position de l’Église sur la guerre et la paix. Il passe aussi en revue les efforts de systématisation qui accompagnent la croissance régulière tout au long de cette période.
En plus des correspondances qui se trouvent dans le texte, les articles généraux sur le sujet sont: Organisation: Histoire de l’organisation et de l’administration et Histoire économique de l’Église. Une fête du Centenaire accompagne le centième anniversaire de l’Église en 1930. Lorenzo Snow, Joseph F. Smith et Heber J. Grant sont les présidents de l’Église pendant cette période.]
L’Église aborde le vingtième siècle en état de siège et dans l’isolement. L’expérience des saints jusqu’ici est constituée d’une fondation, d’un exode vers l’Ouest américain isolé, de la création à cet endroit d’un royaume spirituel et temporel de Dieu et d’affrontements avec une société américaine peu compréhensive et souvent hostile. Pourtant l’année 1898 est une plaque tournante. Après la mort de Wilford Woodruff en septembre, Lorenzo Snow (1898-1901) lui succède et entreprend une série de changements visant à produire un renouveau et une redéfinition. Avec ses successeurs, Joseph F. Smith (1901-1918) et Heber J. Grant (1918-1945), il réagit aux changements radicaux de la première moitié du vingtième siècle et s’efforce de préserver les vieilles valeurs dans un monde en mutation rapide. Il en résulte qu’au milieu du siècle l’Église est acceptée et intégrée dans la société américaine, et qu’elle est plus vigoureuse et plus vivante que personne sauf ses défenseurs les plus vigoureux aurait pu le prévoir un demi-siècle plus tôt.
Les finances constituent le problème le plus urgent. La croisade contre la polygamie (voir Législation contre la polygamie) a gravement détérioré les revenus et les capitaux, d’abord par l’incarcération des dirigeants qui gèrent normalement les dons et en second lieu par la saisie et la mauvaise gestion des biens de l’Église. La panique de 1893 et la dépression qui en est résultée ont encore aggravé la situation. Espérant fournir de l’emploi et stimuler l’économie locale, les dirigeants ont emprunté de l’argent pour financer des travaux publics et des entreprises commerciales. Le président Snow met rapidement fin à cette pratique. Son administration sabre dans les dépenses, vend les biens non essentiels et exhorte les disciples fidèles à augmenter leurs contributions financières.
Il annonce de manière spectaculaire cette nouvelle politique lors d’une tournée de prédication dans le sud de l’Utah. En mai 1899, parlant aux membres assemblés à St-George, il promet que s’ils se conforment fidèlement au code de la dîme, un code de l’Église qui existe de longue date, ils en seront bénis et que cela libérera en même temps l’Église de ses dettes. Une année après la campagne du président Snow en faveur de la dîme, les revenus de l’Église auront doublé. Les dirigeants invitent aussi à faire des dons en argent liquide au lieu de denrées en nature et instituent des procédures systématiques de dépenses et d’apurement. Grâce à ces réformes, le président Smith pourra annoncer, dès 1907, que l’Église est enfin sortie de dettes. Les recettes annuelles de dîme s’élèvent à $1,8 millions, alors qu’en 1898 la dette de l’Église était de $1.25 millions. De plus, l’Église a des propriétés pour plus de $10 millions. L’Église n’aura plus jamais recours au déficit budgétaire, même pendant la grande Dépression.
Les réformes du président Snow n’excluent pas la détention de biens d’investissement ni l’administration d’entreprises par des dirigeants et des directeurs de l’Église (voir Histoire économique de l’Église). Certaines entreprises, comme le Deseret Telegraph, la Utah Light and Railway Company et le Saltair Resort au Grand Lac Salé seront privatisées, mais l’Église investira particulièrement dans les entreprises qui font progresser ses buts sociaux ou institutionnels. Elle conserve le Deseret News et, au début des années 1920, les dirigeants créent l’une des premières stations radio du pays, qui deviendra plus tard radio KSL. Le Salt Lake Theater, le théâtre pionnier, est rendu à l’Église pour donner des spectacles autorisés – mais ce sera pour fermer au début de la Dépression par manque de rentrées et à cause de ce que les dirigeants de l’Église considèrent comme un déclin des valeurs théâtrales.
S’inspirant du précédent de la maison de Nauvoo, on construit l’hôtel Utah de Salt Lake City pour détourner les touristes des hôteliers non mormons hostiles et pour améliorer l’image de l’Église. La Beneficial Life Insurance Company fournit des assurances bon marché. La Utah Sugar Company, transformée en Utah-Idaho Sugar Company, continue à fournir aux fermiers locaux un marché pour leur récolte la plus importante en argent liquide, tandis que la Zion’s Cooperative Mercantile Institution (ZCMI) et la Zion’s Savings Bank & Trust fournissent au public des services de la vente au détail et des services bancaires concurrentiels. Cette politique altruiste d’investissement est également pratiquée à un niveau plus vaste. Les dirigeants de l’Église font partie du conseil d’administration d’autres sociétés importantes pour la région.
Ces investissements et les préoccupations sociales qu’ils expriment remontent à l’idéal pionnier de préoccupation pour le bien-être de la collectivité. Ce n’est d’ailleurs par le seul reste du passé. Le mariage plural continue à être un problème perturbant pour les saints des derniers jours et attire l’attention de tout le pays sur l’Église, en particulier pendant les mandats des présidents Snow et Smith. Si beaucoup de membres ont pu croire que le Manifeste de 1890 a mis fin au mariage plural, d’autres interprètent la déclaration comme un simple transfert de la responsabilité de sa pratique de l’Église à l’individu. En conséquence, de 1890 à 1904 certains mariages pluraux vont continuer, quoique à un niveau considérablement réduit. De plus, si certains maris cessent de vivre avec leurs épouses plurales, la plupart estiment avoir l’obligation morale et spirituelle de continuer de s’occuper de leurs familles.
Cette confusion et cette ambiguïté débordent sur la politique. En 1898, B.H. Roberts, membre du premier conseil des soixante-dix, et mari de trois épouses, est élu à la chambre des représentants des États-Unis. La Salt Lake Ministerial Association [association de pasteurs] et des organisations semblables dans d’autres endroits vont se servir de l’élection de Roberts pour concentrer l’attention sur la poursuite du mariage plural, accusant l’Église de ne pas respecter les accords qui ont permis à l’Utah de devenir un état. Des pétitions anti-Roberts contenant sept millions de signatures inondent le Congrès et la Chambre finit par lui refuser son siège.
Plus grave encore est le cas de Reed Smoot. L’élection en 1903 de Smoot, membre monogame du Collège des douze apôtres au Sénat des États-Unis provoque une fois de plus un tollé national. La commission sénatoriale sur les privilèges et les élections commence en 1904 des audiences sur Smoot (voir Smoot – Audiences), mais le Congrès se concentre plus souvent sur l’Église elle-même. Est-ce que l’Église et l’État sont vraiment séparés en Utah ? L’Église contrôle-t-elle la conduite de ses membres ? Incite-t-elle à la polygamie et à la cohabitation polygame ? Pendant l’enquête, qui va durer deux ans, Joseph F. Smith et d’autres dirigeants vont témoigner devant le comité. D’autres, comme Matthias F. Cowley et John W. Taylor, soupçonnés d’accomplir des mariages pluraux depuis le Manifeste, refusent. Pour mettre fin à la polémique et démontrer la bonne volonté de l’Église de faire de la question une affaire de discipline, le président Smith annonce un «Second Manifeste» qui interdit formellement tout futur mariage plural. Il exige aussi la démission de Cowley et de Taylor du Conseil des Douze. En 1907, le Sénat, suite à un vote serré, permet à Smoot de conserver son siège.
Le mariage plural ne va quand même pas disparaître entièrement, même devant la politique maintenant résolue du président Smith et plus tard du président Grant. Les frères Cowley et Taylor, par exemple, vont subir une action disciplinaire supplémentaire pour poursuite des mariages pluraux, le premier en étant «disqualifié» tandis que Taylor, après avoir pris une épouse plurale supplémentaire, sera excommunié. Leur conduite est semblable à celle d’un nombre de plus en plus important d’anciens Mormons au vingtième siècle. Qualifiés de fondamentalistes, ils préfèrent accepter l’excommunication automatique plutôt que d’abandonner le mariage plural ou de renoncer à d’autres pratiques du dix-neuvième siècle. À la différence de la généralité des saints des derniers jours, qui sont renforcés dans leur croyance en la révélation donnée aux prophètes du jour et abordent donc les temps nouveaux d’une manière nouvelle, les Fondamentalistes affrontent le monde moderne en regardant en arrière.
La question du mariage plural ne disparaît pas non plus dans la presse populaire. Pendant la première décennie du vingtième siècle et même plus tard, l’Église va être harcelée publiquement par les journalistes à scandale et les adversaires politiques en Utah. Les journaux, les périodiques et le cinéma, tant en Europe qu’aux Etats-Unis, vont faire du sensationnel (souvent romancé) avec la polygamie, décrire les dirigeants de l’Église comme des autocrates et traiter l’Église d’antiaméricaine et antichrétienne (voir Publications antimormones; Stéréotypes sur les saints des derniers jours). Les vieilles accusations d’atrocités commises par les Danites et d’expiation par le sang refont surface. En Utah, l’assaut est mené par deux anciens sénateurs américains, Frank J. Cannon et Thomas Kearns, qui se servent du Salt Lake Tribune pour lancer des attaques virulentes contre Smoot et l’Église et pour soutenir l’American Party. Ce parti politique antimormon éphémère dominera le gouvernement de Salt Lake City de 1905 à 1911.
L’Église va essayer d’affronter ce barrage d’insultes malgré la violence de l’opposition. Les premiers efforts vont consister à transformer le Saltair Resort et le Temple Square de Salt Lake City en centres pour visiteurs. Avec les orgues et le Chœur du Tabernacle mormon comme attractions, ce dernier site va, dès 1905, recevoir annuellement 200.000 visiteurs. À partir de ce moment-là, le nombre de visiteurs va augmenter rapidement. Quand c’est possible, les dirigeants publient des réfutations dans les journaux à sensation. En outre une réfutation systématique sera lue en 1911 pendant la conférence générale de l’Église. La réplique la plus compétente et la plus durable viendra de B.H. Roberts. De 1909 à 1915, il publie une série d’articles sur l’histoire mormone dans le périodique Americana. Ils seront plus tard rassemblés pour constituer les six tomes de la Comprehensive History of the Church de Roberts.
De plus en plus, des hommes et des femmes extérieurs à l’Église vont aussi défendre les saints des derniers jours. Déjà en 1900, C. C. Goodwin, ancien rédacteur du journal antimormon Salt Lake Tribune et détracteur de longue date, qualifie franchement les mormons d’efficaces, prospères et généralement agréables. L’éminent sociologue Richard T. Ely fait l’éloge de la vie de groupe des saints. Morris R. Werner publie une biographie de Brigham Young où l’on ne retrouve pas les stéréotypes et l’hostilité antérieurs. Ces ouvrages qui rompent avec les habitudes vont être suivis d’autres. À la fin des années 1920, le président Grant peut concéder que l’on peut mettre dans les médias quasiment tout ce que l’Église pourrait demander. En fait, le magazine Time met le président Grant en couverture, tandis que les studios de Hollywood font des films aussi favorables que Union Pacific et Brigham Young.
Le changement d’attitude du public est dû en partie à l’intégration des membres de l’Église dans la société américaine. Les saints des derniers jours du dix-neuvième siècle avaient étendu leurs colonies agricoles dans tout l’Ouest montagneux et même au Canada et au Mexique (voir Colonisation), mais leurs communautés agraires étaient souvent des enclaves provinciales très unies. Par contre, du fait de l’émigration des saints vers l’extérieur au vingtième siècle, les membres de l’Église vont maintenant fréquenter leurs concitoyens américains en milieu urbain. Pendant les années 1920, par exemple, le pourcentage de saints des derniers jours vivant dans l’Intermountain West diminue tandis que celui des saints vivant sur la côte occidentale américaine augmente. En 1923 est créé le pieu de Los Angeles, premier pieu moderne en dehors de la zone culturelle mormone traditionnelle. Entre 1919 et 1927, le nombre de saints des derniers jours en Californie augmente de moins de 2.000 à plus de 20.000. La dispersion de l’Église au vingtième siècle commence tout d’abord par la migration d’un grands nombre vers la Côte ouest, ensuite et de plus en plus vers l’Est et le Midwest.
Le contact direct avec les voisins diminue les barrières culturelles, religieuses et même émotionnelles, permettant aux mormons et aux non-mormons de mieux s’apprécier. Le nombre de plus en plus important d’Américains prospères qui sont aussi saints des derniers jours ou nés en Utah accélère le processus. Maud Adams connaît un immense succès en incarnant Peter Pan dans un spectacle à grand succès. Les inventions de Philo T. Farnsworth sont à l’origine de la télévision. Cyrus Dallin et Mahonri Young se distinguent dans les arts.
Les saints des derniers jours sont particulièrement attirés vers les affaires publiques. Edgar B. Brossard devient membre et puis président de la Commission tarifaire des États-Unis. J. Reuben Clark, Jr., parvient aux échelons supérieurs de la bureaucratie du Département d’État et termine sa carrière au gouvernement comme ambassadeur au Mexique. Pendant le New Deal, Marriner S. Eccles est président du système de la Réserve fédérale. James H. Moyle est adjoint du Secrétaire au Trésor de 1917 à 1921, tandis que William Spry est commissaire aux terres publiques de 1921 à 1929. Heber M. Wells est trésorier du US Shipping Board. Richard W. Young devient commissaire des États-Unis aux Philippines et reviendra de la Première Guerre mondiale en tant que premier général de l’armée régulière que compte l’Utah. Pour les membres d’une minorité religieuse jadis persécutée, chaque succès personnel de ce genre est le signe que l’Église est de plus en plus acceptée et que son prestige s’accroît. Les «gens du dehors» deviennent des «gens du dedans».
Deux membres de l’Église ont une influence disproportionnée dans la création de la nouvelle image de l’Église. L’un d’eux est Reed Smoot. Distant, mais honnête et tout à fait inlassable dans son dévouement aux devoirs du gouvernement et aux intérêts de l’Église, Smoot restera trente ans au sénat. Président du puissant Comité des finances du sénat, il exerce une influence majeure dans la politique économique américaine. Plus que n’importe quel autre saint des derniers jours dans les services publics, il personnifie l’Église, apaisant les doutes au sujet de son patriotisme et de son intégrité par sa personnalité et sa présence.
L’autre est le président Heber J. Grant. Il est dans les affaires par goût et c’est son premier métier. Ses manières simples et son sens des affaires charment une époque vouée à l’esprit d’entreprise. Les non-mormons apprécient tout particulièrement ses discours. Quand il termine une allocution devant le San Francisco Commonwealth Club, il est applaudi par des cris de «Encore ! Encore !» Quand il parle à la deuxième conférence de l’agriculture, de l’industrie et de la Science de Dearborn, les «Chemurgicians» lui font à deux reprises une ovation. Son ministère de relations publiques est plus que faire des discours. Il organise des tournées du Chœur du Tabernacle. Il fait personnellement visiter Salt Lake City à des personnalités de renommée nationale dans les affaires et la politique et cultive leur amitié. Il rend visite à la Maison Blanche aux présidents des États-Unis Warren G. Harding, Calvin Coolidge, Herbert Hoover et Franklin D. Roosevelt. Si le président Grant est respecté par son propre peuple, les non-mormons l’aiment et l’idéalisent aussi.
La croissance vigoureuse de l’Église pendant cette période témoigne de ce que son image est plus positive. La population va plus que tripler pendant le demi-siècle; les totaux des années 1900 à 1945 passent de 268.331 à 979.454. Avant 1898 l’Église avait organisé 37 pieux (16 seront supprimés); en 1945, 116 autres auront été ajoutés. Le nombre de missionnaires de l’Église change et augmente en conséquence, rajeunissant, attirant plus de célibataires et, après 1898, comprenant un nombre croissant de jeunes filles. À la fin du siècle, on appelle moins de 900 missionnaires par an; en 1940, il y en aura 2.117.
L’œuvre missionnaire continue à être une préoccupation importante. La nouvelle mission la plus ambitieuse est le Japon, ouvert en 1901 par des missionnaires dirigés par Heber J. Grant, alors apôtre. Trois ans plus tard, la mission mexicaine est rouverte. Les années 1920 vont voir plus de 11.000 convertis de langue allemande. Néanmoins c’est des régions d’expression anglaise que viennent la plupart des convertis: de Grande-Bretagne, du Canada et des États-Unis et c’est la mission des états du Sud qui a le plus de succès. Malheureusement, là comme ailleurs, les missionnaires sont soumis à des actes de violence physique. Au début du siècle, le nombre annuel de baptêmes de convertis était de 3.786; un demi-siècle plus tard, il atteint 7.877.
L’Église cherche à rendre son prosélytisme plus efficace. Au lieu d’être envoyés sans «bourse ni sac», la plupart des missionnaires sont maintenant soutenus financièrement par leur famille ou leur assemblée locale. Des cours de formation des missionnaires sont organisés dans les académies et les universités de l’Église. Au milieu des années 1920, on inaugure un «Foyer de mission» à Salt Lake City pour les sœurs et les anciens qui partent. Les missionnaires y reçoivent pendant quinze jours des leçons sur le régime alimentaire, l’hygiène, les bonnes manières et surtout les techniques missionnaires et la doctrine de l’Église. La période produit aussi de nouvelles brochures missionnaires. Charles W. Penrose écrit une série intitulée Rayons de Lumière vivifiante, James Talmage écrit La grande Apostasie et Ben E. Rich écrit Une Discussion amicale. Pour conserver l’esprit de son héritage et pour aider à raconter son histoire, l’Église achète des sites importants pour les débuts de son histoire (voir Sites historiques): la prison de Carthage en Illinois (1903), où Joseph Smith et son frère Hyrum ont été tués, une partie de l’emplacement du temple d’Independence (Missouri) (1904), le lieu de naissance de Joseph Smith à Sharon (Vermont) (1905-1907) et la ferme des Smith à Manchester (New York) (1907). À chacun de ces endroits, l’Église construira par la suite un centre pour visiteurs.
Ce qui caractérise sans doute plus l’époque que l’expansion, c’est la consolidation interne. La succession de Lorenzo Snow à la présidence est symptomatique. Pour la première fois, l’accession du doyen des apôtres au poste de président de l’Église se fait en quelques jours au lieu des interrègnes d’environ trois ans du passé (voir Succession à la présidence). Conscient de la complexité croissante de l’Église, le président Snow exhorte les Autorités générales à consacrer leur temps plein à leur ministère. En 1941, il ne s’agit plus simplement d’une question d’efficacité de la direction, mais d’expansion. «La croissance rapide de l’Église ces derniers temps, la création d’un nombre toujours plus grand de paroisses et de pieux… [et] la nécessité constamment pressante d’augmenter le nombre et l’efficacité de nos missions», remarque la Première Présidence en 1941, «ont donné lieu à un service apostolique de la plus grande magnitude» (CR d’avr. 1941, pp. 94-95). En réponse à ces nouvelles exigences, cinq hommes sont nommés Assistants des Douze. Contrairement aux officiers à court terme qui continuent à occuper la plupart des postes de l’Église, les officiers «généraux» de l’Église, une trentaine, sont maintenant rétribués et accomplissent un ministère à temps plein pour le reste de leur vie.
Le gouvernement de la prêtrise va aussi changer. La première moitié du siècle assiste à une décentralisation graduelle de la prise de décision, les dirigeants de pieu et les dirigeants locaux recevant une autorité accrue. L’église réduit la taille des pieux pour les rendre plus fonctionnels et met davantage l’accent sur «l’enseignement de paroisse» (voir Enseignement au foyer). Avec des districts plus petits et un nombre plus grand de garçons et d’hommes affectés à l’enseignement, le pourcentage des familles recevant des visites mensuelles passe de 20% en 1911 à 70% une décennie plus tard. Finalement, et c’est un changement important par rapport à la pratique pionnière, les membres sont invités à porter les conflits profanes devant les tribunaux civils et pénaux plutôt que devant les tribunaux de l’Église. Jadis le moyen de trancher les problèmes sociaux et économiques, les tribunaux de l’Église s’occupent maintenant exclusivement de discipline religieuse.
Les collèges de la prêtrise sont renforcés. Les réunions de prêtrise se tiennent maintenant chaque semaine et la qualité des réunions est améliorée grâce à des manuels de cours créés au niveau central. En 1906, Joseph F. Smith élabore un programme d’avancement progressif dans la prêtrise pour les jeunes gens. Sous condition de dignité, les jeunes gens reçoivent l’ordination à l’office de diacre à l’âge de douze ans, d’instructeur à quinze et de prêtre trois ans plus tard. De leur côté, les hommes dignes reçoivent l’office d’ancien et de grand prêtre, ce qui change la pratique du dix-neuvième siècle de nommer une majorité de soixante-dix parmi les adultes. En 1910, les collèges de grands prêtres et de soixante-dix sont réalignés pour coïncider avec les frontières de pieu, ce qui permet aux autorités locales d’exercer une meilleure direction.
La tendance à la consolidation se manifeste aussi dans les organisations auxiliaires de l’Église. Les programmes des jeunes, précédemment informels, divers et administrés localement, cèdent de plus en plus la place à des programmes de groupes d’âge centralisés et à des programmes d’études unifiés. La Primaire des enfants ne dessert plus les jeunes plus âgés, tandis que la Société d’amélioration mutuelle des Jeunes Gens (SAMJG) et sa contre-partie chez les jeunes filles (SAMJF) comprend lles adolescents à partir de douze ans (voir Jeunes Gens; Jeunes Filles). On utilise d’abord les programmes nationaux des Boy Scouts et des Campeuses pour les jeunes membres de la SAM (voir Supervision), mais on ne tardera pas à abandonner ce dernier programme en faveur d’un programme interne. Les programmes d’activité prennent de plus en plus d’importance. Maintenant que l’École du Dimanche et les collèges de prêtrise donnent une formation doctrinale, la SAM se tourne de plus en plus vers la danse, le théâtre, la musique et le sport. Le siège de l’Église crée un magazine pour chaque auxiliaire: La Primaire a le Children’s Friend (1902) l’École du Dimanche, le Juvenile Instructor (1900), qui deviendra l’Instructor (1929). La SAMJG a l’Improvement Era (1897), la SAMJF le Young Woman’s Journal (1889); en 1929, les deux fusionnent et l’Improvement Era     devient la publication des deux. Les articles, les cours et les programmes sont périodiquement passés en revue et coordonnés. Par exemple, un Comité général de coordination de l’Église et le Comité consultatif social s’unissent pour publier un rapport crucial et de grande envergure en 1921 (voir Coordination de l’administration de l’Église).
La Société de Secours connaît ces mêmes tendances. Ses trois premières présidentes du vingtième siècle, c à d Zina D. H. Young (1888-1901), Bathsheba W. Smith (1901-1910) et Emmeline B. Wells (1910-1921), se souvenaient toutes de l’organisation de Nauvoo. Pour elles, les réunions des femmes devaient être spontanées, spirituellement actives et conçues localement. Mais le nouveau siècle va redéfinir leur vision. En 1901, quelques plans de leçons sont créés provisoirement. Douze ans après, avec la recommandation d’un comité de coordination de l’Église, les dirigeantes de la Société de Secours vont adopter un programme d’études uniforme prescrit. Elles mettent aussi en application un jour uniforme de réunion (le mardi), des registres et un message mensuel pour les instructrices visiteuses qui font des visites mensuelles dans les foyers. En 1915, un magazine officiel de la Société de Secours remplace le semi-indépendant Woman’s Exponent, qui était l’organe de la     Société de Secours depuis 1872. Bien que la Première Présidence approuve au début la poursuite de la pratique de la guérison par la prière par les femmes, souvent entreprise de matière impromptue lors des réunions, celle-ci va diminuer et sera abolie au milieu du siècle. Autre signe de centralisation sous la direction de la prêtrise, la Société de Secours est abritée dans le Bishop’s Building et reçoit de plus en plus ses directives de l’épiscopat président plutôt que de la Première Présidence. Bien que la Société de Secours ait précédemment joué un rôle dans l’élaboration et la supervision de la Primaire et de la SAMJG, cette supervision des auxiliaires des enfants et des jeunes prend fin.
Clarissa S. Williams (1921-1928), Louise Y. Robison (1928-1939) et Amy Brown Lyman (1940-1945), présidentes successives de la Société de Secours, collaborent à ces changements. Parlant pour le modernisme et l’efficacité, elles et leurs comités consultatifs abandonnent des tâches du passé telles que l’industrie locale, la culture de la soie et la vente au détail par magasin de distribution, en faveur de l’action au sein de la collectivité, de l’œuvre sociale «scientifique» ou professionnellement qualifiée, des campagnes contre l’alcool, le tabac et la délinquance et, pendant la grande Dépression, le secours public. Ce dernier effort est crucial. «Dans la mesure où les organisations de Société de Secours dans les paroisses fonctionnent en coopération avec les collèges de la prêtrise et les épiscopats», déclare Harold B. Lee, qui dirige les efforts d’entraide de l’Église, «il y a, dans cette même mesure, un programme de sécurité [entraide] dans cette paroisse» (Relief Society Magazine 24, 1e mars 1937, p. 143). Ces efforts répondent à l’idéal féminin mormon du début du vingtième siècle. Les femmes doivent encourager, adoucir et aider. Tandis que les dirigeantes des femmes continuent à jouer un rôle actif au Conseil national et international des femmes, les femmes ordinaires sont moins actives dans les rôles politiques, sociaux et professionnels que dans le ménage.
Plusieurs problèmes doctrinaux sont réglés, autre indication que la systématisation est en cours. À partir des premières années de l’administration de Lorenzo Snow, les autorités de l’Église débattent du point de savoir avec quelle rigueur la Parole de Sagesse, la révélation de 1833 sur la santé, doit être respectée. En 1921, on tranche la question en faisant de l’abstinence d’alcool, de tabac, de thé et de café l’une des conditions d’admission dans les temples. Pendant les trois premières décennies du siècle, le code de santé va inciter la plupart des saints des derniers jours à soutenir la Prohibition au niveau local, de l’état et national.
En 1909, la Première Présidence publie une déclaration visant à clarifier la position de l’Église sur l’évolution. La déclaration ne traite pas de la façon dont la création a eu lieu, mais soutient que «Adam était le premier homme et qu’il a été créé à l’image de Dieu.» Mais le sujet continue à poser problème. Avec la question de la haute critique biblique, elle va causer, en 1911, la démission de trois professeurs de l’université Brigham Young et, deux décennies plus tard, à des discussions privées intensives parmi des dirigeants de l’Église.
En 1916, la Première Présidence et le Collège des Douze publient un deuxième exposé doctrinal important intitulé «le Père et le Fils». Apparemment occasionné par des pamphlets antimormons accusant les dirigeants de l’Église de conférer la divinité à Adam, la déclaration définit les rôles respectifs des deux premiers membres de la Divinité. Peu avant sa mort, Joseph F. Smith reçoit une vision de l’œuvre missionnaire et de l’existence spirituelle dans l’au-delà, qui sera par la suite incluse en tant que section 138 dans les Doctrine et Alliances. En plus des sujets spécifiques, la doctrine et l’histoire générales de l’Église reçoivent un traitement systématique, souvent pour la première fois, par des ouvrages tels que Doctrine de l’Évangile, du président Smith, Les Articles de Foi et Jésus le Christ, de James E. Talmage les trois tomes de New Witnesses for God de B.H. Roberts.
Comme sa population est toujours essentiellement américaine, l’Église est particulièrement affectée par les événements qui se produisent pendant cette période aux États-Unis. Presque dès le début, l’administration du président Grant connaît des temps difficiles. L’agriculture et l’exploitation minière, deux des industries principales de l’Utah, s’effondrent dans les années 1920 et particulièrement dans les années 1930 pendant la grande Dépression. Le président Grant économise soigneusement les finances de l’Église, réduisant les dépenses et les projets de construction. Utilisant ses contacts avec le commerce et les dirigeants politiques du pays, il maintient à flot les principales entreprises appartenant à l’Utah et à l’Église. Il se préoccupe aussi du saint individuel. Après une préparation soigneuse, il annonce en 1936 le programme d’entraide de l’Église (voir Services d’entraide), qui essaie d’obtenir l’autonomie et les moyens de subsistance pour les nécessiteux en fournissant aussi bien du travail que les denrées nécessaires.
En dépit des temps difficiles, l’Église maintient ses fonctions premières. Juste avant l’affaissement économique, elle construit un bâtiment imposant de quatre étages à Salt Lake City. Des temples sont construits à Hawaï (1919), à Cardston (Alberta, Canada) (1923) et à Mesa, en Arizona (1927). L’éducation retient aussi l’attention. Entre 1875 et 1911, l’Église crée trente-quatre académies polyvalentes. Cependant, au fil des années, la détresse financière et l’acceptation croissante de l’instruction publique produisent des changements et beaucoup d’académies ferment ou sont reprises par l’État (voir aussi Éducation). L’Église ne va cependant pas abandonner entièrement son rôle éducatif. Un programme de séminaire hors école pour les lycéens est lancé en 1912 (voir Séminaires), et pendant les années 1920, des instituts de religion sont créés à l’intention des étudiants d’université, le premier à l’université d’Idaho.
Les guerres du vingtième siècle montrent le chemin que l’Église a parcouru par rapport à l’aliénation et à l’isolement du dix-neuvième siècle. Les saints des derniers jours soutiennent l’effort de guerre lors de la guerre hispano-américaine et l’intervention des États-Unis dans les deux guerres mondiales du vingtième siècle. Lors de la première, la Première Présidence publie une déclaration affirmant la loyauté des saints des derniers jours et télégraphie aux dirigeants locaux pour inviter à l’enrôlement. L’Utah sera l’un des premiers états à atteindre son contingent initial. La participation à la Première Guerre mondiale sera encore plus substantielle. Incertaine, au départ, du rôle qui lui incombe, l’Église àva finalement aider les Utahans à donner plus que la quote-part financière réclamée par le gouvernement pour l’état. En septembre 1918, l’Utah aura plus de 18.000 hommes sous les armes, dont près de la moitié volontaires. La participation à la Seconde Guerre mondiale sera plus réservée, peut-être à cause des appréhensions privées du président Grant et de son conseiller J. Reuben Clark à propos de la politique du New Deal. Néanmoins, en avril 1942, 6% de toute la population de l’Église en Amérique sera sous les drapeaux ou dans les industries liées à la défense; d’autres s’engageront au Canada, en Grande-Bretagne et en Allemagne.
Bien que chacun des conflits connaisse certains courants pacifistes et même de l’opposition, la tendance générale est de reconnaître la nécessité de faire preuve de loyauté envers le gouvernement constitué. «L’Église est et doit être contre la guerre», déclare la Première Présidence en avril 1942. Pourtant quand «la loi constitutionnelle… appelle les hommes de l’Église au service armé du pays auquel ils doivent leur allégeance, leur devoir civique suprême exige qu’ils donnent suite à cet appel» (CR, pp. 88-97; voir Guerre et paix).
Bien qu’il soit difficile d’évaluer la vie religieuse, les statistiques donnent une idée de l’impact de l’Église sur la vie quotidienne de son peuple. L’assistance aux réunions révèle une croissance vigoureuse tout au long de cette époque. En 1920, l’assistance hebdomadaire moyenne à la réunion de Sainte-Cène est de 16%; en 1930, 19%; en 1940, 23% et en 1950, 25%. Symptomatique de l’idéal familial de l’Église, le taux des naissances chez les saints dépasse la moyenne nationale, de même que le taux des mariages. Il ne fait aucun doute que le code de santé de l’Église se reflète dans le fait qu’en 1945 le taux de mortalité des saints est à peu près la moitié de la moyenne nationale.
Une étude plus précise des statistiques révèle que dans les premières décennies du vingtième siècle le nombre de naissances par famille de saints diminue, que l’âge au moment du mariage augmente et que le taux des divorces reflète souvent la tendance nationale – à la traîne mais allant dans la même direction que la tendance nationale, comme si l’assimilation était simplement incomplète (voir Statistiques démographiques).
Le demi-siècle aura apporté l’intégration sociale, culturelle et politique, la croissance et la consolidation, et des programmes qui ont redéfini et ont appliqué de nouveau des idéaux plus anciens de l’Église. Mais l’époque révèle aussi des indications que les membres de l’Église ne sont pas immunisés contre de grands courants tels que la laïcisation et même le matérialisme. Pour l’observateur, au milieu du siècle, les questions de base sont toujours là: L’Église pourra-t-elle préserver ses valeurs et son énergie traditionnelles? Ou son entrée dans le monde moderne coûtera-t-elle au mouvement son identité et sa mission ?

Bibliographie
Survols de la période :
Alexander, Thomas G. Mormonism in Transition: A History of the Latter-day Saints, 1890-1930. Urbana et Chicago, 1985.
Allen, JamesB. et Glen M. Leonard, The Story of the Latter-day Saints. Salt Lake City, 1976.
Arrington, Leonard J. et Davis Bitton. The Mormon Experience. New York, 1979.
Cowan, Richard O. The Church in the Twentieth Century. Salt Lake City, 1985.
Département d’Éducation de l’Église. Histoire de l’Église dans la Plénitude des temps. Salt Lake City, 1989.
Roberts, B. H. A Comprehensive History of the Church of Jesus Christ of Latter-day Saints. Salt Lake City, 1930.
Programmes, politique et enseignements de l’Église durant cette période:
Alexander, Thomas G. “Between Revivalism and the Soicial Gospel: The Latter-day Saints Social Advisory Committee, 1916-1922.” BYU Studies 23, Hiver 1983, pp. 19-39.
Id., “The Reconstruction of Mormon Doctrine: From Joseph Smith to Progressive Theology”. Sunstone 5, juillet-août 1980, pp. 24-33.
Id., « ‘To Maintain Harmony’ : Adjusting to External and Internal Stress, 1890-1930 ». Dialogue 15, Hiver 1982, pp. 44-58.
Hartley, William G. “The Priesthood Reform Movement, 1908-1922”. BYU Studies 13, Hiver 1973, pp. 137-156.
Hefner, Loretta L. « This Decade Was Different : Relief Society’s Social Services Department, 1919-1929 ». Dialogue 15, Automne 1982, pp. 64-73.

Histoire de l’Église: 1945-1990, période internationale suivant la Deuxième Guerre mondiale
Auteurs: ALLEN, JAMES B. et COWAN, RICHARD O.

[Depuis la Deuxième Guerre mondiale, l’Église connaît une croissance internationale rapide… qu’elle doit gérer. Après avoir résumé le renouveau de l’après-guerre et l’accroissement du nombre de membres qui l’accompagne, l’article examine plus particulièrement les adaptations qui vont de pair avec la croissance et l’internationalisation. En passant en revue l’évolution récente, il donne une introduction à l’Église contemporaine.
On trouvera des renseignements supplémentaires sur la croissance de l’Église pendant cette période dans Statistiques démographiques et les articles sur l’Église dans: Afrique, l’Église en; Asie, l’Église en: Asie de l’Est; Asie, l’Église en: Asie du Sud et du Sud-est; Australie, l’Église en; Îles Britanniques, l’Église dans les; Canada, l’Église au; Europe, l’Église en; Hawaï; Mexique et l’Amérique Centrale, l’Église au; Proche-Orient, l’Église au; Nouvelle-Zélande, l’Église en; Océanie, l’Église en; Scandinavie, l’Église en; Amérique du Sud, l’Église en: Brésil; Amérique du Sud, l’Église en: L’Amérique du Sud, Nord; Amérique du Sud, l’Église en: Amérique du Sud, Sud; et Antilles, l’Église dans les. Pour l’évolution dans l’organisation et la manière de faire les choses, voir Organisation: Histoire de l’organisation et de l’administration; Organisation: Organisation contemporaine. Consultez aussi les biographies de ceux qui ont été présidents de l’Église au cours de cette période: George Albert Smith (1945-1951), David O. McKay (1951-1970), Joseph Fielding Smith (1970-1972), Harold B. Lee (1972-1973), Spencer W. Kimball (1973-1985) et Ezra Taft Benson (1985-1992).]
Pendant toute sa vie et son ministère, le message principal de George Albert Smith sera un message d’amour. Il n’est donc que naturel que ce soit au cours de son administration que des marchandises soient envoyées d’Amérique en Europe pour soulager les souffrances des saints après la Deuxième Guerre mondiale, particulièrement ceux d’une Allemagne dévastée par la guerre. En 1946, Ezra    Taft Benson, du Conseil des douze apôtres, fait rouvrir la mission européenne et y dirige les secours de l’Église. Il trouve des branches désorganisées, des églises détruites et beaucoup de membres sans abri. La plupart ont tout perdu et partout il y a un besoin pressant de nourriture et de vêtements. Le service d’entraide de l’Église va devenir un facteur important de la remise à flot de beaucoup de saints aussi bien que de certains non-membres.
Puisque la guerre a tout remis à plus tard, depuis l’œuvre missionnaire jusqu’à la construction de bâtiments, il va falloir remettre partout les programmes de l’Église sur pied et leur redonner de la vigueur. Le nombre des missionnaires est rapidement reconstitué et des centaines d’églises sont construites. La moitié de toutes chapelles en service au milieu des années 1950 sont érigées au cours des années suivant la Deuxième Guerre mondiale, une période où plus de la moitié de toutes les dépenses de l’Église va à des chantiers de construction.
UNE ÉGLISE DEVENUE INTERNATIONALE. La fin de la Deuxième Guerre mondiale marque l’aube d’une ère nouvelle dans l’histoire de l’Église dont un thème dominant est la croissance internationale. En 1947, la population de l’Église atteint le million, et en 1990 le total est de plus de sept millions. La croissance est particulièrement forte le long de la Côte Ouest de l’Amérique, en Amérique latine et, après 1978, en Afrique. En 1950, l’Église a 180 pieux organisés, dont près de la moitié en Utah; en 1990, il y a 1.700 pieux, dont moins d’un quart sont en Utah. En 1950, l’Église est organisée dans moins de 50 pays ou territoires, mais en 1990, elle est passée à 128. En 1950, moins de 8% de l’Église vit en dehors des États-Unis et du Canada, mais quarante ans après, le chiffre est d’approximativement 35%. Pendant la même période, le nombre de missionnaires passe de 6.000 à 40.000 et le nombre de temples passe de huit, dont un seulement en dehors des États-Unis, à quarante-quatre, dont vingt-trois en dehors des États-Unis.
Cette croissance remarquable est le résultat d’efforts renouvelés pour accomplir la révélation donnée à Joseph Smith «que le royaume… devienne une grande montagne et remplisse toute la terre» (D&A 109:72). Au début de son administration, le président David O. McKay, le premier à voyager autant comme président de l’Église, visite les missions d’Europe, d’Amérique latine, d’Afrique et du Pacifique Sud, consacrant deux emplacements de temples en Europe et annonçant qu’un temple sera construit en Nouvelle-Zélande. En 1955, il déclare que l’Église doit «faire tous les efforts raisonnables et réalisables pour mettre à la portée des membres dans ces missions éloignées toutes les possibilités éducatives et spirituelles qu’elle a à offrir» (CR avr. 1955, p. 25). Construire des temples, augmenter le nombre de missions, organiser des pieux dans le monde entier, persuader les saints d’édifier Sion dans leur pays plutôt que d’émigrer en Amérique et enfin remettre la direction de l’Église entre les mains de la population locale de chaque pays, voilà toutes les mesures importantes qu’il faudra prendre pour atteindre ce but. En outre, on va mettre de plus en plus l’accent sur l’appel de missionnaires locaux qui, dans certaines régions, remplaceront essentiellement les missionnaires américains.
La croissance ne se produira cependant pas sans problèmes, dont le moindre n’est pas de décider quels sont les pratiques, les enseignements et les programmes qui constituent vraiment l’essence de l’Évangile et quels sont ceux qui sont le reflet de la culture américaine dans laquelle l’Église s’est développée. Pour ouvrir les yeux des membres, des Américains en particulier, sur la nécessité de définir l’Évangile en termes de principes universels, les dirigeants de l’Église vont s’exprimer avec une fréquence croissante. En 1971, par exemple, Bruce R. McConkie rappellera à certains saints américains qu’à l’époque du Nouveau Testament, même les apôtres étaient tellement endoctrinés dans l’idée que le plan du salut se limitait à un peuple particulier qu’ils ont eu du mal à le porter aux païens, et il appliquera la leçon à l’Église moderne. Il invitera les saints américains à dépasser leurs idées reçues, même s’il y aura «en chemin des luttes et certaines difficultés, certains préjugés et certaines incertitudes». Les autres peuples, fera-t-il remarquer, «ont d’autres antécédents que nous, ce qui n’a aucune importance pour le Seigneur…. Avoir des coutumes sociales différentes n’est pas plus étonnant que parler des langues différentes… Et le Seigneur connaît toutes les langues» (Palmer, pp 143, 147). En 1987, Boyd K. Packer rappellera à un groupe de dirigeants de l’Église: «Nous ne pouvons pas entrer [dans divers pays] avec une église d’Utah de 1947 ! Il se peut que nous ne soyons pas prêts à porter l’Évangile parce que nous ne sommes pas prêts à porter (et qu’ils ne sont pas prêts à recevoir) toutes les choses que nous avons emballées avec lui comme bagages supplémentaires» (tel que cité dans Dialogue 21, automne 1988, p. 97). Le but est d’ennoblir des gens appartenant à des cultures et ayant des perspectives diverses pour qu’ils trouvent plus complètement la vraie fraternité au sein des limites spirituelles communes de l’Église.
En 1974, le président Spencer W. Kimball invite les membres à «allonger la foulée» en portant l’Évangile à toute la terre. Il les exhorte à prier que les barrières soient levées. Il désigne David M. Kennedy, anciens secrétaire au trésor et ambassadeur extraordinaire, comme représentant international de l’Église pour travailler avec les gouvernements à résoudre les problèmes qui ont gêné les activités de l’Église. En 1977, l’Église est légalement reconnue en Pologne et en 1985, un temple est consacré en République démocratique allemande. Les révolutions politiques spectaculaires de 1989-1990 ouvrent d’autres pays du Bloc de l’Est et conduisent au commencement de l’œuvre missionnaire de l’Église en Union Soviétique.
L’un des changements radicaux du vingtième siècle est la révélation reçue par le président Spencer W. Kimball en juin 1978, accordant les bénédictions de la prêtrise à tous les membres masculins dignes. Résultat d’une prière longue et fervente, la révélation signifie que «le jour promis depuis si longtemps est venu où tous les hommes fidèles et dignes de l'Église pourront recevoir la Sainte Prêtrise… sans considération de race ou de couleur» (voir Doctrine et Alliances: Déclaration officielle - 2). Tout de suite, des noirs dignes sont scellés dans les temples et beaucoup recevront des affectations comme missionnaires et dirigeants. Au Ghana et au Nigeria, où les noirs plaidaient depuis des années pour l’établissement de l’Église, celle-ci se développe rapidement, mais elle s’étend aussi dans d’autres régions qui comptent de grandes populations noires. La première Autorité générale noire, Helvécio Martins, du Brésil, sera soutenu à la conférence générale de l’Église en avril 1990.
CHANGEMENTS ADMINISTRATIFS. Les changements administratifs nombreux répondent aussi aux besoins d’une Église en pleine croissance. En 1967, les pieux sont organisés en régions. À partir de 1975, plusieurs régions sont organisées en interrégions et en 1984, des présidences d’interrégion, chacune constituée de trois Autorités générales, se voient confier la responsabilité des pieux dans le monde entier.
En 1975, le président Kimball annoncé l’organisation du premier collège des soixante-dix, dont les membres sont Autorités générales de l’Église, à savoir les anciens Assistants des Douze. En 1989, le deuxième collège des soixante-dix est organisé; ces Autorités générales sont appelées pour trois à cinq ans. En 1978 commence la pratique d’élever les membres des soixante-dix à l’éméritat pour des raisons de santé ou d’âge, et l’année suivante le patriarche de l’Église accède aussi à l’éméritat.
Les Autorités générales prennent aussi des mesures pour coordonner plus efficacement les programmes de l’Église et, à partir de 1961, mettent davantage l’accent sur la «coordination de la prêtrise» (voir Prêtrise; Coordination de l’administration de l’Église). Sous la présidence de Harold B. Lee, des comités au siège de l’Église planifient, élaborent et révisent les programmes d’études et les activités pour toutes les organisations ou groupes d’âge. Ils définissent plus soigneusement les rôles propres à chaque organisation et éliminent les doubles emplois. Les dirigeants se concentrent sur le foyer, endroit le plus efficace pour enseigner et appliquer les principes de l’Évangile. L’accent est remis sur la soirée familiale et, à partir de 1965, on publie des manuels attrayants fournissant des aides aux leçons.
Au début des années 1970, il y a aussi un regroupement des responsabilités administratives au siège de l’Église. Les organismes sont groupés en plusieurs grands départements, chacun sous la juridiction d’une ou plusieurs Autorités générales, la gestion générale des opérations étant assurée au jour le jour par des professionnels à temps plein. Par exemple, l’entraide, les services sociaux et les programmes de santé sont regroupés pour former le Département d’Entraide. Le symbole visible de ce regroupement est le nouveau bâtiment des bureaux de l’Église de vingt-huit étages à Salt Lake City, réunissant la plupart des unités administratives. En 1970, les fonctions de la Prêtrise d’Aaron et de la Société d’amélioration mutuelle des Jeunes Gens sont combinées (voir Jeunes Gens). En 1971, le programme des publications est regroupé (voir Magazines). Les magazines en d’autres langues que l’anglais sont unifiés en 1967 et leur contenu standardisé à l’exception des sujets locaux (voir Magazines internationaux).
D’autres changements se produisent du fait que la croissance internationale rapide augmente le nombre des voyages et la charge administrative des dirigeants de l’Église. Dans les années 1970, les présidents de pieu sont autorisés à «mettre à part» les missionnaires à plein temps (voir Mise à part), ordonner les évêques et les patriarches et consacrer les églises. Les Autorités générales se réunissent moins fréquemment en conférence avec les pieux mais, à partir de 1971, l’Église commence à tenir des «conférences interrégionales» où une délégation d’Autorités générales rencontre les saints rassemblés d’une région géographique. En 1979, le nombre des conférences de pieu par an est réduit de quatre à deux, et dans les années 1980 des conférences régionales ou des multirégionales remplacent les conférences interrégionales (voir Conférences).
L’ÉDUCATION DANS L’ÉGLISE. Entre 1950 et 1990, le nombre total d’inscriptions aux programmes éducatifs de l’Église passe de 38.400 à 442.500 (voir Département d’éducation de l’Église (DEE)). Les inscriptions à temps plein à l’université Brigham Young montent en flèche de 5.400 en 1950 à presque 25.000 en 1975, le maximum possible. Plutôt que de consacrer des montants toujours plus élevés aux études supérieures, l’Église emploie de plus en plus les fonds à satisfaire les besoins plus fondamentaux liés à la croissance mondiale. L’expansion principale dans l’enrôlement se produit dans le domaine de l’éducation religieuse. Depuis le début du vingtième siècle, les étudiants des localités à prédominance mormone suivaient des cours de séminaire «hors école» dans des bâtiments contigus à leur école secondaire. Dans les années 1950, en commençant en Californie, le séminaire «matinal» va se tenir dans des bâtiments de l’Église près des écoles secondaires publiques. Après 1968, dans les régions où les membres sont encore plus dispersés, les jeunes vont recevoir de quoi faire le «séminaire d’étude à domicile». L’Église augmente aussi le nombre d’instituts de religion placés à côté des campus universitaires. En 1990, il y a des programmes de séminaire ou d’institut dans soixante-quatorze pays ou territoires.
L’Église accorde aussi une attention particulière à la vie religieuse des étudiants d’université. En 1956, le premier pieu estudiantin, avec douze paroisses, est organisé sur le campus de l’université Brigham Young. Cela rend accessibles des services de l’Église qui répondent directement aux besoins des étudiants et qui donnent de plus nombreuses occasions d’assurer une direction. Le plan s’étendra à d’autres endroits où il y a assez d’étudiants pour le justifier. L’idée est d’assurer une plus grande croissance spirituelle, et dans des domaines statistiquement mesurables comme le mariage au temple et l’assistance aux réunions, les paroisses estudiantines viennent en tête dans l’Église.
Dans certaines régions du Pacifique et de l’Amérique latine, des régions où la croissance de l’Église est particulièrement rapide et où l’instruction publique est limitée, l’Église en revient à son ancienne pratique de fonder des écoles pour l’instruction religieuse et d’assurer un enseignement élémentaire. Elle fonde quarante écoles primaires et secondaires au Mexique et crée une faculté de premier cycle à la périphérie de Mexico. Lorsque de meilleurs établissements d’enseignement public apparaîtront, l’Église fermera beaucoup de ces écoles.
PROGRAMME DE CONSTRUCTION. Les nouvelles assemblées ont besoin de nouveaux bâtiments. Même si deux ou trois paroisses se partagent la plupart des bâtiments, l’Église se trouve dans la nécessité de construire plus d’une nouvelle église par jour. Les coûts potentiels sont énormes et dans beaucoup de régions les saints locaux ne sont pas en mesure de lever leur quote-part.
Une solution apparaît quand l’Église se trouve devant une pénurie de main-d’œuvre pendant qu’elle bâtit des bâtiments scolaires dans le Pacifique Sud. À partir de 1950, elle appelle des jeunes gens en tant que «missionnaires bâtisseurs» pour faire don de leur main d’œuvre pendant deux ans. Tandis qu’ils construisent des bâtiments à un coût beaucoup moindre, les constructeurs expérimentés leur enseignent des techniques de construction; les missionnaires bâtisseurs apprennent aussi auprès des constructeurs expérimentés des compétences commercialisables. Dans les années 1950 et 1960, les missionnaires bâtisseurs construisent des écoles et des chapelles dans le Pacifique Sud, l’Amérique latine, l’Europe et ailleurs. Plus tard, pour réduire au minimum les coûts de construction et d’entretien, le département des constructions élaborera une série de plans standardisés qui peuvent être adaptés à différents endroits et agrandis si nécessaire.
Bien que les fonds généraux de l’Église aident à la construction et à l’entretien des églises, il est attendu des assemblées locales qu’elles contribuent non seulement en main d’œuvre, mais aussi une partie importante de l’argent nécessaire, cela en plus du paiement de la dîme et des offrandes habituelles. Pour soulager le fardeau financier pesant sur les assemblées locales, la part supportée par les saints locaux diminue graduellement jusqu’à ce qu’en 1989, les contributions locales ne soient plus requises.
À partir des années 1980, les nouvelles églises sont généralement plus petites et parfois plus austères que les plus anciennes, mais cela permet à l’Église de construire des centaines d’églises par an et surtout de fournir des lieux de réunion bien nécessaires dans les régions en voie de développement. C’est aussi un mouvement vers l’égalité. L’argent qui aurait pu être consacré à la construction de bâtiments plus coûteux dans des régions riches est plutôt utilisé pour fournir des lieux confortables pour le culte dans toute l’Église.
LA TECHNOLOGIE ET L’ÉGLISE MODERNE. L’Église cherche activement à maîtriser les découvertes étonnantes de la technologie moderne pour améliorer ses capacités administratives et pour mieux diffuser son message spirituel. Depuis qu’elle a installé, en 1962, son premier ordinateur au Département financier, elle se sert de cette technologie d’innombrables façons, notamment dans la conception architecturale, un système automatisé de certificats de membre, une comptabilité automatisée, le traitement des dossiers des missionnaires, la tenue des registres au niveau général et local, et en fournissant des ressources pour la recherche historique et généalogique.
Il n’est pas d’activité de l’Église qui ait ressenti l’impact de la technologie moderne autant que l’œuvre généalogique. Comme la population de l’Église augmente, le besoin de moyens plus efficaces pour recueillir et traiter les noms pour l’œuvre du temple s’accroît également. Le Département généalogique (maintenant Département d’histoire familiale) microfilme les registres d’état civil de partout dans le monde, les rendant disponibles dans sa bibliothèque de Salt Lake City (voir Bibliothèque d’histoire familiale) et dans des centaines de centres d’histoire familiale dans le monde entier. Dans les années 1960, le Département généalogique commence aussi à utiliser l’ordinateur pour organiser les noms obtenus à partir de ces documents. Depuis 1978, des membres de l’Église désignés pour cela consacrent quatre heures ou plus de service hebdomadaire à «extraire» des renseignements des microfilms pour l’œuvre du temple. Le Département d’histoire familiale crée aussi le PAF (Personal Ancestral File), un programme généalogique automatisé couramment utilisé et commence à rendre les données généalogiques principales disponibles sur des disques laser.
La technologie touche encore le temple autrement. Le cinéma et la technologie de la vidéo permettent de présenter plus efficacement les instructions du temple. Ceci pouvant se faire dans une seule salle au lieu de l’ancienne série de quatre salles, les temples peuvent être construits plus petits et leur construction peut ainsi être moins coûteuse, ce qui va permettre à plus de membres dans le monde entier d’avoir un temple près de chez eux. La nouvelle technologie permet aussi de présenter les ordonnances simultanément en plusieurs langues si besoin est.
L’effet de la télévision sur les communications de l’Église et son image publique est spectaculaire, lui aussi. Les conférences générales de l’Église sont d’abord diffusées en 1949 sur KSL Television à Salt Lake City et dès le milieu des années 1960, une ou plusieurs sessions de chaque conférence sont télévisées partout aux États-Unis. Dans les années 1980, l’Église élabore un système de communication par satellite relié aux centres de pieu dans le monde entier, de sorte que les saints des derniers jours vont pouvoir regarder la conférence et les autres programmes créés par l’Église.
L’ŒUVRE MISSIONNAIRE. En 1990, plus des deux-tiers de la croissance annuelle de l’Église viennent des baptêmes de convertis. Quelque 30.000 des plus de 40.000 missionnaires à plein temps sont des jeunes gens de dix-neuf à vingt et un ans; des femmes célibataires de vingt et un ans ou plus et des couples ayant atteint l’âge de la retraite constituent la majeure partie du reste.
Une attention considérable est apportée à l’amélioration des techniques et des capacités missionnaires. Après beaucoup d’expérimentation, un plan systématique basé sur une série de leçons est officiellement adopté dans les années 1950. Après beaucoup d’améliorations et de modifications, en 1990, le plan se concentre moins sur la mémorisation de la part des missionnaires et plus sur leur capacité de compter sur l’Esprit dans la présentation du canevas mis à leur disposition.
Les missionnaires reçoivent aussi une formation plus efficace, particulièrement dans les langues. En 1963, une mission de formation linguistique, plus tard connue sous le nom de centre de formation des missionnaires est créée près de l’université Brigham Young et cinq ans plus tard un programme semblable s’ouvre près de l’université de l’Église à Hawaï (voir Université Brigham Young: Campus de l’université Brigham Young – Hawaï). En 1990, les missionnaires reçoivent une formation linguistique et missionnaire intensive dans quatorze centres de formation des missionnaires de par le monde, quoique 75% environ d’entre eux aillent au centre de Provo.
Les innovations dans le programme missionnaire comprennent une incitation à plus d’activités en dehors du prosélytisme et de service chrétien. En 1971, par exemple, les «missionnaires des services de santé» commencent à enseigner l’ABC de l’alimentation, de l’hygiène et de la prévention des maladies, particulièrement dans les pays en voie de développement. En 1990, tous les missionnaires sont invités à passer deux à quatre heures par semaine au service de la collectivité, en plus du prosélytisme. En outre, les couples missionnaires d’âge mûr sont souvent affectés à des services non missionnaires tels que les services de santé et l’entraide, la formation des dirigeants, le personnel des centres pour visiteurs d’autres activités de relations publiques, l’aide aux personnes se présentant dans les divers centres d’histoire familiale de l’Église, les missions de service au temple et les missions d’enseignement.
QUESTIONS D’INTÉRÊT PUBLIC ET DE SOCIÉTÉ. Bien que l’Église ait essayé de prendre ses distances par rapport à toute participation directe à la politique, les dirigeants de l’Église prennent néanmoins de temps en temps officiellement position sur les questions de moralité. La Première Présidence déplore publiquement l’invasion croissante de la pornographie, la pratique répandue du contrôle des naissances, l’avortement et le déclin général de la moralité, notamment le nombre croissant des divorces et l’importance de plus en plus grande de l’homosexualité. En 1968, l’Église s’implique directement dans le processus politique de l’Utah en s’opposant ouvertement à la vente de boissons alcoolisées. Elle fait aussi des déclarations publiques en faveur des lois sur la fermeture le dimanche et les lois des états sur le droit au travail et contre les loteries d’état (voir Jeux de hasard).
Au milieu du conflit intense sur les droits civiques qui caractérise les États-Unis dans les années 1960, la Première Présidence demande ouvertement «l’égalité civique complète pour tous les enfants de Dieu» et invite expressément les saints des derniers jours à travailler pour les droits civiques des noirs. Dans les années 1970, quand la polémique concernant les droits de la femmes s’intensifie en Amérique, la Première Présidence prend publiquement position en faveur de l’égalité complète des femmes devant la loi mais, en même temps, s’oppose publiquement au Equal Rights Amendment (l’amendement sur l’égalité des droits) qu’elle considère comme opposé à la famille. La Première Présidence se préoccupe aussi vivement de la moralité de la course aux armements nucléaires et la dénonce officiellement en 1980 et de nouveau en 1981 (voir Guerre et paix).
Contrairement à ce qui s’est passé au début du vingtième siècle quand la plupart des saints des derniers jours vivaient essentiellement en milieu rural, depuis le milieu du siècle, la plupart vivent dans des centres urbains. Le mode de vie effréné des grandes villes crée des tensions émotionnelles supplémentaires et un éventail d’attractions et de tentations a tendance à écarteler la famille. En réaction à ces besoins et à d’autres, l’Église institue une série de programmes sociaux. Depuis 1919, la Société de Secours gère une agence d’adoption et propose des foyers d’accueil pour les enfants défavorisés. Elle va être étendue. Le service de placement des étudiants indiens, créé dans les années 1950 sous la présidence de Spencer W. Kimball, offre à des milliers de petits Amérindiens l’avantage d’aller dans de bonnes écoles tout en vivant dans l’environnement sain de familles de l’Église. Un programme «de guidance de jeunes» conseille les familles dans le besoin. Ces trois programmes, qui sont tenus par la loi d’employer les travailleurs sociaux professionnels autorisés, sont fusionnés en 1969 pour former le Département des services sociaux de l’Église. Ce département patronne aussi des camps de jour pour jeunes, des programmes pour les membres en prison et de la consultance pour ceux qui abusent de l’alcool ou de la drogue.
Les dirigeants de l’Église commencent aussi à se préoccuper davantage des besoins spéciaux des célibataires. Qu’ils soient divorcés, veufs ou ne se sont tout simplement jamais mariés, leurs besoins sociaux et spirituels ne sont souvent pas satisfaits par les activités traditionnelles de l’Église orientées vers le couple et la famille. Dans les années 1970, des programmes spéciaux pour les jeunes adultes seuls aussi bien que pour les personnes seules plus âgées sont créés sous les auspices de la prêtrise et de la Société de Secours. Sous le patronage de conseils autonomes de paroisse, de pieu et de région, ils vont à des bals et à d’autres activités culturelles et ont de meilleures occasions de faire la connaissance d’autres membres de leur âge qui partagent leurs intérêts. En outre, des paroisses pour jeunes adultes sont organisées, d’abord dans le pieu d’Émigration à Salt Lake City, et puis dans d’autres régions.
RETOUR AUX FONDEMENTS. Un des appels de clairon du président Ezra Taft Benson aux saints dans les années 1980 est le retour aux valeurs traditionnelles. Il invite en particulier à l’étude régulière du Livre de Mormon comme moyen de fortifier la foi au Christ et d’avoir un guide pour affronter les difficultés du jour. Mais son appel n’est qu’une des manifestations des efforts que font les dirigeants modernes de l’Église pour répondre aux problèmes sans cesse plus complexes du monde et pour conduire les saints dans un retour aux fondements.
En 1972, le cours des adultes, celui de Doctrine de l’Évangile à l’École du Dimanche, entreprend l’étude systématique des ouvrages canoniques. Les Écritures sont les seuls manuels et elles doivent être étudiées successivement au cours d’une période de huit ans (de quatre ans par la suite). Bientôt tous les programmes d’études de l’Église sont rattachés aux Écritures. Pour soutenir le programme d’études et inciter à l’étude individuelle des Écritures, les dirigeants de l’Église procèdent à la publication de nouvelles éditions des ouvrages canoniques, chacun muni de renvois aux autres. La publication par l’Église, en 1979, de la King James Version de la Bible contient une annexe importante de 800 pages qui comprend un dictionnaire de la Bible, un guide par sujet de toutes les Écritures, des cartes et des extraits de la traduction de la Bible par Joseph Smith. En 1981, de nouvelles éditions des autres ouvrages canoniques paraissent avec des aides supplémentaires à l’étude.
Le thème du «retour aux fondements» trouve aussi un écho dans beaucoup d’autres changements de la politique et des programmes de l’Église. En 1980, le système des réunions de l’Église est regroupé en un bloc unique de trois heures le dimanche en remplacement du système traditionnel des réunions de prêtrise et d’École du Dimanche le matin, de réunion de Sainte-Cène en fin d’après-midi ou en soirée et de réunions des auxiliaires pendant la semaine (voir Réunions principales de l’Église). Cette mesure simplifie les problèmes de transport de beaucoup de membres, mais les dirigeants de l’Église soulignent que l’objectif central est de laisser plus de temps aux familles pour étudier les Écritures ou se livrer ensemble à d’autres activités convenant au sabbat.
À partir de 1990 aux États-Unis et au Canada et de 1991 dans d’autres régions du monde, il n’est plus demandé aux membres de faire des dons au budget de paroisse et de pieu; tous les frais de fonctionnement des unités locales seront payés avec la dîme et les offrandes. Ce système uniforme permet une plus grande égalité, réduisant beaucoup de budgets de fonctionnement locaux tout en en augmentant d’autres (voir Finances de l’Église; Contributions financières). En expliquant la nouvelle politique, Boyd K. Packer, du Conseil des douze, qualifiera cela de «correction de trajectoire» inspirée, un élément de l’effort global pour en revenir aux fondements (Ensign 10, mai 1990, pp. 89-91). La métaphore pourrait très bien être appliquée à une grande partie de ce qui s’est produit depuis 1945.
D’une manière générale, les membres de l’Église acceptent bien ces changements et y voient une occasion de progresser davantage spirituellement. En conséquence, en 1990, l’Église se prépare plus rapidement que jamais à s’adapter à des nationalités, à des groupes de langues et à des cultures divers. Les dirigeants de l’Église continuent à souligner les points de doctrine traditionnels, mais les discours de conférence générale ont de plus en plus tendance à définir ce qu’est un saint en termes de ce que M. Russell Ballard caractérise, en avril 1990, comme étant des «choses petites et simples»: l’amour, le service, le foyer, la famille et le culte du Sauveur (Ensign 10, mai 1990, pp. 6-8). Ce sont là les principes universels qui constituent l’essence de ce que signifie être saint des derniers jours.

Bibliographie
On a beaucoup écrit sur cette période dans les revues professionnelles. Quelques grands traitements sont mentionnés dans l’introduction de cette section historique. Voir aussi Spencer J. Palmer, The Expanding Church, Salt Lake City, 1978. On trouvera des renseignements supplémentaires dans les bibliographies qui accompagnent les biographies des présidents de l’Église qui ont exercé leur mandat pendant cette période : George Albert Smith, David O. McKay, Joseph Fielding Smith, Harold B. Lee, Spencer W. Kimball et Ezra Taft Benson.

 

Histoire familiale (Généalogie)
Auteur : Pratt, David H.

Les termes « histoire familiale » et « généalogie » sont synonymes pour les saints des derniers jours. Dallin H. Oaks, membre du collège des douze apôtres, a dit : « Le processus par lequel nous déterminons notre place dans notre famille éternelle s'appelle généalogie. La généalogie est l’histoire de la famille » (séminaire des représentants régionaux, 3 avril 1987). Pour souligner le caractère familial de la généalogie, la Première Présidence a changé, en 1987, le nom du Département généalogique en Département d'Histoire familiale et le nom de la Bibliothèque généalogique en Bibliothèque d’Histoire familiale.
L’Intérêt des saints des derniers jours pour l'histoire familiale repose sur les points de doctrine fondamentaux que sont le salut, le libre arbitre et l’exaltation. Le plan de Dieu veut que toute personne ait la possibilité d'entendre l'Évangile de Jésus-Christ et de recevoir les ordonnances salvatrices, peu importe où elle a vécu sur terre. Si les gens ne s’entendent pas prêcher l'Évangile dans cette vie par les serviteurs autorisés du Seigneur, ils l'entendront dans le monde des esprits après la mort. Les saints identifient leurs ancêtres et prennent les dispositions nécessaires pour que le baptême et d’autres ordonnances soient effectués par procuration, c'est-à-dire qu’ils font en sorte qu’une personne vivante représente le défunt dans un temple. Ce n'est pas un élément facultatif dans la croyance des saints, c’est, au contraire, un commandement de Dieu. Comme Dallin Oaks l’a encore expliqué : « L’œuvre généalogique n’est pas un passe-temps pour nous. Nous faisons l'histoire familiale afin de fournir les ordonnances du salut aux vivants et aux morts"(1989, p. 6 ; voir aussi Salut des morts).
Les membres de l'Église ont été instruits en 1894 du rôle sacré de l'histoire familiale lorsque le président Wilford Woodruff a déclaré : « Nous voulons que les saints des derniers jours fassent dorénavant remonter leur généalogie aussi loin que possible et soient scellés à leurs pères et mères. Faites sceller les enfants à leurs parents et remontez cette chaîne autant que vous le pouvez... C'est la volonté du Seigneur pour ce peuple » (p. 543 ; voir aussi Scellement). Le but de l’histoire familiale, a expliqué le président Woodruff, est d’obtenir des noms et des données statistiques afin que les ordonnances du temple puissent être effectuées en faveur des ancêtres décédés qui n'ont pas eu l'occasion d'entendre l'Évangile rétabli de leur vivant. Il a enseigné à une autre occasion que « nous devons entrer dans ces temples racheter nos morts – pas seulement les morts de notre propre famille, mais les morts de tout le monde d'esprit » (JD 21:192).
À la base de la doctrine du salut des morts se trouve l’exercice du libre arbitre. Lorsque les personnes meurent, leur esprit continue à vivre dans le monde postmortel et est capable de faire des choix. Les saints des derniers jours accomplissent des baptêmes pour les morts afin que ceux qui vivent en tant qu’esprits puissent décider s’ils acceptent ou non le baptême dans la véritable Église de Jésus-Christ dans le monde des esprits. S'ils n'acceptent pas le baptême, il est sans effet. Il en va de même pour les autres ordonnances salvatrices que les membres accomplissent dans les temples en faveur des morts.
L’amour est la motivation centrale de l'histoire familiale. Identifier les ancêtres et accomplir les ordonnances salvatrices pour eux est une expression d'amour. C'est l'esprit et le pouvoir d'Élie, qui a donné, en 1836, les clefs de ce pouvoir à Joseph Smith dans le Temple de Kirtland pour « tourner le cœur des pères vers les enfants, et les enfants vers les pères » (D&A 110:15 ; voir aussi Malachie 4:5-6; JS–H 1:39; D&A 2:2). Le désir de découvrir ses ancêtres et d’accomplir toutes les ordonnances du temple pour eux est parfois appelé l'esprit d'Élie (voir Élie, Esprit d’). Le président Joseph Fielding Smith a associé l’histoire familiale et l’œuvre du temple à l’amour pour l'humanité en déclarant que travailler en faveur des morts est « une œuvre qui épanouit l'âme de l'homme, lui donne des idées plus larges sur le bien-être de son prochain et implante dans son cœur l’amour pour tous les enfants de notre Père céleste. Il n'y a pas d’œuvre égale à celle du temple pour les morts pour enseigner à l’homme à aimer son prochain comme lui-même » (p. 3).
En réponse à l'enseignement du président Woodruff au sujet de leurs responsabilités en matière d’histoire familiale, les saints des derniers jours ont créé en 1894 la société généalogique d’Utah à Salt Lake City. Au fil des années, la société, par le biais de la Bibliothèque d’Histoire Familiale et de son réseau mondial de plus de 1 500 centres d'histoire familiale, est devenue un soutien majeur des efforts consentis par l’Église pour l’enseignement de l’histoire familiale par des informations sur la recherche (d'abord sous forme de livres et plus tard par microfilms puis en disques compacts) et en mettant à disposition un personnel compétent pour aider les chercheurs à identifier leurs ancêtres.
L’intérêt pour l'histoire familiale n'est pas limité aux saints des derniers jours. Il y a eu une croissance remarquable de l'intérêt pour la généalogie et l'histoire familiale depuis 1836, quand Élie a remis les clefs à Joseph Smith, le prophète. Dans de nombreux pays, des milliers de personnes ont rejoint des sociétés généalogiques et historiques et plus de la moitié des clients de la Bibliothèque d’Histoire familiale et de ses centres d'histoire familiale sont membres d'autres religions. L'Église participe à des efforts de coopération avec des centaines de sociétés généalogiques et d’histoire familiale, archives et bibliothèques pour identifier les documents généalogiques et conserver les données qui s’y trouvent (voir Conférences mondiales sur les annales).
La technologie moderne a joué un rôle important dans les progrès de l’histoire familiale dans la seconde moitié du XXe siècle. L'Église a mis au point un vaste programme de microfilmage dans le monde entier. Depuis 1938, elle a fait du microfilmage dans plus d'une centaine de pays et a accumulé plus de 1,3 milliards de clichés avec quelque huit milliards de noms. Les documents microfilmés constituent la base d’une expansion fulgurante de la recherche généalogique. Ils ont permis une croissance rapide des collections de la Bibliothèque d’Histoire familiale et a permis à la fois la distribution de renseignements généalogiques aux centres d'histoire familiale de l'Église et les programmes d'extraction de noms qui ont permis l'automatisation généralisée des renseignements généalogiques contenus dans le système informatique de FamilySearch.
Il en résulte qu’il n’a jamais été aussi facile de faire de la recherche généalogique. Grâce à FamilySearch, les clients de la Bibliothèque d’Histoire familiale et des centres d'histoire familiale ont accès aux 147 millions de noms qui se trouvent dans l'Index généalogique International et au nombre croissant des 9,67 millions de noms raccordés par lignage d’Ancestral File™. Les programmes d’extraction de noms convertissent les informations provenant de documents papier (par exemple, le recensement fédéral américain de 1880 et le recensement britannique de 1881) et du fait que des gens de partout dans le monde apportent des renseignements à Ancestral File, les programmes informatiques associés à FamilySearch peuvent simplifier considérablement l’identification des ancêtres.
L'Église enseigne que les devoirs des membres en matière d’histoire familiale sont triples. Tout d'abord, ils doivent acquérir le désir d'aider à racheter les morts. Une fois qu’ils ont acquis le témoignage du principe du salut des morts, ils sentent qu’ils ont la responsabilité personnelle d’y aider. Ils se préoccupent également de ceux dans le monde des esprits qui attendent que les ordonnances du temple soient accomplies.
En second lieu, ils doivent déterminer ce qu'il faut faire. Chaque saint des derniers jours peut faire quelque chose pour faire avancer l’histoire familiale. Dallin H. Oaks conseille : « Nous ne devons pas essayer d’obliger tout le monde à tout faire, mais encourager chacun à faire quelque chose » (1989, p. 6). En conséquence, les saints des derniers jours sont encouragés à participer à des activités liées au salut des morts. Ce que l’on fait et la quantité de ce que l’on fait dépend des capacités et de la situation de chacun, de ce que la famille peut avoir déjà accompli, de l’inspiration personnelle venant de l'Esprit et des lignes directrices proposées par les dirigeants de l'Église. Parmi les activités, il y a l’identification des ancêtres et l’accomplissement des ordonnances du temple en leur faveur, la participation à des organisations familiales, au programme d'extraction des noms, la tenue d’un journal personnel, la rédaction d’une histoire personnelle et familiale et l’acceptation d’appels de l'Église au service dans le temple et dans l'histoire familiale. Pour identifier les premières générations d’ancêtres, il n’est habituellement pas nécessaire de faire beaucoup de recherches à la bibliothèque ou d’avoir recours à des outils de recherche avancés. Au début, les recherches généalogiques consistent généralement à consulter les documents familiaux connus (voir Journaux intimes), à se renseigner, soit oralement, soit par écrit, auprès des membres de la famille, à chercher dans les archives publiques d’accès facile telles que les extraits d’acte de naissance. Pour identifier les ancêtres au-delà des quelques premières générations, il faut habituellement avoir recours aux bibliothèques, aux outils informatiques disponibles dans des systèmes tels que FamilySearch et l’aide de spécialistes. Les organisations familiales permettent aux membres de mettre en commun les renseignements et les ressources pour promouvoir l’histoire de la famille. Le Programme d’extraction des Noms permet de convertir les données qui se trouvent sur les copies microfilmées d’archives sur papier – registres paroissiaux, recensements, etc. – en un format informatique pour les intégrer dans des fichiers de FamilySearch ou de fournir les noms nécessaires aux temples.
Troisièmement, les membres doivent continuer à œuvrer. Le travail du département d'histoire familiale ne sera terminé que quand tous les noms seront enregistrés et toutes les ordonnances accomplies.


Bibliographie
Come unto Christ Through Temple Ordinances and Covenants, 2e éd. Salt Lake City, 1988.
Greenwood, Val D. The Researcher's Guide to American Genealogy, 2e éd. Baltimore, 1990.
Instructions for Priesthood Leaders on Temple and Family History Work. Salt Lake City, 1990.
Oaks, Dallin H. "Family History: "In Wisdom and Order'." Ensign 19, juin 1989, p. 6-8.
Smith, Joseph Fielding. Church News, 24 octobre 1970, p. 3.
Woodruff, Wilford. Deseret Weekly, 21 avril 1894, p. 543.
DAVID H. PRATT